Chapitre 7 : Une idée lumineuse

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 Asuna tentait quelque chose de son côté avec sa Pierre de Vie. Elle prononçait des incantations, apposait son joyau contre les tuyaux, créant ainsi des petites spores dorées. Elle s’escrimait à vouloir les mettre à l’intérieur, mais elle s’épuisait à la tâche.

– Vas-y doucement, Asuna, nous avons besoin de toi pour la suite ! Préserve tes forces ! lui recommandai-je.

 Orialis regardait la scène, en pleine réflexion, une main posée sur sa bouche.

– Je pense qu’on peut essayer quelque chose..., marmonna-t-elle. Nos Pierres de Vie ne peuvent pas détruire. Mais elles peuvent amplifier notre magie. Asuna est dans le juste, cependant, son pouvoir est différent du mien… ses spores, une magie spécifique provenant des arbres, ne semblent pas pouvoir pénétrer le tuyau, par contre…

 Elle me fixa de ses beaux yeux gris-jaunes, le visage grave. Sans s’expliquer, la Noyrocienne détacha son bracelet, y délogea sa Pierre de Vie, s’accroupit et se pencha contre le tuyau. Elle ferma les yeux, l’expression placide. Le joyau se mit à scintiller d’une lumière vive. Elle posa ses antennes contre ce dernier. Il s’en dégagea d’étranges petits orbes d’à peine un centimètre de diamètre. Les minuscules billes pénétrèrent l’intérieur du tuyau, traversant la matière comme de petits fantômes. Elles se mélangèrent aux bulles pour finalement circuler dans le tube. Ce dernier se mit à vibrer.

– On dirait que ça fonctionne ! m’exclamai-je. Orialis, tu es un génie !

– Je viens de perturber le système… de l’infecter, comme tu disais. L’Ombre craint la lumière du Soleil, or mes astinas en proviennent directement.

– Tu crois qu’un seul tuyau suffira ?

– Je ne sais pas, je vais en contaminer au moins deux autres en espérant que cela se propage partout.

 Orialis s’avança vers le pilier suivant et s’exécuta. La Pierre de Vie luisait de sa belle couleur dorée.

– La substance… est en train de dégénérer ; elle mute, souffla la Noyrocienne. Elle va s’autodétruire – du moins, je l’espère.

 Elle fit de même pour deux autres tuyaux, mais ce travail l’éreintait. Ses réserves d’astinas étant épuisées, Orialis ne pouvait pas faire fonctionner correctement la Pierre, ni se connecter à Orfianne. Elle puisait dans ses ultimes ressources : nous étions enfermées dans une salle souterraine, et elle avait auparavant erré dans une forêt aussi sombre que la nuit. Malgré mon expression anxieuse, elle poursuivait sa tâche.

– Orialis, ce n’est pas une bonne idée. Tu vas mourir ! lui lança Asuna, en proie à la panique.

 Mon amie le savait. Je compris qu’elle n’hésiterait pas à se sacrifier pour que nous puissions nous enfuir.

– Stop ! Arrête, Orialis ! lui ordonnai-je.

 Elle demeura ainsi quelques instants contre la quatrième colonne, le dos courbé, la Pierre et l’extrémité de ses antennes posées sur le pilastre. Elle dodelinait de la tête en se redressant, le regard dans le vide, puis s’écroula. J’accourus immédiatement pour prendre son corps inanimé dans mes bras, l’allongea délicatement à même le sol. Je me concentrai pour activer mon pouvoir de guérison. Asuna m’avait rejoint. Elle posa sa Pierre de Vie contre la poitrine d’Orialis et serra ses mains dans les siennes. Je sortis la mienne de ma brassière.

– À deux, on va y arriver ; nous allons la guérir, me rassura la fillette.

 Elle conservait son calme inébranlable, une fois de plus, quand moi je perdais tous mes moyens. Sa présence me redonna du courage.

 Je pensai très fort au Soleil, aux fameux astinas dont elle avait grand besoin. Je ne parvenais toujours pas à ressentir la magie d’Orfianne, mais je faisais confiance à ma Pierre de Vie pour amplifier ma propre magie. La lumière verte apparut dans mes mains. Des petites billes jaunes émanaient de la jeune Moroshiwa, et s’installèrent auprès des antennes d’Orialis. Ces dernières se remirent à luire.

 Nos deux pouvoirs ainsi combinés semblaient faire des merveilles.

 Les paupières de la Noyrocienne s’ouvrirent lentement. Je la serrai contre moi. Asuna lui caressait doucement les cheveux.

 Notre amie nous exprima sa gratitude par un sourire radieux, mais se rendormit aussitôt, trop affaiblie. Je m’assurai de sa bonne santé et constatai qu’elle respirait correctement.

 Asuna observait, méfiante, les tuyaux briller d’une drôle de couleur, mélange du violet et du jaune or, et les bulles défiler à une vitesse fulgurante, comme affolées. Les tubes frémissaient en chœur, produisant un petit bruit sourd. Et pourtant, aucun garde à l’horizon, malgré nos méfaits.

– Cela risque d’exploser, alertai-je. Il faut sortir d’ici et mettre Orialis en sécurité.

 À peine avais-je prononcé ces mots qu’un tourbillon noir apparut au milieu de la salle, juste devant le trône. J’eus peur que ce soit l’Ombre, mais cette étrange tornade ne prit pas de forme particulière et stagna sur place.

 Nous déposâmes délicatement Orialis proche de l’entrée, prenant soin de l’adosser au mur.

– Veille sur elle ! lançai-je à Asuna en me rapprochant de cette terrifiante boule noire déchaînée.

 Elle atteignait presque le plafond, et devait faire environ trois mètres de diamètre. Elle pivotait sur elle-même, inlassablement.

 Du coin de l’œil, je vis qu’Asuna usait de son pouvoir de lévitation pour protéger Orialis, toutes deux en apesanteur dans sa bulle dorée. Excellent réflexe !

 Je respirai profondément.

La magie d’Orfianne ! Je la ressens enfin ! Nous avons réussi !

 Mon rayon lumineux naquit enfin de mes paumes. Je le propulsai contre cette magie obscure. Il atteignit le tourbillon de ténèbres, le transperça pour toucher son centre. Je maintins mon faisceau en un tir nourri. Sa taille diminua quelque peu mais il vibra avec force, produisant des sons graves, assourdissants.

 Je ne percevais qu’une faible palpitation de ma planète, et en captais difficilement l’énergie. Je plissai les yeux, aussi effrayée que déterminée. Je m’efforçai de propager la lumière, dans le but de l’entourer. Je visualisai mon rayon en train de l’encercler. Ma volonté, inébranlable, amplifia mon pouvoir, et cette pensée devint réalité.

 Je compris qu’Orfianne n’était pas ma seule alliée. L’Ombre avait raison. En restant si longtemps sur Terre, j’avais acquis une autre source de magie.

 Le fameux pouvoir de la pensée des Terriens.

 Ma lumière englobait entièrement cette nuée informe. Le vrombissement s’intensifia.

 Je sentis que tout allait bientôt exploser. Il fallait immédiatement faire sortir Asuna et Orialis. Je stoppai mon offensive, priant pour que ce soit suffisant.

 Asuna avait dû sentir l’imminente déflagration. Toujours dans sa sphère protectrice, avec Orialis contre elle, la jeune Moroshiwa s’approcha de moi, et se mit à chanter. L’aura dorée s’étendit au son de sa voix, incluant mon propre corps. Elle s’éleva dans les airs et nous transporta en dehors de la salle du trône, dans le couloir.

 Les murs tremblaient, comme si le royaume continuait de se défendre et cherchait à nous empêcher de fuir. Les tuyaux se mirent à rayonner de plus belle, alors que les statues et les colonnes commençaient à se fissurer. La sphère, devenue bicolore, à l’image du yin et du yang, s’arrêta brusquement de pivoter sur elle-même.

 Nous avions gagné la partie.

– Mon pouvoir de lévitation ne nous protégera pas des forces de l’explosion, seulement des débris ! s’alarma Asuna.

 Je formai vite un bouclier autour de nous.

– Tiens bon, Nêryah ! m’encouragea Asuna.

 Curieusement, un affreux moment de silence s’installa. Le calme absolu avant la tempête. Je regardai l’entrée de la salle du trône, anxieuse, et me concentrai sur la solidité du bouclier.

 Tout explosa d’un coup, répandant pêle-mêle éclats de statues et bris de colonnes.

 Je perçus à travers mon champ de force une lueur aveuglante. J’entendis un son tonitruant, indescriptible, qui allait probablement nous rendre sourdes. Tout se mélangea dans un terrible fracas : ombre et lumière, morceaux de pierre tourbillonnants dans les airs. Je n’arrivais même plus à savoir où je me trouvais, perdue au milieu du chaos. Je me recroquevillai contre les filles, fermai les yeux, focalisée sur le maintien de notre sphère protectrice.

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