Chapitre 2

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Comme tous les matins, Cassidy se rendit dans son atelier qui se trouvait à quelques rues de chez elle. Elle prit une toile vierge qu’elle vint poser sur un chevalet. La jeune artiste attacha sa chevelure bleutée en un chignon fait à la va-vite. Puis, dans un tiroir d’une étagère en bois, elle attrapa un bandana noir taché de peinture et le passa autour de sa tête pour maintenir en place les quelques mèches rebelles. Une fois pinceau et peinture entre les mains, elle se plaça devant la toile immaculée. Une minute. Deux minutes. Puis, finalement, trois minutes passèrent sans que quoi que ce soit ne se passe. La jeune femme soupira de frustration. Elle sortit son téléphone de la poche arrière de son jean, le connecta à l’enceinte Bluetooth et sélectionna une playlist de bruit d’océan. Elle retourna devant le chevalet et fixa à nouveau la toile. Tout en se concentrant sur le bruit de fond, la jeune peintre secoua ses bras, fit rouler ses épaules puis ferma les yeux pour se détendre. Après quelques secondes dans un silence absolu, n’entendant rien d’autre que le son de l’océan, son “don” finit par opérer.

En ouvrant les yeux, Cassy ne se trouvait plus dans son atelier à Manhattan. Une légère brise effleura sa peau, la faisant frissonner. Elle regarda sa tenue et en comprit la raison. Elle ne portait plus son jean préféré et son tee-shirt blanc, mais était désormais vêtue d’une longue robe printanière, lui arrivant presque aux chevilles. Une herbe fraîchement coupée chatouillait ses pieds nus. Relevant la tête, elle entreprit une observation minutieuse de ce nouvel environnement. Différentes fleurs et arbres fruitiers embellissaient ce somptueux jardin verdoyant. Fermant les paupières, elle s’imprégna des douces odeurs de rose et de lilas. Alors qu’habituellement, elle n’aimait pas tellement ses deux parfums, à cet instant, elle sentait que c’était le contraire. Elle avait même le sentiment que ses fleurs étaient ses préférées. La jeune femme rangea cette information dans un petit coin de sa tête et poursuivit son inspection. Elle ouvrit à nouveau les yeux et admira, un peu plus loin, la jolie maison de campagne. Montant sur un étage, la bâtisse n’était pas très grande. La jeune femme s’approcha et effleura du bout des doigts les pierres froides et rugueuses de la maisonnette. Elle suivit du regard le lierre grimpant le long d’un tuyau et s'entortillant sur toute la longueur de la gouttière. Une petite table et deux chaises en bois de couleur verte ornaient les pavés de la cour. Cassidy s’avança jusqu’à la porte en bois bleu de la maison. Au fur et à mesure de son approche, elle fut envahie par un sentiment d’amour et de joie. Toutefois, elle ressentait comme une impression de proximité et d’éloignement. Cette sensation la perturba, elle ne savait pas trop quoi en penser. Posant la main sur la poignée, elle la tourna et poussa difficilement la lourde porte. Cette dernière s’ouvrit dans un grincement. Avec étonnement, Cassidy ne découvrit absolument rien. Ce n’était que le néant, le noir intersidéral. Le cœur battant, elle prit son courage à deux mains et entra à l’intérieur.

La vision floue, Cassidy papillonna des yeux. Une fois claire, la jeune femme se rendit compte qu’elle se trouvait à nouveau dans son atelier en plein cœur de Manhattan. Pris soudainement d’un vertige, elle se laissa tomber sur le tabouret qui se trouvait devant son bureau. Lorsque ce fût passé, la jeune peintre put enfin admirer son œuvre. Devant elle ne se tenait plus une toile vierge, mais la peinture d’une jolie maison de campagne fleurie. Elle était représentée exactement telle qu’elle avait pu le voir dans sa vision. Enfin, à une chose près. Comme sur chacun des tableaux ou des dessins qu’elle créait durant l’un de ces “voyages”, un personnage féminin était représenté de dos. Cassidy avait commencé à voir cette femme il y avait de ça deux mois. La seule chose qu’elle avait pu apprendre depuis tous ce temps, était qu’il s’agissait d’une jeune femme rousse d’à peu près son âge. Et qu’apparemment, cette femme mystère appréciait beaucoup les roses et le lilas. Ses visions ne lui avaient pas permis d’en apprendre davantage sur elle. Ces petites promenades spirituelles lui prenaient toutes ces forces. Elle avait besoin de refaire le plein d’énergie. Elle prit ses affaires et se rendit au Mona’s Coffee, non sans vérifier son apparence au préalable. À son arrivée, six personnes attendaient dans la file d’attente pour passer commande. La jeune femme soupira, espérant pouvoir tenir jusqu’à ce que son tour arrive. Après plusieurs minutes interminables, elle commença rapidement à se sentir mal, ayant comme des bouffées de chaleur. Son cœur se mit à palpiter. Cassidy était à deux doigts de faire un malaise. Tout à coup, une main vint se poser sur son bras.

« Cassy ? Est-ce que tout va bien ? entendit-elle, sans vraiment réagir. »

Le cerveau embrumé, elle n’arrivait plus à réfléchir. Elle se sentit être tirée à l’écart, le brouhaha devenant moins intense. Quelques secondes plus tard, assise sur une banquette mœlleuse, un verre de jus de pomme et un muffin aux pépites de chocolat se posèrent devant elle. Elle leva la tête vers son sauveur et sourit lorsqu’elle reconnut enfin son meilleur ami de toujours, Noah Davis.

« Tu es vraiment un amour ! le remercia-t-elle. »

Noah s’assit en face de la jeune femme, l’observant avec une pointe d’inquiétude dans le regard. Noah était âgé de vingt-six ans, seulement un an de plus que l’artiste aux cheveux bleus. Tous les deux s’étaient connus à Central Park, il y avait de ça une quinzaine d’années. Noah se faisait harceler par trois garçons plus grands que lui. Cassidy, qui ne tolérait pas les injustices, était allée à son secours. Toutefois, haute comme trois pommes, elle ne fut pas d’une grande aide. Ce fut le frère de Noah, Spencer, qui les sauva de ces trois brutes. Depuis ce jour, Noah avait gardé une cicatrice au sourcil gauche que Cassidy aimait beaucoup. Elle lui répétait sans cesse que cela lui donnait un petit air craquant.

« Ça va mieux ? s’enquit son meilleur ami.

— Oui, merci !

— Noah ! interpella une voix grave derrière le comptoir noir de monde.

— Je suis désolé, je dois y retourner ! s’excusa-t-il, se levant pour retourner faire ce pour quoi il était payé. Au fait, le repas c’est pour moi ! ajouta le jeune homme, faisant un clin d’œil à son amie. »

Cassy ne put répliquer et continua donc de manger, regardant les passants dans une rue tout aussi bondée que l’intérieur du café. L’artiste, n’aimant pas trop la foule dans des espaces aussi exigus, se sentit rapidement oppressée. Elle prit ses affaires, fit un signe de la main à Noah et s’éloigna de cet étau qui lui comprimait la poitrine. Elle remonta les rues à toute vitesse, cherchant à mettre le plus de distance possible avec tous ces inconnus. De retour à son atelier, elle reçut un appel d’une galerie d’art, la gérante étant intéressée par ses tableaux pour une future exposition. C’était une première pour Cassidy. Toute excitée, elle donna rendez-vous à madame Long le lendemain après-midi devant son atelier. La jeune femme entreprit de faire un peu de ménage dans son petit local. Elle balaya et passa la serpillière sur le sol, nettoya ses pinceaux et rangea ses innombrables tubes de peinture. Éreintée, elle se rendit dans la pièce attenante, une salle où était entreposé l’ensemble de ces tableaux. Admirant ses œuvres, l’artiste peintre ne pouvait se résoudre à faire un choix. Après maint changement, elle réussit à sélectionner une dizaine de tableaux. Enfin satisfaite, elle éteignit les lumières et ferma à clé avant de se rendre dans son petit appartement cosy.

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