Chapitre 3 - Alpha ! Vous me recevez ? - Partie 1

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Un long tube de forme ovoïde se déplaçait silencieusement. Le fond sombre de l’espace contrastait avec le reflet rougeâtre que Parelas-d donnait au vaisseau mère. Le Markind 55 Cancri était le fruit de plusieurs générations d’esprits humains tous plus avisés les uns que les autres. Toute la technologie humaine était concentrée dans chacun de ses rouages, boulons, écoutilles ou tuyaux. Rien ne semblait troubler le calme qui l’entourait. Chaque lignée humaine modifiait peu à peu le Markind. Celui-ci n’était déjà plus le même qu’à son origine. Il avait bénéficié de nombreuses avancées technologiques acquises sur plusieurs planètes colonisées comme Belgi, Ition-g et Baure.

Phel avait participé indirectement à l’évolution du Markind par l’étude d’une roche baurienne aux capacités supraconductrices surprenantes. Une majeure partie des systèmes électroniques du Markind 55 Cancri avait pu être optimisée. Leur taille et leur dégagement de chaleur avaient été réduits comme peau de chagrin. Cela avait permis d’agrandir l’espace de vie du vaisseau de près d’un sixième, de quoi emmener plus de matériel. Au grand bonheur de Vidar, ses « petits » étaient devenus plus agiles et moins gourmands. Mais cette roche restait rare et de nombreuses prospections sur la surface de Baure avaient été nécessaires pour dénicher cette ressource révolutionnaire. Comite, son nom, faisait bouillir le sang des ingénieurs et techniciens en électronique. Elle permettait de repenser les systèmes et de les rendre plus performants. Chacun rivalisait d’idées pour innover toujours plus. Le Markind 55 Cancri s’affichait donc comme le fer de lance de la technologie humaine. Prêt à traverser des distances immenses vers une destination lointaine. Pourtant, malgré tout cette débauche de qualités techniques, sur Parelas-d, les colons restaient muets, introuvables.

« Nil, j’attends de vous un rapport à intervalles régulier. Nous tendrons tous les systèmes possibles dans votre direction, dit Milo Vard.

— Entendu, Milo, nous sommes prêts. Vous pouvez enclencher la séquence de débarquement », répondit Nil.

Milo Vard fit un signe rapide aux membres d’équipage responsables de la navette. Dans la salle aux pupitres, la nuée s’activait autour de lui. La décurie de sauvetage était installée dans un espace beaucoup plus sommaire que dans la graine. Elles étaient conçues pour faire les allers-retours entre les camps de base installées sur les planètes colonisées et le Markind. Cependant, une installation était nécessaire sur la surface pour permettre son lancement. Ce voyage serait donc à sens unique dans un premier temps.

La séquence d’entrée dans l’atmosphère parélienne augmenta la tension au sein de l’équipe de sauvetage. Le ressenti était beaucoup plus désagréable que dans la graine. Mais ce ne fut pas long. Après avoir fendu les cieux, l’engin se posa en douceur exactement à l’emplacement prévu par les ingénieurs et techniciens du Markind. Dès la confirmation de leur arrivée, les combinaisons se revêtirent de leurs parures de couleurs. Nil se leva et fit une rapide évaluation de sa décurie.

« Je vous confirme Milo que tout est ok de notre côté », avertit Nil.

Puis, il se dirigea vers l’écoutille principale qu’il déverrouilla. Un à un, les membres de l’équipe de sauvetage posaient les pieds sur Parelas-d tout en ajustant leur écharpe de respiration. Nil se baissa pour toucher de ses doigts le sable rouge parélien. Il en prit une poignée qu’il fit aller d’une paume à l’autre. Il fut surpris par la teinte du sol. Moins rouge que lors de ses observations à bord du Markind. Les machines ont tendance à tromper les sens, pensa-t-il. Il se tourna vers son équipe.

« Déchargeons le matériel et rejoignons le camp Alpha », annonça-t-il.

La concentration régnait au sein du centre décisionnel du Markind 55 Cancri. Les regards étaient tournés vers les pupitres de contrôle qui remontaient en temps réel la progression de la décurie de sauvetage au sol. Fatia surveillait tout particulièrement une carte tactique de la zone entourant le camp de base Alpha. Elle était nerveuse et avait déjà renvoyé sèchement deux techniciens pour des demandes de validation. Elle surveillait tout particulièrement la zone partant vers l’Est. Milo Vard vint à sa rencontre.

« Le géologue Phel et l’ingénieur robotique Trabo étaient partis sur un site situé dans cette zone. Vous avez un début de piste les concernant ? Peut-être ont-ils déclenché quelque chose ? », demanda Milo Vard.

Fatia se rejeta en arrière sur son siège. Elle passait les mains sur ses yeux en pressant légèrement ses orbites. Elle avait ce tic de comportement depuis des années.

« Vous allez bien Fatia ?

— Oui, c’est juste que je ne cesse de scruter cette vue. Quelque chose m’intrigue.

— Quelle chose au juste ?

— Regardez ces traces rectilignes sur plus de cent mètres. Elles parcourent cette zone depuis l’ensemble du camp Alpha en passant à proximité du transporteur du géologue et vont se perdre vers la forêt d’algues noires au loin, lui expliqua Fatia.

Milo Vard se pencha pour observer de plus près.

— En effet, mais nous ne les avions pas remarquées sur les clichés des sondes volantes, rétorqua Milo Vard.

— Vous avez raison. Ce sont des lignes magnétiques et non dessinées sur le sol. Seul le filtre tactique permet de voir de telles marques. De plus, elles restent légères mais bien présentes.

— C’est formidable ! Nous tenons enfin une piste. Je commençais à douter de ma santé mentale. Comment avez-vous eu cette idée, Fatia ? La voix de Milo Vard se teintait du retour de l’espoir.

— Tout simplement en partant du constat de l’état électrique du camp Alpha, élément validé par le transporteur et la balise du site 4HE. Leurs sources d’énergie ont été comme vampirisées. J’ai tout de suite pensé à une attaque EM, argumenta Fatia.

— Une arme EM ? Comme celles utilisées anciennement sur Terre pour faire retourner à l’Âge de pierre des nations entières ?, interrogea Milo.

— Oui, celles-là mêmes. Cependant, elles laissaient une marque différente, comme un souffle formant des cercles. Cette configuration est inédite. Je ne trouve rien sur l’Humania concernant des armes électromagnétiques ayant cet effet sur de si grandes distances, se résigna Fatia en croisant les bras et se rejetant sur son siège.

— Vous avez fait du très bon boulot, Fatia. Allons prévenir Nil et sa décurie de cette découverte », répliqua Milo Vard dont les traits s’étaient légèrement détendus.

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