Une nouvelle infirmière

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 Une nouvelle infirmière est arrivée. Ils lui ont de suite donné mon dossier, lui disant « c’est un cas compliqué, à vous de gérer ». Mais donner un dossier à une nouvelle aide-soignante ? Je la regardais, fatigué, mettre mon plateau repas au bord de mon lit, me parler, en vain, car j’avais même oublié comment parler. J'étais si fatigué...

 Cette infirmière, elle a changé quelque chose. Je ne sais quoi, peut-être me rappelait-elle quelqu’un, mais c’était un souvenir à présent trop lointain pour moi. C’était un 11 juin 1942, j’avais … 25 ans peut-être ? Ce jour-là, j’ai rencontré une drôle de dame, toute gentille, qui me faisait du regard. J’avais entendu qu’elle s’appelait Marie-Françoise. Mais je préférais l’appeler Marie. Elle s’était assise à ma table, l’air de rien, puis tout d’un coup m’avait demandé :

« Vous aimez votre métier ?

- Que.. Pardon ?

- Ah, vous étiez ailleurs. Je suis Marie-Françoise, et vous ?

- Edmond, madame.

- Edmond ? c’est joli. Bon, écoutez, je suis veuve depuis maintenant 3 ans, mon mari est mort d’une pneumonie ou d’un cancer du poumon, bref, il est mort quoi. J’ai 29 ans, et j’ai besoin de compagnie. Et vous, vous m’attirez. Vous êtes le genre d’homme qui est solitaire, un tourtereau éloigné de sa tendre et belle épouse, je me trompe ?

- Euh… Pourquoi vous me racontez tout ça ?

- Vous êtes soldat ?

- Non, marine, madame.

- Marine ? C’est bien. Je suis infirmière pour ma part. Ca vous dit un verre ?

- Eh bien… Pourquoi pas ? »

Nous avons passé la soirée à parler, enfin plus elle que moi quand même. Puis elle a voulu rentrer. En tant qu’homme galant, je l’ai raccompagnée, mais elle m’a tiré vers elle devant sa porte et… Mieux vaut ne pas raconter la suite.

Le lendemain, je suis parti de chez elle pendant qu’elle dormait.

Cette dame, qui me parlait, lui ressemblait. Donc forcément, je devais lui demander, la parole revenant d’un coup :

- Dites-moi.. Connaîtriez-vous une Marie ? Marie-..Françoise ? »

Elle m’a regardé, sans rien dire, puis a ouvert la bouche, l’a refermée, a tourné la tête, m’a regardé, puis a rigolé, tout d’un coup. Et elle a dit :

« Vous.. Vous savez encore parler alors ? Et vous avez de la mémoire ? On m’a dit que vous aviez tout oublié de votre vie, mais que parfois, des souvenirs vous revenaient en mémoire, comme ça. Eh bien.. que vous vous rappeliez de ma mère.. Quelle coïncidence hein ? Oui, ma mère s’appelait Marie-Françoise, mais vous l’appeliez Marie, n’est-ce-pas ? Edmond.. Elle m’a parlé de vous, souvent. La nuit de sa vie. Et un mois après, on l’annonçait enceinte. De père inconnu, je suis née. Puis, ma mère m’a contée comment un soir, elle avait repéré un bel homme qui semblait seul. Il s’appelait Edmond. Il était dans la marine. Mais vous avez dû oublier ça ? Vous avez tout oublié, après tout.

- Dites-moi.. Qui êtes-vous ? »

J’avais encore oublié. Et cette jolie infirmière m’a regardé l’air songeur, triste, mélancolique aussi. Comment pouvait-on avoir une telle expression sur le visage ? Elle m’a dit qu’elle reviendrait dans deux heures s’occuper de mon repas, puis est partie.

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