Chapitre 19

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Ils marchèrent toute la nuit. Arment, en premier, dirigeait l’expédition, la lanterne à la main. Kita suivait, les yeux sur le sol, à éviter les racines tortueuses dissimulés sous le voile des ténèbres. Les deux étrangers leur emboîtaient aisément le pas, habitués à fouler ces sols inégaux. Une fois les marais atteints, Lalia dénicha une branche, enduit un bandage d’huile. L’extrémité de la torche s’embrasa.

—Il y avait des fleurs, commença Kita. Elles s’illuminaient une fois la nuit tombée.

—Ces sont des lyjnaoï, expliqua la sorcière. Elles se nourrissent de l’énergie solaire et la libèrent une fois celle-ci disparue. Elle ne pousse que dans les régions assez éclairés des marais. Cette partie est bien trop boisée pour que les rayons du soleil atteignent ces fleurs. Sans cette source, elles meurent.

Les sombres cheveux d’Arment reflétaient le halo de la torche. De dos, elle ne distinguait que sa taille et la largeur de ses épaules. Bon nombre de femmes apprécieraient d’être étreintes entre ces bras, contre son torse. Voilà la surprise qui attendait les putes chaque soir : un mercenaire aux palpitants récits, au corps sec et au visage attirant ou des hommes vieux et obèses ne trouvant d’aimable en elle que leur connil. Tel était le lot des catins.

—Vous m’avez vue dans vos visions.

—Pas des visions. Les Dieux choisissent mes cartes et guident mon pendule. Parfois, ils soufflent des noms. A nous de lier les éléments entre eux.

—Mais vous me connaissez malgré cela.

—Je connais car j’étais l’amie de votre mère. Racontez-moi plutôt ce que vous faîtes ici, loin de l’écurie de votre père.

Et Kita lui conta son histoire, la Breille, l’acte qui l’avait conduit dans ses geôles, Valia et sa quête mais elle lui tut ses appréhensions et les morts de deux de ses camarades.

—Le destin vous a conduit jusqu’à moi-même si j’ignore encore pourquoi. Les Dieux ont prévu quelque chose pour vous et mon rôle est de vous y aider.

—Je reprendrai ce qui m’appartient, là est mon but. Vous ne pouvez m’aider à reprendre mon écurie avec un pendule et des cartes. Vous vous trompez.

—Vous êtes croyante, Kita. Pensez-vous que les Dieux se trompent.

—Pas les Dieux mais vous oui. Vous n’avez aucune autre preuve que des images mal interprétées. Leur ordre peut raconter n’importe quelle histoire, vous les avez simplement mal rangées.

—C’est possible, acquiesça leur sorcière. Nous faisons tous des erreurs, nous voyons ce que nous souhaitons voir. Notre esprit est humain. Faible. Je me peux me tromper dans l’interprétation de mes signes mais je crois mon instinct. Et il me dit que nous devions nous rencontrer.

—Le mien me dit que j’ai toujours eu raison de me méfier de votre… espèce. Vous venez de m’en donner la preuve.

A l’ombre de sa torche, un rictus étira ses lèvres. Les flammes jouaient sur la peau sombre de son front, ses yeux brillaient comme des onyx.

—Vous avez peur et je le comprends. Les enfants de Nogaïla vous farcissent la tête d’idioties à not…

—Non, la coupa rudement Kita, suffisamment fort pour interloquer les deux hommes. Ils sont la voix des Dieux, ils Les entendent, ils communiquent avec eux pour mieux nous éclairer.

—Des guerres ont éclaté pour défendre les Dieux. Des femmes, des enfants, des nourrissons sont morts pour avoir cru en d’autres. Est-ce que ces actes méritent la mort ?

—Oui, ils sont des traitres. Je l’ai été moi aussi. Cette quête insensée est ma punition.

A tomber dans une mauvaise oreille, ces paroles pouvaient coûter la vie. Sa longévité l’étonnait. Des enfants de Nogaïla avaient forcément dû s’aventurer dans ce village et la rencontrer. Elle prie les même Dieux que toi, chuchota une voix. Cette croyance l’a sauvée de ce mensonge.

—Ils vous ont enfermée mais vous les défendez.

—J’ai pêché mais j’étais trop sotte pour m’en rendre compte. Aujourd’hui, je le sais. Les Dieux ont eu pitié de moi en m’envoyant Valia.

La sorcière l’observa tristement. Elle semblait plus déçue que furieuse. Je ne lui dois rien, songea la jeune femme. Comment puis-je la décevoir alors que nous ne nous connaissons pas ? Certes, ma mère avait été son amie un certain temps. En quoi cela la concerne-t-il ? J’ai défendu ma foi et mes Dieux face à une enchanteresse. Elle imaginait le sourire d’un des prêtres. Voyez-vous ? Je m’approche de la rédemption.

Kita s’approcha d’Arment et Morghel de la sorcière. Elle ne savait que dire au guerrier. La peur blanchissaient son visage et ses phalanges enroulées autour de l’anse de la lanterne.

—Votre frère survivra.

C’était une remarque maladroite mais le guide lui décrocha un regard où perçait la souffrance. Quelques instants plus, une source de lumière orange frappa leurs rétines.

—Ils ont dressé le camp. Nous sommes arrivés.

Ses jambes avalèrent les quelques dizaines de pas les séparant. Reikoo les accueillit avec un sourire froid.

—Vous êtes finalement revenue ?

—Votre Dame m’a fait une promesse. Un titre prestigieux m’attend.

—Qui êtes-vous ? Demanda le chef en lorgnant sur les deux inconnus.

—Je suis Lalia, la sorcière.

—Est-ce votre apprenti ?

Morghel s’esclaffa, non sans réel amusement toutefois.

—A mon âge ? J’approche des cinquante-cinq ans. Je suis le guérisseur.

Il s’accroupit près du blessé, palpa son front, chercha la plaie.

—Ne savez-vous pas guérir ? S’enquit Reikoo à l’enchanteresse.

—Beaucoup de rumeurs sont colportées. Je ne fais pas partie des sorciers qui soignent.

—Et votre ami oui ?

—Morghel n’est pas un sorcier même s’il passe souvent pour tel. Non, il n’est qu’un érudit. Leurs connaissances se transmettent de génération en génération.

Après un examen minutieux, Morghel déclara :

—Il s’en sortira.

Arment souffla, ses paupières se fermèrent. Une fois l’angoisse de la perte d’un camarade atténuée, Kita ressentit la fatigue raidir ses membres. Malgré l’annonce du guérisseur, Aroa paraissait plus proche du bras de Khéor que de la main de Miekko. Le front luisant de sueur sous les flammes, les frissons engourdissant ses membres, la cavalière peinait à croire à une possible guérison. Morghel sortit de son sac différents plantes, une coupole et un pilon. Il broyait par de vigoureux coups secs et les claquements sonores des instruments emplirent le silence des marais.

—Nous ne pouvons le transporter ainsi.

—Je le porterai, proposa le guerrier aux cheveux rouges.

—Non, nous devons le ramener dans ma hutte au plus vite. Vous, vous et vous (il désigna les trois membres à sa droite), construisez un brancard. Trouvez des branches solides et de la corde.

—Ne serait-il pas plus simple de chercher une carriole ?

—Et perdre une journée ? J’ai besoin de toi ici et la petite croule de fatigue. Repose-toi, fillette.

Elle ne se rendit compte de son épuisement qu’une fois le mot prononcé. La dresseuse guetta l’accord de Reikoo.

—Je prendrai la première garde.

Soulagée, elle demanda à Tâches de Myosotis de descendre son bras. Lalia s’agenouilla face à Morghel et les mains sur la poitrine du jeune homme, psalmodia des incantations. Je croyais qu’elle ne savait qu’interpréter, fut sa dernière pensée avant de s’abandonner à des rêves noirs.

—Nous partons, déclara Arment en la réveillant d’une secousse.

Kita reprit péniblement ses esprits, reconnut à peine le lieu où elle s’était assoupie.

—Combien de temps ai-je dormi ?

—Peu de temps. L’aurore est encore loin.

La fatigue alourdissaient les paupières du guide, ses mouvements étaient lents, ses joues creusées et son teint, pâle. Elle reconnut là les migraines qui accompagnaient les nuits blanches.

—Vous devriez aussi vous reposer, suggéra la cavalière d’une voix pâteuse.

Sa langue engourdie claquait avec mollesse contre ses dents.

—Je me reposerai une fois chez la sorcière.

Kita acquiesça. Qu’aurait-elle pu dire pour l’en dissuader ?

—Comment va votre frère ?

—Mieux. Les herbes commencent à agir.

Et pourtant le guerrier n’était totalement serein. Son frère vient d’échapper à la mort. Laisse-lui du temps. C’est ce qu’elle fit. Elle n’ouvrit guère la bouche lors du chemin de retour. Ses compagnons gardaient leurs lèvres scellées. Le guerrier tressé se porta volontaire pour soutenir le brancard de fortune mais après quelques lieux, ses yeux lui jouèrent des ours. Ses pieds s’emmêlèrent dans les racines, si bien que Ferol le remplaça à peine les marais quittés. Restait les hautes herbes où il chemina près de la dresseuse.

—Ils veilleront sur votre frère pour le reste de cette nuit et demain.

Nul ne lui répondit. Peut-être Arment ne l’avait-il pas même entendu ? La nuit semblait les ignorer, les oublier. Le regard hagard porté sur l’horizon, ils guettèrent les toits des chaumières par-dessus la cime des hautes herbes. De nombreuses paroles lui assaillirent l’esprit, pour beaucoup maladroites et peu réconfortantes. Devant eux, Aroa gémissait. S’il avait conscience de sa douleur, il s’en tirerait probablement. L’aube colora le ciel d’orange et de saumon. Entre le chien et le loup, sur une couverture d’or se découpèrent le toit des chaumières et le si soulagement éclot en elle, il submergea Arment.

—J’ai réussi, murmura-t-il.

Ils traversèrent le village en chancelant, plus misérables que victorieux. Les paysans les plus matinaux, munis de fourches les fixaient avec un œil mauvais. Nous ou la sorcière ? Habitués à ces mimiques, Kita n’en prit garde mais son assimilation avec Lalia la dérangeait. Je prie les vrais Dieux, je suis assez forte pour lui résister.

L’enchanteresse les conduisit à la chaumière de son compagnon. Ils installèrent Aroa sur un lit de fourrures, Morghel réitéra le cataplasme.

—Vous (il désigna Arment) je vous autorise à rester.

Kita n’eut d’autres choix que de coucher chez la sorcière en compagnie de Reikoo. Lalia étendit cinq fourrures sur le sol. La jeune femme choisit celle qui se rapprochait le plus de la porte et par la même occasion la plus éloignée de son chef. Ses yeux sondèrent les ombres sur le plancher, reflet de quelques individus se promenant à l’aube. Les travailleurs de la terre vivaient avec le soleil, se réveillaient et se couchaient ensemble. Kita n’aurait jamais tenu une fois son rythme inversé. La boule de feu éclaboussait la Horza de sa royale lumière que sa chambre revêtait le manteau de la nuit et se mettait en quête d’auberges. La légèreté de son corps après une nuit de débauche lui faisait défaut le matin.

Ses membres, aussi roides que les pierres l’invitaient au sommeil mais la décoration de la sorcière l’empêchait de fuir avec sérénité dans ses rêves. De multiples animaux empaillés encombraient ses armoires : hiboux, serpents, chauves-souris, oiseau la fixaient de leurs yeux morts et vitreux. Une belette trônait sur un pupitre à deux ou trois mains de son visage. La cavalière se recroquevilla, ferma les yeux et colonisa son esprit d’anciens souvenirs heureux.

Le lendemain, l’enchanteresse leur prépara une soupe avec d’inoffensifs légumes. Pour en être certaine, Kita l’avait aidé à les éplucher, à les émincer et à les broyer sous d’étranges ustensiles en bois aux trois dents.

—Des babioles que nos ébénistes inventent.

Les lui vendent-ils de leur plein gré ? Elle empoigna le manche et joua de son poignet. Les carottes s’écrasaient avec une facilité déconcertante.

—Pour combien de temps en aurait-t-il ?

La dresseuse n’avait pas besoin de prononcer le nom du guérisseur. Les uniques échanges dans cette chaumière concernaient Aroa. Et d’Aroa, seule son intégrité physique importait. Pourrait-il suivre la cadence imposée par Reikoo et le désir de combler sa Dame ? Du chemin restait à parcourir et le retard n’était pas une option. Kita le constatait au regard noir que portait le garde aux diverses babioles de la sorcière. S’il ne se rétablit pas dans quelques jours, il l’abandonnera, Arment avec lui et nous nous retrouverons dépourvu de guide. C’était un risque qu’il n’hésiterait pas à prendre. Peu importe si nous mourrons tous tant qu’il rapporte les pierres à Valia. Le poignard de la jeune femme glissa sur le plan de travail et sectionna une touffe de poils de la queue d’un lièvre fraichement tuée. Les yeux de l’enchanteresse fixèrent le duvet blanc avant de remonter le long du visage de la dresseuse.

—Pauvre enfant, si jeune à peine et déjà damnée.

—Cessez vos simagrées, bougonna-t-elle en piochant un poireau.

—Les Dieux n’ont guère eu de pitié pour toi.

—Leurs voies sont imprenables.

—Ton innocence… perdue.

—Elle est déjà perdue.

Femme et homme y avaient goûté. Aucun n’y avait trouvé à redire.

—Excuse-moi, se reprit-elle. Je n’ai pas à dévoiler mes interprétations.

—Elles peuvent être erronées, la provoqua-t-elle.

—Cela m’arrive quelque fois. Ou le futur se produit sans que je n’y aie porté le bon regard. C’est déroutant mais surprenant. N’importe qui peut s’y former s’il le souhaite. Nous sommes tous de possibles magiciens.

—Essayez-vous de me convaincre d’adorer votre stupide magie ? Il n’y a pas de magie et si tel était le cas, les enfants de Nogaïla n’essayeraient pas de la supprimer.

Ce jeu était à double tranchant tant pour les uns que pour les autres.

—Tu as raison. Il n’y a de magie que pour ceux qui veulent la voir.

Les rondelles de légumes terminèrent dans le chaudron d’eau bouillante. Lalia ajouta de fines pincées d’herbes : ail et persil.

—Tu ne crois pas dans les signes envoyé par les Dieux. Comment expliques-tu que je connaisse ton secret ? Le fruit que portaient tes entrailles est mort mais il te hante toujours.

Une expression d’horreur frappa le visage de Kita.

—Je vous défends d’en parler.

—Ouvrez les yeux, Kita. Je vous ai donné de nombreuses preuves auxquelles croire.

—Non. Vous dévoilez des mensonges.

Incapable de se contenir, la jeune femme se rua dehors. Magie, magie, magie. N’a-t-elle d’autre mot à la bouche ? Elle s’assit sur le porche, les pieds ballants dans un vide d’un ou deux pouces, sous le grincement des cages de fer. Les lanternes éteintes oscillaient de concert. Fuir ressemblait à son ancien comportement, du temps où la maison de son père représentait son royaume. Kita s’en voulait de persister dans sa lâcheté. Elle pensait que sa voiture la changerait, que son décourage décuplerait. Il n’en n’était rien, on ne métamorphosait pas aisément une identité profondément enracinée. Elle était tout au plus une petite fille qui copiait les grands. La jeune femme grimaça. Une ombre vacilla à ses pieds : Keïdan la dissimula au soleil.

—Comment va-t-il ?

Elle n’avait pas besoin de lui demander d’où il revenait. La réponse s’imposait d’elle-même.

—Dans la meilleure forme qu’on puisse être après avoir frôlé le bras de Khéor.

Kita hocha la tête alors qu’il se laissa choir à ses côtés.

—La mort de Xaelio vous hante-t-elle ?

—Oui.

Inutile de le nier. Le mercenaire discernerait le mensonge à travers ses mots.

—Plus aucun de nos compagnons ne vous touchera sans votre consentement, désormais.

Il m’avait semblé amical. Rien qu’un masque, un sourire pour camoufler le durcissement de son vit. Sa mâchoire se crispa. Franchir la frontière entre proie et prédateur exigeait d’abandonner une parte de son humanité. Une fois une vie arrachée, la ligne entre le bien et le mail se brouillait. Les parents apprenaient que donner volontairement était lâche, pire même : qu’un monstre dévorait son arme. Cette leçon concernait-elle aussi les assassins et les violeurs ? Quant au monstre, nulle créature ne rampa hors du Royaume Blanc pour broyer son esprit de ses dents. Non, ce monstre n’était que les fragments de son âme s’abandonnant à la noirceur.

—Ai-je mal agi ?

Kita chercha ses yeux. Le reître s’opposa.

—J’ai tué bien des gens mais aucun traître. Je ne sais pas.

Bien sûr que non. Personne ne sait. Débrouille-toi avec tes démons. Malgré leurs perfides sourires, ils demeuraient silencieux. Elle sentait leur présence au fond de son esprit.

—Vous sentez-vous coupable ?

—Parfois. Lorsque j’abats un garçon qui n’a pas eu le temps de vivre, j’ai des remords.

—Je n’en n’ai pas.

Le mien a eu le temps de vivre, de baiser, de tuer et de mourir. Voilà pourquoi je n’ai pas honte. S’il apparaissait derrière une chaumière, Kita n’avait aucun doute, elle lui promettrait le baiser de ses gants de fer. Une voix ricana sous son crâne.

—Que faisons-nous maintenant ?

—Hormis attendre ? Rien.

—Prier, peut-être.

Oui, prier les aiderait. Les enfants de Nogaïla leur conseillaient de prier lorsque les ténèbres s’abattaient sur eux. Pour invoquer les Dieux, il lui faudrait s’éloigner de la sorcière.

—Je dois y aller.

—Où donc ?

—Prier. Je dois aller prier. Il doit bien exister un endroit tranquille dans cette forêt pour prier.

—Priez si cela vous réconforte.

La voix des Dieux me guide. Ils ne m’ont jamais fait défaut. Après un signe de tête, Kita se dirigea vers la forêt, à l’opposé des hautes herbes. Le sol droit sécurisait sa marche. La mousse couvrait les aspérités et trompait l’œil mais les sentiers dénudés des bois assuraient son pas. La cavalière se glissa dans les fourrés, les épines des buissons éraflaient ses vêtements de cuir. Les rayons de soleil mouchetaient les feuilles et les troncs de points lumineux. Kita repéra un tronc couché, dévêtu de son écorce. Elle s’accroupit, ses doigts effleuraient les cicatrices du temps imprimées dans la chair de l’arbre. Elle savourait le calme, chassa les noires pensées de son esprit, se concentra sur son appel.

—Guidez mon chemin, les implora-t-elle. Aidez-moi à discerner la lumière des ténèbres.

Tout se confondait dans son esprit. La lueur d’espoir diminuait, s’assombrissant. L’obscurité se teintait de gris. Qu’est-ce qui est bon ? Qu’est-ce qui est mauvais ? Comment savoir si je ne me trompe pas de route ? Certaines que les Dieux l’écoutait, la comprenait, Kita se laissa aller aux confidences. Des souvenirs d’enfance, les baisers de son frère, les rire des gamins, son cœur bondissant dans sa poitrine alors que Sapin claquaient des ailes. Sa vie n’avait pas été que misère. Il y avait eu de la joie aussi si on savait où chercher. La question résidait en ce où ?

—Je dois abandonner ma nature. La transformation est longue mais serais-je assez héroïque à mon retour ?

Elle était convaincue que les Dieux le lui commandaient. Ils souhaitaient une métamorphose. Je dois me laisser embraser par ma foi et ma lumière. Seulement ainsi, je les aiderai. Entrer en communication avec les Dieux n’étaient pas chose aisée mais Kita se bornait à chasser toute mauvaise pensées comme le leur montraient les enfants de Nogaïla. Une foule d’adorateurs les attendaient chaque après-midi communié leurs bonnes paroles. Elle se remémora leur conseils, joignit les mains à son front.

Kita s’immobilisa quelques heures durant, ne résonna à ses oreilles que le chuchotement des feuilles. Soudain, alors qu’elle implorait la Déesse Mère de lui prêter sa force, elle sentit deux yeux se poser sur dos, brûler le cuir et la chaleur caresser sa peau. La cavalière se retourna brusquement mais ne vit rien. Son cœur, lui, savait qu’une créature l’épiait. Kita sonda les sous-bois avant de s’y aventure. Des branches sèches craquèrent. Il ne courrait ni ne marchait, elle ne parvenait à identifier ce mouvement lorsque l’animal se présenta à elle. Une partie du moins.

Ramper. Cette créature rampe.

Elle discerna une longue queue écailleuse blanche glisser sur le sol. La dresseuse oubli un instant de respirer, sa poitrine ne se gonflait ni ne se vidait. VA-T’EN !

Kita obtempéra et le bruit de rapprocha. Le serpent avait fait demi-tour. Il la suivait. C’est le même. Celui de la Breille. Ce salopard les avait suivis. Elle l’imaginer se dresser sur ses courtes jambes et lui donner la chasse, la gueule entrouverte, le museau tendu vers le haut. Elle franchit l’orée de la forêt, le raclement des feuilles sur la terre s’estompa. Elle courut jusqu’à la chaumière de la sorcière sans se retourner.

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