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Mustaf

Défi
Mustaf


Le soir venu, quand une lente solitude me gagne, enveloppe les pensées et tire imperceptiblement mon esprit loin des rivages de la réalité, Je laisse l'instant dériver dans le cours agité de mes souvenirs. Le remous du crépuscule intensifie le rugissement des vagues, tout le passé se porte en ébullition sous-jacent dans les profondeurs de mon intimité, prenant la forme d’un océan tourmenté, meuglant, sauvage comme une horde de furies rendues folles par l’odeur du sang stellaire éclaté dans l’horizon.
Mes frémissements émotifs se répandent dans la nature ouverte à mon hallucination. Les mots s'envolent portés par les ailes du désir de nous unir dans la perception du temps qui nous enlaçait.
Toutes les formules, les sens, les harmonies sont en fouillis dans l’atmosphère, la nuit s’étire dans l’ivresse, il n’y a plus que des vibrations à ressentir et des orages en crise, turbulences à traverser, des vertiges à surmonter pour embrasser l’amour des mots et des êtres qui les font naitre dans les rivières de passions et de voluptés. Chaque lecture, chaque poème, chaque strophe, chaque vers, chaque son, me fait sombrer davantage dans ces torrents qui m'ont submergé.
Solitaire errance dans l'oubli de ce que nous étions, mes yeux s'irritent dans la sécheresse que me renvoie ton absence, un désert de sens envahit les rives de mes courants sentimentaux. Je baise pour t’oublier, je baise pour vivre, je baise pour mourir, te baiser était pourtant une tension, une pulsion de vie entre l’oubli et la mort.
Quelque part, cette relation pourrait n’être finalement qu’un amas inextricable de confusion, une masse nébuleuse de rancœurs, des tonnes de faiblesses à masquer, de vieilles blessures à panser, une grosse dose de narcissisme à combler, des songeries issues de l’imaginaire à filer dans la ouate de nos escapades diurnes, des merveilleux moments à sublimer.
Ce qui restait à déterminer était, se protéger ou s’exposer, risquer le cœur et l’âme au-devant des caprices tempétueux de ce destin pris de vertige soudain, d’altitude. Il y a une prise de hauteur à aimer, même la plus insignifiante salope des gares de Lille. On ne tombe amoureux qu’après s’être élevé dans la contemplation qui l’a permis. Il nous a fallu plusieurs semaines pour concevoir, développer, nourrir et libérer les aveux de nos sentiments communs.
C’est le boulot d’un artisan, d’un mois de discussions, d’approches, d’inclinations, de paroles à vous fendre l’âme et vous empoigner le cœur, là c’est sur mes lèvres que sa pulsation prend sa mesure. C’est toute cette alchimie que je tiens dans mes bras, à cet instant précis, dans cette étreinte de rêve, je m’enroule autour de cette taille de femme, trop creuse pour en retirer de la matière à la surface de la réalité, ce rêve aussi sera englouti par le réel, pourtant elle a quelque-chose pour me faire danser encore quelques semaines de plus, là dans le regard, ce petit truc en mouvement incertain entre la luxure et le désespoir.
Pour moi, ça a été toujours été compliqué de vivre, de côtoyer les semblables, des parents, des amis, de la famille, des collègues. Toute l’armée du quotidien attend pour se nourrir de vous, vous prendre votre temps, vos préoccupations, vos meilleures années, votre talent et les conventions sont ainsi faites pour régénérer ces attentes tant qu’il y aura des comme moi pour les combler. La vie n’est rien moins qu’une chaine de corvéables reliés par la morale, le sentiment d’utilité et de dévotion.
Alors être amoureux, ou m’y croire, incarner le rôle de celui qui s’enthousiaste de tous les bienfaits de l’univers contenus dans une seule personne, cette femme soudainement devenue astrale, une effigie vénusienne baignée de lumière, incandescente, une torche enflammant les cœurs, sa peau devenue un rivage embaumé de milles senteurs. Emanait de ces lèvres vaginales une pure exhalaison du mysticisme amoureux.
Mon regard se perd, se dilue dans le vague lointain de ce ciel parsemé encore d’une explosion colorée, pastel d’éclats nuancés dans les taches sombres qui ne tarderont guère à le recouvrir. Dans ce tableau de la nature en basculement, entre fuite et surgissement, où le gris des nuits s’accapare l’espace du monde, Mes yeux découpent dans ce tissu céleste une robe de satin qui épousera les courbes qui m’ont rendu ivres d erotisme.
Des caresses insensibles, des baisers sans ardeurs, un amour d’automate dont la chair suffocante a flétri dans le mois qui a succédé sa floraison.
Ce n’est qu’une histoire de prestation sociale, on soigne nos malheurs en s’aimant, sa détresse supporte la mienne, ça fait plus de 80 années de plaintes, de gémissements et de souffrances cumulés sur le dos.
On végète alors dans des Illusions à tisser sur des bouts de fragments de réalité ornés par quelques beaux mots et de morales élégances, on entretient l’hygiène de notre amour, ce qu’il en reste, là disséminés éparses, en jouissant quelques heures par semaines dans des chambres clandestines, orphelines de passions, il nous faut garder l’anonymat, la discrétion, le premier plaisir des adultérins. Elle est sur la brèche, consciente de la perte en jeu dans chacune de nos secousses orgasmiques, je me lasse de toute cette médiocrité, l’à peu près des maitresses incertaines. L’amour aussi cultive ses lâchetés quotidiennes, bien loin de l’ondoiement originel, la mesquinerie, la fuite , les faux semblants feront toujours de l’éros un enfant rachitique et mal nourri.
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Je tombe toujours dans les mêmes schémas, ces tracés sinueux de mes dérives quotidiennes me conduisent, dilué, dans l’axe crasseux de mes obsessions libidineuses. La sempiternelle célébration de la vie dans la quête de l’étourdissement. Depuis que je suis en âge de déterminer le sens de mes érections, je m’y abandonne dans ces festivités closes sur la bousculade des confessions accouplées.
Un coup de dé n’abolira jamais le hasard, disait l’autre, et le baiser de Tyché lance le départ de ma course macabre à la chair et à la débauche. Il y a si peu de complexités à trouver le point de jonction entre une volonté et la creuse hospitalité pouvant l’accueillir que le hasard peut bien s’inviter au banquet. C’est à la portée du premier désœuvré venu et du désœuvrement, j’en ai garni mes heures de solitude. Je m’évade de la fadeur du monde, de la vacuité de mes temps libres. J’ai une nature de corvéable de toute manière, un maillon sur la chaine de la dépravation.
Toute cette fuite en avant, dans les orifices des nymphes modernes, me ramène inlassablement au même endroit, là reclus dans l’étroitesse du même sentiment, ce désamour de soi.
Au lever du jour qui a suivi une nuit d’abandon, pour peu que je fusse artificiellement engagé avec une romantique qui a gobé, en plus de mon anatomie, quelques belles paroles bien senties, les conséquences ne sont pas en retard à l’heure de se faire entendre. Ritournelle en dissonance de ma médiocrité, et explose alors les éclats, les tempêtes, les disputes et les séparations. Qui pourrait s’infliger un tel sacerdoce ? la piété a délaissé les cœurs des femmes, des hommes elle ne s’y est jamais attardée. Une belle âme viendra peut-être un jour témoigner de son existence mais en attendant je reste seul perdu esclave de mes obsessions. Un errant libidineux, un ermite urbain. L’histoire en détaillera les contours de ce nouveau mythe, le portrait archétypal des sybarites désargentés.
Je replonge dans la même situation que précédemment, et de toutes celles qui sont déja advenues. Pourtant il n’y a de quadrature dans ce cercle concen triques de vices et sans vertus.
Il y a ma bite, un vagin et plein de problèmes autour.
Tout le reste, ce n’est que prétexte, des chemins de circonstances, on enrobe le tout dans des silences, des non-dits et des petits mensonges du quotidien à la lisière de la Bonne conscience, ça aide à tenir, se regarder, se lever le matin et poursuivre son chaos, lui donner toute sa vitalité, le faire grandir suffisamment pour qu’il nous engloutisse.
Toute cette montagne de douleur, de mal être, des maladresses de cœurs, on est mal logés en amour nous autres, étrangers à la pure volupté, puceaux de l’extase cardiaque.
Ces frissons qui vous parcourent quand on pue l’amour depuis l’ensemble de nos pores, on se respire les tripes par des filtres infâmes, on se murmure des je t’aime en se mordillant les seins érectiles entre nos dents.
J’ai toute la dureté de mon désir en suspension dans l’univers, gémis dans l’harmonie du premier concerto pour piano de Tchaïkovski, si deux corps vibrent de plaisir dans les résonnances des harpes antiques, je veux bien y être encore une fois à la Dernière sodomie avant l'extinction du genre, libérer ma dernière giclée de foutre dans le bas ventre d’Eve avant que Dieu ne la chasse du paradis perdu.
Je suis au-delà de la morale quand je veux baiser sans la retenue des gens civilisés, je profanerai Aphrodite pour qu’il n'y ait que des coïts purgés de sentiments amoureux.
Je me dis soudainement que c’était beau le romantisme avant de goûter à un cul de femme déchaînée par l’enfer de la pénétration anale.
J’aime m’endormir sur cette image d’apaisement, c’est la seule interaction entre hommes femmes qui tolèrent les inélégances.
La vision d'un postérieur avant de le grand sommeil soulage les tensions de ma présence au monde.

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Las, fatigué, éreinté. La semaine se termine et je ne veux écouler les heures du jour restant à boire et désaltérer cette terre aride qu’est devenue le quotidien nauséabond.
Un bar, un tabouret, un serveur, une lumière bleuité et des fumées épaisses dissiperont le vague à l’âme. Boire et s’étourdir éveillera ce corps endolori par le néant.
Il y a de la vie dans ce troquet, des éclats de rire, du lâcher prise. Le troupeau de frustrés s’est arrêté pour paître. Je frise comme un mouton anarchiste qui a perdu l’envie de bêler.
Un semblant de bien être autour de verres sans cesse remplis pour ne pas interrompre la farandole de houblon qui descend dans les gosiers.
Je m’y prête. J’y ai droit et devoir à ce bien être évanescent d’une fin de semaine qui suspend l’ennui. Les heures tournent sans clarté, des fumées se suspendent sous les abat-jours, l’air est chargé de mal être à étouffer, d’envie à assouvir. Le climat s’intensifie. Les filles se déshabillent, mollement, titubant d’ivresse. La médiocrité, même dans la débauche, est une nouvelle forme de sida social. Dans ce lieu rempli de partouzeurs indécis, des jouisseurs de l’abstrait, éphémères étalons de plus éphémères orgies dévitalisées, Je m’attarde du regard, encore un peu lucide, sur une table de deux femmes maquillées comme des voitures volées.
L’une est racée, tracée, chevelure de jais tombant sur les épaules, regards de braises à mille éclats, deux lèvres cabossées par le désir, comme un carton d’invitation au bal des queutards, robe rouge bas de nylon noires, talons dont la finesse pourraient les loger entre deux phalanges.
Un mètre 70 de charme, de sensualité sur échasse. Sa copine est un fruit du paradis perdu, toute bleue vêtue, l’anus en point de mire et des seins, beaux, charnus lourds comme des trophées, à lubrifier de coups de langues infinis. Elles discutent vers ma direction, rient aux éclats, cela dérègle l’harmonie du cosmos. La nuit a besoin de respirer ce souffle de putains déchainant
Je me raidis tout à coup. Les vapeurs d’alcool ne peuvent anesthésier la bête en éveil. Je rugis d’excitation à l’intérieur. Je les imagine. Je perçois, je ressens, je bois, j’hume, je renifle. Je suis un chien en chaleur, un instinct primal en spasme devant l’abime des chairs et des chattes.
Deux corps, deux fusions d’Ames, d’atomes surchauffés par l’attraction de leur corps tendus pour l’extase, j’ai mal de ne pas encore les baiser toute entière, bouche en feu autour des seins de glaces, sculptés par le plus génial des détraqués du genre humain.
La fille aux échasses se fige. Belle, sexy, provocante, un rouge vif comme le sang qui monte en pression dans mon pantalon bientôt à l’étroit, sous taillée pour
Elle a fini son verre, une de tequila dans une coupe évasée pour pétasse, sa copine bleue vient juste de partir, la laissant seule aux regards de ce peuple d’eunuque cérébraux aux chibres insatisfaits., éjaculateurs sans contact.
Mais elle, elle reste là, aguicheuse, nous mesurant du regard. Le mien vient d’en bas, du bas ventre qui se raffermit à chaque coup d’œil. Elle est là pour l’hygiène, se purger les entrailles. Ce n’est plus freudien, juste du cul. Moi j’ai perdu tout sens commun, je ne raisonne plus. Mon cœur n’a plus de pulsation, mon système nerveux fait une descente d’organe. Mon corps est un bâton, de raideur absolue, une bite d’orgueil qui va retarder au maximum la libération de la voie lactée dans ce cosmos de sexe et de sens, qu’est cette nymphe rougie par l’audace.
Elle se rapproche, me capture, ses yeux me violent encore habillé, je faiblis, je faillis, je succombe déjà sans parler, sans protester je me lève, maladroitement pour cacher ma bosse, que je ressens comme une infirmité sur le moment. Elle me fixe, confiante en ses effets, m’ordonne de la suivre d’un clin d’œil léger comme un soupir.
Je la suis, on quitte le bar, et on plonge dans la pénombre, je reste derrière elle, je profite de la vue, celle qui se dessine en ombre ondulante dans cette nuit à la promesse d’aube éternelle. Elle a des courbes de chatte en représentation, elle en rajoute des rondeurs de cercles lascifs et envoutants. L’air tourbillonne dans mes narines, son parfum s’évade par tous ses pores, c’est l’appel d’un amour sans contrainte, d’une obligation de jouissance de l’instant sans entraves. C’est le parfum de deux âmes qui se rencontrent pour se dévorer et se rendre à leur réalité sans attaches ni devoirs.
Cette vue de son dos me trouble mais je ne résiste à la prendre par la main, pour reprendre le rythme, diriger son mouvement vers le premier bâtiment que je vois, une vielle église abandonnée. Elle sourit en baissant les yeux. Elle me lâche la main et court vers l’église. Je reste coi, puis la poursuit comme un dératé. Elle pénètre le sacré, je lui emboite le pas. On perçoit la ferveur surannée des lieux. L’édifice mérite une résurrection, une homélie de circonstance. La vitalité qui enfle en moi promet une épiphanie d’extase et de volupté.
Et en pénétrant par la vieille porte de la bâtisse, sa copine bleue m’accueille. Une coupe de vin à la main et mes lèvres sur les siennes. Elles m’attrapent les cheveux, les tirent en arrière, me fait boire en m’embrassant. Ce nectar dégouline de nos bouches. Elle me lèche comme une féline. Propre, elle me prépare pour son amie rouge. Elle se glisse sans bruit entre deux rangées de bancs et observe, la main déjà en action sur ses vulves humidifiées par l’excitation.
Rouge est incandescente, enflammée par le désir. Je lui récite le premier verset du cantique des cantiques. Ses baisers sont doux et chauds comme une soirée d’été, je promène mes mains sous sa robe, ses cuisses sont tièdes, tendres, son cul a la fermeté des injonctions royales, une reine dans la maison de dieu, bientôt nue sous mon empressement, une peau de satin perlant d’excitation, je m‘agenouille pour boire le vin nouveau entre ses cuisses pleines de générosité.
Je la soulève, son aveu colle à mon abdomen, elle est fraiche, mure, je veux la prendre telle qu’elle s’offre, entière et sans retenue, sur mon sexe convaincu de sa victoire.
Elle s’empale et Je la dirige, dans les cadences inquiètes de mon tango céleste, je l’enfourne pour une levée des sens, belle, ferme, elle s’abandonne sous mes assauts répétés, elle m’agrippe le dos, ses ongles me déchirent la chair, mon sang et ses râles fouettent mon excitation bestiale. Je mords dans cette éternité passagère. Je la baise à pleine bouche, ma langue lui décrit des je t’aime
Pour ce genre de créatures, à l’heure des nuits moites dans les alcôves suffocantes, le moindre je t’aime à des arrières gouts de spermes chauds, dégoulinant d’aveux mutuels sur toutes ses lèvres.
Sa copine gémit à l‘étouffée entre les bancs, je devine son regard lubrique sur nos corps emmêlés. Ses doigts remuant un clitoris me rendent ivres de désir pour son amie. Je la laboure davantage avec une profonde ardeur.
Elle se décolle, incline la tête, ses cheveux basculent en arrière, son souffle s’accélère, elle me bouscule, me pousse, me frappe, une claque, deux claques. Elle me toise, se colle contre mon torse dans lequel bondit mon cœur pompant tous les sangs des rivières empourprées.
Elle m’attrape les couilles à pleines mains en me capturant le regard, elle serre et sourit, je sens ses ongles gratter la souche de ma cucurbite, elle empoigne fermement. Je souffre et j’en jouis. Quel merci dans tes mains, belle salope ?? Je pense à Bleue, tapie dans l’ombre qui se repait lubriquement de nos extases brulantes. Je l’imagine se limer le clitoris avec toute la dévotion qu’elle put.
Je sens les doigts de rouge, vengeurs entre mon trou et mes boules. Je me jette profond dans ton regard de feu, incendie moi la verge et arrose là de ton fluide vaginal. Frotte-toi le bas ventre sur le mien. Fais jaillir l’étincelle de nos ébats. Elle me claque à nouveau le visage à pleine paume puis elle me caresse la joue de cette main sentant la bite. Je lèche un à un ses doigts qui m’ont meurtri. Elle recogne, sans vergogne poings en avant, elle veut de la domination brute, pure, ça suffit. Je lui prends le bras, armé pour une troisième attaque, je la retourne, la pose brutalement, buste en appui sur le banc des fidèles. Repends-toi ma pécheresse. Prosterne-toi pour l’absolution.
Je la doigte délicatement tout en cherchant Bleue du regard. Je la lèche avec soin pour préparer mon œuvre. Elle s’impatiente, mais toutes les réunions se préparent, les trajectoires libidineuses se télescopent. J’ai dans la main, grossissant le dernier phallus enfournant l’ultime anus qui ouvre son orifice au plaisir dans une Gomorrhe en pleurs sous la destruction divine. Le toit de l’Eglise craque, le tonnerre dehors gronde. Les éléments de la nature se déchainent. Ça pleut ça tombe, ça gémit, dehors le châtiment assassine, la passion homicide ravage les alentours et fauche les âmes, moi je fourre une dernière fois mon glaive dans le fourreau étroit de cette dernière chienne.
Elle se courbe en avant, la colonne vertébrale ressort, bien alignée, elle maitrise l’anatomie, elle me fait varier les angles de pénétration, elle veut de l’intensité, elle contracte et réduit sa faille de San Andreas, elle emprisonne mon engin dans son trou et l’astique d’avant en arrière. Je me lasse aller, elle veut me l’aspirer et le recrache pour mieux l’aspirer à nouveau et le rejeter. Elle me tient à portée de giclée, deux veines qui gonflent et tambourinent les tempes, mon sang a perdu le sens de la gravitation, il dévale à grosse pression vers l’Obélix de mon univers, pénis de sang et de chair, verge de feu pour les extases des enragés du corps humain. Je suis Michel ange au pinceau céleste qui recouvre de blanc nacré le plafond des cathédrales orgiaques.
La sentence peut venir, Atropos peut couper le fil de ma dernière érection. Mon appétit demeure, Je la lécherai avec ce qu’il me reste d’attributs, fougueusement, tendrement, bestialement, je m’abandonnerai dans la vallée de son intimité, son fluide corporel me parfume la bouche de tout le miel de la création, des nectars alcoolisés des bacchanales antiques, mes sens s’enivrent, mon corps s’enfièvre, ma vie peut cesser après ma damnation, charnelle, sexuelle. Qu’on m’accorde un répit pour la baiser encore une fois, pour sentir sa chatte brulante sur mes testicules. Je me damnerai pour ce cul, tous les culs de la création.
J’harangue les dernières secousses de cette terre de désolation. Ma jouissance s’unit aux transes des orgasmes telluriques. Je profane la dernière tombe vaginale du cimetière des putains éternelles.
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L’homme est un spécimen qui aime les bilans
Le bipède autodestructeur s’emploie à décrypter les mouvements de sa vie à l’heure où l’horloge du temps sonne les caps que son âge traverse.
A chaque décennie, son retour en arrière, l’amertume des heures filant son acrylique texture sur l’échine des jours, à chaque décennie, sa projection vers l’avenir qui se tend avec de moins en moins de promesses au fur et à mesure des années, un champ inévitablement rétréci déroulé vers le dernier périmètre exigu contenant la sépulture qui nous est réservé dès la naissance., tous les ingrédients concourant à la mise en abîme des espoirs violés distillent leur saveur dans la marmite des pensées inquiètes..A chaque décennie l’usage du rétroviseur comme un miroir sur soi dans lequel l’ombre du regret nous dévore davantage le visage, un moi dans la laideur de sa totale et entière nudité.
L’homme dresse des bilans en espérant y trouver le sens qui manque cruellement à nos existences, se remémorant la perte du suc de jeunesse, le parfum d’une époque fanée ou la symphonie mélodieuse de la joie d’une vie passée et pas assez vécue. Le temps sublime l’édifice de la mémoire. La réalité a achevé de résigner l’envie de voir le papillon de notre bonheur s’échouer sur la fleur qui l’avait désiré.
L’illusion que nous avons réussi à conserver, flamme miraculeusement préservée du souffle implacable du réel… Trente cinq années bientôt sonnés, trente cinq années de peu de substance, de matière nourrissant la fange. Trente-cinq, l’entre-deux de deux décennies, l’écartèlement entre le regard perdu sur la trentaine et l’élan irréfréné me poussant vers la quarantaine rugissante.
Le passé survit dans le souvenir, l’avenir s’agite dans la pensée, le présent s’ignore, espace temporel où résonne l’instrument du chagrin, en écho plaintif des pulsations creuses.
Le bilan pour assigner une fonction déterminante à la prise de conscience du temps qui passe.
Le bilan pour modifier la trajectoire, spirale infernale dans un monde où vivre est la perpétuation d’un génocide.
Le bilan est pour moi un exercice malsain, lugubre et ne me propose que la perspective d’un deuil éternel. Mort des rêves, trépas des songes, agonie d’ambitions, juste le battement cardiaque me maintenant en vie pour assouvir mes sordides plaisirs surabondants de chairs, de corps et de charognes d’âmes en décomposition.
Un bilan qui célèbre le règne du frivole et pleure la perte de l’aimée.
De ce cœur regretté, j’écris l’absence dans ce bilan pathétique. L’absence qui fit couler le sang du jasmin dans mes veines, un battement d’ailes de papillon m’a éloigné de toi, j’ai perdu ta trace dans la poussière du soir. Laisse ton âme suivre la mienne dans les cadences anxieuses de mon tango céleste. Dénude-toi, offre-moi la beauté de ta nudité comme seule vision de l’infini, répand le parfum de ton sexe dans l’air offert à mon odorat. Unissons-nous pour nous soustraire au bilan macabre, unissons nous dans l’étreinte confondante de nos êtres entremêlés. Unissons-nous avant que le créateur ne défasse les coutures qui nous ont assemblés. Unissons-nous avant que le dégoût de nos corps ne nous exclût l’un l’autre du champ des pulsions assouvis. Ne nous protégeons pas du plaisir que l’on se donne, jouissons de cette vie avant que Dieu ne me brûle l’âme au jour du jugement dernier, avant que les cendres de l’enfer ne se répandent sur nos têtes. Faisons l’amour pour procréer. Procréons, donnons-nous la vie que le destin nous a refusée, renaissons l’un dans l’autre.
Il me faut ta chair entre-ouverte, soumisse à mon intrusion, lieu où jaillit la source généreuse ou je m’abreuve, rivière d’abondance, lieu de rencontre des lèvres qui ne se parlent que dans l’aveu de leurs désirs communiés. Ma damnation est terrestre, charnelle.
La peau nue de ma verge enflée pointe le chemin humide de tes entrailles bouillonnantes, cet étroit passage, détroit » vagineux », lieu plus vaste que mes projets de vie, tanière ou j’engouffre les inquiètes ardeurs de mes plaisirs éphémères… Je me damne encore et encore, je renouvelle en toi les vœux de ma damnation choisie, damnation de sens dans l’oubli de l’être, je ne suis qu’une mèche de chair gorgée de sang et de feu prête à allumer un brasier dans la tanière de tes organes en ébullition sismique.
Ton corps se raidit, dessine des courbes lascives dans un absolu de félinité, mes reins contiennent toute la fougue d’un attelage d’étalons en rut. Tes mains s’agrippent à la voûte céleste qui nous préservent du regard de l’éternel. Des étoiles fanées en tombent et s’éteignent sur le plancher chaud où se dispersent nos souffles éreintés.
Dans ce nouvel espace ouvert à nos ébats, nous ne sommes que les sujets conjugués de l’autocratie des pulsions obscurs. La promenade de mes doigts dans les allées de mon intimité, et sur leurs bouts arrondis, j’ai toutes les odeurs de l’anatomie humaine. Je vois, je sens, je touche, j’ouïs, je goûte. Les sens exaltés par la lubricité d’une créature dionysiaque.
Je n’ai pas encore épuisé le contenu des effets que tu me produis. Je redescends au niveau de ce bout de peau sorti de sa fente pour moi, je presse ta vulve entre deux doigts pour en extraire le nectar qui recouvrira ma langue, la sève de l’impatience perle à la pointe de ta toison intime, je serre le lys de ton sexe et perçois le frémissement de chaque membre de ton corps, nous revenons à la primitivité du langage, où se répondent nos révélations orgasmiques. Dans le chuchotement d’un gémissement partagé, nous psalmodions un verset du coran des alcôves.
Tu me bascules sur le dos, et m’invité à l’abandon d’une ultime chevauche, la cavalcade avant l’extinction des sens. Je saisis tes seins à pleines mains, fruit d’un moulage voluptueux aux mamelons roses durcis par l’excitation du plaisir qui t’envahit. Nos bouches s’approchent, nos langues s’y glissent, et en t’embrassant j’ai la sensation de baiser toutes les nymphomanes de Sodome et Gomorrhe, toutes les dépravées des rues de l’humanité, toutes les charognes des poèmes interdits.
Tu es prête à te repaître de l’ondée crémeuse que je répands dans le creux de tes reins. Bois mes écumes d’argents, avale le lait de nos extases impudiques, savoure leur descente en toi..Car dans la fougue de mon ultime piété, je sens une ride d’amertume creuser le front de Dieu.
Car à l’heure du bilan de cette nuit d’homme moite et de femme humide.
Car, à l’instant où nos corps se décolleront dans la séparation de nos vies, tu me piétineras le cœur de tes souliers de verres. … Mais laisse ma main, libre, écrire l’éclat du cristal qui se brise…
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Certains dimanches, je prends le bus. Pas par gout d’une promiscuité qui peut m’amuser par instant, mais pour emprunter le fil me ramenant au passé d’une vie conjugale. Mon ex-femme vit à quelques hectomètres de ma tanière, et régulièrement, elle m’appelle au secours dans l’espoir que je puisse apaiser ses angoisses.
Cette fonction d’ « apaiseur d’angoisse d’ex-femme en souffrance » tend à se raréfier et j’en suis ravi pour elle.
Un saut de transport public suffit pour voyager dans le temps.
Mais ce type de bus, ça ne transporte pas de passagers mais du mal être, de l’empressement masquant la lassitude.
Et dans chacun de mes tracés publics, je fais la rencontre de cet homme âgé, atemporel. Il prend le temps de saluer tout le monde. Spectacle détonnant.
Le vieil homme a une voix grave qui déraille à la fin de chaque phrase, une voix qui vient de l’intérieur, des organes, une voie artérielle, depuis la voute plantaire, une voix de noyau terrestre en fusion qui explose dans le conduit qui le libère. Il est à chaque fois d’humeur égale, courtois, poli. Près d’un siècle de civilisation barbare ne sont pas venus à bout de cette masse de bienveillance,
Il porte son par-dessus de saison, gris clair aux rayures sombres, un anthracite de circonstance à notre époque de noir abyssal. Sur le nez, des lunettes aux verres circulaires suspendus par des branches de sèves organiques, lui donnant des allures de sage de la nature, omniscient. A la vision de ce tableau en mouvement, jaillit un sentiment soudain de réminiscence et une sensation d’excavation, de terre sablonneuse qui m’ensevelit.
La canne est usée, c’est certain, le pas est tremblant, assurément, la démarche a des hésitations de condamné mais le visage est taillé par le stoïcisme, contenu comme une falaise en bord de mer. Les vagues du quotidien s’y brisent dans le fracas sourd de son inflexibilité.
Je le regarde, je lui souris, et lui rends un bonjour teinté de respect et de mystère. Quelle existence fut la sienne pour sourire et saluer un connard comme moi ? Il incarne des valeurs décharnées que notre modernité a violées, un vestige de ce que fus l’homme en représentation sociale, l’image d’une respectabilité qu’on donne à suivre aux enfants. La situation m’intrigue, me mets mal à l’aise.
Pour me rassurer, je me convaincs qu’il est atteint d’Alzheimer ou plutôt d’une forme édulcorée, une maladie light, bio, sans gluten, qui affecte sans symptômes, sans douleurs. Une sournoiserie de plus au royaume de l’hypocrisie. Ou encore que je sois le seul à le voir, qu’il est le produit de mes dérèglements sensoriels, qu’il est le produit de mes failles psychiques. Que seul moi je peux apercevoir ce spectre par la grâce, ou la damnation de mes délires atrophiés.
Dans ce corridor motorisé, étroit et puant, théâtre mouvant de la collision des époques, mon trajet est d’un éphémère quelconque, des poignées de secondes jetées en pâtures à Kronos le vorace, ce trajet fait remonter à la surface du réel la vacuité de nos parcours, du mien et de ceux que j’entraine dans ce vertige, de cette boucle temporelle que l’univers me renvoie, inlassablement par le mécanisme du destin.
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Il y a des déferlements de pensées sourdes et violentes sur les plages noires de mon cerveau caoutchouteux. Des milliers de murmures s’éclatent en fragment dans la danse macabre des tristesses défuntes. Un souffle et deux bruissements se disputent les conduits de Mon entendement, des centaines de houris s’empilent dans l’horizon pour m’empêcher de rêver, le temps se contorsionne et ondule le long de la flamme embrasant ma quiétude. Le vent soulève les vagues de la mer en pleur et sculpte un arbre d’eau aux écumes fleuris, dressé dans le ciel comme une sépulture immanente tendue vers l’infini qui nous inonde. Mes yeux flottent dans ces branches humides et s’élèvent dans la fluidité des sens que tu as exaltés.
Beauté de la nature en dérèglement, toison dorée par Hélios, l’azur se pâme sous l’ardeur de tes charmes, des caresses s’échappent du bout de tes doigts arrondis et voluptueux, un arc sans flèche cherche le cœur qu’il a pris pour cible, une pluie céleste tombant de ton regard noie les tâches profondes des blessures antiques. Des lianes, sorties de tes mains, escaladent le mur de baisers que ma bouche délivre en t’embrassant. Mon âme se réduit sur l’instant qu’à deux lèvres épaisses, charnues et généreuses qui te baisent. Je te baise par tous les commandements du monde en effusion, je te baise en répondant aux appels éruptifs du cosmos , en succombant aux ordonnances des éléments de la nature, je t’aime davantage dans l’érotisme qui nous immortalise.
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Mustaf

Je marche, lancinant vertige sur le jour en retraite, bleu de ciel en sursis vers la promesse d une aube nouvelle, je laisse mes sens s enflammer dans la graisse des ricaneurs du soir, je m impregne, sans volonté première, de la laideur des joies artificielles, je m'y sens chez moi dans le refoulé des alcools libérés..
L humanité a survécu aux siècles des invasions barbares, des massacres civilisationnels et des equarissages confessionnels
On a tout concèdé aux désirs des bêtes civilisées, on a reculé puis cèdé devant nos vils instincts, sournois, embaumés, charmeurs, obstinés.
Le Cœur en vain, sans sursaut,ne sort vainqueur, l affrontement est déloyal, il est scellé dans notre nature, enclos dans les tripes, là dans le bas ventre que se décide l action des hommes, tout le reste c est de l enfantillage de raison, l acharnement est dévoyé, perdu, surfait, on y a laissé la morale, Kant et Camus, une idée de l humain en fuite, travestis dans les Bois lascifs de la débauche..
L espoir n'est devenu qu un échos, usage sans parole dans la prosopopée qui la ressuscite.
Les queutards compulsifs ont perdu la Bite dans des puisards trop sombres pour être appelés chattes... L humanité s est compromis dans la sécheresse de ses coits décharnés, il nous reste toi et moi qu à nous baiser par toute la fougue de notre persistance, te claquer les fesses pendant que je te prenne energiquement à quatre pattes, attelé à tes hanches comme à une bouée, et entendre ton cul rebondir sur mon bas ventre comme un sursaut de vie, un spasme orgasmique qui invite nos chairs à se renouveler de plaisir dans des grands coups de vitalité... Jouissons ma reine, Jouissons....
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Mustaf


L’aube approche à grands pas. Le sommeil me rappelle dans un dernier sursaut tendrement désespéré pour une dernière étreinte, un ultime câlin arraché aux bras d’une journée qui commence toujours trop tôt. Bien que celle qui s’avance embusquée sous les brumes aurorales, a les délicieux contours d’une paresse que je ne me lasse pas d’honorer. C’est journée de RTT et je compte profiter de chaque instant pour ne rien faire le plus longtemps possible. Le café est le premier contact que j’établis avec ce jour délicieusement attendu. Un cérémonial aphone et brutal qui vient clore définitivement la nuit qui l’a précédé.

Le café apporte la clarté à un esprit encore prisonnier de la léthargie des songes. Il propulse dans ma psyché un élan nostalgique qui concourt à l’exhumation de vieux souvenirs. Les épisodes du passé défilent dans mon esprit, le café est réminiscence,
Il met à l’épreuve la flexibilité du temps et de l’espace. Il convoque un instant anonyme perdu dans le cortège des souvenirs. Sorti des gouffres de l’oubli, il me ramène à l’été 1994 et à ma région natale du Nord de la France.
Au pays du charbon, roi sombre à l’incandescence prisée, qui a plus de valeurs quelles mains qui l’extraient des entrailles de la terre, les villes se ressemblent, jumelles de monotonie, elles fleurissent, malgré l’âpreté de l’activité minière, sous les cieux grisonnants.
C’est dans un petit hameau de Douai que je suis né. Le quartier de la « solitude ». J’y ai passé toute mon enfance et la majeure partie de mon adolescence.
«La solitude » nom prémonitoire, contrairement à celle de Pablo Neruda elle fut loin d’être lumineuse.
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A la solitude, nous étions une multitude d’âmes meurtries, issues d’une double généalogie non assumées, plongées dans l’oppressant sentiment éponyme de la cité qui nous engloutissait. Nous étions les enfants d’une terre, les produits d’une époque ou plus simplement les
Conséquences directes de l’historicité familiale, celle-là même qui subissait les soubresauts de l’Histoire d’un siècle marqué par les travers de l’humanité (fascisme, colonisation).
Les nombreux croisements de la destinée humaine engendrent le croisement des genres humains.
Rejets de deux cultures qui refusaient notre particularisme par fautes d’être totalement l’un ou totalement l’autre, nous étions en équilibre instable, un pied dans le bassin minier, l’autre par-delà le bassin Méditerranéen et entre les deux errait un esprit perdu dans ce processus d’acculturation, qui s’accommoda peu à peu de cette misère incréée
Ces refus d’appartenance nous incitaient à ne rien devenir et n’être personne était une quête qui nous semblait accessible, vouloir autre chose signifiait fleurir une tombe de plus au cimetière de nos ambitions.
On disposait d’outils pour se bricoler une destruction...drogue, violence, délinquance, déscolarisation, abandon d’un avenir sur les sentiers de la perdition. Le monde que l’on nous offrait contenait notre mort sous-jacente. La dérive sociétale devint progressivement notre seul rapport au réel, normative de notre quotidien, elle dérégulait l‘attitude et ensevelissait notre parcelle d’humanisme sous une montagne de haine que générait ce sentiment de frustration permanente.
Nous nous situions dans la filiation délictueuse de ceux qui nous avaient précédés.
Frères, cousins, amis, voisins ou illustres inconnus de notre environnement avaient balisé un chemin tortueux et torturant que nous entrevoyons comme la seule issue possible.
Car à l’école des corons, l’assiduité au délit nous délivra un certificat de nuisance.
Dans ce maelstrom d’inélégance La vie peinait à trouver son expression la plus raffinée..
Elle n’avait d’expression que dans l’étroit carcan du «déjà condamné».
Les corons regorgeaient d’endroits fréquentés jusqu’à l’errance où l’ennui nous disputait à l’inutilité.
Les ruelles, bordées des maisons aux briques rouges dont les cheminées crachaient leurs fumées épaisses, recueillaient nos humeurs bouillonnantes dans une exubérance de maux qui pourvoyait aux innombrables égarés le choix de leur registre. Chronique ordinaire d’une misère devenue ordinaire, la détresse se pare de nos noms, perles innombrables portées en collier autour de son cou.
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Le sport nous apportait une bouffée d’oxygène et le parc de la Templerie devenait un complexe sportif en plein air. On y pratiquait tout ce qu’on pouvait y pratiquer, football, tennis de table, basket, tennis sur parking. On organisait chaque été un tournoi de boxe dans l’ancien bassin à poissons que le temps et la négligence avaient fini par dessécher.
Contre un forfait participatif de 20 francs, on intègre le grand tableau des huitièmes de finales, catégories moins de dix-huit ans.
La règle est réduite à la plus simple complexité.; trois rounds de trois minutes, pas de coups bas, de coups de coudes ni de coups de têtes.. Si à la fin des trois reprises les deux boxeurs sont toujours debout, le verdict sera rendu par le public, pour la plupart composé d’ivrognes, de drogués, des délinquants notoires, des vicelards, des curieux, des badauds passagers intrigués par l’hystérie collective, des sans cœurs, des frustrés, des voyous- voyeurs ou voyeurs- voyous, moralité est offerte au peuple du purgatoire, par sa bouche sera vomie la sentence, par sa voie et ses voix sera rendue la justice.
Le tirage au (mauvais) sort me désigne Kader, alias Spook, comme premier adversaire.
Spook est un garçon de ma rue, de deux ans mon aîné. Fainéant, fourbe, voleur, menteur, il poursuit sans cesse une entreprise de démolition de sa propre existence. Pour accélérer ce processus, il sombre corps et âmes dans l’addiction aux drogues. Cannabis, Ecstasy, Héroïne, cocaïne, codéine, amphétamine, LSD, crack, toutes matières susceptibles de faciliter sa déchéance finissent dans son organisme.

La dope a même emporté progressivement son humour dévastateur qui était sa principale singularité.
Encore qu’à le voir enfilé les gants et se poster face à moi en garde haute avec les jambes flageolantes sa silhouette squelettique et son aspect cadavérique, on se dit que même drogué jusqu’à la moelle, le « spook » ne se départira jamais de son naturel comique.
Faute d’aspirer à devenir, il se contentait d’aspirer les flocons de cocaïne qui blanchissaient son été,
Cette givre synthétique avait figé sa volonté dans une posture de soumission à la toute puissante chimie et à son pouvoir chimérique.
Il avait choisi la parallèle de l’illusion à la droite ligne de la réalité. Nul d’entre nous ne le blâma vraiment car tout comme lui on savait qu’on mettrait toute une vie à mourir. La toxicomanie est un chemin qui ne connaît pas d’aboutissement.
Une partie de la famille de spook s’est tassée au bord du bassin. Ily avait Omar, que l’on surnommait le « dealer de son » ou le « funky Brother «, dénicheur de morceaux inédits nappés de chocolat Soul ou importateur
De sonorités sirupeuses rythmant nos heures entre deux ennuis prolongés. Sa sœur Kébhira (Littéralement «la grande » en arabe) se charge d’entretenir l’ambiance, de souffler sur les braises. On l’appelait «la méduse », du venin plein la bouche et de la came plein les veines. Elle trimballe son bébé criard, pauvre bâtard sur lequel pléthore de sérial fornicateur pourraient revendiquer la paternité,
Début du premier round, la stéréo d’Omar délivre « Billy Jack » de Curtis Mayfield. La ligne de basse fait danser l’horizon, le souffle du vent ondule sous l’effet des harmonies sonores, rythme lancinant qui invite à cogner en douceur, à boxer dans la ouate mais ni toi ni moi sommes là pour planer sur la partition musicale du « superfly ».
Tu n’es plus dans l’illusion, les coups sont réels, dont la drogue atténue certainement la portée mais ma riposte trace des traits acérés décochés à la farce de ton opposition Spook. Tu ne proposes qu’une louche de taloches mal ajustées ou une grappe décomposée de punchs aussi moisis que ton sang. La boxe est comme la dope, trop mauvais pour toi. Nocifs ça creuse ta tombe, patientes encore un peu et tu pourras y prendre place, lèves les bras, protèges ton corps, j’entends les os qui craquent, tout s’effrite, tes chicots se déchaussent, tu ne peux même plus croquer dans ta biscotte le matin, tu es aussi épais qu’un survivant des camps de la mort, tu as du sang qui te descend des narines, d’habitude y a de la poudre qui y monte, faut au moins goûter à la vie avant de se laisser mourir. En attendant goûtes à ma gauche, reprends de ma droite. Ressens la douleur Spook, Vies Spook, sois meurtri par quelque chose de réel,
ton passage par ce monde ne peut compter que par ta fuite dans l’artifice de l’univers chimérique, l’exaltation des sens, cherchant un point d’ancrage dans la seringue sur vitaminée, te dérobe à notre réalité et t’emmène, par ta fascination du néant, vers les limbes ténébreux de l’oubli. Une combinaison au plexus te rapproche des rivages éternels, tu n’as plus la force d’esquiver, tu t’offres à mes poings comme tu tends ton bras à la seringue. Tu ne resteras pas longtemps suspendu entre le sursis et le trépas.

Fin de la première reprise, tu t’effondres sur le tabouret. Tu ne reprendras pas le combat. La radio de ton Funky Brother allait entamer «no thing on me » que mes poings allaient te fredonner durant trois minutes tel un hymne à la sobriété, ta gorgone de sœur avait programmé un second opus d’insultes dans son crachoir automatique. Ton neveu continuera de brailler bien après le gong imaginaire, il braillera toute sa vie comme la brûlure du premier souffle, comme la douleur d’une naissance refusée,
Quant à toi, tu rejoindras, dramatiquement, le rang des veines percées, à l’âme dévorée par l’immonde bête blanche qui recrachera tes restes, maigre pâture aux vers insatiables, dans un fossé voisin.
De la chambre du « dealer de son» s’évadent les accents torturés de Freddie’s Dead portés en oraison. Puisse ton paradis être autrement qu’artificiel.
Pour appréhender mon prochain adversaire, il convient de plonger de l’autre côté du miroir.
Hassan est beau, unique, il est l’incarnation du bien et de la beauté. Notre univers était peuplé de têtes de pioches et de visages cabossés. Hassan souvent donné la sensation
D’un mirage dans notre quotidien. Beau, grand, élancé, élégant d’apparence et d’attitude, élève brillant qui faisait la fierté de ses professeurs et le respect de ses camarades, capitaine exemplaire de l’équipe de foot du quartier, il y avait dans toutes ses dimensions l’expression d’une perfection qui nous fascinait. Un être concentrant une kyrielle de qualités et de vertus, le tout diffusées par un naturel désarmant qui mettait en relief notre indécrottable médiocrité.

Mais il n’était pas « seulement » la personnification d’UN idéal ou l’éminent représentant de l’excellence Humaine en ces lieux désolés, il opposait un cinglant démenti aux théoriciens de la génétique criminelle.
Ses trois frères aînés étaient des petites frappes multirécidivistes qui, de séjours carcéraux en libertés sursitaires, rehaussaient le prestige de leur benjamin. En observant la trajectoire des membres de la famille, nous étions stupéfaits de l’asymétrie constatée entre l’intègre confondu et accompli dans l’axe du monde et les tourmentés dilués dans le grand bain de la violence auto- destructrice.
Magicien des lieux à la douceur assassine, il imposa la beauté là où seule la force avait le droit de « cité ». Mais magicien ou tortionnaire, beauté réfléchie ou obscure laideur, il représentait un obstacle à écarter, un adversaire à abattre.
Dès le début du combat, ma rage lui explose à la figure. Hassan est un privilégié de la nature, étranger à la difficulté. Je l’emmène batailler dans un registre qu’il abhorre, la victoire passera par le laborieux et l’éclat boueux de la chiffonnade. L’issue de notre affrontement sera ce que j’en voudrais et non ce qu’il en espérait. Il fuit les corps à corps, je lui offre une promiscuité de tous les instants, nos odeurs se mélangent., nos souffles se confondent, je perçois ces râles prolongés comme des invitations à poursuivre mon labeur, des encouragements aux succès qui ne tardera pas à m’appartenir par mérite et obstination. C’est mon quart d’heure de gloire, Hassan a l’éternité pour se repaître du bonheur qu’il lui est prescrit par divin décret sans y consentir un véritable effort. Quel charmant privilège que de jouir d’un inné tant jalousé. Je cogne dans tous les sens, mes poings s’agitent sous tous les angles, j’ai 10 bras, j’ai 20 mains, j’ai 30 volontés, j’ai soif de revanche, faim de reconnaissance, besoin d’expulser cette haine sur ce que j’ai toujours voulu être, Hassan est mon idéal et je m’acharne à le briser. Il bascule contre les vieilles parois du bassin et s’effondre. Rassasié, je ne me rends même pas compte que je viens de faucher la seule rose qui poussait dans ce fumier.
Rattrapé par la malédiction des lieux, Hassan dévia de la ligne vertueuse qu’était sa vie. Absorbé par les abysses, il plongera pour trafic de stupéfiant. Les policiers, qui cultivaient une sacrée dose de cynisme, le cueilleront le soir de ses fiançailles.
Aux pays des gueules noires, mon démon est blond, le cheveu crasseux, le visage gagné par la couperose et se prénomme Bertrand, bien dans la tonalité d’une allure qui suinte le soufre comme au temps maudit de la pire condition humaine. Il est issu d’une lignée de ferrailleur dont il perpétue la tradition avec la robustesse qui caractérise les gens du métier. Le patriarche de la famille était l’Héphaïstos du coin dont l’épanchement et l’étanchement de ses émois l’avaient plongé dans une brutalité très primitive.
Les mandales et le ceinturon étaient les instruments forgeant le mental de ses rejetons. Une méthode typique des schémas éducationnels de l’ » époque», où l’on craignait davantage le fouet de l’autorité paternel que le maillet de la justice. Le Saint Patron des ferrailleurs, bourru à la vitalité flétrie et à la vigueur surannée, vit désormais ses bastons par procuration, accompagnant son fils aux quatre coins des rings,
En lui communiquant sa ferveur pour la souffrance, sa passion pour la douleur et son amour pour le mal infligé. Il était la caricature de la caricature de l’ivrogne épanoui dans les méandres de l’alcool, la forme quintessenciée du poivrot assumé vivant de et pour son addiction.
La « cogne » et la « bibine », sont les deux pôles confondants du gamin, héritage d’un Hercule désœuvré sans travaux mais travers. Licencié au club de Boxe de la ville, il pensait avoir trouvé le parfait exutoire à sa rancœur congénitale et pourtant flinguer des sacs de frappe ne saurait suffire à étouffer ce qu’il avait de vif et d’écorché.
L’atmosphère dans le parc est encore plus nauséabonde que d’habitude. Le combat semble être transporté vers d’autres perspectives, plus générales car sous le vernis du furtif intérêt pour
Une animation de quartier, certains y décèlent la symbolique de la suprématie des races et de la hiérarchisation des ethnies.
Ça crie, ça gueule, ça vocifère, ça beugle, ça braille. Un troupeau de pochtrons sort du troquet qu’est devenu le club de pétanque voisin, faisant davantage résonner les verres que claquer les boules. On s’époumone, les « nez de cochons « donnent du concert de houblon en répandant leur haleine inflammable dans ce fond d’air déjà menacé d’implosion. Je suis encore descendu d’un étage dans la fosse à purin, car il est des bas-fonds où la vermine se télescope.
À l’extérieur des « cordes «, au-dessus du bassin, ça tourne au clash des civilisations, invectives et injures, les combats d’insultes avant le combat de poings où l’on étale les maux de l’esprit pour des mots de bas prix. Blanc du cru contre « bicot » immigré, et tout autour alcooliques notoires contre musulmans décomplexés qui marient l’illicite du trafic au halal des merguez grillant sur le barbecue. Malgré le déclin progressif du jour, le soleil continue de cogner sur les caboches. Déplumés, nous ne sommes que des poulets dans la rôtisserie des âmes. Je fixe mon adversaire comme face à mon créateur, une déférence teintée de défiance, je le sais dangereux, incontrôlable et que si j’ai le bonheur de remporter ce combat, il me sautera à la gorge et crèvera ma jugulaire avec ses dents ou alors choisira-t-il de m’éventrer sur place et de filer mes entrailles à son doberman.
Le papa ferrailleur, ventru et vermoulu, pointe son doigt en ma direction : « Il va te maquiller comme une p*** à 100 balles. Sûr qu’il sait de quoi il parle.
Après s’être querellé du regard quelques secondes, deux trois tours du ring pour bien consolider le cadre de nos débats, je balance une série de jabs pour établir le contact. La riposte jaillit sous la forme d‘un crochet que je contre avec l‘avant-bras, puis me pousse violemment, je glisse sur un appui fuyant en voulant me récupérer. En le voyant charger comme un bison, je me rattrape en le ceinturant pour éviter la correction. On s’enlace, un premier corps à corps. Fatal rapprochement. Son haleine a des relents dégradés de bête immonde, plus répulsif qu’un fennec négligeant sur l‘hygiène. Ma bouche a gobé cette particule nauséeuse. L’odeur fait son chemin jusqu‘à mon abdomen, mes organes se tordent, bons à rincer l’impureté dont ils sont imbibés. Sans recevoir un seul coup il me met l’estomac de travers.
Faut que je bouge sinon je suis mort, je dois le déplacer pour le vider de son stock de TNT. Je l’invite à visiter le ring, me courir après comme un chien après son Os. La bête poursuit sa proie qui a encore la force de fuir. Je me faufile, je tourne autour, je change d’appui, je passe en dessous d’un swing, il enrage, ses yeux déversent des discours de haine mais je n’ai pas les moyens physiques de poursuivre cette tactique bien longtemps. La politique est coûteuse et mon capital énergie se ……Fin du premier round.

Malgré tous ses attributs brutaux et l’expression de sa sauvagerie, l’espace du ring est encore à conquérir. Je regagne mon coin passablement inquiet. Ça résonne dans le casque et ce brouhaha m’assourdis. J’essaie de rester lucide, j’ouvre grand la bouche pour bien remplir mes poumons, ma cage thoracique a sifflé comme une cocote minute sur le point d’exploser ou le hennissement fatigué d’un poulain épuisé jusqu’aux jarrets.
Il m’a imposé un rythme d’inconscient pour déjouer les pièges venimeux dont son cœur est gorgé.
Je n’ai personne dans mon coin, pas d’Eddie Futch ni d’Angelo Dundee, juste la trouille qui met en garde, juste cette pétoche qui me maintient conscient du danger encouru, juste cette flippe du mauvais coup, cette hantise de la raclée, l’angoisse de l’humiliation qui m’alerte du péril qui me guette.
J’ai vécu le second round comme un calvaire. J’ai oublié de respirer et toute mon énergie s’est consumée, envolée dans les vapeurs de ce barbecue obsédant. Cet enragé frappe comme une mule.
Je me demande si l’affreux ne m’a pas monté un coup à la « Bug’s Bunny » en planquant un fer à cheval dans son gant. Il a astiqué mes côtes avec un plaisir de sadique, doublé à l’abdomen avec l’acharnement
d’un barbare touchant aux confins de la cruauté. La perspective d’encaisser trois minutes de plus les charges d’un mulâtre décérébré me rende paranoïaque. J’ai envie de me lever de ce tabouret pourri, de me sortir de ce traquenard en courant le plus loin possible. Mais il y a 160 francs en jeu, une partie du paradis, de quoi financer un business qui m‘offrira du bon temps, l’ultime luxe que l’on peut se payer.
La troisième reprise démarre à peine qu’il me choppe à la mâchoire, c’est le brouillard estival dans mon esprit, des filets de sang se tressent dans ma bouche, je vacille un quart de seconde, léger mouvement de balancier vers l’arrière puis vers l‘avant, mes talons se soulèvent quand le cobra s’élance, rapide et vif il mord dans ma chair, je sens ses crochets s’enfoncer, le choc a libéré les dreads d’hémoglobine contenus dans ma bouche,
Le venin se propage dans mes veines, galope dans mon esprit, la douleur me paralyse un court instant , mes yeux roulent comme deux pépites en gravitation, mon genou fléchi dans une posture d‘ allégeance, je me repens d’avoir cru à la victoire dont je réalise brutalement le prix exorbitant à verser pour l’obtenir.
Ce bourreau plein de morve déchire de toute sa rage la tendresse d’une éternité passagère.
Il me surplombe, lève les bras, et conclut son œuvre par une bordée d’insultes. Quelle idée de croiser le fer avec un ferrailleur ! La foule redouble de vacarme, la soirée s’étire au-delà de son terme, des torrents de houblon continuent de descendre dans les gosiers, les fumeurs de haschich s‘éparpillent aux quatre coins du parc, la douleur m’a pénétré, obsédante, aliénante, elle me rappelle ma défaite, j’ai mal de vivre ce moment, la nuit ne viendra pas après cette soirée, une aube de larmes et de sang se lèvera sur ma débâcle. J’ai perdu ma mise initiale de 20 francs et je ne remettrai jamais plus les gants.
Bertrand gagnera le tournoi et empochera les 320 francs qui iront remplir la caisse métallique de la « baraque italienne », club de jardiniers locaux qui désaltère chaque soir les assoiffés de notre « solitude ».
Dès le printemps prochain, je profiterai d’une fêlure lumineuse dans la grisaille des cieux pour fuir cet endroit, le seul que j’ai connu en 17ans, en m’engouffrant dans cet interstice à la forme de ticket d’évasion. Je n’ai presque rien ramené de mon enfance, je n’ai rien emporté de cette « solitude » qui était la négation de notre multitude, qui encourageait le déni de notre existence, j’ai tout laissé derrière moi, seule la passion de la boxe, chevillée au corps, m’accompagna dans ma fuite vers la normalité.
La matinée tire à sa fin et la cafetière est encore à moitié pleine. ..
«Billy Jack»
http://www.youtube.com/watch?v=QuytQvycLag
«Freddie’s Dead»
http://www.youtube.com/watch?v=ECgBXkil7YI
«No Thing on me»
http://www.youtube.com/watch?v=Lus0wLOXvAc
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Mustaf


Quelque part dans le désordre, le fracas de mes sentiments, il doit y rester encore un peu d’amour.
Reclus, apeuré, recroquevillé dans un coin du capharnaüm où j’ai amoncelé toutes les sublimations sensorielles et artificielles que mon cerveau atrophié a secrétées, en dehors de toute réalité.
Tout ce bordel me fatigue le cœur, à vibrer et sursauter en toutes circonstances. Ça donne la mesure du battement sur la portée du temps, la pulsation se fait plus intense, elle est gourmande, en devient vorace. Ça pompe du sang, ça irrigue le circuit veineux de ce grand corps qui me supporte. Parfois, le cœur et le cerveau échangent leur place, leurs fonctions.
Chez moi, ce sont des faux jumeaux, des sosies, j’ai longtemps cru qu’ils étaient de la même matière, qu’ils n’étaient qu’un, qu’ils partageaient en commun, à part égale, la connerie qui me fait agir et ressentir.
J’offrirais bien ma dépouille à un curieux, un mage du scalpel, rigoriste et méticuleux, qui me dissèque ces deux farceurs, que je puisse en avoir le cœur net si je puis dire.
Après cette ultime vérification d’usage, je servirai de compost naturel, d’énergie fossile, un répit pour des vers pas trop regardant sur l’origine de la barbaque, eux aussi ont droit à leur banquet de chairs, et tant mieux s’ils l’aiment défraichies. J’en ai connu des moins bandantes dans des alcôves lilloises.
A trop penser avec le cœur, on finit par descendre le cerveau au niveau de la bite. Et là, terminé la trique du réveil, et les fourrages hygiéniques de chattes dociles, on rationalise avec sa paire de couilles des concepts de d’épanouissement personnel tendant vers le bonheur asymptotique.
Le cerveau aussi développe des illusions, des tracés d’éphémères poursuites vaines et naines, vaines et haineuses, vénéneuses. AU fond, il doit y avoir encore d’amour là-dedans, mais faut se presser, ça s’éteint vite ce truc, ça s’évapore quand ça manque d’espace et de respiration.
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Mustaf


Il n’y a à écrire bien moins qu’à vivre. Je traverse deux fuseaux horaires en clignant des yeux sur ton passage, un instantané donnant naissance à l’éternité de ta beauté dont le mouvement impérieux l’éloigne de ma portée. Mains et yeux en échec dans la tentative vaine de t’accaparer.
Deux mers, en étreintes écumantes, recrachent sur le pavé froid les naufragés de l’existence, des rêves éventrés obstruent le chemin de ma ballade nocturne, des badauds par milliers envahissent l’espace où mon esprit vogue, des physionomies sans relief descendent des avenues dans un silence de compassion, des hommes sans nom prêtent leur douleur à ma gloire nouvelle, un peuple acéphale poursuit sa voix dans le concert aphone du monde.
Mes déambulations se nourrissent des métamorphoses de rues, apparitions disparitions des êtres dans le champ spectral de ma pensée, des vagues de fraîcheur, images en rouleaux sous mes pas me plongent dans une mélancolie flamboyante, une chaleur unique chemine depuis mon lointain intérieur vers l’expression d’un idéal refusant le deuil du bonheur auquel j’ai gouté immodérément avec la fougue et l’insouciance des génies capricieux.
Je prolonge ma marche dans des venelles larges comme des océans de lumières, baignade d’illusions dans l’abolition progressive de ma volonté. Je ne désire plus, je vis.
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Les maudits de la Boxe : » L’Art au temps des cochons. »


La Boxe est un fabuleux matériau de construction pour bâtir des légendes hors du commun, hors du temps, Une texture unique et inimitable, un fil à tisser des destins intemporels qui chatouillent l’imaginaire et suscitent l’admiration.
Depuis sa supposée naissance sumérienne (entre 3500 et 1500 ans avant notre ère) jusqu’ aux réunions étoilées des casinos du Nevada, ses formes d’expressions et ses appellations ont varié au gré des siècles et des époques traversés.
Les civilisations l’ont modelée aux mœurs de leur temps (1) et si certains élans moraux propulsés par la religion ont proscrit sa pratique (notamment la Rome christianisée), le pugilat a toujours su ressusciter grâce à l’ingéniosité et la témérité de ses nouveaux adeptes.
La fascination qu’elle exerce puise ses racines dans la tradition immémoriale qui érige le combattant en héros populaire, une incarnation de la respectabilité que lui confère la dureté de sa pratique.
Mais réduire la boxe à une vulgaire épreuve de force serait se couper de tout ce qui fait son essence, un attrait répulsif ou une répulsion attractive qui nous renvoie à la primitivité de notre condition.
Afin d’appréhender au mieux les ressorts mystérieux de cet art, il convient de voyager dans le passé, d’emprunter les couloirs du temps, parcourir les allées de la mémoire. Un épisode fondamental de son histoire se trouve injustement relégué dans l’oubli.
Et Pour éclairer cet épisode, il nous faut remonter à l’ère de la sécularisation de la discipline.
Après une longue période d’hibernation, le pugilat réapparaît en Angleterre au cours du 17e siècle. Des combats se déroulent de plus en plus fréquemment dans les gargotes de l’Est londonien.
La ferveur se nourrit au rythme des pintes qui arrosent les gosiers asséchés et au tintement des schillings placés sur un des courageux venus se faire cogner dans le buffet, perdre quelques dents, se faire briser des côtes dans l’espoir de contourner la pauvreté de leur existence au risque d’y sombrer définitivement, … corps et âmes.
Le phénomène prend une ampleur qui dépasse progressivement les couches de la société.
La fièvre émanant des arrière-salles enfumées des tavernes gagne aussi la Gentry londonienne.
Très vite, elle s’approprie ce nouvel opium du peuple et le sort des bouges infâmes des bas-fonds de White Chapel.
Elle administre sa pratique, et lui donne un nom (Boxing, du verbe To Box, frapper avec le poing). Captivée par la violence du spectacle et la dramaturgie qu’il renferme, elle prend soin de le mettre en scène afin de tirer le maximum de bénéfices des énormes sommes engagées dans les paris.
Chaque Noble, chaque duc a son poulain, souvent un serviteur de la maison .
La boxe devient prisonnière d’un système coercitif où le véritable enjeu est la réputation des familles de la noblesse londonienne qui s’affronte par serviteur interposé.
Le sujet, sélectionné pour son imposante stature, est la personnification virile de la vanité du patron qu’il sert.
Il ne représente pas davantage qu’un bourrin des champs de courses usé jusqu’aux jarrets pour satisfaire l’ego de son propriétaire. Il ne lui manque au fond que les armoiries de la famille tatouées sur les pectoraux. Les affrontements durent jusqu’à ce que l’un des protagonistes soit mis K.O. ou qu’il abandonne.
A la fin de la première moitié du 18eme siècle, un personnage émerge naturellement de ces multiples « bastons«. Jack Broughton. Invaincu pendant 10 ans entre 1740 et 1750, il est proclamé Champion Du monde par le microcosme pugilistique. Il devient le protégé du duc de Cumberland, frère du Roi George II.
LE 24 avril 1741, il bat le cocher du prince de Galles, George Stevenson. Après 35 minutes d’un combat d’une rare violence, Stevenson perd connaissance et sombre dans le coma. Il décède tragiquement quelques jours plus tard.
Jack Broughton est profondément traumatisé par le drame. Il prend ses distances avec le monde de la Boxe. Sa conscience est torturée. Après un long moment d’isolement et de questionnement, Il réapparaît tel Moise descendant du Sinaï avec les tables de la Loi. Il rédige sept règles gravées dans le marbre qui servent de socle immuable au processus civilisationnel de la Boxe, et proclame la création d‘une fédération, le Pugilistic Club, organe qui aura pour principale mission de garantir leur mise en application. (2)

Malgré les efforts de Broughton, le parlement anglais prononce l’interdiction de la boxe considérée comme immorale et dangereuse.
Pour survivre, elle rentre à nouveau dans la clandestinité et va devenir l‘otage des combines en tous genres. Les carrières sportives sont indexées sur la courbe des paris. Des fortunes se font et se défont au gré des arrangements. Les boxeurs, soucieux de leur niveau de vie, respectent le scénario et le rôle qui leur est assigné. La discipline devient alors le jouet de certains, faisant à la fois la délectation des hémophiles et autres détraqués nourris à la fange de l‘humanité, elle fait la fortune des bookmakers, ceux-là même qui gagnent leur vie sur la fascination qu’exercent ceux qui risquent la leur.
Le 18eme siècle tire à sa fin. Et avec lui, la boxe agonise. Discréditée, elle n’en finit plus d’être en gestation, comme un enfant, qui pour naître au monde, attend le cadre normatif et sécurisant nécessaire à son développement.
Elle illustre la brutalité des mœurs d’une société reflétant paradoxalement le bon goût et l’élégance.
Près d’un demi-siècle après la loueuse initiative de Jack Broughton, elle se trouve toujours à l’état d’ébauche. Elle appelle de ses vœux un représentant qui saura révéler la dimension universelle et artistique encore enclose en elle. L’époque appelle désespérément un champion. Le pugilat répondra à son appel et lui enverra, sous les traits de Daniel Mendoza, son premier prophète.
Remonter le destin de Daniel Mendoza et en dénouer les liens c’est un peu comme ouvrir un sac à légendes. Un destin projeté, depuis des sous-sols «perséphoniens», vers des altitudes icariennes
Né à Londres le 5 juillet 1764 (3), il est le cinquième des sept enfants d’un couple d’artisans modestes (Abraham et Esther Mendoza) qui tentent de subsister dans le purgatoire sociétal qu’est White chapel. A la fin du 15e siècle, les ancêtres de Daniel, juifs marranes, ont quitté l’Andalousie et le bûcher que leur prédestinait Torquemada.
Les Mendoza bénéficiaient de la respectabilité et du prestige que leur octroyait leur fonction de juge rabbinique au sein de la Judéria de Cordoue, à une époque où l’Andalousie constituait un rempart contre l’obscurantisme, un bouclier contre le fléau de l’intégrisme. L’union tripartite (Hébraïque, Islamique et Romaine) permit trois siècles d’épanouissement intellectuel et enfanta un art de vivre au centre duquel le respect, la tolérance et l’altérité étaient des préceptes relationnels. La foi n’était pas qu’une prescription à la croyance mais l’élan nécessaire à la pleine et totale exploration de l’esprit
L’avènement du troisième calife des almohades, Al Mansur, a refermé définitivement la parenthèse enchantée ouverte par « l’esprit de Cordoue «. Son fanatisme a condamné le pluralisme religieux, banni la diversité spirituelle. Il proclama un autodafé sensé épurer l’inestimable bibliothèque cordouane des « œuvres païennes » contraires à «sa religion «. Son ordre prendra la forme d’un immense brasier dans lequel se consumeront quelques 300 000 livres.
Al Mansur a ouvert une brèche au chaos, une brèche dans laquelle s’engouffrera plus tard l’inquisition «torquemadesque«.
Certaines légendes remontent l’ascendance des Mendoza à des illustres personnages de la culture hébraïque tel que Maimonide ou le Roi David lui-même.
L’errance, les humiliations et les persécutions ont tari la noblesse de leur sang. Quand les Mendoza débarquent à Londres avec leur peur sous le bras et leur instinct de survie pour unique bagage, ils perpétuent à leur tour une bien triste tradition du peuple juif : l’exode.
A White Chapel, Daniel Mendoza grandit dans d’atroces conditions. Le quartier de l’East End est une véritable insulte à l’humanité. Dans celieu de privation et d’excès, l’espoir n’est qu’une particule évanescente qui se dissout dans la réalité comme un flocon de neige égaré en plein Sahara.
La population patauge dans la boue, racle la poussière, épouse une pauvreté sans nom qui condamne ces habitants avant même qu’ils soient venus au monde. La détresse creuse les cœurs aussi profondément que l‘intérieur d‘une vieille prostituée. Les tanneries, les abattoirs, les fonderies et autres industries polluantes plantés au milieu de ce dépotoir concourent à la déstructuration sociale. Ils y déversent leurs déchets et propagent une atmosphère étouffante qui balaie les rues crasseuses de ce sordide endroit. Un souffle brûlant qui murmure à l’oreille de cette population damnée qu’elle est en enfer.
White Chapel n’est qu’un immense cratère d’immondices toujours prêt à cracher sa lave d’inhumanité,
Elle est semblable à un énorme bovidé anthropophage ruminant des proies trop tendres sous ses mâchoires d‘aciers.
La jeunesse de Daniel Mendoza dérive au milieu des naufragés de son environnement.
Faute de moyens financiers pour poursuivre ses études, il multiplie les petits boulots (vitrier, importateur de thé, marchand de tabac, serveur,) qui se soldent invariablement par des renvois pour des bagarres, altercations ou excès de violences. Tous ceux qui portent atteinte à sa dignité goûtent à la fermeté de son poing droit.
C’est dans l’arrière-cour d’un troquet mal fréquenté du quartier que le jeune Mendoza va découvrir le sens de son histoire. Venu brouillé la réalité dans des vapeurs alcoolisées, il va dissiper les brumes qui obscurcissent son avenir. Daniel est absorbé par le spectacle mettant aux prises deux hommes dans ce qui ressemble davantage à une foire d’empoigne qu’à une bastonnade suintant la testostérone.
Deux sacs d’os embarqués dans un combat à l’estomac pour l’estomac. Curieusement, ces deux silhouettes squelettiques rongées par toute une vie de crève la faim font basculer la vie de Daniel Mendoza.
Il découvre la boxe. Elle ne va plus le quitter. Il s’engouffre en elle, elle s’empare de lui. Elle l’arrache à la misère, il la délivre de ses faux amants et va révéler la grandeur qui sommeille encore en elle.
Elle va lui apporter le sentiment d’exister, de valoir quelque chose.
Mendoza devient la coqueluche de White Chapel. Très vite, la foule se passionne pour ce petit gabarit (un mètre soixante-dix) au style original. A cette époque, la boxe ignore les catégories, la segmentation pondérale qui garantit un certain équilibre des forces entre les gabarits opposés. Mendoza est une brindille faisant face à des troncs à l’écorce graniteuse. Le profil offert par Daniel est déroutant, aux antipodes des standards de l’époque. Culminant à environ un mètre soixante-dix, les archives le pèsent à peine plus de 75 kilos, il est coiffé d’une imposante chevelure, une longue tignasse noire qui voltige à tous vents comme un emblème de liberté et une peau brunie dont on ne saurait dire si elle est une conséquence directe de la génétique ou l’effet de la crasse qui l’a toujours côtoyé.

Daniel Mendoza est un humain bâti et charpenté autour du squelette d’un chat, incroyablement flexible, souple, élancé, fin, maigrelet. Ses articulations ne sont que ressorts.
Pour compenser son déficit physique, il développe une boxe tonique, rapide, basée sur le mouvement la rapidité gestuelle, un coup d’œil aiguisé et un sens de l’esquive jamais vu à l’époque.
Cette manière de combattre ne fait pas toutefois pas l’unanimité. Elle est perçue comme une violation du rituel pugilistique, un dépassement illicite de sa doctrine sédentaire qui s’est accommodé des empoignades d’ours évoluant sur pignon fixe.
Les victoires s’enchaînent et cette boxe si particulière attire d’innombrables admirateurs. Mendoza commence enfin à savourer une vie digne de ce nom. Combat après combat, il amasse une jolie fortune, achète une propriété à White Chapel qu‘il baptise « l‘amiral Nelson«et y enseigne sa conception toute personnelle du pugilat. Une école est fondée, mieux un courant de pensée se propage. La boxe n’est plus condamnée à la brutalité radicale. Elle mue en Art, elle file la parfaite métaphore qui, jailli de ses poings prend la forme de miracles perpétuellement renouvelés. Harry le charbonnier, géant de deux mètres, se consume en quarante minutes, Martin le boucher de Bath est découpé méticuleusement en une demi-heure.
Sa réputation dépasse rapidement les limites de son quartier. Porté par la fougue et l’enthousiasme de ce peuple des abîmes (4) , qui le rebaptise «l’Etoile de l’Est» ,il obtient le droit d’affronter Richard Humphries, gentleman boxeur et idole de l’Angleterre.
Le duel Humphries- Mendoza enflamme le pays et tombe inévitablement dans la caricature de la lutte des classes entre le sans-grade des bas quartiers de Londres et le représentant des peaux rosées parfumées aux privilèges et au bien-être. Mais bien plus qu’une lutte entre miséreux et nantis, c‘est une lutte de deux conceptions de la boxe, l’une qui a fait du mouvement son idéologie créatrice et l’autre qui vit et périt par la force brute et son conservatisme
Humphries est un monstre de puissance. Massif, le torse large comme une armoire normande, de longs bras au bout desquels pendent deux poings gros comme des rochers qui auraient dû lui valoir une condamnation pour ports d’armes prohibées. Le tout reposé sur une solide paire de jambes aux mollets dégradés en pointe qui semblent le clouer sur le sol. Mendoza lui rend plus de vingt kilos.
Les spectateurs présents autour de l’anneauce jour-là vont toucher du regard la matière élémentaire du pugilat : Le Noble Art.
Mendoza virevolte, emmène Humphries dans un tour de manège lancé à pleine vitesse. Il joue du buste, roule des épaules, son corps répond à une musique qu’il est le seul à entendre. Il bondit, plie les genoux, déplie les bras qui lui servent de fouets, ça gicle de toutes parts, le visage de Richard est fardé de rouge et de bleu. La facilité n’est pas qu’apparente, elle est la parente de ce génie réformateur qui enivre l’assistance dans ses circonvolutions transcendantales. Humphries s’épuise à poursuivre l’insaisissable,il s’agite en tous sens à grands coups de poings nerveux non contrôlés, des moulinets de bras qui trahissent sa filiation animale. Mendoza réduit son adversaire à deux états consubstantiels, la colère et la résignation.
L’issue du combat est toute tracée quand les partisans d’Humphries décident d’influer sur les événements. Ils envahissent le ring pour permettre à leur protégé de récupérer. L’arbitre a du mal à garantir la régularité des débats. Humphries frappe bas et touche. Le combat verse dans la pourriture.
Daniel Mendoza est battu après Vingt-neuf minutes d’un duel émaillé de tricheries insupportables.
Humphries fanfaronne « J’ai battu le juif » qui résonne comme un soulagement.
Certains parieurs refusent de percevoir leurs gains. La colère monte parmi la foule. Elle enfle, houleuse se mue en un fleuve porteur de clameurs sauvages qui menacent de tout ravager.
Dans les calèches qui ramènent les nobles à leur demeure, la revanche est une passagère omniprésente.
Elle aura lieu une année plus tard et aura un goût délicieusement éclatant pour Daniel Mendoza.
Le 06 Mai 1789 à Stilton , au petit matin, ( la boxe est toujours frappée d’interdiction et les combats se déroulent à l’aube dans des endroits reculés afin de se prémunir des descentes de la police) ,3 000 personnes paient pour la toute première fois leur billet d’entrée pour assister à une rencontre de Boxe.
Et de rencontre à proprement parler, il n’y en a eu. 59 minutes de démonstration rendent justice au rebut de White Chapel. Humphries et la noblesse s‘inclinent. Le « juif» a vaincu.
Au petit matin de ce printemps 1789, le ciel fait descendre sur l’Angleterre une aurore de satin qui , en diffusant progressivement son rayonnement purpurin, inonde soudainement la vie de Daniel Mendoza de tout l’éclat du monde.
Avec l’avènement de Mendoza, le boxeur change de statut. Trop longtemps considéré comme de la chair à cogner pour cogner, il évolue en un être délié, en mouvement perpétuel, qui répond non plus à un comportement primitif mais à une véritable réflexion dont le corps devient le support de cette expression.
Les marquis et les ducs voient d’un mauvais œil ce juif espagnol de bas lignage se jouer de l’adversité avec une telle insolence. John Johnson est chargé de purifier la boxe de ce « phlegmon». Celui qui donne des leçons d’auto-défense au poète Byron se dresse sur la route de Mendoza.
La mise à mort est programmée le 15 Avril 1795. John Johnson utilise tout le manuel de la vermine conventionnée par le système. Coups bas, frappes derrière la nuque (rabbit punch), il empoigne la chevelure de Mendoza, tire de toutes ses forces, la tête de Daniel est offerte en sacrifice à l’autre main du bourreau qui s’acharne violemment. Le ring est recouvert du sang de Mendoza.Jackson redouble de rage et d’animalité. Le visage de Daniel est ravagé, il termine à genoux noyé dans une mare d‘hémoglobine, une longue et épaisse morve rougie coule de son nez. Celui qui pouvait d’un simple mouvement passer d’un bord à l’autre de l’univers se retire pour la première fois de ce monde qui l’écœure.
Si Mendoza fut certainement le premier homme que la boxe a sorti du caniveau, il est également le premier que le ring a retenu bien trop longtemps. Conscient que pour prétendre au repos de justes, il se devait d’user jusqu’à ses dernières forces, ou taquiné par le démon de la vanité, il pensait que le bras armé de sa volonté pouvait suspendre le temps destructeur au-dessus de ses jours, il remonte dans l’arène à 56 ans pour vraisemblablement régler un énième créancier. Les schémas qui relient le boxeur et la scène n’ont pas beaucoup varié en deux cent ans. Mais il le fera également pour en baver encore, éprouver son corps, ressentir la douleur des coups, recevoir l’amour de la foule et aimé une dernière fois cette Dame la boxe qui lui a tant apporté.

Les paupières de Daniel Mendoza se sont définitivement closes le 3 Septembre 1836, faisant l’effet de deux petites coques arrondies traversées par la lueur de la sérénité qui y a brillé jusqu’au dernier instant. Il est mort comme il est venu au monde, dans le dénuement et la pauvreté matérielle. Entre les deux pôles qui ont borné son existence, il a offert le patrimoine d’un esprit à la richesse inégalée.
Le voyage qui nous a mené aux confins de la mémoire touche à sa fin. Et pour tout vous avouer je ne sais toujours pas quoi penser de ce Daniel Mendoza, qui échappe à ma raison et a emprisonné chacun de mes instants durant les dix jours qui m’ont été nécessaire à la rédaction de ce papier.
Il ne m’était pas possible de séparer la légende de la réalité, d’extraire le factuel de l’incroyable pouvoir de l’imagination qui a probablement corrompu son œuvre. Loin d’être guidé par une démarche d’historien, ma plume a entretenu l’illusion de découvrir autre chose, d’explorer davantage les fabuleux ressorts de la dignité humaine. Daniel Mendoza est certainement un homme qui s’est égaré dans le labyrinthe du temps. Quelqu’un qui a vécu à une époque qui n’était pas la sienne, une époque qu’il a contribué à améliorer. Il fut à la fois la fertilité et la floraison d’un nouvel esprit qui a brisé les murs de la différence. Digne descendant d’une lignée prestigieuse, Il a hérité d’un fil atemporel, tendu depuis des générations par des glorieux aînés tels Maimonide, le médecin des rois (Saladin, Richard cœur de lion ou Baudouin le lépreux.) ou David le roi étoilé d’un peuple qui avait cessé de briller depuis trop longtemps. Il a prolongé la trajectoire de ce fil et l’a tendu à son tour à la descendance Mendoza. L’ » étoile de l’Est» est devenu davantage que le symbole distinctif d’appartenance à une communauté. Elle est la source créatrice, nourricière et inspiratrice de l’univers de la boxe.
Elle est la cause et la première conséquence du Big Bang qui a révolutionné sa pratique.
L’ » étoile de l’Est» était, est et restera à jamais le soleil de la galaxie «Noble Art«.
Un immense merci à LBF de m’avoir fait replongé là-dedans.
Sources :
«La loi du ring » de Michel Chemin
(1) Lors de la période sumérienne (environ 3500 à 1500 avant JC), des lutteurs s’affrontaient poings nus lors de grandes festivités données en honneur aux nombreuses divinités.
En Grèce, le Pugilat servait de rites funéraires que les vivants dédiaient aux guerriers morts au combat (voir le livre XXIII de l‘Illiade et la description du combat entre Epéios et Euryale lors des obsèques de Patrocle.)
Plus tard, l’épreuve fut inscrite au programme des jeux antiques et le vainqueur en retirait un énorme prestige
(2) voici en détail les «Ring Rules» publiées le 16 Août 1743
Article 1: Tout homme qui tombe sur ou hors de l’estrade doit être ramené par son second face à son adversaire. Tant que le signal n’est pas donné, il est interdit de frapper
Article 2: Un combattant qui n’est pas ramené par son second trente secondes après sa chute est déclaré vaincu
Article 3: Personne ne doit se trouver sur l’estrade, à part les deux adversaires et leurs seconds. MrBroughton est cependant habilité à y monter en certaines occasions sans se mêler au combat.
Article 4: Un champion n’est déclaré battu que s’il ne se présente pas sur l’estrade dans la limite du temps imparti, ou si ses seconds annoncent son abandon. Ces derniers ne sont pas autorisés à dialoguer avec le camp adverse.
Article 5: Le prix du vainqueur représente les deux tiers de la recette du jour, à moins qu’un arrangement particulier ne soit intervenu.
Article 6: Pour éviter tout litige, les deux adversaires choisissent parmi l’assistance, deux gentlemen qui officient en temps qu’arbitres.
Article 7: Il est interdit de frapper un adversaire à terre, de le saisir par les cheveux, la culotte, de porter un coup sous la ceinture. Un homme à genoux est considéré à terre.
(3):Un doute subsiste sur la datation exacte de la naissance de Daniel Mendoza. Dans ses écrits, l’intéressé affirme qu’il est né en 1764 alors que les archives de la synagogue de Londres datent sa circoncision le 12 Juillet 1765.
Dans la religion juive, la circoncision (Brith Milah) se pratique le matin du huitième jour suivant la naissance.
(4) «Le peuple de l’abîme» est le titre d’un livre de Jack London racontant sa descente dans les bas-fonds de l’ East End au cours de l’été 1902.
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Mustaf

La pluie arrose les heures ou ma pensée torture la vie que je suis censé supporter. La mort n'a plus à attendre, son œuvre est déjà accomplie, un amour de rien suffit à me jeter dans les vertiges de l'illusion.
L’amour comme un trépas, un pas de l'absurde dans l'impasse des sens, une passe d’essence dans l’effervescence de la chair inflammable.
Je glisse sur le croissant de la lune rousse, je me pique aux chardons des charmes, des dons que la nature répand en proportions.
Envoutement te ment et éloigne la voute de ma main tendue vers un horizon évanoui dans sa fuite, la soif de ne rien boire, de ne rien altérer des sensations que cet esprit dérangé secrète en mon intérieur, lentement dévoré, savamment consumé, la douleur me ravage les organes, je ris de la pourriture qui me gagne, je m’amuse du démon qui semble ravi d'avoir vaincu ma volonté.
Mon corps est un vestige de ce que j'étais. Mon âme est déjà partie, la nuit descend en moi, comme une pente légèrement douce et offerte aux ténèbres, la fumée épaisse émane d'une terre sablonneuse où les cadavres s'enfoncent pour y disparaitre à jamais.
Les Etoiles sourient du spectacle d'une humanité qui afflige. Le vide a trouvé son royaume, le ciel n'a qu'une fenêtre qui donne sur ma chambre. La porte est fermée, le lit est étroit, les murs sombres, le désordre des lieux invitent à la fuite, condition obscène de l’homme prisonnier de sa médiocrité, le jus de ma démence coule négligemment le long de ma cuisse, je ne m'appartiens plus, de la vibration du sexe érigé comme un empereur sans palais, j'en suis les commandements, j’en fais un tuteur.
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