# 1337 Extrait de dossier - Jour 27

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Jour 27



     C'est aujourd'hui, normalement. Aujourd'hui qu'ils vont enregistrer ma réponse. Je les attends avec impatience. J'espère que c'est aujourd'hui.

Je n'ai toujours pas réussi à dormir. Je me suis allongé pendant un moment, la tablette à l'autre bout de la pièce. Je suis trop tenté, sinon. Mais si je parle trop, je pense trop, et impossible de trouver le sommeil. Cela dit, je n'ai pas non plus réussi à dormir. Même avec la tablette loin de moi. Même sans parler. Quoi que je fasse, je pense. Combien de temps s'est écoulé entre ce que j'ai appelé « Jour 26 » et aujourd'hui ?

Les lignes de la veille sont enfin restées dans la mémoire de ce foutu scripteur. Qu'est-ce que ça veut dire ? Qu'on est encore le même jour, ou que dans tous les cas elles ne s'effaceront pas pour que je garde leurs immondes conditions sous les yeux ? Ce sera encore le robot qui va jouer les intermédiaires ? Ou est-ce qu'ils daigneront enfin me laisser parler avec un humain ? De toute façon, ce seront des humains qui vont me charcuter. Enfin j'espère. Non, ils ne laisseront jamais des machines se charger d'une chose pareille. On ne fait pas suffisamment confiance aux robots pour ça.

     D'ailleurs, c'est bien pour ça que ce sont eux qui s'occupent de nous, les criminels. Parce que ce sont des sous-merdes. On leur confie les tâches ingrates. Les esclaves des temps modernes. Les esclaves de l'Humanité. Ils ramassent nos mégots et le moindre de nos déchets, font reluire nos chaussures, réparent les infrastructures en mauvais état dans les pires conditions. Ils nous font à bouffer, nous servent, nettoient nos chiures, les chambres, le salon, la capsule toute entière. Les pervers en manque de baise n'ont qu'à se rendre dans les cyber-bordels pour assouvir leurs besoins. Les robots font les putes. Bien qu'il existe encore des putes en chair et en os. Mais c'est marrant comme elles ont moins de succès. Incroyable.

     Et je ne compte pas le nombre de combats de robots qui ont été organisés. Le sport le plus populaire qui soit. Mais ça, c'est vraiment sympa à voir, quand même. Les regarder se foutre sur la gueule et vomir leurs circuits et leurs foutues puces électroniques. Ils s'en foutent, ils ne ressentent rien de toute façon. Même si certains sont programmés pour gicler de l'hémoglobine et imiter des cris de douleur. Mais ça, c'est pour le spectacle. Parce qu'au final, ce ne sont que des machines. Des saloperies de machines.

     Alors c'est ça. Les esclaves sont chargés de s'occuper des parias. Et si l'un des deux camps en vient à détruire l'autre, Homo sapiens le tout puissant n'a qu'à tous nous enterrer vivants. Sceller la surface, définitivement. Je ne sais pas comment ils vont s'y prendre pour faire ça. Mais ils y ont surement déjà réfléchi. C'est sûr. Ils ne prennent pas de risque. On n'en serait pas là, si l'humanité prenait des risques. Sa principale force, c'est de stagner. La stabilité. Et la conquête. Un cancer qui se répand sur la Terre. Qui l'envahit et la ronge.

     Mes pauvres plantes... Ça fait presque trois ans que je suis ici. J'espère que quelqu'un s'en est occupé. J'espère qu'elles ne sont pas mortes. Anna, j’espère que tu as bien pris soin de mes plantes… Qui sinon toi ? Tu es où, Anna ?

Peut-être que quelqu'un a repris la boutique. Après tout, c'est rare les boutiques de plantes. Mais peut-être que c'est rare parce que plus personne n'en veut. Pourtant, il y avait bien des gens pour venir m'en acheter. Mais si peu. Mes plantes... Ma douce Anna... Vous me manquez tant.

     Eh le robot ! C'est aujourd'hui que tu devais enregistrer ma réponse ! Qu'est-ce que tu fous ? Ça fait deux jours, je l'ai écrit sur le scripteur ! Tu es venu le 25 et aujourd'hui on est le 27 ! Tu ne sais même pas compter les jours !? Con de robot !

     Bon sang... Dors Pablo. Peut-être que ça ne fait pas vraiment deux jours. Peut-être que c'est toi qui t'es trompé. Non, je ne me suis pas trompé. C'est encore une de leurs astuces pour me torturer. Je ne me laisserai pas torturer comme ça. Je vais dormir. Dormir en attendant qu'on me sorte d'ici.

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