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Michayl

Michayl
Si j'étais idiot, je retomberais amoureux

Je me suis dit que ce serait un titre intéressant pour mon prochain texte, mais je doute à présent. Je décide de demander à Balthazar. Mon vieil ami ne saurait me faire défaut.
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Michayl

Je n'ai pas le souffle court mais j'ai l'impression d'avoir couru un marathon. Non, deux marathons. Mes jambes me font souffrir, mes bras refusent presque de se lever à nouveau. Nous suons tous les deux à grosses gouttes. Elle a ce sourire que je lui connais bien, ma petite blonde.

Notre affrontement, notre plaisir, nous l'arrachons à nos plaintes, à nos douleurs. Nos corps meurtris par le cuir nous rappellent que nous existons. Les marques laissées sont autant de témoins de notre appartenance au monde des vivants. Nous aimons.

Nous aimons l'autre parce qu'il nous rappelle qu'avant d'être faibles, nous sommes présents. Avant d'être vus, nous sommes visibles. Avant que nos corps ne soient déchirés par la souffrance et le désir, ce ne sont que des réceptacles vides. Avant l'ombre, la lumière. Avant la mort, le plaisir.

A ton tour. Frappe, frappe et frappe encore, petite blonde. Tanne ma peau comme on a tanné ton cuir, tandis que mon visage se tord, tandis que tes mains se serrent. Tape, frappe, tanne ! Tout pour repousser nos limites, tout plutôt que rester en l'état. Tout pour nous, tout à toi. Pour cette fois.

Je repense à ce moment, ma tête posée sur mes bras croisés à la fenêtre. La rue se bouscule en-dessous. La boulangerie me renvoie ses effluves de bon pain et de croissants chauds. Le goût de la rosée sur les tuiles, et celui du fer mouillé, tout me ramène à toi ce matin.

Et sur mes mains, l'odeur du cuir.
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Michayl
Première publication sur ce site, je publiais auparavant sur mytexte : www.mytexte.com/textes.php?auteur=ifrit
Ce texte date d'il y a un peu plus de quatre ans mais je tiens aujourd'hui à le publier. N'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez, et à faire un tour sur mon ancien compte. Je suis friand de critiques et de réactions sur mes écrits.
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Ils sont partis sans même dire merci. Mais comment leur en vouloir ? Ce sont des oiseaux. Les oiseaux ne disent pas merci, même une fois la becquée terminée. Ils ne sont qu'instincts. Faim. Peur. Reproduction. Douleur. Liberté. La vieille dame dans le parc nourrit-elle les oiseaux pour contempler la liberté ? Ou pour l'asservir via un autre instinct ? Est-elle esclave ou maîtresse ? Prisonnière ou perverse ? Peu importe, au final, nous contemplons tous la même beauté dans son incommensurable simplicité. Le bleu de la mésange n'a rien à envier au rouge-gorge et pourtant, seul le pain compte pour ces couleurs volantes. Le pain n'a qu'une couleur. Le pain nourrit. Seul le pain compte.

Alors pourquoi suis-je ici, sur mon balcon solitaire, à disposer une énième boule de graisse dans son filet pour des êtres si étroits d'esprit ? N'ai-je point déjà vu mille plumes bleues et milles plumes rouges ? N'ai-je point déjà connu la faim pour ainsi l'observer sans cesse ? Suis-je effrayé par la solitude ? Par la douleur ? Suis-je enfermé au point de n'avoir pour seule distraction que la compagnie des oiseaux qui picorent mon offrande ? Tant de questions pour tant de simples choses. Oui, non, on peut douter de tout. Nous manquons toujours de tout, mais moi, j'ai surtout manqué de choses simples. De choses simples et belles.

L'instinct commande à l'instant. Il me plaît de voir. Il me plaît d'entendre. Et tout disparaît pour les oiseaux. Plus de questions, plus de froid, plus de faim, plus de solitude. Sur mon balcon, des oiseaux picorent. Une cabane en bois les protège du froid. La boule gigote dans son filet sous leurs petits coups de bec. Une voiture passe au loin, mais je n'entends rien. Nul prédateur en ce chemin. Mon chocolat coule doucereusement, chacun se régale. Le repas prend fin pour l'un, l'autre prend place et le manège continue. Les arbres se peuplent de chants et le ciel rougit aux couleurs de mes convives. Les questions attendront. Savourons ensemble ces moments, qu'il réchauffe nos cœurs et nos ventres.

Les heures s'écoulent comme le miel dans le lait chaud. Les oiseaux sont partis sans dire merci, mais comment leur en vouloir ? Ce sont des oiseaux. De simples et beaux oiseaux.
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Au beau milieu des pins odorants et des ruisselets chantants, deux êtres innocents se tiennent la main. Cette scène pourrait être splendide si la réalité des choses nous lâchait la grappe cinq minutes. Nous étions perdus.
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On n'a pas idée de tomber amoureux. Pas comme ça. L'étymologie même du mot appuie cette idée, on « tombe ». Badaboum ! Ou plutôt PAF ! CLAC ! VLAM ! Le pire, c'est que ça n'arrive qu'aux coins de rue, vous savez, cet endroit aux rencontres fortuites. Parfois même fortes et fortuites. Je m'arrange toujours pour qu'elles soient fortes, on ne vit pas assez longtemps pour vivre peu.

Mais là, je me suis mis dans de beaux draps. Ce sont encore les miens, heureusement, vous me direz. Mais voilà, je suis tombé. J'ai les genoux écorchés et les mains qui tremblent. Il fait chaud, j'ai de la terre partout et s'il pleuvait, on pourrait croire que je pleure. Je me relève, les joues rouges et les traits tendus. Le ventre noué, le regard fuyant. Ce qui m'arrive est mal et je pourrais faire de mauvaises choses. Changer de draps par exemple.

Ça pique, ça tire, j'ai beau fermer les yeux, ça ne part pas. Je suis déjà tombé, je me suis déjà relevé et avec le sourire. Et arrive le croche-pied innocent, la bouche en cœur et les yeux qui papillonnent. Elle n'a pas fait exprès, vous me direz. Vous dites beaucoup de choses vraies. Mais faire tomber les gens est une chose, viser ceux qui ont déjà les genoux ensanglantés en est une autre. J'ai encore les mains propres mais pour combien de temps ?

Le hasard fait les choses telles qu'elles sont, à nous de jouer avec. Je joue, c'est ma passion, je joue avec la passion. J'adore ça. Mais la passion engage l'honneur. Je me relève, rongé par la terre et avant qu'arrive la pluie, je bande mes genoux. Ça se verra, vous me direz. Peut-être. Certainement même. Au moins, je suis propre et dans mes draps. Et vous, qu'auriez-vous fait ? Je soigne mes chutes une par une. Question de principes.
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Michayl

La bécane, ça te fait prendre conscience de beaucoup de choses parce que ça les met en lumière. Plein phares sur ta gueule, ça éblouit pas mal au départ, puis tu t'habitues. Les images viennent. Matin, midi et soir, six fois par jour, tu te dis que c'est peut-être la dernière fois que tu enjambes la bête. Que cette fois-ci, l'autre connard pressé dans son Audi ne te loupera pas. Que tu t'envoleras jusque sous les roues du semi-remorque à côté pour finir en pâtée de toi. Tu commences un peu à avoir le syndrome de Jésus, t'imagines ton enterrement, les gens qui chialent, ou juste ta femme, parce que t'as toujours eu un peu de mal à trouver des potes en qui avoir confiance. Tu sais, pas juste des gars qui boivent des pintes avec toi et rigolent sur la longueur de leur zizi. Non, je te parle de potes qui savent des trucs crades sur toi et qui n'en parleront jamais, de potes qui ont ce qu'il faut pour cacher un cadavre et qui ne te feraient même pas payer pour ça, de potes qui ne rateront jamais une occasion de te rappeler que ta tronche de rat a intérêt à aller bien sinon ils débarquent et te composent une faciale en six temps pour te ragaillardir. Et là, quand tu démarres ton bolide, l'engin qui t'expédiera peut-être vers une mort façon chair à boudin au mieux, ou coma façon sarcophage de chair au pire, tu sais que tu sais. En une seconde, tu retournes dans les bas-fonds de ta conscience pour revivre le pire de ta vie, tout ce qu'on t'a dit, tout ce que t'as fait, tous ces pleurs, cette honte, cette solitude, cette haine qui te maintient en vie et que tous les bien-penseurs bobos diront que la vie c'est pas ça. En une seconde, tu retournes brûler seul au fin fond d'un trou sans lumière, à écouter tes propres sanglots en boucle. Et dans cette même minuscule seconde, dans cet infime moment d'introspection dont personne ne soupçonnera jamais l'existence, tu revois ces quelques mains tendues. Ces refuges qu'on t'a proposés. Peu importe le temps qu'il te faut, on te disait, c'est ouvert. Viens. Ca ira. Et quand ça ira mieux, tu pourras quand même revenir, pour le plaisir cette fois.
Je démarre ma bécane, je rentre chez moi en faisant gaffe au connard en Audi parce que je veux les revoir, ces gens qui seront à mon enterrement. J'ai envie de chialer mais c'est le vent sur ma visière fermée.
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De nouveau, je suis libre d'aimer toutes les femmes du monde.
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Des Chocrobons !

Cette idée avait surgi de nulle part tandis que le regard dépité de ma moitié vagabondait d'un rayon de gourmandises à l'autre. Des Chocrobons, ou quel que soit le nom de cette ignoble sucrerie, des Chocrobons il me fallait, des Chocrobons j'obtiendrais. Elle m'avait parlé de la bête quelques jours auparavant, lors de nos courses bi-hebdomadaires, des étoiles dans les yeux mais des mites dans les poches. Nos finances ne nous permettaient toujours pas d'en acheter sans faire de concessions telles que le ketchup ou autre bêtise inutile et donc indispensable. Pourtant, en cette journée morose et grise battue par la pluie et les moues boudeuses des passants, les Chocrobons m'apparaissaient comme la seule et unique solution à la déprime chronique de madame.

« Choisis un truc qui te plaît, lui ordonnai-je en m'éloignant vers une allée incertaine, je reviens. »

Les féministes de tous bords vous martèleront que la femme a besoin de liberté. Que nenni ! Billevesées ! Nawak, wesh. Bref, il n'est point de loi universelle pour faire le bonheur de ces dames car la mienne préfère qu'on lui montre le chemin. Mieux (ou pire, selon ces chères gardiennes du bon droit), elle a besoin d'être dictée. Sa liberté la confine, elle s'y perd, s'y étouffe. Loin d'avoir besoin d'une main pour la soutenir, elle n'a cependant jamais demandé qu'une direction. Ça me va, sans pour autant vouloir offrir le traditionnel tableau patriarcal de l'homme de famille dominant. Je rajoute ceci au cas où l'une des sus-citées me lise, on ne sait jamais.

J'eus le temps de voir sa tête hocher avant de faire volte-face, sa triste mine tentant vainement un sourire faux. Vainement. J'allais trouver ces boules de chocolat à la noisette. J'allais lui offrir. J'allais réussir. Le rayon des biscuits s'était révélé vide de l'objet de ma convoitise, si l'on ne tenait pas compte de ma belle éperdue. Tandis que je dirigeais toute mon attention sur la recherche des confiseries, je vins à heurter une jeune fille. Pas le temps de discuter, je m'excusai rapidement avant de filer. Elle me suivit dans le rayon et s'adressa à moi d'un ton qu'elle avait sûrement emprunté à sa mère : « Non mais dites donc, ça va pas de bousculer les gens comme ça ! Vous voulez que j'aille chercher le vigile ou quoi ? » Ces deux derniers mots m'indiquaient que malgré sa famille probablement bourgeoise pour avoir l'outrecuidance de venir jusqu'ici pour me houspiller du haut de ses treize ou quatorze ans, ses relations amicales traînaient tard le soir en trottinette en écoutant du mauvais rap sur une mini-enceinte à quinze euros. Une mini-racaille de la haute, en somme.
Pas le temps de niaiser, comme diraient nos chers amis québécois. « Tu veux une bonne raison d'appeler le vigile, ma grande ? » Il y eut un moment de flottement, avant qu'un jeune gaillard à peine plus âgé débarque dans son slim et ses mocassins impeccables. « Louise, tu viens ? », lui lança-t-il, la sauvant de mon regard sombre et de mon désir ardent de lui apprendre la vie.

C'est en l'observant quitter l'allée que j'aperçus enfin l'objet de mes recherches. Là, à deux mètres de moi, en tête de gondole, toutes sortes de paquets plastiques luisants sous les néons n'attendaient que moi. En haut, les petits lots de deux cents grammes me faisaient de l'oeil tandis qu'en bas, les imposants lots de cinq cents grammes m'ordonnaient d'apporter la joie non pas à une, mais à deux personnes à la fois. Dont moi-même.

Je me saisis de cinq cents grammes de bonheur au chocolat et à la noisette que je fourrai au fond du sac de courses, voulant créer la surprise. Ma moitié n'avait pas bougé d'un pouce, de même que sa pâle déprime. « T'as pris quoi comme bêtise encore ? », lorgnant sur la poche rebondie d'où provenait le craquement caractéristique du plastique coupable. J'ouvrai le sac, affichant un faux repentir pour implorer son faux pardon. Heureusement, ses fossettes ont eu vite fait de m'excuser.
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Michayl

Le hasard a cela de réconfortant qu'on peut y mettre toutes les couleurs. Tous les sentiments s'y mêlent, toutes les excuses, toutes les envies, tous les visages.
Je traînais ma carcasse et mon ennui sur la terrasse d'un bar, flanqué de mes compères et collègues. L'un bavassait à perdre haleine sa triste relation manquée, son cœur brisé. L'autre écoutait, patientait, attendait son tour qui ne viendrait peut-être jamais. Et moi, je regardais la pluie venir, l'oreille distraite par le foot et le cœur ouvert. Je ne souhaitais rien qu'un bon moment, une tranche de vie arrosée de quelques bières belges et tartinée de fromage de chèvre, avec des cornichons. J'aime à penser que rien ne serait pareil sans le cornichon. Rien dans un apéritif ne croque et ne ravive plus le palais qu'un cornichon extra-fin dans son jus. Rien n'apparaît aussi succulemment dans une soirée qu'une poignée de cornichons frais, qu'importe sa garniture et sa boisson. Non, vraiment rien.
Et tandis que mon esprit dissertait sur la valeur du cornichon, le ciel nous tomba sur la tête. Le temps s'était arrêté, le vent ne caressait plus nos visages brûlés, la pluie ne battait plus la tôle du bar, la télévision s'était tue et le monde retenait son souffle pour que cet instant n'expire jamais.
Elle était arrivée. Je ne l'attendais pas mais elle venait pour moi. L'espace se retirait devant elle, et tandis que son corps flottait sous sa fine robe d'été, l'allée glissait sous ses pieds. Les tables défilaient les unes après les autres derrière elle, ses jambes semblaient à peine la porter tandis que sa taille fine ondulait sous les longs fils d'or caramel de sa...
« Oh tu m'écoutes ? »
Je sursautais, manquant de renverser la table de fortune qui constituait notre terrasse.
« Et voilà, on l'a perdu. T'as vu qui ? Si elle était jolie, soit elle ne bosse pas chez nous, soit elle vit loin d'ici. »
Loin d'ici, voilà où je m'étais retrouvé durant ces quelques secondes avant qu'elle n'entre dans le bar. Loin, avec ce sentiment distant mais furieux que quelque chose de bon était arrivé. Une nostalgie, une chaleur refoulée, comme un parfum lointain dont on aurait oublié l'appartenance.
« Vous ne l'avez pas vue ? »
Mes compères me regardèrent avec interrogation.
« La... » Les mots me manquaient. « … fille, continuais-je avec hésitation, qui vient de traverser l'allée, avec sa robe verte et ses grands yeux parfaits.
Ah oui, je la connais, on était au lycée ensemble. »
Je sursautais, intérieurement cette fois-ci. Notre ami silencieux venait d'ouvrir le ciel sur mille soleils, et je me recroquevillais dans ma propre ombre. J'étais curieux malgré tout.
« C'est bien elle, dit-il en me montrant son Instagram, elle est cool, tu veux aller lui parler ? »
Curieux et terrifié. Ma confiance aux pieds d'argile, ma gueule mal rasée et mon haleine de bière m'interdisaient d'espérer l'approcher. Mais pire encore, je ne parvenais pas à distinguer ce sentiment fuyant qui m'envahissait. Je touchais du doigt un interdit que je pensais perdu à jamais. Mais quel était son nom ? Quelle était cette mélodie qui résonnait en mon sein et trébuchait sur les pièces de mon être parsemées ça et là ?
« Parfaite, c'est toi qui le dis », reprit le collègue célibataire endurci mais pas trop parce qu'il discutait un peu avec son ex mais vite fait parce que ça fait une compagnie et qu'au fond il s'en fichait bien sûr. « Elle fume, je te ferais remarquer. »
Bien sûr qu'elle fume, bien sûr qu'elle n'est pas parfaite, bien sûr que je vois tout ça puisque je n'autorise que mon regard à l'aimer, à espérer un contact, à espérer de vivre autre chose que ma morne solitude claudicante et pitoyable, gorgée du dédain d'une autre et de la honte de m'être laissé berner, encore, bien sûr que j'espère.
Bien sûr... Cette certitude me heurta de plein fouet. Je voulais me lever, traverser les interminables mètres qui nous séparaient et m'agenouiller devant elle. Je voulais la remercier, lui rendre grâce, et saluer le destin pour cette rencontre avec elle, cette inconnue parfaite. Je voulais lui dire toutes ces choses, combien je l'avais attendue, combien j'avais désiré ce moment sans le savoir, combien j'avais voulu connaître à nouveau ce tressaillement, cette folie, ce coup de foudre pour la vie qu'on appelle sobrement l'espoir. Elle m'avait fait rêver. Elle m'avait rendu l'espoir.
Une heure passa. J'appris son nom et son âge. Cela m'importa peu au final. Elle n'apprendrait jamais mon existence ni son importance. Notre relation imaginaire ne dura que ces quelques dizaines de minutes, et tandis que je l'observais quitter mon monde dans la pénombre, je la remerciais encore, tout en espérant un jour désirer autant, encore.
Et puis de toute façon, elle fumait.
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Je n'attendais rien. La souffrance s'estompait, emportant avec elle la solitude, l'amertume, et même un peu de rancœur. Ma vie brûlait enfin de son propre feu, et le chemin qu'elle me laissait entrevoir n'offrait guère plus de place que pour une personne. Je n'attendais rien et j'en étais satisfait. Et la voici qui fait irruption dans ma vie, comme un éclair sans bruit. L'air s'embrase et le soleil n'éclaire plus qu'elle. Elle est cette chanson que je ne comprenais pas jusqu'à maintenant, et ses mots, ses murmures, volent vers mon âme : « Le moment est venu de vivre. » Nos corps s'évanouissent, j'imagine des jours lointains, les draps chauds d'un samedi matin, sa peau diaphane, immobile dans la lumière naissante, et son sourire nourrit mon cœur. Des souvenirs d'instants futurs apparaissent ça et là, entre deux tourbillons de couleur, parés d'éclats de nous.

Tout ceci n'est qu'un rêve. Son parfum, ses sourires, son corps contre le mien, rien ne tient. Toutes ces histoires, tous ces amours, tous ces instants perdus, tout me semble si loin et pourtant, je les sens encore, palpitant dans l'ombre crasse de ma mémoire. Comme un avertissement, comme une menace. Vivre, encore ? J'ai assez vécu. Et pourtant...

Ai-je seulement le choix ? Son nom résonne dans ma poitrine comme un millier de coups de feu, la guerre est déclarée mais personne ne lui a dit. Plus rien ne m'appartient, je regarde ma vie partir en nuages dans l'océan de ses yeux. Je la connais comme on connaît la mer. Impalpable, l'horizon se pare de son image, et s'il en est qui ont tenté de l'apprivoiser, le défi demeure. Je mesure encore l'ampleur de la tâche qui m'attend. A mon âge, quand on a vécu mes voyages, veut-on encore lever l'ancre pour une terre inconnue ? Cette question me traverse. Le cyclone abat sur moi sa force d'un blanc nacré, m'accablant de ses doutes, de ses envies, tourbillonnant sur ma vie et rasant tout sur son passage. Pour y survivre, je devrai le quitter ou trouver son œil. Et au milieu de tout ceci, la question la plus absurde survient : pourquoi maintenant ?

Cela n'arrive jamais quand il faut. Mais il le faut. Que deviendrions-nous, pauvres hères d'une seule vie, sans cet heureux hasard ? Pourquoi vivre, sinon pour l'exquise rencontre de ces deux destins forgés à même le vide ? Et surtout, pourquoi maintenant ? S'il le faut vraiment, cela peut-il attendre un peu ?
Je lève mon verre dans la tourmente, et le whisky m'aide à oublier, le temps d'une gorgée. Au cyclone blanc, à ma tempête, à l'espoir de trouver ton œil.
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Dans un futur pas si lointain, la guerre nucléaire et les maladies ont ravagé l'Humanité. La paix règne à nouveau mais la Sycomore fait toujours rage, relevant les morts et menaçant la vie dans son ensemble.
Mei et Astrid, sa mère, voient leurs vies bouleversées par la rencontre d'un être qu'elles pensaient impossible : un être sans aura.
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