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Nous escaladâmes la petite colline à moitié nus le plus rapidement possible. Heureusement que la maison était perdue loin du village. Un passant aurait vu deux individus courant dans l'herbe ; l'un à moitié enroulé dans une couverture et l'autre cachant seulement ses parties intimes avec des vêtements. Ça aurait fait les gros titres dans les torchons à ragots. Nous, cela nous rendait hilares.

La maison était calme, Fanny et Andreas dormaient encore. Nous montâmes les marches de l'étage le plus silencieusement possible en refrénant nos éclats de rire. A chaque pause, à chaque changement de pièce nous nous embrassions. Je refermai la porte de ma chambre doucement le front presque collé dessus afin de contenir le déclic de la serrure, quand je me retournai, je le vis debout devant moi m’attendant la main tendue. Il m’entraina vers lui, me serra contre lui tout en m’embrassant dans le cou. Des frissons envahirent mon corps si fortement que je poussai un léger râle que je retins aussitôt de peur d’avoir fait trop de bruit. Cette réaction me perturba aussitôt et je décidai de ne pas laisser la voie libre à cette part de moi qui ne voulait pas faire de vague, habituée à se taire pour ne gêner personne. Je décidai d’exister. Au moins une fois. Au moins cette fois. Jamais, je n'aurais imaginé que des baisers dans le cou pouvaient être aussi exaltants, aussi perturbants, aussi libérateurs.

Nous entrâmes sous la douche. La chaleur de l'eau perlant sur nos peaux rendait ce moment encore plus sensuel. Je ne sais pas combien de temps, nous restâmes sous la douche. J'avais l'impression que le temps s’était arrêté. Je ne voulais pas qu'il reprenne sa folle course. Je voulais qu'il reste en mode pause encore un peu. Les yeux fermés, je profitais de chaque baiser en savourant ses lèvres, de chaque caresse en guidant ses mains.

J'étais presque dans un abandon total quand la porte de la salle de bain s'ouvrit soudainement. Derrière le rideau de douche, nous nous regardâmes sans bouger comme si on avait compté “un-deux-trois soleil”. Suspendus dans notre étreinte, les gouttes ruisselant sur nous, nous dressions les oreilles comme des proies cachées dans leur terrier.

La voix de Fanny résonna dans la salle de bain :

- Excuse-moi de te déranger. Et sans vouloir t’affoler, est-ce que tu as vu Jimmy ? Il n’est pas au salon et la porte d’entrée est grande ouverte.

Nous nous regardâmes prêts à éclater de rire. Il ouvrit la bouche. Prise de panique, je lui intimai le silence en lui mettant mes mains sur sa bouche qu’il esquiva amusé. Je le suppliai du regard de se taire.

- Fanny, dis-je en essayant d'être la plus sérieuse possible, je suis sous la douche …

- Oui et on est un peu occupés là, me coupa-t-il soudainement les yeux plein de malice, sans que je puisse y faire quoique ce soit.

Je tournai la tête vers lui bouche bée et les yeux écarquillés. Dans la salle de bain, il y eut un long silence. On pouvait palper l’incompréhension et la surprise de Fanny. Je vis l’ombre de Fanny sur le rideau de douche s’éloigner. Elle bégaya un “bon ben, je vous laisse alors”. Toujours enlacés, nous éclatâmes, tous les deux, de rire en même temps que Fanny refermait la porte de la salle de bain derrière elle.

Plus que de me gêner, cette situation me soulagea. Il n'y aura pas d’explication à fournir. Les faits étaient là clairs, sans non-dits, sans secrets. C'était fait, c'était dit. Je pouvais vivre ce moment sans me cacher.

Quand les premiers signes que nous avions utilisé toute l'eau chaude se profilèrent, nous sortîmes. Nous nous jetâmes sur le lit simple qui semblait être un lit deux places tellement nous étions collés l'un à l'autre. La fatigue m'envahit soudainement. Je me sentais vidée. Je me sentais légère. Dans mon corps comme dans mon esprit, je me sentais libérée. Je m'endormis à nouveau dans ses bras, le sourire aux lèvres.

J'avais l'impression de mettre juste assoupie mais quand je rouvris les yeux, j'étais seule dans le lit. Je descendis de mon nuage en arrivant dans le salon. Jimmy et Andreas n'y étaient pas, seule Fanny était assise sur le canapé et feuilletait un magasine la mâchoire crispée. Je m'attendais à un accueil joyeux voire même légèrement moqueur. Je pensais qu'elle allait m'assaillir de questions mais au lieu de cela, elle me réserva un accueil glacial. Elle n'échangea aucun regard avec moi, tournant machinalement les pages de son magasine.


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