Chapitre 18 :

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Ma bouche resta entre-ouverte un moment. Et mon poids retomba sur mon lit. Je pris ma tête entre mes mains. Il finirait par me rendre folle s’il n’avait pas encore réussi jusque là. Je soupirai et m’étalai en fermant les yeux. Quand je me redressai, je tombai sur Dorian qui avançait dans ma chambre et s’assit à mes côtés.

— T’as entendu ?

— J’ai écouté au porte… Le Lucas de Linda c’était bien lui avec qui t’étais hier soir ?

— Oui, murmurai-je.

— Et Nathan ne semble pas l’apprécier.

— Je ne sais pas pourquoi.

Dorian me dévisagea et je sentis la gêne me gagner. Au lieu d’attendre pleinement ce qu’il allait me dire, j’imaginai ma tenue du jour. Je me grattai la nuque en tournant la tête vers lui, et je l’interrogeai du regard.

— Quand allez-vous vous décidez de vous remettre ensemble ?

Ma bouche se décrocha et mes yeux s’écarquillèrent. Il rigola et je ne compris pas.

— Attends, tu craques pour lui, il vient de te dire qu’il t’aime, et tu ne comptes pas te remettre avec lui ?

— Pas tant qu’il ne me dira pas pourquoi il m’a abandonnée comme cela, dis-je durement.

Dorian me dit qu’il comprend, mais au fond, je crois qu’il ne comprend pas. L’opération retournement de cerveaux de Nathan à marcher sur lui, mais pas sur moi. Je regardai mon ami parti avant d’extirper des vêtements pour accéder à la salle de bain. J’ai besoin de prendre l’air, puis, si ce n’est pas Nathan qui va me révéler comment il a connu Lucas, peut-être que ce dernier aurait l’amabilité de me le dire. Dorian se chargera d’expliquer tout à Mallo et Dylan. Je partis de la maison, bien décidé à parler à Lucas. Le café regroupait toujours de fréquentation, de la plus saine à la plus malsaine. Je passais devant une table de garçons et je sentis leur regard sur moi alors que je m’approchai du bar. Lucas releva la tête et sourit. Je le lui rendis.

— Tu ne peux déjà plus te passer de moi, me taquina-t-il avec un sourire narquois.

— Ne t’y habitue quand même pas trop, je risquerai de te manquer après, rétorquai-je. J’aimerai bien de parler un peu, enfin… si tu as le temps, sinon je repasserai.

Il me dit d’attendre et se décala pour s’approcher d’une femme enrobée qui doit sûrement être sa mère. Lorsqu’il vint lui parler, elle s’afficha toute souriante et sembla acquiescer faisant bouger son gros chignon brun qui commençait à se défaire. Lucas lui déposa un baiser sur la joue et revint vers moi. Je remarquai que sa mère reprit un air maussade même si elle souriant au client qui l’interpellait pour lui passer une commande. Il revient le sourire, passant une main dans ses cheveux blonds-châtains.

— Ma mère est d’accord ! Un chocolat chaud ?

— Comment résister ? Ce sont bien les tiens les meilleurs !

Je le regardai préparer deux chocolats chauds. Puis le suivi lorsqu’il partit vers les tables. Il nous installa à la table derrière le groupe de garçons qui m’avait regardée lorsque je suis rentrée. Ils continuèrent à nous fixer mais je n’y prêtai pas attention. Tant qu’ils ne m’interpellèrent pas, je n’avais aucune raison de me méfier. Je m’installai à la table et prit la tasse entre mes mains sans la détacher de la table. Lucas jeta un regard devant lui et s’assit.

— Que me vaut cette faveur ? questionna Lucas, avec un sourire taquin collé au lèvre.

— Je voudrais savoir, si tu connais un certain Nathan ?

— Laurianne... comment connais-tu ce gars ?

— Un vieil ami, justifiai-je, en tentant de paraître convaincante.

Il parut me croire sur parole. Je ressentis un léger scrupule à lui mentir, même si c’était pour satisfaire ma curiosité. Je devais savoir ce que traficotait et avait traficoté Nathan. Qu’importe la manière dont j’y arrivais, je devais découvrir tout cela.

— Laurianne… Je ne crois pas que ce soit une idée très judicieuse.

— Pourquoi cela ? Ce n’est pas pour moi que je fais cela, mais pour une amie à moi qui a beaucoup souffert de son départ précipité et injustifié. Je t’en pris, dis-moi tout ce que tu sais, murmurai-je.

Il semblait troublé. Je me mordillai la lèvre pour contenir mon stress et ne pas taper du pied. Il me sondait du regard et je priai pour qu’il ne perçoive pas ma tension. Oui, je mentais en prétextant qu’une amie à moi allait mal au départ de Nathan, cette personne, c’était moi. Pola aussi n’allait pas bien lors de son départ, mais je ne pouvais pas la faire débarquer dans cette histoire alors qu’elle ne passait que son temps à dormir ou déprimer. C’était horrible. Je jouais gros, je ne connaissais pas bien Lucas, mais il ressemblait au style de personne douce mais qui pouvait devenir le diable si on lui cherchait des noises. Mais j’avais bien l’impression de l’avoir dupé.

— Je ne peux pas te le dire…

— Je t’en pris !

— Mais je peux te le montrer, déclara-t-il précautionneusement. Pas tout de suite, mais cette après-midi vers quatorze heures. Je te préviens, ce n’est pas très glorieux. Ni pour lui, ni pour moi. Je veux juste que tu me promettes de ne pas juger. Nous avons tous nos raisons, lui aussi devais les avoir.

— Devais ?

— Écoute, pour l’instant je ne peux pas t’en dire plus. Je devrais ni t’en parler ni prévoir de te mêler à ça. Mais c’est bien parce que c’est toi.

Je me sentis mal à l’aise, mais je m’accrochai. J’eus soudainement peur des affaires auxquelles Nathan se trouvait impliqué, ainsi que sur ce qu’il avait pu faire. C’était sûrement par peur de voir son image se ternir. Surtout que je n’aurais pas l’explication car elle ne pouvait venir de lui. Et il s’obstinait à rien me révéler. Comment pouvait-il réussir autant à tout dissimulé ? Je passai une mèche de mes cheveux derrière mon oreille et je l’observai inscrire quelque chose sur une serviette en papier et le glissai jusqu’à moi.

— Je te fais confiance. Cette adresse, personne ne doit la connaître. Brûle-la quand tu seras parti. Et surtout, ne te trompe pas d’endroit et ne reviens plus jamais là-bas. Ce n’est pas un endroit pour toi.

Je hochai légèrement la tête et pliai la serviette soigneusement avant de la ranger. Lucas s’excusa de devoir reprendre son service et débarrassa la table. Lorsque je voulus payer, je lui tendis un billet mais il referma ma main dessus avec un sourire.

— Cadeau, souffla-t-il. Pour ton plus grand plaisir.

— Merci !

Je faillis rester immobile sans rien faire, mais je lui déposai un baisé sur la joue avant de le regarder s’éloigner. Il avait paru être déstabilisé un petit instant. Lorsque je me retournai pour partir, je remarquai les hommes de la table juste derrière qui me fixait. J’adoptais une expression lointaine. Je filai dans la rue, le nez collé au téléphone, devant un message de Nathan :

Ce soir, vient chez Vanessa avec Dorian et Mallo.

Je soupirai. Je n’avais plus qu’à prier pour qu’il n’avoue pas tout ce soir. Sinon, je me serais démenée pour rien. J’avais tout de même peur de ce que j’allais découvrir, mais j’avais l’intime conviction que c’était nécessaire.

Mes doutes se renforcèrent quand je vérifiai dix fois le nom de la rue avant d’être convaincue de m’y trouver. La rue était obscure malgré la lumière de la journée. Un quartier de dealer, cela ne faisait aucun doute. Sur chaque côté de la route, des hommes fumaient des substances illicites à s’en retrouver déchirer pendant que d’autres me regardaient. Je traversai sans m’arrêter, la tête baissée, loin d’être rassurée. Dans quoi c’étaient mis Nathan et Lucas ? Je sentis une main m’attraper l’épaule et me projeter contre le mur. Je serrai les dents et rencontrai le regard fou d’un homme qui se retrouva vit assommé à terre.

— Tu vas bien ? s’inquiéta Lucas en serrant les bras et me regardant droit dans les yeux.

— Dans quelles galères toi et Nathan vous êtes vous fourrés ?

Je crois bien que ma voix se faisait défaillante ou suppliante ou voir pire, désespérer. J’en avais déjà mal au cœur. Mais qu’avait-il fait durant son absence ? Pour une fois, j’avais peur de trop en découvrir. Je réprimai de secouer la tête. Je ne devais pas penser cela. En plus de Nathan, il s’agissait de Vanessa ! Mes deux amis me devaient la vérité, à moi et à Dorian !

— Sûrement dans des problèmes différents sans doute puisqu’il n’était pas particulièrement mon ami, annonça calmement Lucas.

J’inspirai un coup alors que Lucas attrapa ma main fermement en jetant des regards autour de nous avant de m’entraîner avec lui.

Je ne savais pas s’il était préférable que je me défasse de son emprise ou que je le laisse m’entraîner. Je voulais savoir, je devais savoir. Si Lucas était la seule personne qui détenait les informations que je convoitais, j’allais devoir faire avec. Il me serrait la main comme si ma vie en dépendait. J’espérai qu’il ne découvrirait pas qu’un jour, je lui avais menti sur tellement de choses… Je le décevrai forcément, et je pouvais sortir de sa vie très facilement. De plus, c’était la meilleure chose à faire, mais je ne voulais pas vraiment. Il m’emmena au fond de la rue sous les regards de tout le monde et ouvrit une porte en métal noir qui résonna et me poussa avant de la refermer derrière nous et d’allumer la lumière. Il ne faisait guère plus chaud qu’à l’extérieur. La pièce était grande et vaste et il y avait beaucoup de meubles de rangements contre les murs, quelques tables et trois petits canapés. Mais ce qui attira un peu plus mon attention fut une grande carte de la ville avec des inscriptions et des photos de personnes. Il lâcha ma main devenue moite et je ne la fis même pas bouger même si des picotements la parcouraient. Je restai un moment à buter sur les cartes et les visages. Il y avait une photo de Nathan épinglée à je ne sais quel lieu. Je ne reconnais pas le jeune homme sur la photo juste à côté de lui, mais il me disait quelque chose. Je finis par me tourner vers Lucas, assit sur le canapé qui m’observait en passant une main dans ses cheveux.

— C’est quoi cet endroit ? Un QG pour un gang qui traîne dans des affaires de drogues ou autres choses pas très juste ?

— Tout juste, souffla-t-il.

Je fermai les yeux. Nathan… dans quoi t’es-tu fourré avec Vanessa ? Pourquoi ? Pourquoi toi. Je ne dois rien, laisser transparaître. Et Lucas ? Pourquoi fait-il cela ? Il n’a jamais l’air shooté ou suspicieux.

— Je ne me drogue pas, je fais juste cela pour l’argent. Ton ami non plus d’ailleurs, en tout cas, il était toujours sérieux et extrêmement durs dans ses expressions. On ne pouvait pratiquement rien tirer de lui. On a très peu d’informations sur lui. Mais comme je te l’ai dit, il ne fait plus partie du trafic.

— Alors pourquoi l’avez-vous toujours dans vos photos dans ce cas ?

— Longue histoire… pénible pour toi et ton amie si tu veux vraiment savoir.

— Je veux vraiment savoir, répliquai-je fermement.

Il tapota à côté de lui pour m’indiquer de m’asseoir. Je m’installai donc à ses côtés, déglutissant péniblement. Il me lança un regard compatissant. Il toussota, sûrement gêné et se tritura les mains avant de prendre la parole :

— Il a fait partie d’un gang pour je ne sais quoi. Mais un jour, nos deux gangs se sont alliés pour un braquage. Il faisait partie de quatre personnes, deux de leur gang, deux du nôtre qui devait faire le braquage. Les trois autres sont morts, et il a été grièvement blessé et a réussi à se sortir je ne sais pas comment auprès de la justice.

— Et comment ça se faisait que vous l’avez donc toujours dans votre ligne de mire ?

— Tu ne connais pas le monde des gangs. Il a peut-être été gravement blessé, et eux des problèmes dans la justice, il n’est pas mort. Et c’est la tout le problème. Si un meurt, tout le monde meurt.

— Vous allez le tuer ?

— Non. Pire… On voulait prendre son ex copine, qui apparemment, il est encore très attaché voir amoureux d’elle. C’est une vengeance parfaite pour gang. Et tout doux ! Si tu crois que je suis d’accord avec ce genre de principe, ce n’est pas vrai. J’étais juste censé trouver sa copine. Je pensais que c’est toi, mais je ne vais pas t’embêter à te faire cracher le morceau, pas la peine de me parler de ta pote. Je trouverai sans.

S’il savait que l’ex copine qu’il cherchait se trouvait juste à côté de lui. Je maîtrisai une vague de stress et de peur qui rencontrait ma barrière. Je ne savais pas à quoi je ressemblai, mais je n’avais pas l’air de me trahir. Je ne savais pas du tout comment cela allait se passer, mais j’allais hurler sur Nathan quand je le verrais. Pourquoi diable avait-il fait partie d’un gang s’il ne s’était pas drogué ? Pourquoi avoir tout quitté ? Tout abandonner comme cela, ses amis, sa famille, moi… D’autres questions se multipliaient dans ma tête suite à cette réponse, et c’était plus frustrant qu’autre chose. Puis, je commençai à me sentir mal dans cette pièce, face à un homme qui avait comme ordre de me retenir prisonnière pour je ne sais pas quoi qui n’était pas bon à mon égard.

— Et… Aurais-tu déjà entendu parlé d’une certaine Vanessa ?

— Humm… Son prénom me dit quelque chose, attend… Ah oui ! C’était une jolie fille qui se fournissait et qui faisait un peu partie du gang de son pote. Il se connaissait avant je crois. Peut-être que tu la connais ? Elle pourrait m’identifier à connaître la copine de ton pote, mais il ne vaut mieux pas que je m’approche d’elle.

Je m’abstiens de demander pourquoi car cela me semblait étrange. Vanessa se droguait… Peut-être même durant sa grossesse, même avant et après. Maintenant peut-être ? Comment ma meilleure amie avait-elle pu toucher cette extrémité-là ? Je tentais de dissimuler mon expression outrée. Heureusement pour moi j’y arrivai et trouvai rapidement une excuse puisque mon rôle constituait à mentir en ce moment même.

— Je suis amie avec son frère, c’est pour cela. Je savais qu’elle était partie, mais je ne savais pas pourquoi. Je me demande si je dois le dire à son frère…

— Dans quelques années peut-être, mais pas dans l’immédiat je pense. Le temps de prendre du recul.

Je hochai la tête et m’enfonçai dans le canapé en fermant les yeux. Est-ce que j’avais plus d’amis dans ces histoires louches que je le pensais ?

— Et Linda ? Ne me dis pas qu’elle est impliquée dans cela elle aussi.

— Non, ne t’inquiète pas pour ta pote. Elle a peut-être des amis qui ramènent de la drogue pour ses fêtes, mais elle n’y touche jamais même alcoolisée. Tu as ma parole.

Je restai muette en secouant légèrement la tête. Il se leva.

— Bon… Ils vont finirent par arriver alors tu dois vite partir. Si jamais ils te croisent, ils seront moins gentils que moi. Je te veux pas te causer d’ennuis. Allez-va.

Je comprends, et je n’ai vraiment pas envie de rencontrer tous ses amis de son gang. Je ne veux même pas rentrer dans ses affaires de gangs, de bagarres et de trafics de drogues. Je me relevai et le serrai dans mes bras en lui disant milles merci. Je crois bien qu’il rougissait, cela me fit rire. Je me repris en me disant que je ne pouvais pas être si proche de lui alors que je m’apprêtai bientôt à disparaître de sa vie. En effet, lorsque je traversai la rue, tête baissée avec ma capuche, une bande d’homme de tout âge passèrent. Je me pressai et regardai mon téléphone. Finalement, j’étais pressée d’être ce soir.

Avec Mallo et Dorian, on contempla longuement la porte de l’appartement de Vanessa. Elle n’était pas particulièrement belle, mais on n’avait ni envie de frapper, ni d’entrer dans l’appartement. Je n’avais pas encore parlé à mes amis de mes récentes découvertes, je ne savais pas ce que je devais faire, j’étais encore un peu trop ébranlée. Puis, je n’avais pas toutes mes réponses. S’il ne se droguait pas, que faisait Nathan dans ce gang ? Il n’avait pas besoin de se faire de l’argent comme Lucas. Je devais d’abords lui en parler. C’était le moindre des respects. J’échangeai des regards entendus à mes acolytes et je frappai cinq coups secs. Ce fut Nathan qui m’ouvrit, un sourire tendu aux lèvres. Je n’avais pas le cœur de sourire mais je le lui en offris un quand même, mais triste. Vanessa nous demanda de nous asseoir sur le petit canapé. Son fils dormait souvent. Elle et Nathan, restèrent debout, ils semblaient gênés.

— Abrégez, grogna Mallo qui n’était pas d’humeur.

— Vous devez arrêter d’enquêter sur nous, déclara Nathan. Vous serez tous en temps et en heure, mais ce n’est pas maintenant !

— Puis, on ne veut pas vous impliquez dans quelques choses que vous risquez de regretter, justifia Vanessa.

— Comment si vous aviez été forcés de faire cela, marmonnai-je.

— De quoi parles-tu ? questionna-t-il en me fixant.

Je croisai son regard et je perdis mon sang-froid et je bondis du canapé pour leur hurler dessus.

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