UN BILAN

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L’homme est un spécimen qui aime les bilans

Le bipède autodestructeur s’emploie à décrypter les mouvements de sa vie à l’heure où l’horloge du temps sonne les caps que son âge traverse.

A chaque décennie, son retour en arrière, l’amertume des heures filant son acrylique texture sur l’échine des jours, à chaque décennie, sa projection vers l’avenir qui se tend avec de moins en moins de promesses au fur et à mesure des années, un champ inévitablement rétréci déroulé vers le dernier périmètre exigu contenant la sépulture qui nous est réservé dès la naissance., tous les ingrédients concourant à la mise en abîme des espoirs violés distillent leur saveur dans la marmite des pensées inquiètes..A chaque décennie l’usage du rétroviseur comme un miroir sur soi dans lequel l’ombre du regret nous dévore davantage le visage, un moi dans la laideur de sa totale et entière nudité.

L’homme dresse des bilans en espérant y trouver le sens qui manque cruellement à nos existences, se remémorant la perte du suc de jeunesse, le parfum d’une époque fanée ou la symphonie mélodieuse de la joie d’une vie passée et pas assez vécue. Le temps sublime l’édifice de la mémoire. La réalité a achevé de résigner l’envie de voir le papillon de notre bonheur s’échouer sur la fleur qui l’avait désiré.

L’illusion que nous avons réussi à conserver, flamme miraculeusement préservée du souffle implacable du réel… Trente cinq années bientôt sonnés, trente cinq années de peu de substance, de matière nourrissant la fange. Trente-cinq, l’entre-deux de deux décennies, l’écartèlement entre le regard perdu sur la trentaine et l’élan irréfréné me poussant vers la quarantaine rugissante.

Le passé survit dans le souvenir, l’avenir s’agite dans la pensée, le présent s’ignore, espace temporel où résonne l’instrument du chagrin, en écho plaintif des pulsations creuses.

Le bilan pour assigner une fonction déterminante à la prise de conscience du temps qui passe.

Le bilan pour modifier la trajectoire, spirale infernale dans un monde où vivre est la perpétuation d’un génocide.

Le bilan est pour moi un exercice malsain, lugubre et ne me propose que la perspective d’un deuil éternel. Mort des rêves, trépas des songes, agonie d’ambitions, juste le battement cardiaque me maintenant en vie pour assouvir mes sordides plaisirs surabondants de chairs, de corps et de charognes d’âmes en décomposition.

Un bilan qui célèbre le règne du frivole et pleure la perte de l’aimée.

De ce cœur regretté, j’écris l’absence dans ce bilan pathétique. L’absence qui fit couler le sang du jasmin dans mes veines, un battement d’ailes de papillon m’a éloigné de toi, j’ai perdu ta trace dans la poussière du soir. Laisse ton âme suivre la mienne dans les cadences anxieuses de mon tango céleste. Dénude-toi, offre-moi la beauté de ta nudité comme seule vision de l’infini, répand le parfum de ton sexe dans l’air offert à mon odorat. Unissons-nous pour nous soustraire au bilan macabre, unissons nous dans l’étreinte confondante de nos êtres entremêlés. Unissons-nous avant que le créateur ne défasse les coutures qui nous ont assemblés. Unissons-nous avant que le dégoût de nos corps ne nous exclût l’un l’autre du champ des pulsions assouvis. Ne nous protégeons pas du plaisir que l’on se donne, jouissons de cette vie avant que Dieu ne me brûle l’âme au jour du jugement dernier, avant que les cendres de l’enfer ne se répandent sur nos têtes. Faisons l’amour pour procréer. Procréons, donnons-nous la vie que le destin nous a refusée, renaissons l’un dans l’autre.

Il me faut ta chair entre-ouverte, soumisse à mon intrusion, lieu où jaillit la source généreuse ou je m’abreuve, rivière d’abondance, lieu de rencontre des lèvres qui ne se parlent que dans l’aveu de leurs désirs communiés. Ma damnation est terrestre, charnelle.

La peau nue de ma verge enflée pointe le chemin humide de tes entrailles bouillonnantes, cet étroit passage, détroit » vagineux », lieu plus vaste que mes projets de vie, tanière ou j’engouffre les inquiètes ardeurs de mes plaisirs éphémères… Je me damne encore et encore, je renouvelle en toi les vœux de ma damnation choisie, damnation de sens dans l’oubli de l’être, je ne suis qu’une mèche de chair gorgée de sang et de feu prête à allumer un brasier dans la tanière de tes organes en ébullition sismique.

Ton corps se raidit, dessine des courbes lascives dans un absolu de félinité, mes reins contiennent toute la fougue d’un attelage d’étalons en rut. Tes mains s’agrippent à la voûte céleste qui nous préservent du regard de l’éternel. Des étoiles fanées en tombent et s’éteignent sur le plancher chaud où se dispersent nos souffles éreintés.

Dans ce nouvel espace ouvert à nos ébats, nous ne sommes que les sujets conjugués de l’autocratie des pulsions obscurs. La promenade de mes doigts dans les allées de mon intimité, et sur leurs bouts arrondis, j’ai toutes les odeurs de l’anatomie humaine. Je vois, je sens, je touche, j’ouïs, je goûte. Les sens exaltés par la lubricité d’une créature dionysiaque.

Je n’ai pas encore épuisé le contenu des effets que tu me produis. Je redescends au niveau de ce bout de peau sorti de sa fente pour moi, je presse ta vulve entre deux doigts pour en extraire le nectar qui recouvrira ma langue, la sève de l’impatience perle à la pointe de ta toison intime, je serre le lys de ton sexe et perçois le frémissement de chaque membre de ton corps, nous revenons à la primitivité du langage, où se répondent nos révélations orgasmiques. Dans le chuchotement d’un gémissement partagé, nous psalmodions un verset du coran des alcôves.

Tu me bascules sur le dos, et m’invité à l’abandon d’une ultime chevauche, la cavalcade avant l’extinction des sens. Je saisis tes seins à pleines mains, fruit d’un moulage voluptueux aux mamelons roses durcis par l’excitation du plaisir qui t’envahit. Nos bouches s’approchent, nos langues s’y glissent, et en t’embrassant j’ai la sensation de baiser toutes les nymphomanes de Sodome et Gomorrhe, toutes les dépravées des rues de l’humanité, toutes les charognes des poèmes interdits.

Tu es prête à te repaître de l’ondée crémeuse que je répands dans le creux de tes reins. Bois mes écumes d’argents, avale le lait de nos extases impudiques, savoure leur descente en toi..Car dans la fougue de mon ultime piété, je sens une ride d’amertume creuser le front de Dieu.

Car à l’heure du bilan de cette nuit d’homme moite et de femme humide.

Car, à l’instant où nos corps se décolleront dans la séparation de nos vies, tu me piétineras le cœur de tes souliers de verres. … Mais laisse ma main, libre, écrire l’éclat du cristal qui se brise…

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UN BILAN DE CORPS ET D ÂMEChapitre9 messages | 4 ans

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