Une silhouette dans la nuit

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Contraintes :

Sujet : Une voleuse instable combat un acrobate pour venger ses parents.

Le texte se terminera par "Plus personne ne le revit. "

D'un coup de poignet habile, une silhouette fine s'introduisit dans une maison. Son habitant, reconnu dans toute la région, ne craignait pas pour sa vie et ne prenait donc aucune précaution pour la protéger. Sans un bruit, l'ombre s'avança sur le parquet neuf d'un couloir à peine éclairé par quelques bougies en fin de vie. Malgré les nombreuses richesses qui ornaient le corridor, la silhouette n'y prêta guère attention. Elle avait amassé assez de butin au fil des années, son objectif aujourd'hui était tout autre. Guidée par son instinct de cambrioleuse, la jeune femme encapuchonnée se dirigea vers la pièce d'apparence plus décorée.

Durant quelques instants, elle resta dissimulée derrière l'encadrement de la porte, certaine d'avoir entendu un bruit de respiration. Puis, elle se pencha un peu en avant, afin de jeter un coup d'oeil dans la pièce. Contre toute attente, le propriétaire, bien que dans sa chambre, ne dormait pas le moins du monde. Un homme d'âge mûr, assis dans un fauteuil de velours rouge, attendait patiemment de découvrir davantage l'individu qui s'était introduit dans sa demeure. Surprise de croiser le regard affûté de sa victime, la jeune femme se recula brusquement, toujours dans le plus grand silence.

" Montre-toi. Rien ne sert de te cacher puisque je sais que tu es là. Qui es-tu ? Que veux-tu ? "

Avec un grand soupir, la cambrioleuse s'avança d'un pas, son poignard fermement ancré dans sa main.

" Qui es-tu ? reprit l'homme. "

Pour toute réponse, la jeune femme ôta sa capuche, dévoilant une cascade de cheveux roux, presque dorés sous la lueur frêle des bougies. Sur son visage fin, une longue cicatrice, semblable à une brulure, défigurait sa joue ainsi que le côté de son front. Bien que l'étonnement transperçât l'homme, il n'en laissa rien paraître.

" Je vois, déclara-t-il seulement. Que puis-je faire pour toi ?

  • A votre avis ? cracha la jeune femme. Que pourrait faire le plus grand acrobate de la cité pour la fillette qu'il a défiguré, en plus d'en avoir tué les parents ?
  • C'était un accident. "

Malgré son ton calme et apaisant, la jeune voleuse ne parvenait pas à le croire.

" Un accident ? C'est ce que disent tous les meurtriers après avoir commis leurs méfaits !

  • Tu me sembles bien mal placée pour parler de criminels, jeune fille. Si ta réputation n'est plus à faire, sache qu'elle ne m'impressione pas.
  • Je ne cherche pas à vous impressioner.
  • Alors que cherches-tu ?
  • Ma vengeance. "

Un sourire narquois se dessina sur le visage marqué par les ans de l'acrobate. L'aveuglement de la voleuse l'amusait.

"Me tuer te rendra-t-il la vie plus belle ?

  • Non. Mais je brûle d'envie de le faire. Depuis toutes ces années, ma lame n'attend que votre chair.
  • Voilà de bien dures paroles pour une enfant de ton âge.
  • Je ne suis plus une enfant. Plus maintenant.
  • C'est vrai. Tu t'apprêtes à doubler ta réputation de voleuse à celle de meurtrière. Pas vraiment enfantin comme comportement. Dis-moi, as-tu déjà ôté la vie d'un homme ?
  • Epargnez-moi vos leçons de moral, vous n'avez pas idée de ce que j'ai fait et vécu.
  • Je ne l'ai jamais prétendu. Je te demande juste de réfléchir, car ce que tu t'apprêtes à commettre sera irréparable. Je comprends que tu m'en veuilles, quoique je n'ai rien à voir avec le terrible accident qui t'a enlevé tes parents.
  • Vous en êtes sorti vivant. Pas eux.
  • Tu me reproches donc de vivre ? Alors qu'eux ne sont plus ? Où te reproches-tu toi-même de vivre ? Ne me mêle pas à tes propres démons.
  • Oui, je vous reproche de vivre et de les avoir laissés mourir. Oui, je vous reproche d'avoir poursuivi et réussi votre vie alors qu'eux sont restés sur le bord du chemin. Que je suis restée sur le bord du chemin.
  • Tu n'as jamais voulu de mon aide.
  • Je refuse votre pitié.
  • Alors tue-moi. Je n'ai pas peur de la mort. Et de toute façon, ma carrière d'acroate s'arrête ici. Tilo La Plume a donné son dernier spectacle ce soir. Personne ne se rendra compte de ma mort, tout comme personne ne se rendra compte de ma vie. Fais ton choix, mais fais-le vite, j'ai toujours été un brin impatient. "

Troublée de ces paroles, la voleuse reserra ses doigts autour du manche de son poignard. Les débris de sa volonté luttaient dans son esprit pour retrouver leur fortification passée.        

***

Il faisait nuit. Le vent soufflait à peine sous la pleine lune. Les lumières aux fenêtres étaient éteintes, la rue appartenait aux animaux errants. Illuminée par le faible scintillement des étoiles, une silhouette fine courait sur le toit de d'une gigantesque demeure. La demeure du grandiose Tilo La Plume. Sa promesse à la cité fut respectée. Plus personne ne le revit.

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