3 - Profiter du spectacle

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« Dépêche-toi de t’asseoir, Clément ! Tu vas rater mon premier fantasme. »

Il n’y a pas à dire, elle sait me parler. J’obtempère et fais un vif signe de tête à l’amie d’Andréa. Elle réplique avec le sien, reproduit à l’identique, ce qui ne manque pas de me faire rire.

« Clément, voici Automne. Automne, je te présente…

-Clément, j’imagine ? Je suis trop forte pour devenir les prénoms des autres. »

Elles font déjà preuve d’une si belle complicité ! Je peux jurer que je n’ai pas la même avec elle alors que, moi aussi, je l’ai embrassée.

Automne sort son téléphone de sa poche et enchaîne :

« Malheureusement, je ne vais pas pouvoir rester pour les présentations. Il va falloir qu’on repousse ça à une autre fois. »

Andréa se lève et ouvre grand les bras. L’autre se dirige naturellement vers elle et la serre fort dans les siens.

Leur étreinte dure quelques temps. Je me retourne vers la mer parsemée de bijoux qu’est la nuit noire. Les feuillages des arbres laissent passer un fragment du croissant de lune.

J’entends qu’elles se disent au revoir mais n’y prête pas attention. Je suis comme focalisé sur les bruits des criquets environnants, comme si la musique de la soirée ne parvenait pas à percer ma bulle de contemplation. J’aime bien cet endroit.

« Eh. Tu croyais que tu n’allais pas y avoir droit ? »

J’ai l’impression que ça m’était destiné.

J’ai dû rater quelque chose. Je me retourne et réalise qu’Automne est partie.

Andréa se tient face à moi, les bras toujours tendus devant elle.

J’ai voulu faire durer un jeu de séduction idiot où le gagnant serait celui qui se laisse aller en premier. J’ai vraiment voulu.

Mais, ce sentiment-là, ce bien-être que je ressens quand ses bras entourent mes épaules, quand les miens enlacent sa taille, il me laisse sans voix. Elle s’est blottie contre mon corps pour y trouver refuge et, en échange, me fait cadeau de toute la chaleur du sien. Je la serre un peu, peut-être par peur qu’elle ne comprenne pas que j’aime ça plus que tout.

J’ai posé les yeux sur elle, d’en haut. J’ai esquissé un sourire avant de serrer de plus belle pour la rapprocher de moi.

Mon nez s’abandonne à ses cheveux et j’inspire leur parfum. Je ne pensais pas qu’une odeur pouvait avoir une couleur. C’est vert, ou rose, je ne sais pas. Un orchestre de notes sensuelles et poivrées joue avec mes sens. Sans même m’en rendre compte, j’ai fermé les yeux. J’ai envie de continuer, de profiter du spectacle tant qu’il dure.

Elle relâche un peu ses bras et commence à bouger la tête. Je me dis mille choses à la fois : elle n’aime pas ça, elle ne veut pas d’une trop longue étreinte, elle trouve que je ne sens pas bon… alors je la laisse s’en aller par réflexe mais, d’un coup, elle me resserre un peu plus fort qu’avant et lève la tête vers moi.

« Qui t’a autorisé à mettre fin à ce câlin ? »

L’envie de répondre ne vient pas, je reprends son corps entre mes bras et pose mes lèvres sur son front.

Ses sourcils froncés m’ont amusé. Je ne pensais pas voir cette femme bouder comme une enfant aujourd’hui.

Et, alors que je pensais être au bout de mes surprises, elle a chuchoté :

« Tu sens tellement bon…

-Parle pour toi… Tes cheveux m’enivrent, je n’arrive pas à retirer mon nez.

-Je sais comment t’aider.

-Ah oui ? J’écoute volontiers. »

Elle marque un temps. Je sens ses mains se promener le long de mes épaules, même à travers ma veste. Elle a cette manière d’alterner entre la légère pression de ses doigts et la délicatesse de ses ongles.

« Clem, embrasse-moi. »

Alors qu’elle riait et m’expliquait son jeu de sonorités entre Clément et ‘Clem, embrasse-moi’, j’ai pris garde de séparer la distance entre nos lèvres. Cette fille embrasse comme si elle était née pour ça.

Sans vraiment que je puisse me contrôler, mes mains s’égarent et descendent en-dessous de sa taille. Je me suis reculé un instant, et, alors qu’elle me regardait avec une curiosité maladive, j’ai demandé :

« Eh, tu crois que je pourrais glisser ma main plus bas ?

-Quelle question bête. Je n’attendais que ça. »

Elle m’embrasse de nouveau tout en guidant ma main vers ses fesses.

Je prends un malin plaisir à les saisir avec force. J’entends à ses faibles gémissements qu’elle aime sentir mes doigts agripper sa chair.

Mon désir pour elle est brûlant, et elle le sait : sa cuisse s’amuse à frotter mon entrejambe pendant nos baisers. Mon sexe tient à rencontrer ces doigts qui dansent le long de ma joue, cette langue qui épouse la mienne pendant que nos respirations s’entrecoupent. Nos corps se réclament, n’attendent que de s’offrir l’un à l’autre.

« J’ai très envie de toi, Andréa.

-Je ne sais pas comment tu fais pour garder cette veste. J’ai si chaud au bas du ventre…

-Où ça… là ? »

Je me recule et pose ma main sur son ventre. Je la descends un peu au fur et à mesure qu’elle ajoute des ‘plus bas, un peu plus bas…’ et je m’arrête à la culotte que je devine sous sa robe. Elle est chaude, tellement chaude… On se regarde une dernière fois dans les yeux, elle se mord les lèvres, et ajoute qu’elle habite à deux pas.

Elle me guide vers la porte de sortie en me tirant par le poignet. J’ai comme un écho du début de soirée. Je m’ennuyais, cherchais à tout prix à faire une rencontre qui changerait ma vie. Et c’est en me tirant ainsi qu’elle m’avait amené à elle.

On salue chacun nos amis en coup de vent, puis on disparaît aussitôt.

Sur la route, elle m’explique qu’elle étudie en école d’art. Elle est en troisième année et est venue de Lille exprès. Elle a fait un sacré bout de chemin pour arriver ici, tant géographiquement qu’émotionnellement, puisqu’elle est très attachée à sa famille maternelle lilloise. Alors qu’on arrive au pas de sa porte, elle se retourne et me souhaite la bienvenue avec un sourire radieux.

Bordel, sacrée soirée.

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