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Lundi 8 octobre 2018, 17h15


Sylvie ouvrait, en cette fin de journée, la boîte au lettre : trois pubs qu'elle jeta directement dans la poubelle de l'allée de l'immeuble, deux lettres. Et deux colis de Netclick, la société mastodonte de la vente par internet. Son attaché-caisse à la main droite, le courrier à la gauche, elle prit l'ascenseur.

Sylvie Delcourt était la conseillère d'état en charge du département de l'instruction publique, communément appelé le DIP. Elle était la plus jeune des 7 sages, et était pleine d'enthousiasme dans sa fonction.

Son mari, Jean Delcourt, assis à son bureau, une chambre entièrement dévolue à son travail, corrigeait des dissertations de 3ème année. Thème : " Le bonheur est dans les livres". Il était professeur de français au collège de Saussure, et admirait sa femme par dessus tout. Le couple, marié depuis six ans, avait une petite fille, Sylvia, âgée de quatre ans.

Il entendit la porte d'entrée claquer. Voilà une bonne excuse pour faire une pause. Boire un café avec sa femme et avoir une discussion intéressante. Passionnante au vu des récents événements. L'assassinat du président Pendal en était l'Everest.

Jean Delcourt n'avait aucune crainte pour sa femme. Et trouvait ridicule le garde du corps qui accompagnait Sylvie depuis jeudi dernier. Jusque devant la porte de l'allée de l'immeuble où ils habitaient. Sylvie Delcourt ne serait jamais attaqué physiquement par un terroriste ! Cela n'avait pas de sens. La principale intéressée, tout de même bien remuée par les événements derniers, avait fini par absorber le positivisme de son mari. Et faisait également mine de ne pas comprendre pourquoi un garde du corps la suivait en permanence.

- Hello ! fit-elle en posant les paquets de Netclick sur la table à manger.

Ils s'embrassèrent. Il passa sa main dans la chevelure brune de sa femme, l'embrassa encore dans le cou. Caressa son dos. Puis il partit à la cuisine, faire tourner la machine Nespresso.

- Un fort pour moi, j'ai du boulot ce soir, lui dit Sylvie.
Quelque minutes plus tard, installés au salon, avec vue sur les toits de Genève (les Delcourts habitaient au centre ville, dans un magnifique appartement en attique), Jean questionna :

- Alors, l'affaire "E" !

Sa femme posa sa tasse sur la table de salon, et se lança :

- Hors de question de céder au chantage ! Jean Walder ne sera pas le nouveau président du conseil d'état, dit-elle, presque théâtrale.

Et continua :

- "E" est fou ou folle de penser un seul instant que l'on va obéir à ses desiderata !

Son mari approuva :

- Non mais c'est clair, Sylvie. Ce serait ouvrir la porte à tout les abus...

- ...trois morts en une semaine pour défendre sa cause, priorité au genevois...complètement taré...

- Il faudrait faire passer un interrogatoire à tout les membres de GenèveD'Abord .

- Non mais, t'es fou, Jean. T'imagine le boulot ! Plus de 2000 membres. Et si ça ne donne rien, ce serait une formidable publicité pour Jean Walder et son parti !

- Ben moi, c'est tout de même la première piste qui me viendrait à l'esprit : quelqu'un du GdA...

- Hum...bon, Jean Walder, pour l'instant, il n'ose pas. Il ne peut pas décemment, directement, se gausser de la mort de trois personnes. Mais je suis sûre qu'il éprouve une certaine satisfaction. Et ça me dégoûte ! Quelqu'un approuve sa politique. D'une façon extrême. Et si on en arrive là, c'est à cause du laxisme du gouvernement en place années après années ! C'est ce qu'il pense, et que beaucoup pensent.

Sylvie s'interrompit, bu une gorgée de son café, regardait son mari, qui lui souriait.

- Jean, t'as de beaux yeux, tu sais...oui, je sais ça fait cliché, ça fait film, mais c'est vrai !

Puis elle éclata de rire.

Son mari avait effectivement de très beaux yeux. Grand, bleu, vert et gris. Tout le monde le lui disait. C'était ces yeux qui avaient fait craquer Sylvie la première fois qu'elle l'avait vu. Qui s'étaient posés sur elle, très jolie brune, pas très grande, assez menue mais très dynamique, souriante, charmante, drôle.

Et ils s'étaient mariés un an après. Les Delcourts, c'était le couple parfait. Tout leur réussissait.

Entre autre une petite Sylvia de quatre ans que sa grand-mère ramenait à l'instant du cours de danse. Bientôt une petite soeur ou un petit frère ? Sylvia et Jean faisaient l'amour sans contraceptif. Mais rien ne venait. C'était pas le moment se disaient-ils sans s'alarmer.

La carrière de Sylvie, à peine trente-cinq ans, et déjà conseillère d'état au département de l'instruction publique. Lui, quarante ans, prof de français au collège. Sportif, il joggait tout les matins au bord du lac avant de se rendre à l'école. Entretenant un physique avantageux, nous avons déjà parlé des yeux, mais le reste était pas mal non plus. Bref, les seuls ombres au-dessus de la tête des Delcourts étaient apparues la semaine dernière : les trois meurtres revendiqués par "E" ! Le monde dans lequel ils vivaient s'assombrissait quelque peu.

- Maman , maman !

Sylvia sauta dans les bras de sa mère adorée, un paquet de bonbons dans la main.

- Maman, tu lui a encore acheté quelque chose, tu vas la pourrir, cette fille, fit Sylvie tout en riant.

Elle embrassa Sylvia, la serra fort dans ses bras.

Sylvia était, pour Sylvie, oui il est extrêmement conventionnel de le dire, LA plus belle chose qui lui soit arrivée depuis qu'elle arpentait la planète terre. Conventionnel, mais d'une vérité inébranlable !

Sa fille avait rejoint sa chambre avec sa grand-mère, et Sylvie pencha sa tête du côté de Jean et offrit ses lèvres aux siens.

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