Mercredi 25 mars 2020

3 minutes de lecture

231.

C’est le nombre de décès liés au Covid19 aujourd’hui.

C’est effrayant.

C’est la guerre.

Et comme nous sommes en guerre, je dois avoir les forces nécessaires pour le combat. Ne pas se laisser abattre, on est mercredi, c’est jour de sport.

Ce matin, tout le monde autour de la table, comme d’habitude. C’est notre nouvelle routine, avant 9h nous devons tous être ready, installés et prêt au travail. Mon mari a vue sur le magnolia, moi sur les forsythias, et nos enfants se font face.

Après cette matinée, comme on est mercredi, je laisse les enfants faire ce qu’ils veulent, et moi, je me détends. En l’occurrence, je fais du sport, en mode « eyes of the tiger ».

Legging, tee-shirt manches longues (il ne fait quand même pas très chaud), baskets, montre GPS au poignet, et c’est parti !

Je visualise le Covid19, c’est une compétition entre lui et moi. La foule est en délire, amassée autour du jardin, elle me soutien et m’acclame tandis que je commence une course effrénée autour de ma maison.

Je longe la clôture, évite les arbustes dans un mouvement furtif de ninja, je salue Sucette ma chatte, qui me regarde comme si j’étais possédée. Je saute au-dessus des obstacles : un muret en brique, un pavé, un jouet pour chien, Balto mon chien, une crotte, une trottinette, une paire de rollers...

Rien ne me résiste et je fume le Covid19.

Hors d’haleine, je sens le vibreur de ma montre quand j’avale un kilomètre puis un autre ! Je laisse loin derrière moi le Covid et ses répercutions, je suis un avion de chasse, le Covid n’est que la pâle fumée à ma suite. Je connais chaque touffe d’herbe me mon terrain, chaque bosse dans la pelouse, les pièges à éviter dans les graviers qui me prennent en traitre, complices de ce virus qui tentent de me faire chuter !

Un sillon se forme le long de la clôture, je suis rapide comme le vent !

Au bout de seulement 3 kilomètres, je suis morte !

Oui, j’avoue, c’est misérable. Mais franchement tourner autour de ma maison c’est juste super chiant.

Je dois admettre que ma victoire n’est pas totale. Je décide de continuer ma session de sport avec un peu de renforcement musculaire. Abdominaux, muscles fessiers, bras, pectoraux, quadriceps, rien n’y échappe. Oui Covid, tu nous emprisonnes chez nous car ton but ultime est de rendre tous nos maillots de bain trop petits pour cet été, je te vois venir avec tes gros microbes ! Mais tu ne m’auras pas !

Une heure après ce combat acharné, j’ai vaincu, alea jacta est !

Je file dans la salle bain avec l’esprit serein.

Dans l’euphorie du moment, je continue à chouchouter mon corps, gommage, épilation, masque de soin. Les oiseaux m’accompagnent de leur chant que j’entends même la fenêtre fermée. Rien ne m’atteint, je ne pense à rien, je suis bien. Mais le moment de grâce (ou plutôt mon shoot d’endorphine), s’échappe de mon corps comme glisse sur lui l’eau de la douche. Mes pensées s’égarent sur des chemins que je ne veux pas prendre, des chemins tortueux et obscures, des sentiers perdus où les branches crochues des arbres ancestraux cherchent à m’agripper. Je ne veux pas penser à notre situation, je ne veux pas rompre l’état d’esprit qui était le mien depuis ce matin.

Alors pour vite contrer l’assaut des idées tristes, je me sèche, m’habille et file me plonger dans mon roman. Ouf ! Je suis sauvée de moi-même !

Mon livre est le remède miracle, the cure in fact, puisque c’est un livre en anglais qui m’absorbe totalement. L’avantage, et je le découvre seulement, puisque c’est la première fois que je m’attaque à un roman entier en version originale, c’est que je dois être beaucoup plus concentrée que sur un livre en français, et donc mes pensées s’égarent moins.

C’est ainsi que la journée s’égrène, sans stress et sereine.

Il n’y a pas de force assez puissante, pas de virus assez violent, rien en ce monde, qui ne surpasse ma volonté. Je veux avoir ce pouvoir sur moi-même, je veux être plus forte que ma fatigue, que mes faiblesses, que ma maladie. Je crois en mon pouvoir. Je suis une magicienne, une sorcière ou appelez ça comme vous voulez, et le Covid19, je l’emmerde.

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