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Dimanche 7 octobre 2018


Abdel se rendit chez Eloïse Ébeine dans l'après-midi de ce dimanche. C'était le nom qu'il avait choisi sur la liste des membres du GdA, suite à la demande de Hans. L'assassinat de Lucas Tardy à la douane de Certoux avait précipité les choses. Rien ne pouvait attendre, tançait l'inspecteur suisse-allemand. Il fallait faire vite. Remuer dans tous les placards de la république de Genève. Et Abdel crut être bien tombé en pénétrant dans le petit deux pièces de la jeune femme. Dans le quartier des Eaux-Vives, aux bord du lac.

Dans le salon, l'un des murs était recouvert d'articles de journaux découpés et punaisés à même la tapisserie. Elle avait également installé un grand tableau blanc où toutes sortes de commentaires se bousculaient. Presque illisible. Tout cela ressemblait au repère de "E" ! Une sorte d'électricité parcourait le corps d'Abdel ; de sa main droite il tâtait son arme attachée à sa ceinture, et que sa veste recouvrait. Comme pour se rassurer.

Mais. Car il y avait un mais.

Eloïse Ébeine était une jeune femme de vingt-et-un ans. Souriante. Détendue. Qui semblait tout-à-fait heureuse d'accueillir un policier chez elle.

- Vous voulez un café, un thé ? lui demanda-t-elle en réajustant ses lunettes aux verres assez épais. Elle devait souffrir de myopie sévère, se dit Abdel.

- Un café, volontiers.

Elle s'éclipsa dans la cuisine et mit en marche la machine à capsule.

- Plutôt fort ou doux, le café ? demanda-t-elle d'une voix plus forte.

Abdel parcourait le mur de l'affaire "E" de mademoiselle Ébeine. Des points d'interrogations, d'exclamations parsemaient les articles, des annotations que ne comprenait pas Abdel.

- Euh...fort !

Elle avait écrit en marge d'un article de la Tribune de Genève du jeudi 4, lendemain du meurtre de George Pendal : "Pourquoi associations actions extrêmes/partis extrêmes ?" .

Et mademoiselle Ébeine arriva avec deux cafés posés sur un plateau.

- Y a du sucre et de la crème, fit-elle en désignant un sucrier et une petite bouteille. Ils s’assirent dans les deux fauteuils qui prenaient une grande place dans le petit salon. De vieux gros fauteuils. Tout le mobilier était d'ailleurs anciens.

- Pourquoi tout ceci, mademoiselle Ébeine ? demanda Abdel sans détour en tendant son bras vers le mur qui ressemblait à celui du bureau du cinquième étage du commissariat, encore plus fourni même.

Elle sourit :

- Je suis membre de GdA parce que je suis étudiante en science politique à l'université de Genève. Uniquement. Pas du tout par convictions personnelles. Mais cela vous pourrez le garder pour vous, n'est-ce pas, inspecteur ?

Abdel s'étonna, et hocha un peu machinalement la tête. La jeune femme s'expliqua :

- Je trouvais l'idée intéressante de m’immiscer dans un parti politique pour observer de l'intérieur son fonctionnement. Rien de mieux comme complément, expérience réelle et pratique, à mes études.

- Donc "E", vous n'approuvez en rien ses actes ?

- Je ne me positionne pas. Je ne suis ni contre, ni pour. J'observe et j'essaie d'analyser. C'est très intéressant.

Abdel but une gorgée de café.

- Vous vous rendez compte. Je me suis inscrite au parti début septembre et "E" entre en scène quatre semaines plus tard. Quelle coïncidence !

- Pourquoi pensez-vous que je suis là à vous interroger ?

- Parce que "E" a revendiqué l'assassinat du président Pendal, de monsieur Bonnetière, du frontalier qui se rendait à son travail, du frontalier qui travaille à l'Hôtel-de-Ville, et qu'il fustige la politique du gouvernement concernant le travail des frontaliers, ce qui est un des chevaux de bataille du parti politique de Genève d'Abord ! Donc il est assez logique que vous soyez là, à m'interroger, puisque je suis « membre » de GdA. Mais bon, vous devez être un peu déçu. Je ne peux pas vous renseigner sur "E".

- En fait, quand j'ai vu la liste des membres, votre nom a retenu mon attention parce que vos initiales sont deux e...!

Elle sourit, laissa échapper un petit rire :

- Eh ben...l'habit ne fait pas le moine...

Abdel rit également.

- ...je souhaiterais que nous restions en contact, si vous le voulez bien ? fit-il.

- Mais volontiers monsieur... ?

- Chentali. Abdel Chentali...

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