La tartine tomba du côté du fromage frais. "Sarah, tu n'es vraiment pas douée".

Mère et fille faisaient comme si de rien n'était par rapport à la situation de la veille. Anaïs savait parfaitement que sa fille avait honte de cette situation, qu'elle s'organiserait mieux la prochaine fois pour cacher qu'elle invitait des copains en son absence.

"Charles est déjà parti?"

"Oui, il m'a dit qu'il avait un rendez-vous avec Saint John's Corps., tu sais la société de vins alsaciens dont il nous a parlé l'autre soir".

"Ah oui, on va pouvoir se mettre bien pendant des semainess'il boucle ce contrat".

Anaïs mis un chemisier, un tailleur et se regarda dans la glace. Elle se dit qu'avec ces petitsyeux bleus, ce nez grec, cette bouche pleine, ces tâches de rousseur et ses boucles châtain, elle pourrait faire sensation aujourd'hui au travail, et ce soir, dans le lit avec Charles. Hier n'avait pas été le moment propice, mais ce soir... Elle a hâte de pouvoir lui montrer qu'elle n'est pas qu'une étoile de mer et qu'elle aussi, elle prend les devants. Charles lui avait récemment confié qu'il la trouvait trop passive. Elle accepte de bon coeur ses reproches et veut s'améliorer, lui en ayant tant fait par le passé, ce n'était qu'un juste retour des choses.

Les journées à l'espace de coworking sont réjouissantes mais longues. Spécialement lorsque certains locataires prennent Anaïs et Fatima pour de simples employées d'accueil. Fatima, une fois, a fait face à un client tellement désagréable et déplacé qu'elles ont du batailler toutes deux pour rompre son contrat. Fatima en a été énormément reconnaissante à Anaïs qui l'avait beaucoup soutenue. Elle s'était aussi appuyée sur ses propres études de droit pour savoir comment faire cesser cette situation dans la moins contentieuse des issues. Anaïs avait entamé, avec Fatima, une amitié récente mais forte, lui montrant combien l'amitié était plus importante que l'amour entre elle et ses conjoints, passés ou présents. Elle se demandait parfois si la loyauté qu'elle s'adonnait à conserver vis-à-vie de l'avocate était réciproque.

"Alors, on a quoi aujourd'hui?" Anaïs etait arrivée à dix heures, plus tard que Fatima qui est toujours là aux aurores pour accueillir les entrepreneurs les plus matinaux, soit vers sept heures trente.

"C'est plutôt calme. Ah ! Si. Monsieur Zamri souhaite avoir une salle pour un rendez-vous avec devine quelle entreprise. Je te le donne en mille."

"Je ne sais pas. Michel & Augustin?"

"Non, eux, on ne les a jamais vus et on ne les verra jamais. Saint John's Corp."

Anaïs retint son souffle. Monsieur Zamri - un client qui venait une semaine sur deux - avait rendez-vous avec la même entreprise que Charles devait voir. A la même heure.