Du fait de son réveil prématuré, Nathan comptait sur le fait que sa mère soit encore au lit. Plus de doute, la bouche existait. Le gosse ressentait chaque pulsation de vie de l’être. Hors de question que sa mère voie ça. Il sortit de sa chambre avec toutes les précautions d’un espion d’élite.

— Déjà debout mon poussin ?

Eh merde !

Madame Bannon se tenait derrière la porte de la chambre parentale. Seule sa tête en émergeait.

— Euh ouais M’man, j’avais oublié de te dire que j’ai promis à Tim de l’aider à terminer un exo qu’il a pas compris. À tout’ M’man !

Il se dirigea vers la salle de bains.

— Comment se porte ton bobo ? Montre-moi.

Madame Bannon ouvrit plus grand sa porte pour rejoindre son fils. Nathan recula aussitôt et cacha maladroitement sa main derrière son dos.

— Ça va, mentit Nathan. Je veux dire, j’ai pas mal. Faut que je me dépêche. T’inquiète pas, M’man.

Il s’enferma dans la salles de bains sans laisser le temps à sa mère d’enregistrer la réponse.

Nathan resta l’oreille collée à la porte jusqu’à ce qu’il entendît sa mère se recoucher.

Ensuite, il nourrit Grande Gueule. Lui-même avait les crocs. Seulement, il craignait que sa mère finisse par se lever et le rejoindre pendant qu’il déjeunerait. Il quitta la maison sans passer par la cuisine, résigné à sacrifier son précieux argent de poche pour s’acheter un petit pain à la boulangerie.

Sur le chemin, il se surprit à parler à sa blessure.

— Tu fais chier, Grande Gueule. À cause de toi, je dois taper dans mon propre pognon pour me nourrir.

L’organe buccal ne répondit pas. Les pulsations avaient disparu. L’enfant remarqua que la crevasse n’était plus aussi béante qu’avant le nourrissage.

Je deviens fou ou quoi ?