Lundi 8 mars 2010

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Camille,

Aujourd'hui, j'ai pensé à toi. Ne te fais pas de bile, je pense à toi tous les jours. En regardant le jour se lever je me suis rappelé qu'il y avait quantité de choses que tu n'avais pas encore eu le temps de faire. Que tu n'auras plus jamais le temps de faire. Que le jour pour toi ne se lèvera plus.

On meurt durant une vie, on meurt au milieu d'une phrase, au milieu d'un instant, au milieu d'une action. Je me suis rappelé tout ça et je me suis dit que je n'avais pas le droit, au nom de toi, de passer à côté de certaines choses. Je me suis dit que je ne pouvais plus attendre, pas en sachant cela, pas en sachant que le temps nous est compté. La vie est bien trop courte !

Je le lui ai dit.

J'ai pris mon courage (que j'ai soudain trouvé) à deux mains et lui ai tout avoué. Ce fut moins difficile que ça aurait pu l'être étant donné qu'il est mon ami, même si d'un autre côté, j'avais la peur de perdre son amitié. Je me souviens quand Arnaud me plaisait, on ne se parlait pas (jamais) et je n’arrivais pas à trouver de sujet de conversation. Ça avait fini par tomber à l'eau. Tout seul. Quand on ne fait pas attention à quelque chose, elle finit par disparaître. Une plante se fane si on n’en prend pas soin. J'ai pensé à cela et ça m'a fait comprendre que la même chose ne devait pas se produire avec Louis.

J’étais en train de traverser la cour comme tous les jours. J'ai eu une sorte de flash. Dans un demi-tour qui aurait pu me faire déraper sur le verglas, j'ai marché d'un pas décidé vers Louis. Il m'a vu venir et m'a souri. J'ai demandé si on pouvait se parler en tête-à-tête. Alors on s'est écartés de son groupe. On a marché quelques pas côté à côté, en silence. « Tu voulais me dire quelque chose en particulier ? » s'est-il inquiété devant mon silence. Je me suis arrêtée, l'incitant à faire de même et me suis tournée pour lui faire face. Là, je lui ai dit ce que j'avais sur le cœur, complètement, sans détour, sans omission. J'ai dû fermer les yeux pour commencer, pour oublier le monde autour de moi. Pour ne pas avoir peur de me lancer et de finalement renoncer.

« Louis est un ami, un ami, seulement un ami. Voilà ce que je me répète depuis des jours, à moi, aux autres, à elle. Pour me convaincre que ce n'est rien, que je ne ressens rien, que tu n'es qu'un ami. Tu es la meilleure chose qui me soit arrivé depuis l'accident. C'est complètement ridicule, débile et je sais, ça fait tellement cliché ! Mais, c'est ce que je crois ressentir. Non, c'est ce que je ressens. Tu es mon ami, et tu m'aides beaucoup. C'est presque dommage qu'on se soit rencontré maintenant, alors que tout va si mal. Je ne sais même pas si un jour, tu me connaîtras telle que j'étais avant, quand elle était toujours là. J'aurais tant voulu que tu puisses la connaître. J'ai tellement peur de l'oublier, si tu savais comme j'ai peur. Je n'arrive pas à me dire que je vais continuer à grandir sans elle. Et qu'elle, elle restera éternellement une adolescente. Et toi, toi, tu dois comprendre tout ça, pour avoir perdu comme moi quelqu'un qui t'était cher. Et Louis, je voudrais que tu puisses continuer à me comprendre, mais je ne veux pas que ça. Tu es mon ami, Louis. Je veux plus que ça. S'il te plaît, Louis, dis-moi que toi et moi, on peut être plus que ça… Dis-moi que tout ça, ce n'est pas que dans ma tête… »

Il m'a scruté de ses yeux bleus pendant un long moment, j'ai cru que j'allais mourir sur place.

« Je ne sais pas quoi dire. Ou au contraire, je pourrais te dire des tas de choses. Mais j'aurais peur de briser ce moment, Joana. Je connais Camille, tu m'as appris à la connaître. À travers tes yeux. Tu ne seras peut-être plus jamais pareille, comme il n'y aura jamais plus un moment similaire à celui que nous vivons en ce moment. »

J'ai été déçue à cet instant, je me suis dit, ça y est, il n’y aura rien d'autre. Puis, il s'est penché vers moi et m'a murmuré à l'oreille : « On peut être plus que ça, je veux plus que ça. »

Il m'a pris la main et l'a serrée doucement.

Je ne regrette pas de m'être jetée à l'eau, parfois ça vaut le coup de se mouiller. Je suis contente parce qu'il m'aime bien, je suis contente parce que quand je pense à lui mon cœur cogne plus violemment. Se sentir appréciée, aimée, respectée par un garçon, ça fait du bien. C'est une belle sensation. L'amour est un beau sentiment...

Bises, Joana

P.S : Je ne t'oublie pas.

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