New York, juste un rêve

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Chapitre 19

Lorsque nous rentrons chez Mathilde, j'en profite pour faire quelques recherches sur internet. Nous devons absolument élucider le mystère autour de Lana. Pourquoi est-elle en contact avec son frère ? Pourquoi a-t-elle menti sur son départ en Europe ? Est-ce qu'elle s'est vraiment cachée ? Pourquoi la police la protège-t-elle, malgré de gros doutes à son sujet ? Trop de questions demeurent encore sans réponses. Nous devons chercher tout ce qui peut la relier au gang. En fouillant, nous découvrons que le gang de César semble faire régner la terreur depuis des années...

Miss Mystère :
"On va bien finir par trouver quelque chose..."
Mathilde :
"Je sais pas... Ça m’étonnerait que ce soit si simple."

Je trouve des informations sur le gang en général, mais, rien sur Lana... Par contre, le nom de Marco Montanez apparaît plusieurs fois. Comme Daryl nous l'a dit, c'est bien un trafiquant de drogue qui s'est fait tuer dans une fusillade, il y a quelques années. D'après les articles de presses de l'époque, il s'agirait d'un règlement de compte entre gangs rivaux. Elle me fait signe d'arrêter de scroller sur l'un des articles qui relatent les faits.

Mathilde :
"Attends... Reviens plus haut..."

Elle pointe son index sur l'écran et plisse les yeux.

Mathilde :
"Plus haut... Ouais là ! Regarde. L'année de la fusillade, c'est celle de mon accident de moto avec Lana !"

Mon sang se glace. Je ne crois plus aux coïncidences lorsqu'il s'agit de cette garce ! Si ça se trouve, elle est impliquée dans cette histoire. Ça ne m'étonnerait même pas.

Miss Mystère :
"On tient quelque chose, là ! Et si la police nous cachait leurs véritables motivations ?"

Elle m'observe et se cale au fond du canapé en soupirant.

Miss Mystère :
"Je veux dire... Peut-être qu'ils cherchent à démanteler tout le réseau de narcotrafiquants et que ce Marco est le point d'accroche."

Elle se frotte les yeux. Elle semble épuisée.

Mathilde :
"Tu penses que la police sait pour Lana depuis le début ?"
Miss Mystère :
"Si le gang de César est impliqué dans ce meurtre, je trouve étrange que, comme par hasard, la police protège Lana."
Mathilde :
"Elle aurait pu être juste témoin."
Miss Mystère :
"Ou alors, avoir des infos essentielles à apporter aux flics en échange...d'autre chose."

Elle se redresse et masse ses tempes.

Mathilde :
"On ferait bien d'arrêter là et de dormir. Franchement, j'en peux plus, mon cerveau s'embrouille..."

Elle n'a pas tort... Mes yeux commencent à me piquer et mon esprit a du mal à tout synthétiser... Je ferme l'ordinateur et me tourne vers elle.

Miss Mystère :
"On doit parler de ce qu'on a trouvé à Daryl."
Mathilde :
"Maintenant ?"
Miss Mystère :
"Oui !"

Elle grogne et attrape son téléphone. Elle sait que je ne la lâcherai pas avant qu'elle ait appelé son frère.

Mathilde :
"Ouais, c'est moi."
Miss Mystère :
"Mets-le sur haut-parleur !"

Elle s'exécute et place le téléphone sur la table basse devant nous.

Daryl :
"Qu'est-ce qui se passe ?"
Miss Mystère :
"On se demande si ton contact à la police te dit tout."

Il souffle dans le combiné.

Daryl :
"Putain, je vous ai dit de la mettre en veilleuse ! Qu'est-ce que vous avez encore foutu ?!"
Mathilde :
"On a fait quelques recherches sur le gang et Marco Montanez..."
Daryl :
"Vous vous foutez de ma gueule ?"
Miss Mystère :
"On va pas rester les bras croisés ! Tu t'attendais à quoi ?!"
Daryl :
"Bordel, mais je dois faire quoi ?! Vous mettre dans un avion de force et vous envoyer à l'autre bout du globe pour que vous compreniez ?!"

Nous nous regardons, pas vraiment sûrs de l'attitude à adopter. Daryl lâche un juron, s'éclaircit la voix et reprend sur un ton plus doux.

Daryl :
"Ne vous mêlez pas de tout ça. C'est trop dangereux."
Miss Mystère :
"Faire des recherches sur internet, c'est dangereux maintenant ?"
Daryl :
"Je plaisante pas tu devrais faire attention. Et toi, Mathilde, bordel, tient ta copine !"

Je me renfrogne. Je ne suis pas un chien qu'on tient en laisse !

Mathilde :
"Comme si quelqu'un pouvait dire à Miss Mystère ce qu'elle doit faire ou ne pas faire..."
Miss Mystère :
"Hey !!!"

Je lui envoie un coup dans l'épaule. Elle m'enveloppe dans ses bras avant de déposer un baiser sur mon front.

Daryl :
"Vous êtes vraiment deux gosses... Je ne peux plus avoir ce genre de conversation au téléphone."
Miss Mystère :
"Ok, on peut venir à l'hôpital demain et..."

Il me coupe sur un ton sec, cette fois.

Daryl :
"T'as pas compris... Je veux plus qu'on parle ce ça, tout court !"

Je me renfrogne et marmonne ma désapprobation.

Mathilde :
"On va pas faire de conneries..."

Daryl :
"J'espère... Maintenant, vous raccrochez et vous allez vous pieuter. Me rappelez pas pour me parler de ça. Pigé ?"

Je croise les bras en soupirant, pendant que je laisse Mathilde gérer son frère.

Mathilde :
"Ouais. Désolés d'avoir voulu te mettre en garde."

Elle raccroche sans attendre la réponse de son frère.

Miss Mystère :
"À croire qu'il nous cache des choses, lui aussi !"
Mathilde :
"Je crois pas, princesse... Il veut juste nous protéger."

(J'en ai marre qu'on cherche à me protéger, bon sang ! Je ne suis pas cristal !)

Mathilde :
"Écoute, on devrait faire ce qu'il dit. Rester loin de tout ça, le temps que ça se calme..."
Miss Mystère :
"Je voulais juste aider..."
Mathilde :
"Je sais. Mais je veux pas que tu te mettes en danger. S'il t'arrivait quoi que ce soit, je me le pardonnais pas."

Je décroise les bras en guise de capitulation. Difficile de me battre contre elle et son frère. Surtout lorsqu'ils ont décidé d'enfiler leurs armures de chevaliers... Elle est allée prendre sa douche. Je ressasse ce que nous avons trouvé ainsi que la conversation avec Daryl. Je comprends que ce soit dangereux, mais si les flics nous cachent quelque chose, j'ai bien peur que nous soyons, tous les trois, les jolis dindons de la farce ! Je soupire et me laisse tomber sur le lit, les bras en croix. Je ne dois plus penser à tout ça ! Je dois arrêter de fouiner ! Le gang, Marco, Lana, tout cela me dépasse. Je ne suis pas taillée pour affronter de tels événements ! Tout à coup, j'entends le téléphone de Mathilde vibrer sur la petite table du salon. Elle vient de recevoir un message. Je décide... Je jette un coup d'oeil coupable à la porte de la salle de bain. Elle est encore sous la douche... Est-ce que je m'apprête vraiment à espionner ma petite amie ? Une petite voix se fait entendre dans ma tête : "Tu ne l'espionnes pas... Et si c'était important ?" Je n'y teins pas et me lève pour attraper l'objet du délit. En effet, la situation est un peu spéciale. Ça pourrait être Daryl ou Lola...

(Bon sang ! Un texto de Lana !!!)

Mon sang fait un triple looping dans mes veines ! Qu'est-ce qu'elle lui veut encore ?

Lana :
"Tu m'as tellement déçue :-(. Je vais partir un moment :-(((. J'ai besoin d'oublier, de t'oublier..."

La garce ! Elle joue encore à l'ex-éplorée ?! Mais elle prend vraiment pour des idiotes !! En ouvrant le message, je vois les précédents qui s'affichent, en partie tronqués. Je sais que c'est malsain... Que je serais la première à déconseiller à une amie de faire ce que je m'apprête à faire. Mais... mon pousse glisse déjà sur le petit écran pour découvrir l'historique de leurs discussions... Mon coeur s'emballe, bien conscient que je risque de le mettre encore plus à mal. La gorge serrée et les mains glacées, je lis les premières lignes...

(Oh mon dieu...)

Plus je lis, plus un noeud semble se délier en moi. Comme si, quelque part, j'avais encore des doutes... Lana n'a pas arrêté d'essayer de séduire Mathilde, de lui envoyer des messages ambigus, de tenter de me discréditer...

(C'est carrément du harcèlement !)

Et Mathilde lui répond invariablement sur le même ton, lui affirmant qu'elle aime et a refait sa vie maintenant. Qu'elle doit comprendre... Si seulement j'avais su qu'elle m'a toujours été fidèle, ma vie aurait pas pris le tournant dramatique qu'elle a pris ces derniers temps.

(Comment est-ce que j'ai pu douter d'elle ?)

Je suis tellement absorbée dans ma lecture que ne voit pas tout de suite le corps à demi nue de Mathilde qui se dresse devant moi.

(Et il m'en faut pour rater ça !)

Je sursaute et relève les yeux sur une Mathilde surprise. J'esquisse un sourire maladroit.

Mathilde :
"Qu'est-ce que tu fais ?"
Miss Mystère :
"Je... Je... Rien... C'est juste..."

Je ne sais pas comment me dépatouiller. Je me sens honteuse. Elle me regarde tristement. Je crois que je préférais qu'elle soit en colère, qu'elle me traite de gamine. Tout, plus tôt que de lire ce découragement sur son beau visage. Elle se laisse tomber sur le lit à côté de moi et passe une main dans sa tignasse humide.

Mathilde :
"Tu me fais plus confiance..."
Miss Mystère :
"Mais si !"
Mathilde :
"Putain, j'ai tout gâché..."
Miss Mystère :
"Arrête ! J'ai confiance en toi ! C'est juste que... je me suis inquiétée ! Tu as reçu un message, et à cette heure-ci ça aurait pu être grave..."
Mathilde :
"Daryl ?"
Miss Mystère :
"Non. Lana..."

Je redescends les messages jusqu'au dernier et lui tends le téléphone, mal à l'aise. Elle lit rapidement le texto. Son poing se serre sur sa serviette et je vois sa mâchoire se contracter. Elle jure et envoie le téléphone valser à l'autre bout du lit. Elle pose une main sur ça ma taille et m'invite à la regarder. Ses deux prunelles se plantent dans les miennes. J'y lis une profonde détresse.

Mathilde :
"Qu'est-ce que je peux faire pour que tu me fasses confiance à nouveau, princesse ?"

Je me sens coupable. Ma voix devient presque inaudible. Je m'en veux de l'avoir blessé.

Miss Mystère :
"Je te fais confiance..."
Mathilde :
"Alors pourquoi t'as besoin de lire ça ?"

Je soupire.

(C'est vrai, j'en ai eu besoin.)

Miss Mystère :
"J'ai été bête, j'aurais pas dû aller le lire. Pardonne-moi."

Elle n'a pas l'air convaincue et ça me brise le cœur.

Mathilde :
"Et si on partait, toi et moi ?"

J'esquisse un faible sourire.

Miss Mystère :
"J'aimerais pouvoir partir loin et oublier nos problèmes. Mais à quoi bon se voiler la face ?"

Ses épaules s'affaissent. Elle semble tellement fatiguée. À bout.

Mathilde :
"Je t'aime. Mais..."
Miss Mystère :
"Mais quoi ?"
Mathilde :
"Si tu veux me quitter à cause de... tout ça... je comprendrais... Je peux pas te garder égoïstement pour moi si ça te fait du mal."
Miss Mystère :
"Te quitter ? Tu es folle..."
Mathilde :
"La seule chose importante pour moi c'est de te voir heureuse. Et... t'es pas heureuse."

Je pose ma main contre sa joue. Je la sens se tendre à mon contact.

Miss Mystère :
"Je t'aime moi aussi. On traverse juste une mauvaise période. Mais la roue tourne. Elle finit toujours par tourner."

Je me penche vers elle et dépose délicatement mes lèvres sur les siennes. Elle me rend timidement mon baiser. Puis doucement ses bras se referment sur moi, comme un cocon rassurant. Je passe mes mains autour de sa nuque et viens me placer à califourchon sur elle. Je l'embrasse cette fois avec plus de passion et me colle à elle. Je sens les muscles de sa poitrine se contracter, pendant que ses mains se posent sur mes hanches.

Miss Mystère :
"Ne redis jamais des bêtises comme ça."
Mathilde :
"C'est pas des..."
Miss Mystère :
"Chhhhhh..."

Je penche sa tête en arrière et dépose quelques baisers enflammés au creux son cou. Je remonte ensuite sur ses lèvres, que je m'empresse de dévorer, comme si c'était la dernière fois. J'ondule contre elle, puis je jette un coup d'œil à la serviette encore nouée autour de sa taille.

Miss Mystère :
"Elle va nous gêner, je pense..."

Elle me renvoie un regard pétillant, avant de prendre ma bouche avec l'ardeur que je connais si bien. Je suis bien incapable de quitter ses bras, cette bouche et cette peau. Cette fille tout entière est ma drogue. Je n'ai pas choisi de tomber amoureuse d'une mauvaise fille. L'amour ne choisit pas. Mais j'ai le choix de me battre pour sauver notre histoire et je compte bien lui prouver que je ne laisserai pas tomber. Jamais.

(...)

Quelque chose me réveille. Un bruit sourd et sec... Je suis plongée dans le noir complet. Je ne discerne rien. Je tente de me déplacer mais mon corps semble ankylosé. Le bruit se répète. Je retiens mon souffle pour être sûre de bien entendre. Pourtant tout semble calme. Je n'entends même pas la respiration de ma petite copine. Je la cherche de la main dans les draps mais sa place est vide.

Miss Mystère :
"Mathilde ?"

Je prends un flash en plein dans les yeux. Daryl se tient devant moi. Je n'arrive pas à saisir où je me trouve... Il fait froid...

Miss Mystère :
"Daryl... ?"
Daryl :
"Je t'avais dit de pas fouiner ! Maintenant c'est trop tard, ils ont Mathilde..."
Miss Mystère :
"Quoi ?! Mais..."

Un goût de bile dans ma gorge, sensation oppressante sur ma poitrine, impression de déséquilibre... Puis, à nouveau, le noir.

(Qu'est-ce qui se passe ?)

Miss Mystère :
"Mathilde !"

Encore un flash aveuglant ! Je mets mes mains en protection devant mes yeux.

Lana :
"Parle, garce ! Qu'est-ce que tu sais sur nous ?!"
Miss Mystère :
"Lana... ?"

Je fronce les sourcils, la lumière est trop vive. La silhouette féminine qui se dessine devant moi se change progressivement en...

Miss Mystère :
"Lola... ?"
Lola :
"Ils m'ont eu, moi aussi... Tu es seule... Seule..."

Elle s'éloigne de moi, comme si elle sombrait dans un abîme, et je n'arrive pas à la retenir...

Miss Mystère :
"Lola !!!!"

J'ouvre les yeux en sursaut ! Une lame glacée perce mon cœur. Je suis en nage, je tremble et ma respiration est saccadée. Ma compagne dort paisiblement à mes côtés. Il me renvoie à la réalité. Tout est calme. Je suis chez elle. Personne n'a disparu. J'ai besoin de quelques secondes pour reprendre mes esprits et réaliser que je n'ai fait qu'un horrible cauchemar. Je me lève le plus discrètement possible pour ne pas la réveiller. Je l'observe un instant : les paupières closes, elle est sereine. J'attrape un verre et me sers un peu d'eau fraîche. J'ai la gorge sèche. Je m'installe en tailleur sur le canapé et prends ma tête dans mes mains. Topaze me rejoint, en couinant.

Miss Mystère :
"Schhhhhhh... Tu vas la réveiller !"

Il cale doucement sa tête contre ma cuisse et me regarde amoureusement. Mon pauvre toutou n'a pas tous ses repères ici, et moi je le gronde ! Je passe la main dans son poil doux, et ce simple geste m'apporte un peu de quiétude. Je l'entends bouger dans le lit. Bientôt, j'aperçois sa frimousse se relever dans ma direction.

Mathilde :
"Princesse... ? Qu'est-ce que tu fais debout... ?"
Miss Mystère :
"J'arrivais pas à dormir, mais rendors-toi."

Mais elle ignore ma remarque, et me rejoins en quelques enjambées. La coiffure "saut du lit" n'a jamais été aussi sexy qu'elle...

Mathilde :
"Qu'est-ce qui se passe, ma belle... ?"
Miss Mystère :
"Rien..."
Mathilde :
"Me prends pas pour une imbécile... Même Topaze a senti que ça allait pas. Pas vrai, mon pote ?"

Topaze lève un œil vers elle et remue la queue en signe d'approbation.

Miss Mystère :
"J'ai fait un cauchemar, j'avais besoin de me lever pour reprendre mes esprits..."
Mathilde :
"Viens là."

Elle me tend les bras et je me blottis bien volontiers contre elle. Elle est toute chaude.

Miss Mystère :
"J'ai rêvé que Lana s'en était prise à toi et à Lola. Que je vous perdais pour toujours... C'était horrible..."

Elle pose son menton sur mon crâne et me berce doucement.

Mathilde :
"Ça arrivera pas. Je suis là pour te protéger."

Ses mots me rassurent mais je suis inquiète.

Miss Mystère :
"On peut pas se battre contre un gang entier. Daryl a raison. Et j'ai peur qu'ils te fassent du mal..."
Mathilde :
"On va s'en sortir, je te le promets."

Je soupire lourdement sans quitter la chaleur de ses bras.

Mathilde :
"Et si tu emménageais avec moi ?"

Mon cœur fait une embardée et je reste muette.

Mathilde :
"Je sais que c'est un peu petit, pour nous trois ici, mais j'aime pas te sentir seule chez toi..."

Je me redresse et l'observe en haussant un sourcil.

Mathilde :
"Juste le temps que tout ça se calme. Après tu pourras retrouver ton appart... Je veux pas te forcer la main, hein..."

L'observer en train de patauger dans la semoule a quelque chose d'à la fois drôle et attendrissant.

Miss Mystère :
"Tu veux dire que tu veux que je vienne habiter chez toi ?"

Elle m'observe avec son petit sourire encore un peu endormi.

Mathilde :
"Je crois que c'est ce qu'emménager avec moi veut dire... Je suis sûr que Topaze est pour."

Il approuve en se collant à elle pour réclamer une caresse. Je les regarde tous les deux en diagonale. Quelle solidarité... !

Miss Mystère :
"Je suis pas certaine d'être prête à supporter ton bazar."
Mathilde :
"Je t'en voudrais pas si tu ranger un peu."

Je la regarde d'un œil mauvais !

Mathilde :
"Oh Oh ! Tout doux, petite furie ! Je plaisante ! Tu feras juste la cuisine..."

Cette fois, je lui envoie une tape dans la poitrine et elle s'esclaffe comme une imbécile, fière de sa connerie.

Mathilde :
"Il faut vraiment que tu perdes cette habitude de me taper. Surtout si on partage le même appart..."
Miss Mystère :
"Il faut croire que tu aimes ça puisque t'en redemandes..."
Mathilde :
"Mmmmm... Je préfère ta méthode douce..."

Je l'observe en diagonale. J'ai du mal à retenir le sourire qui étire mes lèvres.

Mathilde :
"Allez, reviens te coucher..."

Elle me porte à moitié jusqu'au lit. Je me blottis contre elle en chien de fusil. Sa respiration régulière et sa chaleur m'aident à trouver le sommeil...
Le lundi matin, nous arrivons ensemble au bureau. Nous avons retrouvé notre complicité et nos regards enflammés sont plus qu'explicites... Je décide de me rendre dans le bureau de mon manager, histoire de faire redescendre la tension inappropriée qui habite notre box... Son sourire, quand je me baisse pour ramasser un stylo, dévoile des intentions coquines. Je rougis comme une jeune première. Je ne suis pas très à l'aise à l'idée que les collègues s'aperçoivent de notre petit jeu. Elle le remarque et son sourire s'élargit de plus belle. Elle finit par hausser les épaules, comme si elle était l'être le plus innocent sur cette planète.

Mathilde :
"Tu devrais aller boire un peu d'eau, princesse. On dirait que tu as très chaud, tout à coup."

(Petite conne...)

Miss Mystère :
"Je vois vraiment pas ce qui pourrait me donner très chaud... Je vais juste apporter un dossier à notre manager, très chère... collègue."

J'insiste avec délectation sur le dernier mot. Je me déplace jusqu'au bureau de Gabriel, en faisant rouler mes hanches, version Jessica Rabbit, histoire de rendre la monnaie de sa pièce à Mathilde. Je toque à la porte et entre.

Miss Mystère :
"Bonjour, Gabriel, je viens t'apporter le dossier que tu as demandé en début de semaine dernière."
Gabriel :
"Ah oui... Assieds-toi."

(Wow ! Je passe de la chaleur tropicale à la toundra sibérienne.)

Mathilde :
"Salut Gabriel."

Je sursaute presque, quand je découvre qu'elle est à côté de moi. Qu'est-ce qu'elle vient faire là ?

Miss Mystère :
"Désolée, je te dérange peut-être... Je venais juste déposer les maquettes."
Gabriel :
"Asseyez-vous une minute toutes les deux. Nous allons regarder ensemble si votre travail concorde."

Je hoche la tête pour approuver et m'assieds sur la chaise libre à côté d'elle. Gabriel se concentre sur le tas de paperasses que je viens de lui transmettre. Il n'a vraiment pas l'air de bonne humeur. Mathilde avance son pied vers le mien, jusqu'à ce que sa chaussure touche la mienne. Je la regarde du coin de l'œil. Elle mordille sa lèvre inférieure.

(Elle a les hormones en ébullition aujourd'hui, ou quoi ?!)

Je serais tenté de jouer à ce petit jeu-là, mais je suis trop peureuse. Le risque d'être surpris par Gabriel est excitant, mais je ne veux pas tenter le diable. D'autant que le blondinet n'a pas l'air dans son meilleur jour... J'écarte mon pied, avant de changer d'avis. Il continue son analyse. J'essaie de la ponctuer d'approbations, dans le but de sortir au plus vite de ce bureau. La proximité de Mathilde réveille ma libido, même là où elle n'a pas lieu d'être.

(En fait, même si j'avais 40 de fièvre elle réveillerait ma libido !)

J'essaie de me concentrer sur les paroles de Gabriel quand, soudain, Mathilde fait tomber son stylo par terre. Elle se penche pour le ramasser. Je sens alors une caresse remonter de ma cheville à mon mollet. Sa main glisse sur ma cuisse dénudée et frôle mon entrejambe. Je vais la tuer !

(Quelle idée j'ai eu de me mettre en jupe aujourd'hui ?!)

Le bureau de Gabriel cache son ascension, mais, malheureusement, pas mon visage cramoisi. Je ne sais plus où me mettre.

(Et puis j'ai tellement chaud ! Baissez la clim, bon sang !)

Il relève la tête et croise mon regard sans rien dire. Je le vois hésiter.

Gabriel :
"Vous vous êtes finalement mis d'accord sur la couleur, on dirait. Malgré ton absence, Mathilde..."

Elle reste impassible, alors que sa main glisse à présent sur le haut de ma cuisse.

Mathilde :
"Oui, nous nous sommes finalement coordonnées et nous avons bien approfondi le sujet. Nous aimons aller au fond des choses..."

Elle n'arrêtera jamais sa délicieuse torture, et Gabriel n'est pas près de me laisser partir. Je me lève en toute hâte sous le regard incrédule de mon manager.

Gabriel :
"Où vas-tu comme ça ?"
Mathilde :
"Ben oui ? Qu'est-ce qui t'arrive ? Un problème intestinal ?"

Je la fusille du regard et sors de la pièce en courant, sans donner d'explications. Elle me le paiera ! Je me précipite dans le couloir. Mon cœur bat la chamade et mon désir pour elle pulse entre mes jambes. Appuyée contre le mur, je reprends mes esprits, mais j'aurais mieux fait de déguerpir plus vite... Mathilde ne me laisse pas de répit. Je la vois sortir du bureau de Gabriel en laissant la porte ouverte. Elle avance vers moi, telle une prédatrice sur une proie prise au piège. Je fais un pas précipité pour m'échapper avant qu'elle me rejoigne, mais elle me rattrape et me plaque contre le mur, à l'abri des regards. Sa main droite frôle ma hanche, tandis qu'elle descend son index gauche de ma clavicule jusqu'au creux entre mes seins. Mes yeux se balancent de gauche à droite pour vérifier que personne ne nous voit. Si je parle trop fort, Gabriel risque de nous entendre, alors je chuchote.

Miss Mystère :
"À quoi tu joues ? On va nous surprendre !"

En vérité, je trouve ce jeu très excitant et une part de moi adore ce genre de situation. Je n'irais pas jusqu'à vouloir qu'on nous surprenne, mais le risque apporte une touche épicée à ses caresses.

Mathilde :
"Depuis ce matin, tu balades tes magnifiques jambes sous mes yeux et ça me donne envie de te faire des choses, tu peux pas savoir à quel point."

(OK je suis entrée en combustion spontanée, là !)

Miss Mystère :
"Quel genre de choses ?"

Elle avance ses lèvres pulpeuses contre mon oreille. Son chuchotement me provoque une série de frissons.

Mathilde :
"Retrouve-moi au sous-sol entre midi et deux... je te montrerai."

Nous y sommes... Mon cœur bat un rythme frénétique lorsque je m'avance timidement dans son petit garage... Penchée sur la bécane, elle fait jouer la clef à molette sur un écrou récalcitrant. J'ai tout le loisir de détailler son corps, en débardeur blanc, taché de cambouis. Je ne pensais jamais m'émouvoir devant de la mécanique, mais là, elle pourrait presque me passionner ! Lorsqu’elle m’aperçoit, elle déplie sa grande silhouette et m'observe. Je retourne les yeux, faisant mine de ne pas être intéressée. Elle pose son outil sur la table à côté d'elle et essuie la sueur de son front avec son tee-shirt.

(Au feu les pompiers... ! Retenez-moi ou je me jette dans les flammes !)

Elle ne dit pas un mot et quitte nonchalamment son débardeur pour offrir à ma vue ses magnifiques abdos ainsi que sa poitrine. Cette fois difficile de regarder le plafond ! Il y a des choses dont je me lasserai jamais. Mater le menu détaillé de ma belle brune en fait partie. Mon souffle est erratique lorsqu'elle s'approche de moi avec une lenteur calculée. Elle s'arrête devant moi et, au moment où je pense qu'elle va me toucher, elle appuie sur le bouton du rideau, juste à côté de mon épaule. La porte du garage descend doucement et nous plonge dans le silence. Le sang pulse tellement fort dans mes veines que j'ai l'impression de me résumer à un organe gonflé de désir. Pendant plusieurs secondes, elle se contente de conserver, tout en frottant ses mains avec son tee-shirt.

Mathilde :
"Que fais-tu, princesse ?"

Sa voix chaude... Volontairement provocante. Elle penche la tête légèrement sur le côté. Ses yeux pétillent. Moi, je flambe. Je dois même être rouge comme une tomate. Elle sait très bien ce que je suis venue chercher. Elle veut juste me l'entendre dire.

Miss Mystère :
"Je passais juste voir si tu avais besoin d'un coup de main..."

Elle s'approche plus près de moi et pose une main juste à côté de mon visage. Je dois relever les yeux pour lui tenir tête.

Mathilde :
"Pour... ?"

Ses yeux fixent mes lèvres d'une façon si gourmande qu'ils me brûlent sur place. Je ne sais plus ce que je voulais dire... Je me racle la gorge. Ce n'est pas une bouteille d'eau qu'il me faudrait pour rafraîchir, mais une borne à incendie ! Si je ne veux pas tomber toute cuite dans ses bras, je dois faire diversion ! Je me faufile à côté d'elle, en passant la tête sous son bras, et me retrouve nez à nez avec sa moto.

Miss Mystère :
"Pour m'occuper de toi."

(Je viens vraiment de dire ça... ?)

Je l'entends pousser un petit rire guttural et se rapprocher de moi. Du dos de la main elle vient caresser mon bras. Ma peau réagit instantanément et la chair de poule court sur mon épiderme.

Mathilde :
"Tu sais ce que j'aime par-dessus tout sur ma moto ?"
Miss Mystère :
"Sa ligne sportive...?"

Ses lèvres effleurent le lobe de mon oreille et elle murmure deux simples mots qui s'achèvent.

Mathilde :
"Ses courbes."

Du bout des doigts, elle remonte de ma taille jusque sous ma poitrine.

Mathilde :
"Mais j'aime aussi la façon dont elle réagit au moindre de mes mouvements."

(Bon sang, tu veux me rendre folle...)

Elle caresse lentement ma cuisse avec une sensualité ensorcelante.

Mathilde :
"Il suffit d'un rien pour qu'elle s'enflamme. Juste un mouvement..."

Ses doigts viennent dessiner de petits cercles sur ma peau sensible et, cette fois, je me laisse aller contre sa poitrine. Je ferme les yeux pendant qu'elle continue ses folles caresses... Je me délite peu à peu sous ses doigts.

Miss Mystère :
"Mathilde..."
Mathilde :
"Shhhhh..."

J'agrippe l'assise de la moto. Le cuir craque sous la pression de mes ongles. Elle passe une main sur mes lèvres pour étouffer un gémissement. Mes jambes flageolantes. Des frissons délicieux parcourent tout mon corps. Ma respiration est saccadée, je peine à reprendre mon souffle. Elle me maintient, fermement, contre elle, bien décidé à mettre ses douces menaces à exécution. Une chose est sûre, je ne regrette pas la curiosité qui m'a poussée à la rejoindre au sous-sol... Quelques heures plus tard, me voilà dans l'ascenseur, la mine rougie et les cheveux défaits. Loin d'avoir fait de la mécanique, nous avons optimisé tout le temps de notre pause déjeuner pour nous dévorer l'une et l'autre. Sa moto a été un support idéal. Tout comme les étagères, la table, le mur... Pour ne pas éveiller la curiosité, nous avons décidé de remonter au bureau l'une après l'autre.

(Et aussi pour éviter de continuer nos jeux polissons dans l'ascenseur...)

Des images de nos jeux coquins ne me quittent plus. Le sourire figé sur mes lèvres non plus. J’aimerais passer toutes mes pauses déjeuner de cette façon, à présent... C'est un excellent moyen pour relâcher la pression ! Je devrais soumettre l'idée à Ryan Carter. Je suis sûre qu'il serait OK. Je glousse de ma bêtise en tentant de discipliner un épi rebelle. Mais mon sourire est de courte durée. Les portes de l'ascenseur s'ouvrent au deuxième étage et ce qui devait se produire... se produit : Cassidy entre.

(Je dois avoir un problème de Karma, c'est la seule explication !)

Mes joues en feu et mes cheveux en pétard vont lui mettre la puce à l'oreille. D'autant plus qu'elle en connaît un rayon, sur le sujet... Elle me détaille de la tête aux pieds avec un sourire narquois, mélange de jubilation et d'agacement.

Cassidy :
"Bonjour, Mademoiselle Rivoli, c'est moi qui vous fais cet effet ?"
Miss Mystère :
"Pardon ?"
Cassidy :
"Vos joues sont bien roses, et votre coiffure... Il y a eu un tremblement de terre au sous-sol ?"
Miss Mystère :
"Vous l'auriez sans doute senti, s'il en avait eu un..."
Cassidy :
"Vous me prenez pour une idiote ? Je sais d'où vous venez, et avec qui vous étiez."
Miss Mystère :
"Vous m'espionnez pendant mes heures de pause, maintenant ?"
Cassidy :
"J'espère que vous en avez bien profité parce que ça ne va pas durer."

Je fronce les sourcils, mais ne réponds pas. J'espère juste qu'elle n'en parlera pas à Gabriel.

(Tu rigoles, Miss Mystère ? Bien sûr qu'elle va s'empresser de tout raconter !)

Parfois j'aimerais être dans une série TV, lui sortir un dossier bien crado pour la faire chanter et la calmer tout de suite ! Mais, malheureusement, je ne suis pas dans une série TV, et je n'ai rien sur elle. En tout cas, rien de substantiel. Ah Monde cruel ! Le temps me paraît tellement long pour rejoindre mon étage... Je me passionne soudain pour les numéros qui défilent sur l'écran numérique. Elle, fidèle à elle-même, demeure fière et imperturbable. Parfois je suis admirative de la force qu'elle renvoie. Je me demande ce qu'elle a vécu autrefois pour devenir aussi méchante.

(Ou alors elle est née garce... C'est possible, ça ?)

L'ascenseur stoppe enfin sa course. Ses portes s'ouvrent et me libèrent. Elle ne se gêne pas pour m'adresser un regard mauvais et lourd de menaces...
En fin d'après-midi je rejoins Gabriel dans son bureau. Il a exigé de me voir. Le ton de son e-mail ne me dit rien vaille. Est-ce que Cassidy lui a dit quelque chose... ? Lorsque j'arrive dans son bureau, il est toujours aussi distant. Qu'est-ce qu'il a après moi ? Il est passé du manager bienveillant au boss froid. J'hésite un instant, puis me lance.

Miss Mystère :
"Tout se passe bien en ce moment ?"

Gabriel n'est pas un homme mauvais, mais il est comme tous les hommes : il faut beaucoup de ténacité pour lui tirer les vers du nez. Je pose les poings sur son bureau et lui réitère ma question. Je sens que sa réponse ne va pas me plaire. Est-ce que je pourrais repartir avant qu'il me réponde ?

Gabriel :
"Je ne peux pas changer les règles du travail selon vos humeurs."
Miss Mystère :
"Comment ... De quelles humeurs parles-tu?"
Gabriel :
"Un jour oui, un jour non... Ton comportement avec Mathilde finira par poser des problèmes."

J'ai l'impression d'être jugée sur ma relation. Cela m'agace profondément !

Miss Mystère :
"Comment ça ? Nous avons réglé nos problèmes et..."

Il pousse un long soupir. Il m'observe, en faisant rouler sa chevalière entre ses doigts.

(Non pas ça !)

Gabriel :
"Votre relation privée prend beaucoup trop de place sur votre lieu de travail. Vous êtes ici pour bosser, pas pour régler vos comptes ou vous rabibocher au sous-sol de la boîte."

(Cassidy... garce et rapporteuse ! On se croirait dans une cour d'école !)

Miss Mystère :
"Quoi ? C'est quoi cette histoire encore ?"

Il lève les yeux au ciel. Il n'est pas dupe.

Miss Mystère :
"Je suis étonnée que ma vie privée soit de notoriété publique !"
Gabriel :
"J'aimerais entendre parler de vous un peu moins souvent. Je commence à en avoir assez de vos frasques !"
Miss Mystère :
"Je ne vois vraiment pas ce qu'on a pu te dire. Je t'assure que tu n'as pas plus de souci à te faire."

(Mathilde et moi avons juste une folle et un gang à nos trousses. Mais sinon, tout baigne...)

Gabriel :
"Ce n'est pas pour vos disputes qu'on m'a parlé de vous, cette fois. Bien au contraire..."

Il lève un sourcil en attente de ma réponse. Je ne peux pas lui avouer ce qui s'est réellement passé. J'ai profité de la pause déjeuner pour m'envoyer en l'air dans les sous-sols, je suis reboostée. Il devrait voir ça comme un moyen de motivation !

(Ce n'est donc pas compris dans la convention collective de l'entreprise... ?)

Miss Mystère :
"Je ne serais pas étonné que ce "on" soit Mademoiselle Sparke."

Il est surpris. J'en ai marre que cette garce me menace ou cherche à l'évincer. Il fait que je retourne la situation avant qu'il ne soit trop tard.

Miss Mystère :
"Je ne comprends pas bien son attitude. Si jusque-là je n'ai rien dit, je commence vraiment à saturer. Elle passe son temps à vouloir me rabaisser en me faisant toujours des réflexions. J'aimerais savoir ce qu'elle me reproche exactement."

Je place les deux mains sur mes hanches, avec fierté.

(Girl power !)

Gabriel :
"Je ne comprends pas, tu insinues que Cassidy te cherche des ennuis ?"
Miss Mystère :
"Quand elle me croise, elle en profite pour me rabaisser, ou pour me menacer sur le maintien de mon poste."

(J'en rajoute des caisses et je sors le mot qui fait mal. Tant pis pour elle.)

Miss Mystère :
"C'est du harcèlement !"

Il semble particulièrement troublé par ma réaction. Je sais que Cassidy lui présente un autre visage... Mais honnêtement, j'en ai ma claque des manipulatrices perverses !

Gabriel :
"Je suis étonné, mais j'entends ce que tu dis. Je vais vois ce qu'il en est."

Enfin ! Cette peste va obtenir ce qu'elle mérite. J'en ai assez de me laisser faire, sous prétexte qu'elle a du pouvoir dans l'entreprise.

Miss Mystère :
"Je n'ai pas envie d'avoir des problèmes avec elle. Si ça pouvait rester entre toi et moi, ça me rassurerait..."

Il se lève de sa chaise et avance vers moi. Son regard est indéchiffrable.

Gabriel :
"Dans tous les cas, je compte sur toi pour te reprendre. Je comprends que tu sois dans une passe difficile. Mais ma patience a des limites. La prochaine fois qu'on me fait des réflexions sur vous deux, si les faits sont avérés vous prenez la porte. C'est clair ?"

(Outch !)

Devant mon mutisme il se penche un peu vers moi et hausse les sourcils.

Gabriel :
"C'est clair ?"
Miss Mystère :
"C'est très clair."

(Limpide même !)

J'ai sauvé l'honneur avec la carte Cassidy l’harceleuse, mais c'est la seule dans mon jeu. Je vais devoir remettre les choses au clair avec Mathilde, même si j'aime beaucoup nos petits jeux secrets...
Je rejoins Mathilde et Colin chez Bob pour de la bonne nourriture bien équilibrée. Au point où j'en suis, je peux bien boucher mes artères !

Miss Mystère :
"Un triple cheese, une grande portion de frites et un soda pour moi."

Elle me regarde avec étonnement et son sourire illumine son visage.

Miss Mystère :
"Quoi ?"
Mathilde :
"Non, rien. La même chose pour moi."
Miss Mystère :
"Et ta ligne ? Tu réussiras plus à frapper dans un sac de boxe si tu continues à manger comme ça."

Nous rejoignons Colin, appuyé contre un mur. Il s'empresse de voler une frite à Mathilde.

Mathilde :
"Tu veux mourir aujourd'hui, toi ?"
Colin :
"Non j'fais attention à ta ligne, c'est tout."
Miss Mystère :
"Ah, tu vois ? Je suis pas la seule à le dire !"

J'adore taquiner Mathilde sur son physique. Elle est à se cogner le cul par terre tellement elle est belle, mais elle ne s'en rend même pas compte.

Colin :
"Tu vas voir b'soin d'exercice si tu manges tout çà ! Mais ça tombe bien, j'ai du boulot pour toi, ce week-end."

(Pour l'exercice, c'est moi qui m'en charge !)

Mathilde :
"T'as besoin de moi ?"
Colin :
"J'ai un concert samedi et on manque de bras pour le matos."

Si elle peut s'occuper un peu l'esprit en aidant son pote, ce n'est pas plus mal. De toute façon je comptais aller voir Lola.

Miss Mystère :
"Parfait ! Je voulais passer la journée avec ma copine !"

J’observe sa réaction. Elle n'a pas l'air emballée, car je me doute qu'elle avait d'autres projets pour ce week-end. De plus elle met un point d'honneur à ne pas me laisser seule. Mais on ne peut pas vivre dans la peur permanente. Nous devons rester prudents, mais sans devenir paranoïaques. C'est exactement ce que cette folle attend de nous.

Mathilde :
"Ok mec. Je serai là si t'as besoin d'aide."

Elle me lance un regard entendu.

Mathilde :
"On sera combien à décharger le camion ?"
Colin :
"Comme d'habitude. Enfin, pas sûre... Doris fait la gueule. Si ça s'trouve, elle s'ra pas là."
Mathilde :
"Qu'est-ce qu'elle a ? C'est de ta faute, j'en suis sûr..."

Il hausse les sourcils en continuant à manger, comme si de rien n'était. De la faute Colin ? Pourquoi ? Est-ce qu'ils... ?

Miss Mystère :
Pourquoi elle te ferait la gueule ? Vous êtes fâchés ?"

Il replonge dans son burger et je n'ai droit qu'à un mâchouillement bruyant en guise de réponse.

Colin :
"Elle a un caractère de merde, c'est tout. J'espère juste qu'elle s'ra là pour le concert."
Mathilde :
"J'espère aussi..."

Un silence pesant s'installe tout à coup entre nous. Je sens qu'il voudrait parler du sujet qui fâche. Mais c'est Colin.

Mathilde :
"Ça va. On va bien."

Il lui renvoie un regard acéré et pas très convaincu.

(Ils se parlent par télépathie, ces deux la maintenant ?)

Colin :
"J'aime pas trop c'que j'ai trouvé. Et j'aime pas trop qu'vous soyez mêlés à tout ça."

Ses paroles ont le don de me ramener à la réalité illico presto, et de me couper l'appétit par la même occasion.

Mathilde :
"Écoute, pour l'instant on gère, avec mon frère..."

Il lâche un rire moqueur.

Colin :
"Ouais... Daryl. Il est jamais loin des emmerdes, ton frangin."

Elle serre les dents. Je vais parler, mais elle serre mon poignet pour m'inciter à me taire.

Colin :
"Faite gaffe à vous, c'est tout."

Et ce seront ses dernières paroles pendant tout le repas...

Miss Mystère :
"J'ai besoin de me défouler !"

Nous nous rendons à la salle de boxe afin d'évacuer notre trop-plein de stress. Nous commençons l'échauffement. Mathilde lance un poing que j'esquive adroitement. Je tourne sur le ring. Je lui adresse un sourire de défi. Elle mordille sa lèvre charnue.

Mathilde :
"Un peu de tension à évacuer, princesse ?"

Depuis que nous nous entraînons toutes les deux, elle n'arrête pas de me lancer des sous-entendus explicites. Je commence à me dire qu'elle est insatiable en ce moment, ou quelle décidée de rattraper le temps perdu. J'aime bien jouer les jeunes filles innocentes, je crois que ça me plaît...

Miss Mystère :
"Tu devrais porter tes coups à l'intérieur et baisser ta garde."

J'insiste sur sa technique de combat pour faire semblant de ne pas comprendre ses sous-entendus. Elle est amusée, et j'aime quand tout se passe comme ça. Elle réitère sa frappe, je la contrecarre et réponds d'un crochet du droit. Elle chancelle un peu et se redresse au centre du ring.

Mathilde :
"T'as bouffé du lion ?"

Je m'esclaffe sans perdre ma concentration et ma garde. Je connais ses tactiques pour me déconcentrer.

(Chacun les siennes ; j'en ai de très efficaces !)

Miss Mystère :
"Non, juste Gabriel qui m'a pris la tête !"

Elle s'immobilise une fraction de seconde. J'en profite pour envoyer un coup sur son flanc ! Elle grimace de douleur et je ne peux m'empêcher de jubiler !

Miss Mystère :
"Alors meuf ? On déclare forfait ?"
Mathilde :
"Dans tes rêves !"
Miss Mystère :
"Je n'en attendais pas moins de toi !"

Elle et moi dansons autour du ring. Les bras en position de défense devant le visage, nous nous observons à travers nos poings.

Mathilde :
"C'est quoi l'histoire avec Gabriel ?"
Miss Mystère :
"Cassidy a bavé de ce qu'on a fait entre midi et deux... Il a pas apprécié."

Miss Mystère :
"Je crois que là il a compris !"
Mathilde :
"Il a pas le choix. J'vais pas changer mes pauses avec toi. Elles sont bien trop... revigorantes."

L'atmosphère est chargée d'électricité entre nous, à tel point qu'elle est presque visible. Nos poings s'entrechoquent, nos pas s'harmonisent et nos corps se frôlent. Elle m'envoie un uppercut, je tente de l'éviter, mais dans mon empressement je trébuche au sol, l'entraînant dans ma chute. Toutes les deux allongées sur le dos, immobiles, les bras en étoiles de mer, nous rions à l'unisson.

Miss Mystère :
"Tu parles d'un entraînement ! J'espère que t'es plus efficace avec les jeunes."

Elle roule sur le côté jusqu'à moi et recouvre mon corps étendu de son poids et de sa sueur. Je rougis sous la chaleur de son corps, mais surtout sous l'assaut de ses prunelles endiablées.

Mathilde :
"C'est ma deuxième plus belle fierté."
Miss Mystère :
"Quoi ?"
Mathilde :
"Entraîner ces jeunes. Ils ont une vie pas facile, et je sais que pendant qu'ils sont avec moi, ils échappent à leurs problèmes."

Je suis touchée par l'émotion qu'elle a dans la voix quand elle parle de ses jeunes.

Mathilde :
"J'étais comme eux à leur âge : furieux, perdu. J'aurais voulu que quelqu'un m'aide à me concentrer autre chose que mes merdes. Même si tu penses qu'ils auraient pu avoir un meilleur prof que moi !"

Je me perds dans ses confidences et j'en oublie où nous nous trouvons. Allongé l'un sur l'autre sur le ring, j'ai l'impression que nous sommes seuls, mais je regarde quand même autour de nous. Heureusement la salle est vide, donc notre intimité n'a pas de spectateurs. Il n'y a plus personne. Nous n'avons plus fait la fermeture de la salle depuis nos embrouilles avec Lana. Il semblerait que tout redevienne comme avant. Je me sens bien.

Miss Mystère :
"C'est quoi la première ?"

Elle encadre mon visage de ses mains. Nos sueurs respectives se mélangent sur ma poitrine. Mais elle a beau avoir transpiré sous l'effort, l'odeur de son parfum caractéristique provoque en moi une attraction charnelle.

Mathilde :
"Ma première fierté ?"

Je hoche la tête.

Mathilde :
"Ma petite amie."

Elle dépose ses lèvres sur les miennes et sa main descend le long de mes hanches. Elle a oublié que nous sommes sur le ring, à la vue de tous ? Je me sens franchement gênée d'être dans cette position plus qu'équivoque. Et si quelqu'un entrait ? Parfois, j'aimerais être capable de me lâcher...

Miss Mystère :
"On est en public..."

Elle parcourt ma nuque de tendres baisers. Mon pouls s'accélère.

Mathilde :
"Je crois qu'ils sont tous partis... J'ai bien l'impression qu'on est seules."
Miss Mystère :
"Crois, et, impression ? Ça me rassure pas des masses."

Elle me sourit et se relève. D'une main tendue, elle m'invite à descendre du ring.

Miss Mystère :
"J'ai besoin d'une douche. Et si tu m'accompagnais ?"

Je me relève. Je passe à côté d'elle en frôlant ses abdominaux de main. Je les sens se contracter. Elle contracte sa mâchoire avant de l'embrasser fougueusement.

Mathilde :
"Faudra pas me le dire deux fois."

Je cours jusqu'aux vestiaires sans me retourner, mais je la sens sur mes talons. Elle a aussi très envie de jouer... J'arrive aux douches avant elle et je me déshabille à la hâte pour filer sous le pommeau. Je ferme les yeux pour que le jet d'eau chaude enlève les traces de sueur de mon visage. La porte grince derrière moi. Je ne peux m'empêcher de sourire béatement. Mon corps frissonne par anticipation. J'entends le cliquetis de l'eau qui éclabousse et une main ferme et délicate se referme au-dessus de mon nombril. La carrure de cette femme derrière moi, le contact de sa peau contre la mienne, la tendresse de ses gestes ne laisse plus de place au doute. Mathilde plaque sa poitrine contre mon dos. Sa main, toujours sur mon ventre, m'entraîne à me coller davantage à elle. De sa main gauche, elle écarte les mèches de cheveux plaquées sur ma peau pour libérer l'accès à ma nuque. Ses lèvres absorbent chaque goutte d'eau qui perle entre mon oreille et mon épaule. Je frissonne malgré la chaleur de l'eau de la douche. Je me colle un peu plus à elle pour lui signifier mon envie. Je sais que je joue avec le feu, mais j'en ai tellement envie... Son corps tendu témoigne de son désir pour moi et décuple mes sens. Elle attrape le savon dans la main et le frotte afin que celle-ci mousse. L'odeur d'amende douce éveille mes sens et, lorsqu'elle caresse mon corps avec la substance crémeuse, elle m'enveloppe dans une sensation voluptueuse.

Mathilde :
"T'as un corps divin, princesse. Je pourrais le savonner pendant des heures."
Miss Mystère :
"Qui t'a dit que tu ne pouvais pas le faire ?"

Elle émet un rire et emprisonne le lobe de mon oreille entre ses dents.

Mathilde :
"Tu me provoques ?"
Miss Mystère :
"Jamais j'oserais."

Je glisse ma main sur ses abdos et ses seins musclés et fais cheminer mon doigt sur le tracé quadrillé de ses muscles. Je descends doucement et elle tire délicatement mes cheveux autour de son poing.

Miss Mystère :
"On a tout notre temps, non ?"

Soudain l'eau qui recouvre notre nudité devient glaciale. Je hurle sous la piqûre du froid sur ma peau. La chaudière a répondu à ma question. Non, on a juste le temps durant lequel il y a eu de l'eau chaude.

Miss Mystère :
"Et voilà, ça nous apprendra à vouloir jouer les aventurières !"

Je rigole devant nos visages frigorifiés. La situation est cocasse.

Mathilde :
"Au moins, on s'en souviendra."

Nous sortons de la cabine en frissonnant. Elle me tend une serviette sèche et m'emprisonne dedans. L'eau gelée lui a dessiné une chair de poule sur tout le corps. J'ai encore du savon dans le cou et elle me l'enlève en souriant.

Mathilde :
"On avait pas tout notre temps, apparemment."
Miss Mystère :
"C'est dommage."
Mathilde :
"C'est dommage que t'aies pas eu le temps de te rincer."
Miss Mystère :
"C'est vraiment dommage. Je vais être obligée de me glisser sous ta douche. Tu voudrais pas que ma peau s'irrite à cause du savon ?"
Mathilde :
"Je voudrais surtout pas et j'ai plein d'eau chaude chez moi. Tu vas faire quoi ?"

Elle me pose cette question d'un ton peu assuré. Je crois qu'elle a peur de ma réponse.

(J'adore ça !)

Miss Mystère :
"Je passe la journée avec Lola."
Mathilde :
"Ah."

Elle tente de cacher son soulagement, mais elle échoue lamentablement, en poussant un profond soupir.

Miss Mystère :
"On va sûrement se promener un peu au parc et parler de tout et de rien en dégustant une glace."

Elle semble moyennement rassurée.

Miss Mystère :
"Ça suffit ! Tu peux quand même me laisser passer une journée, seule avec mon amie..."
Mathilde :
"Je m'inquiète pour toi, c'est tout."

Elle a le courage d'avouer ses craintes et je la trouve encore plus craquante. Je raccroche avec l'envie folle d'annuler mon rendez-vous avec Lola et de la kidnapper pour la journée. Mais Topaze trépigne déjà. Je referme le tiroir de mes désirs irréalisables, j'attrape la laisse de Topaze, et me dépêche de rejoindre mon amie en bas de l'immeuble.

Lola :
"On va où alors ?"
Miss Mystère :
"Une balade à Central Park, une bonne séance de papotage et une crème glacée !"
Lola :
"Bonne idée ! J'ai besoin de m'aérer la tête !"

Nous prenons le chemin du parc en papotant de tout et de rien. Topaze furète un peu partout.

Miss Mystère :
"Comment tu vas ?"

Elle soupire et lève son petit nez retroussé vers le ciel.

Lola :
"Ça va."

(C'est un petit ça va.)

Lola :
"Tu sais, j'ai bien réfléchi. Daryl et moi, c'était perdu d'avance. On avait rien en commun. Plus ça va et plus je me demande pourquoi j'ai tenté quelque chose avec lui.

Je suis soulagée de voir que mon amie n'a pas de regrets. Il n'y a rien de pire. Nous continuons et entrons dans le parc. Plusieurs joggeurs sont en train de faire leur footing. Des couples se baladent, main dans la main. Le regard de mon amie s'attarde sur eux. Je lâche Topaze pour qu'il aille faire un peu sa vie.

Lola :
"Je me demande si un jour je trouverai un mec pour moi..."
Miss Mystère :
"C'est difficile. Il te faut la perle rare, parce que le mérites. Et elle se trouve pas si facilement !"
Lola :
"Mouais... Je voudrais juste un type normal, sans histoires. Je demande pas l'exceptionnel."

Je pense très sincèrement que les Ortega sont des personnes exceptionnelles. Ils se trimballent juste une farandole de casseroles. Mais je garde ma réflexion pour moi.

Lola :
"Alors ça va mieux avec Mathilde ?"
Miss Mystère :
"Oui. Elle a compris un certain nombre de choses et on a beaucoup discuté..."
Lola :
"Vous avez décidé quoi ?"
Miss Mystère :
"Pour nous ou pour... ?"

J'hésite à poursuivre, comme si quelqu'un pouvait nous entendre.

Lola :
"Les deux."
Miss Mystère :
"On a décidé de se laisser une dernière chance et d'aller de l'avant. Pour le reste, Daryl nous a ordonné de la mettre en veilleuse et de laisser les choses se décanter."
Lola :
"Vous allez l'écouter ?"

La remarque de mon amie m'amuse. Elle nous connaît bien.

Miss Mystère :
"Cette fois, oui. Cette histoire nous dépasse. Et si on veut retrouver une vie normale, je crois qu'on doit s'éloigner des sujets toxiques. Elle m'a proposé d'emménager avec elle."
Lola :
"Sérieux ?!"

Le regard de mon amie s'illumine. Qu’elle fleur bleue, celle-là !

Miss Mystère :
"Du calme ! Elle m'a pas demandé en mariage non plus !"
Lola :
"C'est un premier pas..."
Miss Mystère :
"Tsss... Je crois pas. Et surtout elle fait ça pour me garder en sécurité. Elle s'inquiète. C'est juste temporaire."
Lola :
"Mais oui, bien sûr..."

Elle m'envoie un regard moqueur. Je dois dire que l'idée ne m'est pas étrangère.

Lola :
"Je suis contente pour vous. Ça me tuait de vous voir comme ça. Vous allez si bien ensemble..."

Nous nous sourions, un instant.

Lola :
"J'ai envie d'une glace !"
Miss Mystère :
"Moi aussi !"

Nous nous ruons comme deux gamines sur le glacier ambulant. Il y a des choses pour lesquelles j'aurai toujours de l'appétit !

Miss Mystère :
"Comme d'habitude ton parfum de glace ?"
Lola :
"Oui. Chocolat !"

On se regarde dans les yeux avec un grand sourire.

Glacier :
"Bonjour mesdemoiselles ?"
Les filles en cœurs :
"Bonjour ! Deux glaces Chocolats s'il vous plaît !"
Glacier :
"Je vous prépare cela tout de suite."

(Quelques minutes plus tard...)

Glacier :
"Voilà mesdemoiselles. Quatre dollars ?"
Miss Mystère :
"Je règle les deux."

Lola me regarde et me fait un bisou sur la joue pour me remercier. Nous continuons notre balade tout en dégustant notre savoureuse glace.

Miss Mystère :
"J'espère que tu passes une bonne journée avec moi ?"
Lola :
"Oui ! Merci beaucoup, ça me change... On peut pas dire que ses derniers temps on était au beau fixe... !"
Miss Mystère :
"Je serais toujours là pour toi... C'est fait pour ça les amies !"

Nous nous faisons un câlin en toute amitié... Cette journée est passée à une vitesse folle. Et ce soir nous avons rendez-vous pour le concert de Colin. Avec Lola nous nous donnons rendez-vous devant la boîte de nuit. Ce soir le Starlite est bondé. Heureusement que Colin nous a réservé les places... Nous entrons toutes les deux, avec ce monde difficile de trouver Mathilde... Elle est peut-être encore dans les coulisses pour les détails avec son pote ! Si ça se trouve, elle nous attend devant l'entrée... !

Lola :
"Y a du monde ce soir ?!"
Miss Mystère :
"Oui."

Nous scrutons les environs !

Miss Mystère :
"Il est où ? Tu la vois ?"

Au milieu de la fosse et du public de plus en plus nombreux, je ne sais pas comment elle va réussir à nous retrouver. La salle de concert est pleine à craquer, ce soir. J'espère que le spectacle ne finira trop tard pour que je puisse passer la fin de soirée avec ma petite amie... Mais, le temps de remballer tout le matériel, j'en doute sincèrement. J'ai mis un soin particulier à me préparer. Lola a décidé de s'occuper de mes cheveux et de mon maquillage. J'espère juste que ça va lui plaire. Mais, vu tous les regards qui se retournent sur moi, j'en conclus que je suis plutôt pas mal.

Lola :
"Cesse de gesticuler dans tous les sens, et par pitié fais-moi confiance. Elle te trouvera avant toi.
Miss Mystère :
"Je vois pas ce qui te fait dire ça."
Lola :
"Regarde comment la meute te regarde, elle aura qu'à suivre leurs regards."

Mon bustier top et mon jean taille basse mettent mes courbes en valeur. Et je ne parle pas des bottines à talons hauts qui donnent un galbe indécent à mon fessier. Je devrais avoir plus confiance en moi. Devant cette tenue un peu rock, Mathilde va tomber raide dingue !!!

Mathilde :
"Non de Dieu, princesse, tu veux ma mort ?"

Lola, postée derrière Mathilde, m'adresse un clin d'œil complice.

(J'ai envie d'effectuer une danse de la victoire au milieu de la piste ! Après tout, je porte la tenue parfaite pour un booty Shake !)

Je joue l'innocente, face à sa déclaration.

Miss Mystère :
"Quelque chose ne va pas ? Ma tenue, peut-être ? Je savais que la couleur te plairait pas..."

Elle m'attrape par la taille et attire mon corps contre le sien. Sa poigne est ferme et possessive. Son regard s'ancre à mes prunelles et expédie le monde qui nous entoure dans une autre galaxie.

Mathilde :
"Toi, t'as envie de me mener par le bout du nez."
Miss Mystère :
"Disons que j'ai envie de m'amuser..."

Ses yeux pétillent, avant que sa bouche vienne effleurer mon oreille pour garder notre conversation secrète.

Mathilde :
"Tu joues un jeu dangereux, princesse..."
Miss Mystère :
"Ça tombe bien. J'adore jouer..."

Elle avance sa bouche près de mon oreille et me susurre des paroles plus qu'explicites.

Mathilde :
"Je suis pas convaincu de rester sage pendant le concert..."

Je flambe en entendant ces mots, comme une crêpe imbibée à l'eau-de-vie à l'approche d'une allumette. Elle fixe avec insistance mes lèvres entrouvertes et le rouge grimpe sur mes joues.

Mathilde :
"On pourrait s'éclipser un petit moment. Je connais les coulisses et il y quelques endroits où je pourrais faire taire tes provocations."

La proposition est plus qu'alléchante, car je ne suis jamais contre l'idée de me laisser aller à des jeux coquins avec elle... Mais, avant que je puisse répondre à Mathilde, les lumières s'éteignent et le public se met à scander le nom du groupe. Elle m'entoure de ses bras. Je frémis, mais ce n'est rien en comparaison de ce qui m'attend.

Miss Mystère :
"Mathilde ?"

Mon souffle se coupe et mes jambes tremblent sous l'adrénaline qui me traverse. Sa main se plaque à l'arrière de ma cuisse et remonte entre mes jambes.

Miss Mystère :
"Qu'est-ce que tu fais ?"

Je parle, mais c'est inutile. Elle ne peut pas m'entendre, maintenant que le groupe envoie les watts ! Son autre main dessine de légers cercles sous mon sein gauche et ne cesse de remonter à chaque solo de la basse. Je jette un œil affolé autour de moi. Tous les spectateurs ont les yeux rivés sur la scène. La fosse est si sombre et si dense qu'on ne peut voir ce qu'elle envisage. Je suis la seule à le savoir, à le sentir... Personne ne risque de voir ce qu'elle me fait. Et ce sentiment suffit à m'enflammer. Ses mains se font de plus en plus baladeuses. Je prends entièrement conscience de sa peau qui se faufile sous mes vêtements pour caresser la mienne. Je commence à perdre pied lorsqu'elle s'aventure à cet endroit précis qui me fait chavirer. Je balance ma tête en arrière, contre son épaule, et ferme les yeux en lâchant en gémissement. Je me fiche désormais royalement du regard des autres et je déguste les mouvements habiles des mains de Mathilde sur mon corps...

(La prochaine fois, je la kidnappe de force, pour me jeter sur elle dans une ruelle sombre et déserte !)

Mathilde a fini tard, hier soir. Le temps de rassembler à nouveau le matos dans le camion... À nos mines complices, je me demande si Lola et Colin n'ont pas compris que nous n'avons pas suivi grand-chose du concert... Bref, je foule la terre de Central Park, un sourire vissé sur mon visage, avec Topaze. Elle dort encore. Après l'avoir un peu admiré à la lumière du matin, j'ai enfilé mes baskets pour... cela fait trop longtemps que je n'ai pas partagé une balade avec mon chien. Je suis si loin de ma vie tranquille. J'ai besoin de revenir à des choses simples. Des choses qui me rappellent que nous pouvons en finir avec tout ce qui menace notre bonheur. En plus, il fait un soleil radieux. Est-ce que le temps aussi s'accorde à mon état d'esprit ? L'air estvivifiant. Une légère brise caresse mon visage et soulève les odeurs printanières. J'aime le calme du parc à cette heure matinale. Je prends le temps de sentir les parfums floraux et d'écouter le chant des oiseaux. Les yeux rivés au sol je cherche un bâton, ni trop fin, ni trop mou, pour l'envoyer à Topaze. J'entends alors les jappements de mon chien et une voix familière. Je relève la tête à la hâte et découvre un visage familier.

Miss Mystère :
"Daryl ? Qu'est-ce que tu fais là ?"

Il se lève du banc et range son portable dans sa poche.

Daryl :
"Salut. Comme toi, je suppose. J'ai besoin d'air."

Je me souviens que c'est à Central Parc que je l'ai rencontré pour la première fois. Que de chemin parcouru depuis... Un silence un peu bizarre s'installe. Heureusement Topaze l'interrompt en déposant son bâton gluant à ses pieds.

Daryl :
"Non, toujours pas, mon gars !"
Miss Mystère :
"Oh allez ! Il adorerait que tu acceptes de lui jeter ! Au moins une fois !"
Daryl :
"Et ouais. On a tous des fantasmes secrets qu'on aimerait assouvir. Au moins une fois..."

Je me dandine d'un pied sur l'autre. Son allusion me met mal alaise. Il y a bien des façons de l'interpréter... Je ne relève pas. Ce serait trop dangereux... Je me racle la gorge. Je dois changer de sujet.

Miss Mystère :
"Tu tiens le coup ... ? Par rapport à Lola..."

Je regrette tout de suite ma question quand je le vois se rembrunir. Il répond simplement d'un hochement de tête. Rapidement il remet le masque du type insensible.

Daryl :
"J'ai pas le choix, non ? Les bad boys sortent pas les filles bien. Ils sont faits pour l'action, le danger et les coups d'un soir."

Sa remarque est suivie d'un silence gênant entre nous. Il aime le danger, les femmes et l'action. C'est un gros dur, mais il n'a pas un cœur de pierre. Je préfère, un lancer un autre sujet.

Miss Mystère :
"T'as eu des nouvelles de la police ?"

Il m'adresse un regard sombre et se rapproche de moi. Il pose une main sur mon bras. Il m'impressionne toujours lorsqu'il a cette expression.

Daryl :
"J'ai déjà dit un truc à ce sujet, non ?"
Miss Mystère :
"Oui, mais..."

Il resserre sa prise sur mon bras.

Daryl :
"Vous passez à autre chose. Toi et Mathilde. Fin de la discussion."

Topaze s'agite autour de nous. Je le sais, d’un seul geste de ma part et il prendrait ma défense. Je ne me dégonfle pas et fixe Daryl droit dans les yeux. Je ne dois pas le laisser s'en tirer si facilement. Il n'est pas seul.

Miss Mystère :
"Tu peux pas tout gérer tout seul ! Regarde où ça t'a mené... On veut juste trouver une solution ensemble..."
Daryl :
"Je fais ça pour votre bien."
Miss Mystère :
"C'est trop tard ! On est tous impliqués, maintenant ! La seule personne qu'on peut encore protéger, c'est Lola !"

Il m'observe, intégrant péniblement ce que je viens de lui dire. Il finit par passer une main dans ses cheveux et m'observe, comme Mathilde lorsqu'il sait que je ne lâcherai rien.

Daryl :
"J'ai pas plus de nouvelles pour l'instant. Mon contact m'a conseillé de ne plus faire de mouvements. Si Lana se sent trop traquée, elle va leur filer entre les pattes. Tu comprends ?"
Miss Mystère :
"Je comprends, mais j'ai pas confiance en eux."
Daryl :
"Je sais. Mais pour l'instant on n’a pas d'autre option."

Je soupire, frustrée, de ne rien pouvoir faire. Il sent mon trouble et poursuit sur un ton plus calme.

Daryl :
"Parfois, même si c'est difficile, on a besoin de s'éloigner du problème pour trouver une solution."

Je me contente de hocher la tête, mais, intérieurement, je me pose des questions. Mathilde, Lola, moi... Nous représentons sa faiblesse. Je me demande si Daryl ne cherche pas s'éloigner de nous... Lorsque je rentre à l'appartement, je m'attends à trouver une Mathilde souriante. En fait je lui trouve une mine défaite. Elle m'adresse qu'un faible sourire lorsque, joueuse, j'agite les croissants devant son nez.

Miss Mystère :
"Hey ! T'as pas l'air bien, ça va ?"

Elle m'enlace et je ferme les yeux un instant, bercée par la chaleur et le parfum de son corps. Je pourrais rester des heures ainsi, contre elle, à respirer son odeur et à me laisser bercer.

Mathilde :
"Si, si. Ça va..."

Mon cœur accélère sa cadence.

(C'est quoi le problème ?)

Miss Mystère :
"Qu'est-ce qu'il a, Mathilde ?"

Et voilà ! Le bonheur ne dure jamais ! Elle va m'annoncer une mauvaise nouvelle et sera la fin de tous mes espoirs ! Moi qui croyais que tout allait bien se passer, que le plus dur était derrière nous... Je n'en peux plus. Si un autre problème survient dans notre vie, je jette l'éponge.

Mathilde :
"C'est Lana..."

(Non ! Non ! Non !!!!)

Mathilde :
"Elle a essayé de m'appeler à plusieurs reprises ce matin. Elle m'a laissé des messages..."
Miss Mystère :
"Qu'est-ce qu'elle te dit ?"
Mathilde :
"Elle me dit que c'est pas trop tard. Qu'on peut encore tout arranger..."

Je me décompose. Cette fille a un gros problème psychologique ! Elle a décidé de faire une fixette sur ma nana ! Un coup elle veut son bien, un autre, elle la met en danger, et maintenant elle tente de la récupérer ?! On est tombé sur une belle dérangée !

Mathilde :
"Je suis désolée... Putain, j'avais vraiment pas envie de parler d'elle ! Mais je veux pas te mentir. J'ai pas envie de te perdre encore une fois."

Je la serre dans mes bras et je la rassure. Nous ne devons pas nous laisser déstabiliser. C'est exactement ce qu'elle recherche.

Miss Mystère :
"Si tu lui réponds pas, elle finira bien par se lasser."
Mathilde :
"Je sais..."

Elle soupire et quitte mes bras. Nous nous installons dans le salon, devant un Topaze très intéressé.

Miss Mystère :
"J'ai pris des croissants."
Mathilde :
"Ah cool..."

Elle semble perdue dans ses pensées. Elle s'effondre sur le canapé. J'ai les boules, de la voir dans cet état. Elle ne peut pas la laisser vivre sa vie tranquille maintenant, non ?! Mon chien s'approche d'elle en remuant la queue et léchouille sa main à plusieurs reprises. Son intervention la détourne de ses préoccupations. Elle sourit. Je décide de ne pas lui parler de mon entrevue surprise avec Daryl. De toute façon je n'ai rien appris de nouveau... Je l'observe un instant et je me mords la lèvre inférieure.

Miss Mystère :
Et si on emménageait ensemble, pour de vrai ?"

Elle relève ses yeux sur moi. Je sens une lueur spéciale poindre au fond de ses prunelles.

Miss Mystère :
"On s'en fou de Lana, du gang... J'ai pas envie de prendre cette décision à cause de ça. Je veux qu'on emménage ensemble, juste pour nous deux."

Elle me sourit. Elle semble touchée et mon cœur se gonfle de bonheur. Je dois lui montrer que je serai toujours là pour elle. Malgré tout ce que Lana va tenter. Je l'aime. Je ne la laisserai pas tomber. Mathilde me serre dans ses bras et enfouit sa tête dans mon cou. Dieu que cette femme peut être vulnérable par moments !

Mathilde :
"J'espérais tellement que tu dises ça, princesse..."

J'enroule mes bras autour de mon cou et pose ma tête contre son épaule.

Miss Mystère :
"Je t'aime ! Je te laisserai jamais tomber."

Elle lâche un soupir étrange. Comme un sanglot étouffé. L'émotion me submerge. Une larme roule sur ma joue et tombe sur ma peau nue de sa nuque. Elle se redresse et plonge ses yeux dans les miens. Comme pour me sonder.

Mathilde :
"Ne pleure pas, ma princesse..."
Miss Mystère :
"Je ne suis pas triste... Je réalise juste à quel point je t'aime... J'ai envie que ça marche entre nous. Vraiment."

Elle m'adresse un tendre sourire et m'embrasse ma joue pour récupérer une autre larme.

Mathilde :
"Ça va marcher, ma belle."

Il faut que ça marche. Il n'y a pas d'autre solution. Je ne supporterais pas d'être loin d'elle. Je me redresse, essuie mes larmes d'un revers de la main et croque à pleines dents dans un croissant.

Mathilde :
"Je vais faire du thé."

Elle se redresse d'un coup et Topaze se précipite pour prendre sa place.

Mathilde :
"Hey ! Sois pas jaloux, mon pote ! Tu vas devoir partager ta patronne avec moi, maintenant !"

On dirait que Topaze la regarde en diagonale.

Miss Mystère :
"Eh oui, mon gros ! Finis les câlins sur le canapé !"

Cette fois mon chien me lance un regard outré et j'explose de rire ! Je me blottis au fond du sofa, assise en tailleur. Ces moments simples sont salvateurs. Mais je ne me fais d'illusions, je sais qu'ils ne dureront pas. Surtout lorsqu'on partage sa vie avec une Ortega...

Le lendemain j'ai du mal à me concentrer sur mon travail. Je ressasse ce que m'a dit ma petite amie à propos de Lana, et je n'arrête pas de penser que cette fille ne lâchera pas. En plus d'être impliquée dans un gang elle a clairement un grain ! Je commence à me dire que le sort s'acharne sur ma belle brune. À croire que parce qu'elle n'est pas née sous une bonne étoile, elle a pas le droit de s'en sortir... Je ne dois pas baisser les bras. Je dois rester positive. Pour elle. Je suis la seule chose qui la raccroche à une vie normale. Elle compte sur moi. Sur mon soutien. Je soupire devant mon écran. Elle est en réunion avec Gabriel, je me demande bien ce que ce dernier lui veut.

Cassidy :
"Tant de motivation, mademoiselle Rivoli, s'en est émouvant !"

(Il ne manquait plus, qu'elle ...)

Je fais tourner la base de mon fauteuil pour me retrouver presque nez à nez avec une poitrine surdimensionnée. Je constate qu'elle n'a rien perdu de sa superbe. À croire que ma conversation avec Gabriel n'a servi à rien...

Miss Mystère :
"Mademoiselle Sparke. Comment avez-vous fait ?"

Je me surprends moi-même. La question est sortie toute seule. Elle m'observe, surprise.

Miss Mystère :
"Je veux dire... Comment avez-vous fait pour arriver là où vous êtes et afficher tout le temps cette mine superbe ?"

Au ton de ma voix, clairement hypocrite, je sens déjà que je vais me prendre un retour de manivelle dans les dents. Elle prend tout son temps pour analyser ma question. Bizarrement elle ne m'a toujours rétorqué l'une de ses piques rapides et dévastatrices dont elle a le secret. Ses yeux de vipère me toisent un moment.

Cassidy :
"Je n'ai jamais laissé personne me dicter ce que je dois faire. Tout ce que j'ai voulu, je me suis battue pour l'obtenir. Et si je rencontre des obstacles, je les pulvérise."

Elle ne serait pas si garce, et je ne serais pas l'un de ses "obstacles", je pourrais presque avoir un brin d'admiration pour elle.

(J'ai bien dit "presque". Restons sérieuses.)

Je reste muette et, aussi étrange que cela puisse paraître, elle me regarde presque... gentiment.

(Je n'aurais jamais pensé cela possible ! Merde, c'est flippant...)

Cassidy :
"Maintenant que j'ai répondu à vos questions existentielles, remettez-vous au travail."

J'approuve d'un sobre hochement de tête.

Cassidy :
"Et arrêtez de souffler, on vous entend depuis l'autre côté de l'open space."

(Ah bah oui, fallait bien qu'elle me secoue un petit peu...)

Elle tourne les talons et disparaît. Je reste dubitative un instant. Je tourne en boucle sa réflexion : "Je ne laisse jamais personne me dicter ce que je dois faire." Peut-être que je devrais m'inspirer de sa remarque pour que cette sale garce de Lana arrête de saloper mon histoire avec Mathilde. Il faudrait que je me transforme en Cassidy Bitch et que je botte les fesses de la revenante ! Jusqu'à présent, elle est la seule à avoir les clés en main pour que la situation s'arrange ou dégénère. Daryl, Mathilde et moi n'avons fait que réagir à ses attaques. Je dois inverser la tendance ! Ça suffit de subir ses manipulations de perverse narcissique ! Ni une ni deux, je dégaine mon portable, telle une épée hors de son fourreau, et je tape mon message. Je dois lui fermer son clapet une bonne fois pour toutes !

Miss Mystère :
"Fous-lui la paix maintenant ! Elle ne veut plus de toi ! Laisse tomber ! Sinon je balance tout ce que je sais sur toi aux flics !"

J'hésite un instant. Les battements de mon coeur s'accélèrent. Je m'apprête peut-être à faire une grosse bêtise, mais je ne peux pas la laisser poursuivre ses manigances.

Mathilde :
"Notre binôme est officiellement de retour. Tu vas devoir me supporter à nouveau."

De surprise je sursaute et mon doigt appuie sur le bouton "envoyer" !

(Oups...!)

Je pose nerveusement mon téléphone face cachée sur mon bureau. Elle est tout sourire. Visiblement son entrevue avec notre manager a été concluante.

Miss Mystère :
"Mince... C'était tellement agréable d'avoir une vue dégagée sans une pile de bordel devant mes yeux..."

Elle tapote le haut de mon crâne et m'envoie un clin d'œil charmeur.

Mathilde :
"T'es sur quoi ?"

L'adrénaline grimpe dans mes veines. Je vais éviter de lui dire que j'ai envoyé un message à Lana sinon elle va me tuer. Quoique, c'était un accident, nan...?

Miss Mystère :
"Je... Euh... Je suis sur un dossier que m'a confié Gabriel."
Mathilde :
"Sans blague ! Je pensais que tu regardais la destination de nos futures vacances."

Je lève les yeux au ciel et me retourne devant mon écran.

Mathilde :
"Ce soir j'entraîne les gosses à la boxe. Tu te sens de rentrer seule à l'appart ?"

(Bof...)

Miss Mystère :
"Oui, oui ! Bien sûr !"
Mathilde :
"Géniale !"

Elle a retrouvé la pêche. Je me maudis d'avoir remué la merde avec mon message... Je lorgne l'écran de mon téléphone pour la cinquantième fois de la journée. Mais aucune réponse de Lana... Quelque part, je préférerais qu'elle ne me réponde pas. Ça pourrait vouloir dire qu'elle n'a jamais reçu mon message, ou qu'elle a changé de numéro... Lorsque je passe les portes de la firme, j'inspire calmement l'air frais. Il fait doux dehors. Je n'ai pas envie d'attendre un taxi et je décide de faire le chemin à pied. Marcher m'aide à réfléchir. Et puis, de toute façon, elle est à la salle, je n'ai rien à faire de spécial, alors autant prendre le temps de m'aérer le cerveau. Je flâne un instant dans les rues commerçantes et me mets à rêver devant les annonces d'une agence immobilière. Plusieurs appartements ont l'air géniaux, mais trop chers pour nos petites bourses... Il y a des choses qui relèvent du domaine du rêve ! Lorsque je reprends ma route, je remarque un type à l'allure douteuse derrière moi. Il me lance un regard étrange. Il porte un bandana un peu démodé et une large cicatrice barre son visage de l'arcade sourcilière jusqu'à la lèvre supérieure. Je n'y prête pas plus d'importance que ça et je poursuis ma flânerie. J'aurais pu continuer tranquillement mon chemin si je ne m'étais pas arrêté devant une autre vitrine et que je vois le type à nouveau derrière moi. Il est négligemment adossé à un mur. Quelque chose cloche... Il regarde quelque chose sur son téléphone. Il attend sûrement quelqu'un. Je ferais mieux de me calmer et d'arrêter d'imaginer les pires scénarios... Il a peut-être une sale tête, mais il a le droit d'emprunter les mêmes rues que moi, sansforcément vouloir m'égorger ! Je prends une grande inspiration et me secoue intérieurement pour arrêter de gamberger. Mais mon sang se glace lorsque je croise à nouveau le regard peu engageant du type, avant de reprendre ma route. Il a clairement regardé dans ma direction ! Je me retourne, l'air de rien. Mes doigts se crispent sur l'anse de mon sac. Du calme. Du calme. À cette heure, il y a encore beaucoup de monde dans les rues de New York. Je ne risque rien. Je décide de ne rien changer à mon attitude. Si ce type en a après moi, il ne pourra rien faire au milieu des passants. Je dois arriver à choper un taxi ! Je jette un coup d'œil discret par-dessus mon épaule pour vérifier s'il me suit encore. Eh oui, le type s'est bien remis en marche. Il n'est plus qu'à quelques mètres de moi ! Bon sang ! C'est quoi ce bordel ?! Mon cerveau fait tout de suite le lien : Lana ! Est-ce qu'elle a envoyé les types du gang pour moi ?! Est-ce que j'ai merdé en lui envoyant un message ?

(Bien sûr que tu as merdé, idiote !)

Je suis en stress complet ! J'attrape mon téléphone en tremblant et je trouve rapidement le contact de Mathilde. J'accélère le pas, mon souffle se fait court et je m'agrippe à mon mobile comme à une bouée de sauvetage.

(Math ! Décroche, s'il te plaît !!!)

Mathilde :
"Oui, princesse ?"

(Alléluia !)

Miss Mystère :
"Un type me suit !"
Mathilde :
"Quoi ?"
Miss Mystère :
"J'ai envoyé un message à Lana pour lui dire de te foutre la paix, et maintenant y a un type qui me suit..."
Mathilde :
"Putain, princesse ! Reste où tu es ! J'arrive !"

Tout à coup j'aperçois un taxi qui dépose un client. C'est le moment ou jamais de semer mon poursuivant ! Je saute littéralement dans le taxi et demande au chauffeur de me déposer dans la rue de Mathilde.

Mathilde :
"T'es toujours là ?"
Miss Mystère :
"Oui ! C'est bon, je suis dans un taxi !"
Mathilde :
"Putain... Pourquoi t'as envoyé un message à Lana ?"

Je savais qu'elle serait en colère...

Miss Mystère :
"J'en avais marre de rester à rien faire, et puis Cassidy a dit..."
Mathilde :
"Quoi ? Qu'est-ce que Cassidy a à voir là-dedans... ?"
Miss Mystère :
"Laisse tomber... Je rentre chez toi, là !"
Mathilde :
"Ok, j'arrive ! Je suis à l'autre bout de la ville... Je devais commander du matos pour la salle. Tu rentres, tu t'enfermes et tu ouvres à personne, Ok ?"
Miss Mystère :
"Oui..."

Elle jure encore une fois dans le combiné. Je sens qu'elle va me passer un sacré savon en arrivant.

Miss Mystère :
"Mathilde..."
Mathilde :
"Oui ?"
Miss Mystère :
"J'ai peur..."
Mathilde :
"Ça va aller, princesse ! Je grimpe sur ma moto et je fonce."
Miss Mystère :
"Ne commets pas d'imprudence, je me fais peut-être des films..."
Mathilde :
"J'arrive princesse. Tu traces, tu t'enfermes..."
Miss Mystère :
"Et je n'ouvre à personne."

Lorsqu'elle raccroche, mon palpitant bat à toute allure. Et si j'avais fait une grossière erreur en provoquant Lana... ? Je tourne nerveusement la clef dans la serrure et m'engouffre dans son appartement. Je referme rapidement la porte derrière moi. Topaze se précipite vers moi, pour me faire la fête, mais il change d'attitude dès qu'il comprend que je ne vais pas le sortir tout de suite.

Miss Mystère :
"Non, Topaze, pas maintenant."

Je regarde par la fenêtre pour voir s'il y a de l'animation dans la rue. Mais il n'y a rien de suspect. Aucun type à l'allure glauque. Aucun van, noir, aux vitres teintées. Je dois redescendre en pression. Il y a peu de chance que le type ait réussi à me suivre. Et puis ma petite-amie ne devrait pas tarder. Je souffle et je me laisse glisser, le dos contre les briques, jusqu'à m'asseoir. Topaze vient se coller à moi en jappant.

Miss Mystère :
"Désolée mon gros. Ta patronne déraille en ce moment..."

Il me regarde amoureusement, sans se soucier une seconde des tracas qui me perturbent. Il enfouit sa tête contre ma poitrine et se laisse câliner. Son contact m'apaise... Mon téléphone sonne. Je me relève précipitamment et manque de m'étaler sur mon chien en voulant décrocher à toute allure.

Daryl :
"Miss Mystère !"

(Daryl...)

Miss Mystère :
"Oui !"
Daryl :
"Mathilde m'a envoyé un texto. Faut toujours que tu fasses le contraire de ce qu'on te dit, hein ?!"
Miss Mystère :
"J'ai juste envoyé un message ! Pas besoin d'en faire un drame !"
Daryl :
"Un drame ? Putain, t'as toujours pas compris à qui t'as affaire ?!"

Miss Mystère :
"C'est bon. Je suis rentrée. Je suis chez elle. Elle arrive bientôt."

Je lance un coup d'œil par la fenêtre. La rue est calme.

Miss Mystère :
"Tout va bien. Personne ne m'a suivie."
Daryl :
"Il ressemble à quoi le type ?"
Miss Mystère :
"J'en sais rien. À un sale type... Il était tatoué et il avait une cicatrice qui lui barrait tout le visage."

Silence au bout du fil.

Miss Mystère :
"Daryl... ?"
Daryl :
"Tu bouges pas et tu attends Mathilde bien sagement, c'est clair ?"
Miss Mystère :
"Oui, j'ai fermé la porte à clef en attendant qu'elle soit là. Elle m'a déjà fait la leçon."
Daryl :
"Déconne pas. Ce type était peut-être pas seul. J'arrive avec mes gars."
Miss Mystère :
"Je crois pas que ce soit vraiment nécessaire..."

(Voilà ! Grâce à ma bourde, j'affole tout le monde ! Je pourrais me filer des claques !)

Daryl :
"Tu connais rien de notre monde, à Mathilde et moi. Si tu sais pas de quoi Lana est capable, moi je le sais !"
Miss Mystère :
"Tu me fais peur !"

Je l'entends soupirer.

Daryl :
"Reste tranquille. On arrive."

Je serre Topaze dans mes bras lorsqu’il raccroche. J'ai une boule à l'estomac. Les sanglots menacent de me submerger. Pour une raison inexplicable, le visage de maman se dessine dans mon esprit. Son doux visage, sa voix rassurante, ses bras bienveillants. Je me recroqueville davantage contre mon chien. Je n'aurais jamais dû envoyer ce message à Lana. J'ai voulu jouer à l'héroïne, mais je n'ai rien d'une guerrière. Maintenant je ne peux plus faire machine arrière. Je me suis laissé emporter par mes émotions et l'envie de lui fermer sa bouche. J'aurais mieux fait de la fermer. Lui dévoiler que nous avons des choses sur elle n'était sans doute pas très malin... Et si j'avais compromis une enquête de police ? Daryl ne me le pardonnerait pas s'il savait que j'ai altéré une enquête de sa source. Et je ne me le pardonnais pas si le gang s'en prenait au flic qui le renseigne. Je suis une piètre confidente... Je prends ma tête entre mes mains sans trop savoir quoi faire. Topaze va se coucher sur son tapis. Je me relève et me déplace jusqu'à la salle de bain. Je ne vais pas commencer à me morfondre ! Du nerf... ! J'ouvre le robinet et passe mes mains sous le jet. Je m'éclabousse le visage et tapote mes joues. Toutes ces histoires vont finir par me rendre folle. J'ai l'impression d'être propulsée au milieu d'un film d'action ! Sauf que je n'ai rien d'une guerrière ! J'ai qu'une envie, me glisser dans ses bras et oublier ce cauchemar... Je m'apprête à quitter la salle de bain quand un grand bruit à la porte d'entrée me fait sursauter. Comme si on venait de pénétrer dans l'appartement, après avoir cassé la porte à coups de hache. Je coupe ma respiration pour écouter et comprendre ce qui se passe. Topaze se met à aboyer. Il grogne et mon cœur s'affole ! Ce n'est sûrement pas à Mathilde qu'il réserve cet accueil ! Il pousse un couinement qui me prend aux tripes. Ensuite je ne l'entends plus... Mon cœur est prêt à imploser. Mes mains et mes jambes commencent à trembler. Je m'empresse aussitôt de fermer la porte de la salle de bain à clef. Je me retourne et regarde frénétiquement tout ce qui m'entoure. Je fais les cent pas dans l'espace restreint de la salle de bains. Je suis incapable de me concentrer afin de me poser les bonnes questions ! Est-ce que ce sont les gars de Lana ? Qu'est-il arrivé à mon chien ? Qu'est-ce qu'ils veulent ? Des voix graves me parviennent à travers la porte. Ils ont l'air d'être plusieurs !

(Mon Dieu ! Je suis fichu !!!)

J'attrape mon téléphone, que j'ai heureusement posé à côté du lavabo. Ma bouche est pâteuse. Je cherche fébrilement le contact de Mathilde. Mes doigts tremblent tellement que je manque de faire tomber mon téléphone. Les tonalités qui résonnent dans mon oreille accentuent mon angoisse. Personne ne répond !

(Bon Dieu ! Elle doit être encore sur sa moto ! Si jamais elle débarque ici, elle ne fera pas le poids contre ces types !)

Daryl ! Il m'a dit qu'il arrivait avec ses gars ! Je dois l'appeler tout de suite ! Il me semble que le temps se distend, comme s'il mettait une éternité à répondre à mon appel.

Daryl :
"Allô ?"

Mon cœur effectue un saut périlleux dans ma poitrine. Sa voix me rassure, mais annonce ce qui est en train de se passer chez Mathilde concrétise la situation.

(Merde, c'est bien réel !)

Je prends une profonde inspiration et chuchote aussi bas que possible dans le combiné.

Daryl :
"Calme-toi... Je comprends rien."
Miss Mystère :
"Ils sont rentrés, ils ont..."

Des sanglots coupent mes paroles. Il n'attend pas que je finisse ma phrase.

Daryl :
"T'es où ? Ils sont combien ?"
Miss Mystère :
"Je me suis enfermée dans la salle de bains. Je sais pas combien ils sont ! Deux ou trois peut-être..."

Un coup brutal contre la porte verrouillée ! Mon cœur bondit de frayeur.

Miss Mystère :
"Ils sont là ! Ils cherchent à entrer !!!"
Inconnu 1 :
"Sors de là ! On te veut pas de mal !"

Je retiens un gémissement de panique.

Daryl :
"Écoute-moi bien. Ils vont entrer. Cache ton téléphone sur toi pour qu'ils le trouvent pas."
Miss Mystère :
"Quoi ? Mais..."

Il prend une voix ferme et autoritaire qui me remet sur les rails.

Daryl :
"Discute pas ! Fais ce que je te dis !"
Inconnu 1 :
"Allez, on veut juste parler un peu, ouvre !"

Je vois la poignée de la porte tourner. Les types cherchent à forcer le verrou.

Miss Mystère :
"Fais quelque chose, je t'en prie ! Si ta sœur débarque alors qu'ils sont là, ils vont..."
Daryl :
"Cache le téléphone. Maintenant !"

Je tremble tellement que je manque de le faire glisser au sol en raccrochant. Je cache le mobile dans mon soutien-gorge. Heureusement que j'ai assez de poitrine pour qu'il ne se voie pas. Les jambes flageolantes, je fixe la poignée qui tremble.

(Cette fois, c'est la fin !)

Les hommes derrière la porte ne me demandent plus gentiment de leur ouvrir. Ils exigent et s'énervent à présent. Les gonds tremblent sous leurs assauts puis le bois craque complètement, lorsque l'un d'eux arrive à défoncer la porte de la salle de bains. Deux armoires à glace entrent d'un pas lourd. Ils sourient en me voyant coller contre le mur. Je voudrais les fixer pour ne pas montrer qu'ils m'intimident, mais mon regard est attiré par le petit corps poilu inerte derrière eux. Topaze gît sur le sol.

(Non !!!)

J'oublie les deux colosses devant moi, tant la colère me submerge ! Je hurle et serre les poings le long de mon corps. Qu'ils s'approchent et je les défonce !

Miss Mystère :
"Qu'est-ce que vous voulez ?!"
Inconnu 1 :
"C'est trop tard pour discuter, maintenant. Tu viens avec nous."

Je n'ai pas le temps de répondre. Déjà, l'un des types me saisit par le bras. Sa poigne est ferme et douloureuse. Je lui envoie un crochet dans la mâchoire. Je ne compte pas me laisser faire ! J'ai peur, mais cela me donne une force supplémentaire. Sauf que ma puissance n'est qu'une illusion ! L'adrénaline qui circule en moi est certes très forte, mais elle ne me suffit pas pour affronter les deux colosses en même temps. Ils me traînent hors de la salle de bain et, avant que j'aie le temps de voir Topaze de plus près, ils m'enfoncent un sac sur la tête. Tous mes sens sont en alerte pour essayer de compenser la perte de vision.

Miss Mystère :
"À L'AIDE !!!"

Il est hors de question que je me laisse faire comme une proie facile ! Un des hommes resserre le sac autour de moi et l'air commence rapidement à me manquer.

(On m'enlève ! On m'enlève !)

Mes poignées sont tenues fermement par l'un de mes ravisseurs, jusqu'à ce qu'il les attache avec un lien râpeux. Une corde peut-être ? Le frottement douloureux me brûle la peau, mes bras s'ankylosent aussitôt. Je suis dans le noir absolu et je me raccroche à la "bonne volonté" de mes deux bourreaux pour savoir ce qui m'attend. Ils ont un accent hispanique prononcé et j'ai parfois mal à comprendre ce qu'ils disent. Je trébuche à plusieurs reprises, jusqu'à ce qu'on me jette, la tête la première, sur le siège d'une voiture. Le choc me coupe le souffle ! La tête me tourne... Les portes claquent et le moteur vrombit aussitôt. Il me semble entendre le bruit de moteur d'une moto qui s'arrête non loin. Mathilde ! Seigneur, elle juste là, dehors ! Elle ne se doute pas une seconde que je ne suis pas à l'appartement ! J'ai essayé de me libérer de mes liens, mais c'est impossible, alors je me concentre sur la route. Je cherche à ressentir le moindre virage, le moindre nid de poule qui pourraient m'indiquer où je vais. Au bout de quelques secondes, je suis déjà perdue. On vient de tourner à droite ou à gauche ? Les deux hommes n'arrêtent pas de se disputer, mais au moins leur conversation m'est utile.

Inconnu 1 :
"Je crois que cette garce m'a pété la mâchoire."
Inconnu 2 :
"Estùpido, c'est qu'une nana !"

(Attends, que je me détache, je vais t'en mettre une à toi aussi, tu verras si je suis qu'une nana !)

Les deux hommes continuent à s'envoyer des piques. Le bon point pour moi c'est qu'ils ont pas l'air malins. Mon souffle s'amenuise au fur et à mesure que ma panique s'accroît. Je suffoque sous ce sac... La route me paraît extrêmement longue. Mais où m'emmènent-ils, bon sang ? J'ai perdu la notion du temps et de la distance.

Inconnu 1 :
"J'lui ferais bien sa fête, à cette bourgeoise, avant de l'amener !"

Des scénarios horribles, se créent dans ma mon esprit. La plaie du passé se rouvre comme un trou béant... Je me recentre pour ne pas céder à la panique et m'évanouir. Surtout ne pas me laisser envahir par le passé ! Je ne suis plus la petite fille sans défense, prise au piège dans la salle de bain du voisin. Je suis une adulte, entraînée et apte à me défendre. Et je veux m'en sortir.

Inconnu 2 :
"Ouais, je s'rais pas contre..."

Mon estomac se serre à nouveau. Une nausée soudaine m'envahit. Une main touche le haut de ma cuisse, juste sous mon fessier. Je crois que vais tomber dans les vapes... Je crie tous les noms d'oiseaux qui me passent par la tête. Je me débats vivement. Il n'a pas intérêt de me toucher, ce porc !

Inconnu 2 :
"Calme-toi, loco !"

Je déglutis, mais ma bouche asséchée m'empêche d'avaler quoi que ce soit.

Inconnu 2 :
"La patronne a dit "intacte" ! C'est clair ?"

Soudain, mon cœur s'emballe. La patronne ? Parle-t-il de Lana ? Ai-je bien entendu, ou mon imagination me joue-t-elle des tours ? La voiture s'arrête. Les portières s'ouvrent. Je retiens ma respiration. Je prête l'oreille pour entendre un son reconnaissable, un indice qui pourrait m'aider à savoir où je suis. Mais les deux abrutis meublent le silence avec leur conversation inutile ! Ils me traînent par le bras. Une porte grince et le son fait l'écho. Mes pieds touchent un sol froid. L'odeur de l'humidité me gratte la gorge. Les voix de mes ravisseurs résonnent comme si nous étions dans une pièce immense.

(Mais où suis-je ?)

J'entends un grincement de chaise sur du béton. On m'assoit dessus sans ménagement. Mes liens aux poignets sont détachés. Malheureusement, mon soulagement est de courte durée. Mon ravisseur utilise la corde pour m'attacher mes mains au dossier. J'ai peur ! Que vont-ils me faire ?! Mon cerveau bouillonne. Il me faut un plan. L'élaboration d'un plan me paraît difficile, sans plus de détails. Je suis foutue. Des bruits de claquements de talons me parviennent et me mettent en alerte. Il y a une femme dans le lot. Et je sais très bien de qui il s'agit. C'est forcément elle. Je me redresse sur ma chaise. Je suis tendue comme un string. J'ai les oreilles à l'affût du moindre mot, de la moindre information qui pourrait me servir. Une main se saisit de mon épaule. Je sursaute, terrorisée. Le sac qui recouvre ma tête est retiré brutalement et emporte quelques-uns de mes cheveux avec lui. Je reprends mon souffle, comme si je venais de plonger en apnée trop longtemps. La lumière blanche m'agresse mes rétines. Je crois que je suis dans une sorte d'entrepôt. Je cligne des paupières plusieurs fois et la silhouette que j'aperçois à travers quelques mèches me paralyse. Lana est devant moi ! Debout. Immobile. Les bras croisés au-dessus de la poitrine et le regard menaçant. J'en aurais mis ma main à couper ! Je savais que ce serait elle... Et je le savais depuis le début, que cette garce été trop sûr d'elle pour n'être qu'un pion dans un gang. La patronne, dont les deux molosses parlaient, c'était bien elle.

Lana :
"T'aurais pas dû te mettre sur mon chemin."
Miss Mystère :
"Qu'est-ce je fais là ?!"
Lana :
"Ta gueule !"

Mes yeux s'écarquillent. Sa voix résonne, avec la hauteur des plafonds.

Lana :
"T'as cru que tu pouvais m'arrêter, n'est-ce pas ? Qu'il te suffirait de me menacer pour m'effrayer ? Petite conne !"

Je regarde autour de moi pour espérer trouver une issue, mais je n'en vois aucune. Y a-t-il d'autres hommes de main de César ? Je ne reconnais pas les deux types qui m'ont enlevée. Je commence à désespérer, car elle est de plus en plus menaçante.

Miss Mystère :
"C'est ton frère qui te manipule... ? C'est lui qui t'a ordonné de m'enlever ?!"

Elle pouffe d'un rire sarcastique.

Lana :
"T'as vraiment rien pigé, hein ?"

Mathilde et Daryl avaient raison : Lana est bien plus dangereuse que je l'imaginais. Et moi, je suis allée la provoquer ! Mais quelle conne !

Miss Mystère :
"Alors, c'est toi qui..."
Lana :
"Oui, c'est moi qui tiens les rênes, idiote."

Je pensais qu'elle avait un rôle auprès de son frère, mais de là à tenir les rênes... Je n'en reviens pas. Elle affiche une expression glaciale. Je ne l'avais jamais vue aussi sûre d'elle.

Lana :
"Et c'est moi qui ai ordonné ton enlèvement. Sans toi dans les pattes je pourrai récupérer Mathilde en un claquement de doigts."

Je garde le silence, tant sa folie est évidente. Elle croit vraiment que Mathilde serait prête à se remettre avec elle ?

Lana :
"J'aurais dû t'éliminer dès le début..."

Elle fait les cent pas devant moi. Elle écarquille les yeux en déblatérant ses intentions. Elle est effrayante. "M'éliminer". Ça a l'air tellement facile dans sa bouche... Elle se tourne subitement dans ma direction et se dirige droit sur moi. Les mains sur les accoudoirs de ma chaise, elle plonge son regard aliéné au fond de mes prunelles. Si près que je sens son souffle erratique sur mon visage.

Lana :
"Mais il a fallu que tu te mettes en travers de ma route, que tu cherches à m'éloigner de Mathilde !"

Tant pis si elle est folle et si je risque ma peau à trop parler, je mourais avec courage.

Miss Mystère :
"Ah ah ah ! Mathilde ne t'aime plus ! Va te faire soigner !"

Elle avance son visage encore plus près du mien. Mon cœur est prêt à exploser hors de ma poitrine.

Lana :
"Mathilde est à moi !"

Je ferme les yeux pour ne pas avoir à supporter son regard. Mais, en réalité, je fais une prière silencieuse. J'ai peur. Peur pour ma vie. Mon téléphone est toujours logé au fond de mon soutien-gorge. C'est mon seul espoir d'être retrouvée, désormais. Ils sont mes derniers espoirs. Je sais qu'ils feront tout pour me retrouver. Mais est-ce qu'ils arriveront à temps ? Son sourire démoniaque m'en fait réellement douter...

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