Chapitre 6 — Chapitre écrit par Alain Damso

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Ɑ Syphilis, elfe guerrier ne s'apercevant pas de l'injustice du système libéral qu'il tente d'imposer en réponse au totalitarisme ténébrorien

Ʌ Chlamydiana, produit d'une société rétrograde et fascisante alors même qu'elle tente de s'en émanciper

Ɛ Clitorhys, monarque absolue de droit divin mais recherchant une optique plus progressiste

Ə Veyyash, promoteur d'une société ne permettant plus l'idéal anarchiste

Ɣ Zidrost, vieux sage cosmique ayant compris l'utilité d'une société humaine basée sur un modèle néospinoziste nietzschéen

Ɔ Sogrizt, guerrier en chef des nains, détail qui manifeste une fois de plus l'obsession hiérarchique d'un peuple préférant vivre dans sa caverne platonique qu'être guidé vers la lumière

Þ Filik, jeune nain fasciné par des distorsions spatio-temporelles semi-conscientes qui s'avèrent une allégorie des ajustements des modes de vie que nous devons promulguer en ce XXIe siècle

Ʋ Zulgor, vil elfe noir promoteur du transhumanisme

Ʒ Le marchand oriental, incarnation du capitalisme dont le libre-échange est voué à détruire peu à peu l'économie nanarnyaise

ʕ Zigoteur le Zigoto, observateur lucide à la verve presque aussi grandiloquente que la mienne

ẞ Araknida, témoin impuissante de la déliquescence de nos sociétés

Ƨ Jean-Hubert Louis, un de mes admirateurs à Télérama

ᴟ Belkaroth, quelqu'un trop bête pour m'avoir déjà lu.


Ə Je vois les armées s'avancer au loin. Zulgor a préparé ma pierre qui remplace les êtres humains par d'autres semblables à moi. Il a fallu de longues décennies avant de développer la Sinkgé, cette mystérieuse technologie qui nous permet de nous connecter désormais aux consciences d'autrui et de les faire ainsi s'intégrer au système. Grâce à elle, nous allons faire de grands bonds dans le progrès ; qu'importe si nous suçons cette planète jusqu'au sang ! Nous aurons les poches pleines d'argent, et les yeux braqués sur les étoiles que nous irons coloniser. Et qu'importe aussi la mort de plusieurs milliards d'êtres humains ; ne sont-ils pas quelqu'un d'autre que moi ?

Ʋ Héhé, cet imbécile ne se doute pas que grâce à cette pierre magique je le remplacerais. Que me sert cet imbécile à présent, après tout ? Il ne me sert que comme marionnette, tout comme le reste de l'État, ce corps cornu des mégacorpos, cette minable minarchie minimisant les minorités. J'ai déjà réussi à forcer les manifestants luxuryens à s'enfermer chez eux, sous prétexte d'une ridicule petite peste noire ! Je suis le Dieu qu'il faudrait tuer, l'idole qu'il faudrait lapider, mais la société aliénante et consumériste que je m'apprête à construire sera bien trop dernierhommesque pour ça !

Ɔ Bordouille de pipe à foin ! Ça, c'est du puantard de bataillasse ! Les buteurs préparent le schmilblick, et ils vont pas rester broucouilles ! Mais les gars et moi on va schlaguer ces brindezingues, jusqu'à ce qu'on dégueule nos bronches tellement ils se seront caqués dessus ! Et vas-y que ça démaraille, zlaaash ! Et vois-tu que ça décanille, vrlaaah ! Leur aile gauche explosille mais nos avants partent en tartiflette. Qu'est-ce que j'aimerais me prendre une dernière pinardaille !

Þ Ils arrivent toujours avant les émeutes. Je suis des yeux les derniers volutes de xlorts qui s'effilochent, ces étranges déformations spatio-temporelles que j'essaye de comprendre en vain. Qu'essayent-elles de me dire ? Pourquoi affichent-elles toujours devant mes yeux "LE SYSTÈME ACTUEL EST UNE MERDE, ON VA TOUS CREVER" ? Se pourrait-il que ces lettres énigmatiques cachent une signification particulière ? Ou dois-je tout simplement oublier ces mystères pour me résoudre tout simplement à accepter tel qu'il est le grand chaos de la vie ?

Ɣ Tu contemples les xlorts, petit Filik, au lieu de te battre comme les autres. Et moi, je te contemple, gisant depuis ma civière, m'apprêtant à abandonner mon corps au Grand Tout. Au loin j'entends Sogrizt ton supérieur qui t'appelle :

« Fïlïk ! Je såis øü tü t'khåshe ! Vïens ïcï ke j'the büthe, ånkhülë ! »

J'aimerais tellement pouvoir t'expliquer que les xlorts sont des émanations de la dixième sous-personnalité de l'Epsilon cosmique, qui entre l'Alpha que constitue la naissance et l'Oméga la destruction est un des concepts sous-tendant notre réalité qui s'affaire à sa maintenance, que l'espace chakratique risque d'être déchiré par la transcendance non-tectonique et que l'ultime axiome symplectique du métacosmos transfuge reste encore à démontrer. Mais je suis sûr que tu comprendras, un jour...

Je sauve Filik de justesse d'une mort certaine. Mon épée transperce deux orcs en même temps, tandis que mon pied gauche valse en direction de l'entrejambe d'un elfe noir. Progresser, toujours progresser. Progresser dans cette marée de sang, progresser dans cette tempête de bras coupés, progresser malgré le cyclone que forment les milliers de derniers souffles qui déferlent sur moi. Progresser.

ʕ Youplaboum et dirladada ! Quelle épique épineuse épopée ! Je sens le sang sifflant des soldats soufflés, les lames qui s'entrechoquent pour vous couper la chique, toute la vermine qui verdit devant nos vertus ! Cessons de ressasser ce système qui nous étiquète en niquant l'éthique à Nicomaque ! Notre triomphe les trifouille, car nous trierons tous ces trouillards !

Ɛ Le combat fait rage de tous les côtés. Je ne sais quoi choisir, entre éventrer l'orque qui se jette sur moi ou réfléchir à quel système sociétal instaurer après toutes ces trucidations. Mais j'aperçois Chlamydiana...

Ƨ Purée, qu'est-ce que je fous ici, moi ?! Je croyais me rendre au slam de l'excellent auteur Alain Damso... À force de fréquenter l'avant-garde, on se retrouve dans des coins pas possibles !

Je vois Chlamydiana se ruer sur Syphilis. Elle a l'air furieuse et prête à en découdre. Dans quelques secondes, j'ai peur que tout soit fini. C'est la fin...

Ʌ Je me rue sur Syphilis. Je suis furieuse et prête à en découdre. Dans quelques secondes, tout sera fini. C'est la fin !!!

Ʒ Une flèche jaillit au dernier instant. Chlamydiana s'écroule.

Le temps semble ralentir. Je vois mon ami se pencher sur le corps de celle qu'il a aimé. Il s'agenouille et la prend dans ses bras en hurlant son désespoir dans un cri trahissant sa grande intelligence poétique :

« CHLAMYDIA ! NOOOOON !!! »

Et je me rends à l'évidence : Tenebror a gagné.

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