Chapitre XIV - Le Vélin d'Aslan

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- Nous sommes convoqués dans la salle du Thrône.

le regard rouge de Shaitana transperce l'esprit d'Alexänder. Elle a horreur de voir la tête des nobles de l'empire. C'est encore pire quand il s'agit de partager son oxygène avec Sa Majesté.

Le guerrier lui tendit le parchemin au sceau de l'empereur. Ils avaient reçu la missive il y a de cela quelques minutes. La bougresse lui arracha la lettre des mains, le parcouru du regard sans vraiment la lire.

- Raaah !

Elle froisse le courrier entre ses longs doigts aux ongles griffus et le jette dans l'âtre de la cheminée. Le feu crépitant ne fit qu'une bouchée du vélin.

- Et pour quelles raisons sommes nous convoqués dans la salle de Solaris ?!

- Nous allons sans doute avoir du pain sur la planche...

La jeune femme, enragée, s'assoit sur une table au centre de la pièce, fesant bouger la chaise devant elle rageusement à l'aide de ses bottes. Elle continuait de fixer Alexänder avec une expression des plus mécontentes, les sourcils froncés. Son visage en amande s'enfonce dans le col de son manteau de Worg. Ses pupilles vermillon lancent des éclairs à quiconque a la malchance de les croiser.

- Tu as eu les informations concernant le port de Telmar ?

- Les attentats ?

Il hoche la tête. Elle n'est pas si stupide après tout ...

- Les mises à prix des trois terroristes à augmenté.

- Trois ? Je pensais qu'on avait encore affaire à deux des Douze Princes Primordiaux ...

- Pas tout à fait.

Il est vrai qu'Orias et Léviathan avaient été apperçus le soir du drame. Le monstre guerrier et le dragon d'opale sont connus à travers tous les services de protection de l'empire, comme quelques uns des pires criminels de leur temps. Ce n'est pas rien si ils figurent parmis les douze surnaturels les plus recherchés de leur génération.

Ceux qui figurent au panthéon sont affublés des noms des divinités de leur culte, cela instaure la crainte parmis le peuple, contrôlable plus facilement. Au delà de la peur, on leur donne ces désignations pour les reconnaître, même sans savoir leur nom. D'ailleurs, personne ici ne les connaissent.

Mephisto Grimm, était connu depuis dix ans déjà sur cette liste, déjà trop longue au goût de Shaitana. Bien qu'on ne sache quasiment rien sur la nature ni les origines de ce monstre, on sait qu'il est l'auteur des massacres de Nicolaï, de la boucherie des gorges Nordiques et des fléaux de Ragnar. Les informateurs décrivent une créature à l'apparence humaine d'une vingtaine d'années, à la peau blanche et aux cheveux noirs. Les hommes lui ont attribué le nom d'Orias. Perché sur son cheval de guerre, on le décrit comme un lion damné, seigneur de la guerre, semant mort et désolation dans les flammes de son passage.

Prince d'Opale quand à lui, s'est vu attribué d'office le patronyme de Léviathan, seigneur suprème des eaux. Les surnaturels l'appellent plutôt Jörmundgandr. Trop compliqé à pronnoncer pour la langue de l'Empire, il a été traduit par le mot Léviathan. On le connaît comme un démon dragon, ancien esclave, utilisé comme mercenaire par l'empire pour perpéter des assassinats, ainsi que des combats d'arène pour divertir les nobles à leurs heures perdues.

- On compte une troisième personne à leurs côtés. Continue Alexänder. On nous à dit avoir apperçu une femme au bras bionique attaquer les forces impériales cette même nuit.

Sa complice tiqua. Qui serait assez puissant pour s'être greffé au duo infernal ? Erzulie ? Non ... Cela fait des années qu'on ne l'as plus apperçue ... Yukinba ? Pas possible, on sait que cette mercennaire voyage seule.

- Nos informateurs parlent de pyrokinésie.

***

La journée s'était doucement entammée sur le pont de Teirloa'renn.

Yuki, fatiguée des derniers évènements, s'afférait à rafistoler son bras biomécanique. Malheureusement, elle ne pouvait pas tout réparer pour le moment. Il lui fallait se procurer des pièces qui n'étaient pas présentes sur le bateau.

Elle souffla. Avec quelques courbatures, elle se releva, bien emmitouflée dans les peaux puantes de Shirô. Ses vêtements n'étaient pas encore secs, et elle s'avérait obligée de les porter sur ses épaules, malgré un certain dégoût pour l'odeur qui en émane. Mais une irriésistible envie de pointer son nez en dehors de la cabine la pousse à se lever.

Les embruns lui griffent le visage. Ses cheveux de feu volent autour de son visage, fesant claquer ses boucles d'oreilles contre ses joues. La jeune femme s'asseoit dans le cock pitt du navire, bien loin de l'imposant démon furie noire. Hotsuki est posté devant la barre franche, et la dirige nonchallemment à l'aide de ses cuisses, son bras valide posé sur ses blessures au flanc. Pas jojo à voir.

Shirô l'avait aidé à recoudre la plaie, peu profonde. Mais la douleur restait bien présente et lui mordait le flanc. Le bras gauche enserré d'un bandage repose dans une étole de cotton, une de ses jambes retient tout son poids. Les jets de lave lui avaient dévoré la peau des cuisses et des mollets à certains endroits. Fort heureusement, les écailles épaisses de sa raisonnance avec Ryuu lui avaient permis de minimiser les dégats, et de pouvoir encore se servir de ses jambes sans trop de problèmes.

Il n'y avait à présent autour de Teirloa'renn que la mer. La grande baie d'Aori avait disparu à l'horizon, bien qu'ils soient encore à l'intérieur de la cuvette, et ce, pour encore un bon bout de temps.

- J'ai été épaté Yuki ... Tu m'as, ... tu nous a sauvé la vie.

" Une fois de plus ..." Songe le démon. Il expira bien fortement, les épaules bien droites.

La jeune femme le regarait avec des yeux ronds. Un sourie de satisfaction scotché sur le visage.

- On vas se faire défoncer par le Conseil, ça, c'est certain. Mais avec toute la purée que tu as envoyée hier soir, je pense qu'on te réserve une belle place parmis nous !

- Tu es certain de ce que tu dis ?!

- Pas totalement, mais c'est bien parti.

Yuki sentit une grande vague de satisfaction l'envahir. Enfin ! De l'espoir pointe le bout de son nez à l'horizon. Ils en avaient tous grand besoin au sein de l'équipe.

Shirô sortit à son tour de ses rêveries. Il se leva pour aller vaquer à quelques occupations autour de lui. Il avait attaché sa crinière grossièrement dans son dos, le tout libérant ses épaules massives recouvertes d'une couverture. Il tient dans ses main un petit coffre de bois poli par le temps.

- Eh ! C'est à moi !

La jeune femme se leva d'un coup, gardant tant bien que mal ses peaux autour d'elle, et tenta d'attraper au vol l'objet des mains du colosse. Malgré l'exaspération dont elle fait preuve, les images de sa transformation lui glacent le sang. Celui ci n'eut qu'à lever le bras pour rendre le coffre hors de portée.

- Que nous as-tu volé là ?

Hotsuki ricana quelques peu devant la scène.

- Ce ne sont pas vos affaires ! Rendez moi ce coffre !

- Tu penses bien qu'il contient des pièces. On connaît Yuki n'est-ce pas ?

Shirô ricana avec son ami. Il baissa un peu le bras et ouvrit le loquet du petit coffre de bois. La pyromancienne se garda bien de tout contact avec le jeune homme. Il en sortit une petite bourse de pièces de monnaie, et ... Il fronça les sourcils. Sa large main plongea dans le contenant et en ressortit un petit parchemin, roulé dans un ruban de soie rouge. Il s'avérait être scellé par un sceau de cire. Hotsuki le reconnu de suite, la marque d'Aslan.

Le sceau de la famille noble à la tête des trafiquants d'esclaves. La tête de lion rugissante sur la cire montrait de grandes dents bien aiguisées. Bizarre de trouver un objet de la sorte dans une pareille situation. Surtout que le coffre avait été trouvé dans la cale numéro cinq, là où se trouvaient les esclaves qu'ils avaaient libéré.

Intrigué, Shirô posa le coffre sur le toit de la cabine du thonier. Il jeta un regard interrogateur à son équipe, avant de désceller le sceau de cire. Il déroula le parchemin avec précaution. Il était vieux. Très vieux. Rien que par la rigidité de la peau sur laquelle il avait été fait, on arrive à savoir que l'objet date de plus de cinq siècles.

Devant les yeux ébahis de la furie se dessinnent des signes qui lui sont inconnus. Des glyphes aux formes longues et déliées, dessinés par des courbes graciles et raffinées. Un language qui lui était inconnu, mais dont les signes ne lui paraissaient pas étrangers. La langue semblait se lire de haut en bas, contrairement au runique et à l'akumarmoricain, qui partent de gauche à droite et se suivent horizontalement.

- Que ce passe-t'il ? Demande Hotsuki, intrigué de ne voir aucune réaction de la part de Shirô.

Ils s'attendaient tous à déplier un parchemin contenant une liste de comptes ou de noms, par exemple. Jamais ils n'auraient cru tomber sur une pareille découverte.

- Sais-tu de quoi il s'agit ?

Le colosse brun tendit le vélin au démon dragon. Yuki pu enfin en voir le contenu par dessus l'épaule de son compagnon, qui écarquilla encore plus les yeux que Shirô. Si ils avaient pu s'échapper de ses orbites, ils l'auraient fait.

Du Khankla ... Impossible. Les mains du jeune homme se mirent à trembler d'exitation. La langue des Anciens ... La langue des Douze. Hotsuki posa ses fesses sur les bancs du cock pitt de l'embarcation, afin de bien prendre le temps de se rendre compte de ce qu'il a sous les yeux.

Impossible ...

Le Khankla est une langue oubliée depuis des siècles ici. Le Spelt Blink raconte qu'il fut créé par Fàfnir, le premier des dragons, afin qu'il puisse parler avec son peuple, les nains. La langue légendaire n'avait que rarement été écrite sur des vélins. Cependant ...

- " Chacun des enfants de Fàfnir possède dans son essence même le don de parler le khankla ... " Commence Ryuu.

Hotsuki ne connaîtrai décidément jamais tous les secrets détenus par son démon. Il fut tout de même surpris de prendre connaissance de cette capacité.

- " Saurais-tu parler cette langue, Dragon ?

- Je te l'ai dit ... Elle coule dans nos veines. "

- Alors ? Demande Yuki à son compagnon. De quoi s'agit-t-il ?

- Nous sommes vraisemblablement devant l'un des derniers textes rédigé dans la langue des Douze.

Yuki failli s'en étouffer. Les dieux eux mêmes possèdent une langue ?! Encore une chose dont elle n'était pas informée.

- Tu ne savais pas ? On raconte que Fàfnir fit don de sa langue aux enfants de l'Ancien Culte, dans le but de les unir dans les ténèbres qu'ils traversent en chaque instant.

Yuki fit de grands yeux ronds à son tour. Cela ne lui disait rien du tout. Elle se doutait bien que tout ce charabia voulait certainement signifier quelque chose, mais de là à ce que ce soit une véritable langue ...

- Et quelqu'un sait déchiffer ces gribouillages ? Lance elle à ses deux compagnons.

- Ryuu pourrait y arriver...

- L'âme du dragon d'opale ?

Le démon hocha la tête. Il lui fallait se pencher sur le vélin pendant quelques heures pour pouvoir en saisir toutes les subtilités.

- Bien ...

Hotsuki se leva en pliant précautionneusement le parchemin. Il se retourna avant de disparaître dans la cabine du bateau. Il avait besoin de calme pour pouvoir déchiffer les glyphes.

Il descendit les petits escaliers de la cabine de l'esquif avant de disparaître, le visage interdit.

- Eh bien ! Moi j'ai appris à lire, ben je souhaite ça à personne ! S'exclame Yuki, les deux bras sur les hanches.

***

Hotsuki s'était enfermé depuis déjà quelques heures dans le ventre de Teirloa'renn. Un crayon de bois à la main, il ne cesse de raturer les parchemins dont il dispose, ne cesse de remanier les mots que lui dicte Ryuu. Le dragon lui même n'est pas un grand connaisseur de cette langue si ancienne et compliquée à l'écrit.

Nul ne sait comment elle s'écrit réellement, on ne peut que la suggérer. C'est une langue à tons que l'on ne peut retranscrire à l'exact sur un vélin. Les glyphes raturés et souvent difficiles à déchiffrer ne s'avèrent que peu coopératifs.

Ce fut au bout d'une longue après midi, en milieu de soirée que le démon ressorti de sa tanière, la traduction du texte serrée dans sa main. Il est encore partagé entre le déni et l'espoir hypothétique que pourrait apporter ce vélin à la Résistance.

Sans un mot, il s'accoude au bastinguage de l'esquif, perd son regard azur dans le pétrole des vagues de la mer de la baie d'Aori. Il tend sans un mot le papier à ses compagnons, qui le regardent sans avoir dit un mot depuis sa sortie de la cabine.

Yuki se saisit du chiffon raturé qu'il leur tend. Avec une certaine apréhension, elle expira un grand coup, et commença à parcourir les lignes à voix haute, le regard de Shirô suivant sa lecture par dessus ses épaules. Elle frissonne.

" Changer l'inchangeable.

Gloire au Seigneur, Celui qui par ses actes fera tomber les Golems. Courbe l'échine devant Celui qui se tient droit contre le Soleil.

Vaincre l'invaincu.

Gloire au Seigneur, Celui qui as déjà vendu son âme au Diable. Louée soit la Bénédiction des Psychopomes sur son Etre.

Blaspmème

Concevoir l'inconcevable.

Loué soit son Sacrifice. Plie le genoux devant Celui qui gratte le Ciel, Celui qui revient du Sidh pour sauver les Enfants de l'Ancien Culte.

Voir l'invisible.

Gloire au Seigneur, Celui qui pourra exécuter la Volonté des Dieux. Prosterne toi devant Celui qui revient de l'Au Delà pour porter l'Espoir de son peuple.

Blasphème

Saisir l'insaisissable.

Gloire au Seigneur, Celui qui marqué au milieu de l'âme, par les yeux des Psychopompes, voit les Maux de Körangar.

Trouver l'introuvable

Béni soit l'Etre choisi par les Douze, Celui qui arpente les contrées vaporeuses de l'Autre Monde, par delà les Limites, et encore au delà...

Alors de nouveau, le Chant s'élèvera dans les Airs, La Force grondera sur la Terre, le Silence pèsera sous les Mers.

Glorieux soit Celui qui Déchire le Ciel. "

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