On marche... on marche...

2 minutes de lecture

Le pion tourne une page, et reprend : "...Immense plage ensoleillée, où le bain ne manque pas de piquant, où les pieds et même les fesses se transforment en pelotes d'épingles, because les oursins. Nonchalamment, les piétons harassés nous rejoignent. De retour au camp, le soir, les gardes civils se montrent déjà moins civils. Heureusement que l'un des deux pères porte soutane." Et page suivante : "Lundi 14 - Des courageux vont se baigner au petit port de Capdepera où des noyades ont eu lieu la veille... Veillée ratée : ce n'est pas étonnant: les piétons harassés sont déjà couchés." Plus loin encore : "Mercredi 16 - Les piétons vont combiner le tortillard et la marche à pied, par quels chemins, grands dieux, si mauvais que la Comtesse s'y cassera la figure." Et encore : "Jeudi 17 - La route est épouvantable. Les piétons arrivent épuisés."

L'un d'eux écrit :"Je marche, tu marches, il marche, nous marchons... Le sac de plomb nous meurtrit les épaules et le bruit de nos pas nous endort en marchant. Mes jambes avancent sans que je m'en rende compte. Comme celles d'un automate. Je ne regarde pas trop loin devant moi. Je songe au pas que je vais faire. Un pas après l'autre. Encore un. Encore un. Un point sensible commence à se manifester sous mon gros orteil gauche. Un pli de chaussette. Si je m'arrête pour me déchausser, il faudra rejoindre. Tant pis, marchons. Ca commence à être casse-pieds. Ce serait idiot d'avoir une ampoule. Tant pis, je m'arrête pour me déchausser. Criquet et TPLB s'arrêtent aussi. Braves types. C'était bien la chaussette qui faisait un pli. Les autres ont pris au moins deux cents mètres d'avance. On allonge le pas en gardant la même cadence...

- Ca y est, ça recommence, je suis bon pour une ampoule.

- C'est fameux quand même de marcher. Les copains sont là, on parle quand on en a envie, et on chante. On est comme sur une autre planète. Le collège est à des siècles derrière nous, et les jours qui nous restent sont une éternité... Vivre des années comme ça, sans autre préoccupation que le prochain pas à faire. Sans autre souci que le prochain puits d'eau fraîche à découvrir... Je pense à la phrase du Petit Prince : "Moi, si j'avais soif et des minutes à dépenser, je marcherais tout doucement vers une fontaine..."

- Les cyclistes dorment déjà.

- Les veinards...

- Tu es sûr ? Je m'aime mieux ici à marcher. Tu crois qu'ils profitent autant du paysage ?

- Ils peuvent même pas causer en roulant.

Depuis quelques kilomètres, l'ampoule se fait. Je marche sur le côté du pied gauche, ce qui me fait mal aux muscles du mollet.

- Tant pis. Je l'écrase.

- Quoi ?

- L'ampoule. Je marche dessus. Ca la dressera.

Plus tard, sur le bord de la route, dans un talus on s'étendra. Comme on dort bien quand on est fatigué. On dort bien, mais pas longtemps. Cinq heures du matin, on repart, les jambes raides, les pieds lourds. Il faut au moins quatre kilomètres pour se mettre en train, pour que les muscles s'assouplissent, pour que les pieds s'échauffent.

On marche, on marche........."

Annotations

Vous aimez lire Oncle Dan ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0