Rue du Docteur Bouchut, seize heures. Anaïs sort de la Part Dieu pour se rendre à un entretient pour un partenariat avec le coworworking. Après quelques semaines, elle parvient désormais, parfois, à ne plus penser à Charles et à sa trahison. Les déboires de sa fille, le soutien de Fatima l'ont aidée dans sa reconstruction. Le fait que Charles l'ait trompée avec un homme adoucit un peu la déchirure, se dit-elle souvent. C'est en partie ce qui l'aide à oublier.

Elle se pose dans un café au style New-yorkais, au croisement de la grande avenue longeant la gare principale de la ville. Les clients sont agréablement assis à l'extérieur en cette chaleur de juin, elle sort son ordinateur et prépare ses arguments pour ce partenariat important, qu'elle prépare depuis à peu près la découverte de la tromperie de Charles, comme pour s'enfermer dans un nouveau projet purement rationnel et éloigné de toute émotion relationnelle.

Elle travaille depuis déjà une heure lorsqu'elle relève la tête, pleine de douleurs au cou, et aperçoit un heune homme, la trentaine, assis avec une cigarette à la bouche, qui l'observe de l'autre côté de la terrasse.

Tout de suite, timide, il détourne le regard.

Il est vrai qu'elle s'est affublée d'une jupe relativement courte et d'un haut rouge moulant, presque sans faire exprès, car il ne lui restait que ça. Ca doit être ça, se dit-elle. Elle continue à travailler mais n'arrive pas à se concentrer. Elle sent le regard du trentenaire, cinq ans de moins qu'elle, se fixer sur le dos de son ordinateur.

"Devrais-je partir ? Il faut que je finisse ctte prez et ce mec veut visiblement ma peau, avec le col remonté de son polo lacoste et ses longs bras".

Elle déguerpit après avoir payé et sens de tout son être le regard dans son dos. Elle ne sait pas si elle est prête pour cela, c'est la première fois que cela lui arrive depuis Charles. Comme si à Paris, personne ne la regardait.