Journal du terrible pirate Homlets, 15 octobre de l'an de grâce 1725.

Grande victoire ce jour. Nous avons capturé un galion espagnol, rien que ça ! Mes gars sont aux anges, même si comme les autres gentilshommes de mer, nous sommes condamnés à l'Enfer. En même temps, qu'importe l'après-vie ? Le paradis est ici : écumer les sept mers, voler du butin, le dépenser à boire du rhum, écumer les sept mers... bref. Ce soir, nous retournons boire sur le plancher des vaches. Si nous continuons comme ça, peut-être que nous deviendrons aussi célèbres que Bartholomew Roberts lui-même – Satan ait son âme ! Évidemment, mieux vaudrait ne pas finir aussi bêtement que lui. Nous devons... non, nous pouvons faire mieux encore !

16 octobre de l'an de grâce 1725.

Quelle soirée mémorable, hier, au port ! J'en subis encore le roulis rebelle de l'alcool. Mais surtout, surtout, j'ai entendu parler d'un mystérieux trésor, quelque part dans l'archipel des Bermudes, sur une île non répertoriée. Il s'agirait du mythique « chaudron des leprechauns ». Un chaudron rempli d'or, ainsi nommé parce qu'il est aussi insaisissable que les créatures féeriques issues du cerveau délirant des marins d'eau douce superstitieux ! Mon second, Thomas, pense que ce n'est qu'une rumeur propagée pour piéger les bons et courageux gentilshommes comme nous. N'importe quoi. Le gars qui m'en a parlé, c'est le plus proche ami du cousin de la mère de mon frère de lait. Et c'est lui aussi un pirate.

Un homme de confiance, un vrai ! Cette légende a forcément un fond de vérité, comme toutes les légendes. Je vais aller voir ça de plus près, une fois que tout l'équipage aura dessaoulé et que ma chambre aura fini de tanguer comme en pleine tempête.

17 octobre de l'an de grâce 1725.

En route pour les Bermudes, moussaillon ! Au vu de notre position et du climat clément, nous devrions atteindre notre objectif d'ici une semaine. Il me tarde de découvrir cet inestimable trésor.

Thomas est toujours aussi grincheux. Tout ça parce que d'après cet incorrigible imbécile à la tête farcie d'histoires, le compas de Christophe Colomb s'est déréglé quand cet imbécile est passé par l'archipel susmentionné. Pures élucubrations d'un esprit perturbé ! Il a lu trop de livres, son cerveau a fini par surchauffer... Pour le rafraîchir un peu, j'ai ordonné à mes bons marins de lui faire visiter le dessous de la coque.

24 octobre de l'an de grâce 1725.

Nous avons atteint les Bermudes hier. Il nous reste à découvrir l'île « dont la position n'est pas mentionnée sur la carte », selon les propres dires du meilleur ami du cousin de la mère de mon frère de lait. Pour l'instant, rien de tel à l'horizon. En revanche, un grain se prépare, et un sérieux ! J'ai rarement vu le ciel aussi noir quand le soleil devrait être au zénith ! Les éclairs se succèdent à une allure telle qu'on se croirait sous les flashs d'une horde de paparazzi enragés... Mais qu'est-ce que je raconte au juste ? J'ai dû boire trop de rhum hier soir, cette phrase truffée de mots inexistants n'a aucun sens. Le vent forcit de manière spectaculaire, il est temps de ferler les voiles si nous ne voulons pas perdre la mâture.

25 octobre de l'an de grâce 1725.

Morbleu, quel enfer ! Cette tempête a bien failli vaincre notre vaillant navire ! Nous voilà échoués sur un rivage inconnu. La coque n'a pas subi trop d'avaries mais le manque de précision de la carte nous oblige à une escale forcée. D'un autre côté... Cela signifie que nous avons été amenés au trésor par la tempête ! Pendant la réparation du bâtiment, j'irai explorer l'intérieur des terres avec quelques hommes de confiance afin de trouver ce maudit trésor. Le soleil est de retour, il y a même un arc-en-ciel. À défaut de mieux, nous allons marcher dans sa direction, tiens ! C'est peut-être un signe que le diable nous envoie !