Chapitre 2 :

10 minutes de lecture

Pola me regarda interloquée et abasourdie. Ce que je venais de lui avouer lui semblait totalement étrange. Et je ne pouvais que la comprendre.

— Attends... Tu viens de m'avouer que tu es restée en faites six ans avec Nathan et que personne à par tes frères et les siens étaient aux courant ? Laurianne, c'est juste complètement dingue. Pendant quatre ans vous vous êtes cachés, tout ça en vous séparant puis en vous rabibochant de multiples fois pour finir séparer il y a quelques années...

— Bah ouais.

— Tu me surprendras toujours, conclut ma confidente.

Était-ce une bonne chose ? Je n'en savais rien. Pola me promit de ne pas l'inviter aux mêmes soirées que moi et m'assura qu'il y avait très peu de chance que je le rencontre dans un endroit aussi peuplé. C'était en vain, maintenant qu'elle avait parlé de lui, il n'allait pas sortir de mon esprit. Pas avant une semaine au moins.
Je soupirai.

J'avais mis tellement de temps, usée tellement de volonté pour réussir à l'oublier. Cela m'avait parue insurmontable et interminable. J'avais passé les pires moments de ma vie, me demandant si c'était réellement terminé, ou s'il allait revenir vers moi une nouvelle fois. Une fois de plus. Mais il ne l'a jamais fait. Cette fois-là, il avait bien abandonné. Il était bel et bien parti. Sans nous donner une chance. Sans un mot. Sans une explication. Il était parti tel un invisible, mais il était resté en tant que fantôme. Un beau fantôme qui me suivait partout à la trace avant que j'enfouisse mon dernier souvenir de lui, de nous, dans les recoins sombres de mon esprit. Et cela ne me paraissait pas si lointain. Il était vrai, que je l'avais rayé de ma vie ainsi que tous ce qui se rapportait à lui. Pour mieux ressortir de la rupture je devais l'oublier en son intégralité. Mais ce n'était pas une solution durable, pas tant qu'il faisait partie des gens que je connaissais aussi. Il n'avait fallu qu'entendre son prénom pour qu'une vague d'émotion me submerge.

— Laurianne ! Hey oh ! (Elle claqua des doigts devant ma figure). J'aimerais bien que tu reviennes sur Terre. Serait-ce trop te demander ?

Je ne lui lançai qu'un bref regard pour ne pas lui en lancer un noir. Pola était une des filles les plus rêveuse que je connaissais. Elle était pratiquement tout le temps en train de se perdre dans les profondeurs de son esprit, dans des pensées presque improbables.

— Oui, quoi ? M'as-tu dit quelques choses ? repris-je en tournant ma tête vers elle.

Pola prit une expression ennuyée que je savais fausse puis son visage s'apaisa de nouveau même si j'arrivais à remarquer une lueur d'inquiétude dans son regard lorsqu'elle me regardait.

— Je ne sais pas... Tu n'avais pas l'air d'aller très bien, comme si tu te remémorais le cauchemar que tu avais fais cette nuit.

Je levai les yeux pendant que ma bouche se redressait en un demi-sourire. Que pouvais-je dire à cela ? Pola faisait toujours des comparaisons assez drôles qui possédaient quelques points en communs avec la vérité mais aussi qui n'avaient rien à voir. Heureusement, j'en avais l'habitude. C'était quotidien ce genre d'égarement.

— Je n'ai pas fait de cauchemar la nuit dernière, déclarai-je.

Je l'entendis soupirer en fermant les yeux avant de prendre la parole :

— Qu'as-tu, alors ?

— C'est juste que... Ça me fait tellement mal au cœur de repenser à lui. Cela a été très difficile de l'oublier. Je me suis prise mes souvenirs, nos souvenirs en pleine face parce que je n'ai pas été capable de les stopper avant que ça me submerge complètement.

— Je comprends, je suis là, ne t'inquiète pas. Et, je pense que tu peux en parler à Dylan, c'est ton meilleur ami. Tu le connais depuis la petite section de maternelle, tu n'as même pas besoin de faire quoique ce soit pour lui faire confiance. Il a toujours été là pour toi tout comme tu as été là pour lui, même dans les moments difficiles. Je lui en parlerai, il sera le premier à faire attention à toi.

Je fis un pâle sourire avant de m'emparer d'un magazine.

— Comment ça se passe entre vous ? C'est toujours l'amour fou, je suppose. Vous pensez sûrement au mariage. J'ai hâte de voir plein de petites Pola et de petits Dylan vous donnez la vie dure, commentai-je.

Je fus surprise d'entendre une nuance de sarcasme et d'envie dans ma voix. Je n'avais jamais vraiment voulu être en couple et ce n'était arrivé qu'une fois, donc il n'y avait aucune raison d'être à la place de Pola. Le sarcasme, lui, devait sûrement venir de Nathan. Je ne devais pas penser à lui.

J'attendais patiemment la réponse de ma confidente qui ne vient pas. Pourtant elle n'était pas partie faire autre chose, je l'aurais entendue se lever du canapé. Je redressai ma tête, l'article que j'étais en train de lire n'était pas vraiment intéressant, je l'abandonnai donc sans peine. Pola était restée paralyser sans réponse et fixait le magazine que je tenais toujours en main. D'abord pensant que c'était dû à la couverture, je l'observai, mais elle n'avait rien de particulier. Je tournai la tête vers elle et passai ma main devant ses yeux.

— La communication entre lui et moi est pratiquement au point mort, répondit-elle.

J'en fus surprise. Ils avaient l'air de former un couple radieux pourtant.

— Il travaille beaucoup et reste fatigué tout le temps. Il passe plus de temps à travailler avec Mallo qu'avec moi. C'est Mallo qui est le plus présent dans sa vie que moi.

J'étais partagée entre le rire et la peine pour mon amie. C'était assez drôle de la voir aussi jalouse de Mallo pour pas grand-chose. En même temps, je voyais bien que cela l'attristait beaucoup. Je devais faire quelque chose pour mes deux amis.

— C'est chou de te voir jalouse de Mallo, ça montre que tu tiens beaucoup à Dylan. Mais il n'y a aucune raison pour, ils sont collègues c'est tout. La prochaine fois que je le vois seul je lui en parlerai. Compte sur moi.

Elle me fit un sourire avant de désigner la porte de la cuisine d'un geste de la tête.

— Il vient de passer. Il fait je ne sais quoi dans la cuisine. À toi de jouer, je te laisse le champ libre mais ne fais pas de gaffe. Je compte sur toi.

Elle me mettait légèrement la pression, c'était assez inquiétant. Pola en attendait beaucoup de cette discussion. Et tout reposait sur mes épaules. À une époque, tellement de personnes comptaient sur moi et avaient besoin de moi. Aujourd'hui, en cas de coup dur c'était toujours le cas.

Notamment ma mère quand mon père l'avait quittée pour une autre femme, elle était en dépression et j'étais là pour la soutenir et la faire remonter la pente petit à petit. J'avais réussi et mon père était revenu, j'ai eu du mal à lui pardonner, j'ai mis longtemps, ma mère non. Mon père était l'amour de sa vie et elle ne pouvait abandonner comme cela. Je ne savais pas si leur amour était plus fort ou plus fragile, mais ils avaient cassé le mythe du couple parfait à mes yeux. J'avais beaucoup souffert de leur séparation, tiraillé par mon père et ma mère. J'avais décidé de ne pas rentrer dans leur querelle de couple mais d'être un soutien quand ils en avaient eu besoin. Mes parents m'ont souvent dit que c'était grâce à mes conseils qu'ils avaient ouverts les yeux et c'étaient remis ensemble. Cela m'était égale que ce soit grâce à moi. J'avais l'habitude de jouer au cupidon pour tout le monde. Amis et famille.

Je regardai Pola qui me regardait avec tant d'espoir que cela m'en fit trembler. Encore une fois, je devais jouer l’entremetteuse, la réparatrice de couple, le cupidon humain. À croire, que j'étais née dans ce but serviable et honorable. En faites, je le faisais que parce que je trouvais cela nécessaire. Peut-être que cela faisait de moi une bonne personne... L'étais-je ? Je ne savais pas.

Je détournai le regard de celui de Pola et me dirigeai vers la cuisine de l'appartement. Je rentrai sans un bruit et refermai la porte derrière moi. Quand je me retournai, Dylan me fixa en souriant, un verre d'eau à la main.

— Laurianne ! Cela faisait un moment qu'on ne s'était pas retrouvé vraiment tous les deux comme le bon vieux temps lorsqu'on était gamin. Ce temps-là me manque, on a tellement plus de responsabilité adulte. S'en est presque décourageant quelques fois.

Je me rapprochai de lui alors que je repensais à Pola. Je devais faire comprendre à Dylan qu'il devait être plus présent dans son couple et non qu'avec ses amis. Lui et Pola méritaient un avenir radieux et génial. Ils devaient se battre pour leur couple.

— Tu es très occupé en ce moment, j'ai cru comprendre.

— Ouais... Je n'ai plus beaucoup de temps pour moi, je suis exténué à chaque fin de journée. Tu verrais tout le travail qu'on a avec Mallo !

— Justement ! Il serait peut-être temps de faire quelques pauses ou de réduire la charge de boulot que vous avez. Je veux dire, vous êtes en train de vous tuez à travailler alors que ce n'est que le début de très longues années. Vous devriez calmer la cadence. Pola m'a dite que tu étais moins présent dans votre couple. Tu lui manques. Je sais que tes parents te demandent une réussite exemplaire, mais pense à toi aussi. Toi et elle vous vous aimez, vous êtes ensemble et vous avez emménagé tous les deux. Dans la logique des choses les prochaines étapes c'est le mariage et des gosses, ou juste un des deux. Alors soyez heureux et profitez. Ne laisse pas le bonheur s'échapper alors qu'il est si près.

Il paraissait gêné. Je n'insistai pas plus, j'espérai qu'il avait juste compris le message. Puis je fronçai les sourcils lorsque que je remarquai une chaîne d'argent autour de son cou.

— C'est à Mallo cette chaîne. Il ne prête pas ses affaires d'habitude, fis-je remarquer.

Je crus voir Dylan rougir pendant un bref instant puis se ressaisit. Cela devait être mes yeux. Ce n'était pas possible autrement. Ce n'était pas le genre de mon meilleur ami de rougir.

— Ouais... D'ailleurs tu m'as faite penser que je dois le lui rendre. J'avais une réunion importante hier et je ne savais pas quoi mettre pour être classe. Il m'a donc prêté sa chaîne.

Cela ne devait donc pas être la chaîne qui avait de l'importance aux yeux de Mallo. Pourtant j'ai cru l'avoir reconnue. Je hochai la tête puis consultai ma montre. Mes cours commençaient bientôt. Je lui dis donc au revoir et sortir de la cuisine avec lui. Je fis un clin d'œil à Pola puis la bise et hurlai un "à ce soir" à Mallo avant de quitter l'appartement.

Je n'arrivais pas en retard en cours, mais Kristia, une amie de la fac oui. Elle se fit réprimander malgré le fait qu'on soit à l'université et que les professeurs avaient maintenant moins de pouvoir sur nous, élèves. Le reste de la journée se passa sans dérapage et j'en étais bien contente. Bien évidemment, les nouveaux colocataires me restaient toujours à l'esprit. Qui étaient-ils ? Nathan quant à lui resta en retrait dans ma tête, et c'était bien comme cela. Pendant la pause du déjeuner, on imagina avec Kristia à quoi les nouveaux allaient ressembler. J'avais rencontré Kristia en fac de droit, elle aussi voulait faire journaliste, mais on était tous obligée de faire du droit avant la fac de journalisme, c'était ainsi. On s'était liée d'amitié et on restait ensemble la journée.

Il était dix-sept heures lorsque l'on se sépara pour rentrer chez nous. Linda m'avait dite de ne pas être en retard, mais je ne savais pas exactement quand ils allaient arriver avec le père de l'un d'eux. Cela ne me préoccupa pas, cela ne serait aucunement de ma faute si j'étais en retard mais celle des transports en commun. Mallo m'envoya un SMS pour me dire qu'il rentrerait beaucoup plus tard car il devait peaufiner quelques détails sur un projet. Je ne pris pas la peine de répondre.

Puis, sortant du métro, je marchai quelques minutes pour rejoindre la maison. Et, ce que je redoutais était sous mes yeux. Ils attendaient devant chez nous, leurs baguages à la main. Ils se tournèrent vers moi et je restai paralysée, la bouche ouverte. Je devais vraiment paraître extrêmement cruche.

L'homme le plus âgé était le père accompagnant les deux jeunes hommes. Cet homme devait avoir la cinquantaine. Il avait les yeux marron et des cheveux noires, il paraissait assez sévère et était intimidant à mes yeux fut un temps mais plus maintenant.

Les deux jeunes hommes avaient mon âge, je le savais.

L'un d'eux était brun et plus petit que l'autre. Il avait une tête allongée et un regard à la fois sérieux et espiègle. À l'époque il était très intelligent et faisait toujours partie des premiers avec Dylan. Ils avaient d'ailleurs eux le droit tous les deux, de bénéficier du pôle d'histoire en sixième.

L'autre jeune homme, était le fils de l'adulte. Comme le disait Pola, était extrêmement beau à mon goût. Depuis le temps il avait quand même pris quelques centimètres en plus. Son sourire de tombeur avait laissé place à une bouche dessinant un o de surprise. Son visage était toujours aussi magnifique et ses cheveux noirs raides étaient toujours en bataille puisqu'il ne les coiffait que très peu. Ses yeux d'un bleu extraordinaire étaient toujours aussi profonds avec une nuance d'espièglerie comme son meilleur ami.

Pourquoi je n’avais toujours pas de chance !

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 3 versions.

Vous aimez lire Starry Sky ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0