Prologue !

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Demain, départ pour les Alpes du Nord, enfin !

Une semaine de détente et de repos loin de mon quotidien, j’en rêve depuis déjà un moment. Plus de deux ans que nous ne sommes pas parties entre filles. Mise à part avec le groupe entier ou pour rendre visite à ma famille, je ne suis pas sortie de paris depuis une éternité. Et cette année, nous allons fêter le Nouvel An rien que toutes les trois !

Cléo file le parfait amour avec Morgan depuis plus de deux ans et leur petite Laura pousse comme un champignon. Quant à Léo, elle roucoule avec Thomas. OK, roucouler est un bien grand mot quand on connaît l’engin ! Disons plutôt qu’elle a une relation exclusive avec son barman. Et n’allais surtout pas lui balancer qu’elle est en couple, au risque de vous faire égorger sur place. Cette fille reste le plus gros mystère de l’humanité, je n’ai jamais compris son aversion pour la vie à deux.

Assise à mon bureau, devant le bilan de l’année, impossible de me concentrer. Mes pensées ne cessent de s’égarer sur mes vacances. Pourtant, je dois boucler ce dossier avant de partir, si je veux le remettre en temps et en heure à l’administration. Parfois, je me demande ce qui m’a traversé l’esprit pour accepter ce poste de directrice. Ma vie d’institutrice était bien tranquille, alors qu’aujourd’hui, je suis plus stressé que jamais. Cléo ne cesse de me répéter que depuis que je suis aux commandes tout est plus simple.

Ben pas en ce qui me concerne !

Je passe mon temps pendue au téléphone à chercher des subventions pour tout ! Du crayon au mobilier et les sorties scolaires, sans parler de tout le côté paperasse. L’école est vide, ils sont tous en vacance et comme toujours, il ne reste que moi. Cependant, je ne peux nier que depuis que j’ai pris ce poste, je me sens plus importante, mon existence est moins fade. Non pas que l’enseignement n’est pas essentiel, malgré tout, le fait de travailler en amont me procure un sentiment de fierté. Je facilite la vie de mes collègues et embellit celle de tous ces gosses dont tout le monde se fous, mis à part nous.

Bref, il est temps que je me concentre un peu si je veux partir d’ici au plus vite. Demain, je prends le large avec les filles. Adieu boulot, homme, enfant, animaux de compagnie et bonjour apéro, glisse et papotage entre copines. Bon, je ne suis pas une grande adepte du ski et j’aurais préféré aller ailleurs, ceci dit, ça avait l’air de faire plaisir à Léo, alors je n’ai pas contredit.

J’espère juste ne pas finir plâtrer de la tête aux pieds !

Je suis loin d’être une gourde en puissance comme Cléo, disons plutôt que la hauteur et la vitesse me font peur. Les filles ayant des obligations, elles ne restent que quatre jours, je n’ai plus qu’à trouver le moyen d’échapper aux descentes !

À dix-neuf heures, je ferme enfin l’enceinte de l’établissement. Encore heureux que ma valise soit bouclée depuis un moment ! Elles m’attendent au « central pub » pour régler les derniers détails. Tout est pourtant déjà au point depuis plusieurs mois, je me suis occupée de tout. De la réservation du chalet, à leurs billets de train, j’ai même fait des recherches pour nous organiser notre séjour. Ce rendez-vous, c’est plutôt un rituel, nous le savons toutes, ceci dit, nous ne sommes pas toutes prêtes à l’accepter. Pour Léo le mot « rituel » est synonyme de vieux ! Elle part du principe que les habitudes encroûtent et que l’imprévu permet de rester jeune.

Peut-être qu’un jour, elle finira par grandir !

Bref, j’ai une bonne demi-heure de transport en commun pour les rejoindre, une fois n’est pas coutume, je serais en retard !

Pour une fois que c’est moi et pas la suceuse !

Cléo m’a envoyé un message pour me dire qu’elles étaient arrivées et depuis, mon portable ne cesse de vibrer dans la poche de mon jean. Léo à la salle habitude d’harceler jusqu’à ce qu’on lui réponde, elle devra pourtant attendre que je sois installée dans le métro. Avec l’hiver, les Parisiens ont fui leurs vélos et leurs trottinettes, il est encore plus bondé qu’à l’accoutumée.

Et les fêtes n’arrangent rien !

L’été, la capitale se déserte, par contre, en fin d’année, elle est prise d’assaut. Entre les familles et les voyageurs, Paris devient plus impraticable que le reste du temps. Je dois donc jouer des coudes pour me faire une place et surtout, chopper la prochaine rame. Sinon, je suis bonne pour poireauter un quart d’heure supplémentaire.

Tout le monde a droit aux vacances, même les agents de la RATP !

Debout écrasé entre un étudiant qui traîne une valise plus grosse que lui et un groupe de touriste japonais qui s’extasie de tout, je dégaine mon smartphone et réponds à Léo avant que la vibration de ce dernier ne finisse par trouver ma poche.

« Dans le métro, j’arrive »

« T’as vue l’heure, tu t’es endormi ? »

« Non, je finissais de boucler mon bilan de l’année »

« Ennuyeux ! »

Ça, c’est certain ! Je range enfin mon téléphone et m’accroche à ce que je trouve à porter de main pour ne pas terminer vautrée sur le sol poisseux, tant le conducteur est brut.

Y’en a qui ne doivent pas sucer que des glaçons durant les fêtes !

Après avoir prié tous les seins de la terre, j’arrive tout de même sans incident devant les portes du bar. À l’intérieur se dégage une chaleur agréable et réconfortante. Cet endroit, nous le fréquentons depuis tant d’années, que je m’y sens comme chez moi. Aucun recoin n’a de secret pour nous. Je retrouve les filles sur notre banquette habituelle. Celle-ci a tellement vu nos derrières que je suis certaine que notre ADN est imprégné dedans.

— Ha ben quand même ! s’exclame Léo.

Je devrais peut-être lui rappeler qu’en général, c’est elle que l’on attend. Même si depuis qu’elle fréquente Thomas, sa ponctualité s’est améliorée. Si l’on fait bien entendu abstraction de leurs parties de jambes en l’air de dernières minutes.

— Désolé, je n’aurais jamais pensé que ce bilan me prendrait autant de temps, réponds-je en m’installant à côté de Cléo.

— Je croyais que tu étais en vacances ! demande Léo.

— Ouais, mais j’avais trop de boulot avant la fin du trimestre pour m’en occuper et il doit être rendu au plus tard le jour de la rentrée, j’avais pas trop le choix.

— Je confirme, t’as bien un boulot à la con !

— Merci bien, ton soutien me met du baume au cœur ! soufflé-je agacée.

Pour Léo, la vie n’est faite que de bonne chose, la merde, elle fait semblant de ne pas la voir. Il serait temps qu’elle se rende compte que ce n’est pas toujours rose.

— Rho ça va ! réplique cette dernière. J’me dévoue, j’vais chercher à boire.

Tu parles qu’elle se dévoue, le seul truc qui l’intéresse c’est d’aller bécoter Thomas qui est de service aujourd’hui.

— Tu crois qu’elle sait que nous savons ? demande Cléo en fixant Léo accoudé au comptoir.

— Bien sûr que non ! Elle est trop persuadée de sa discrétion.

— Léo discrète ? éclate-t-elle de rire. Une armée d’éléphant passerait plus inaperçue que la suceuse.

— Tu sais ce qu’on dit ! C’est le cordonnier le plus mal chaussé.

Léo est raide dingue de son barman, tout le monde le sait, sauf elle. Cachée derrière son besoin d’indépendance, elle refuse toute marque d’affection en public, même devant nous. Une main au cul ne lui pose aucun problème, par contre, une caresse sur la joue et c’est le scandale. Thomas semble très bien s’en accommoder, je ne comprendrais jamais leur façon de fonctionner. Ceci dit, tant que ça leur convient, je n’y trouve rien à redire.

— Bon les pétasses, c’est quoi le programme du séjour ? questionne Léo en déposant le plateau chargé de cocktails devant nous. Snowboard sur piste noire ? Descente hors des sentiers balisés ? J’ai de l’énergie à revendre !

Cette fille me tue ! Elle est son éternel grain de folie. Je n’ai jamais parlé à personne de ma peur du vide. Pourtant, je viens du centre de la France, j’ai grandi à la montagne au milieu de la neige et des skieurs. Aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours était paniqué par la hauteur, sans jamais en connaître la raison. Mes parents s’en sont accommodés.

— Aucune idée, c’est Joy qui s’est occupé de tout ! rétorque Cléo.

Leurs regards droits sur moi, elle me fixe. Si je leur parle de partie de scrabble au bord du feu, je ne passerais pas la soirée !

— Raphiqui, on t’écoute !

Comment me sortir de ce bordel ?

— J’ai répertorié tout ce qu’il y a faire sur place ! On pourra étudier ça demain devant un verre.

J’élude, d’ici là, je trouverais bien un truc qui tienne la route ! En fait, les seules choses que j’ai retenues pour nous occuper, ce sont les bars, les restos et un centre de thalasso qui propose des bains chauds au milieu de la neige. À la limite, une petite promenade dans la forêt de pins en bas de la station. Bref, rien de sensationnel.

— Les Arcs sont assez réputés en matière de descente ascensionnels. Il doit y avoir moyen de se faire quelques frayeurs.

— Joy, ça va pas ? T’es toute pâle ?

Descente ascensionnelle et frayeur dans la même phrase, il ne m’en faut pas plus pour que l’angoisse monte. Ma respiration s’accélère et mon cœur palpite avec toutes les images qui sont en train de me traverser l’esprit.

Je vais mourir et je viens juste d’avoir trente ans !

Cléo panique, Léo réfléchit. L’une fait appel à son instinct maternel en touchant mon front alors que l’autre me tend un verre.

— Bois ça ! T’as dû encore bouffer un truc pas net ! Il va vraiment falloir que ta manie de ne rien jeter te passe. Un jour, il va te pousser des pustules sur la tronche !

Elle n’a pas tort, j’en ai conscience. Ceci dit, il y a tant de personnes dans le besoin que je refuse de gaspiller la nourriture et je me débrouille toujours pour ne rien mettre à la poubelle.

Me détendre, je dois juste me détendre. Je suis assise dans notre bar, sur la terre ferme, il ne peut rien m’arriver. Aucune chance que le sol se dérobe sous mes pieds.

— Je pense plutôt qu’elle nous couve un truc. Quels sont tes symptômes ? Mal au ventre, diarrhées ? T’as fait caca récemment ?

Cléo me palpe, je me fige. Elle n’est pas sérieuse j’espère ? Elle ne compte quand même pas que je réponde à ça ?

— Hé la morue ? Range ton côté mère poule et laisse là respirer, elle commence à être toute verte !

Avec ses histoires, elle va me filer la gerbe oui. J’accepte le verre que me tend Léo et en vide une bonne partie cul sec. Un peu d’alcool ne me fera pas de mal, au contraire, si mon esprit plane, j’en oublierais mes appréhensions, du moins, pour le moment. La discussion reprend et au bout de quelques minutes mon angoisse s’apaise. Voilà, de toute façon, elles ne pourront pas me forcer à pratiquer quelque chose que je ne veux pas et au pire, elles iront descendre les pistes ensemble et je les regarderais d’en bas. Sauf que pour ça, il faudrait que j’admette que j’ai la frousse. Toute ma vie, j’ai reçu des brimades à cause de cette phobie incontrôlable et je connais Léo, elle s’en servira pour se foutre de ma gueule. Déjà que j’entends parler de mon aversion pour les pieds depuis des années, je n’ai aucune envie de rajouter de l’eau à son moulin de critiques. Je sais que ce n’est que de la plaisanterie, néanmoins, ça peut faire mal.

— Montre ? me questionne Léo.

— Montrer quoi ?

Perdue dans mes pensées, je n’ai pas suivi le cours de la conversation.

— Raphiqui, arrête l’alcool et passe au coca, ça ne te réussit pas ! Je te demande de nous montrer les photos du chalet.

— Ah ouais !

Je dégaine mon portable, me connecte au site de réservation et leur tends pour qu’elles fassent défiler les images.

— C’est super beau ! Si seulement Morgan et Laura pouvaient découvrir ça !

— Ha non, tu vas pas commencer ! Ont été d’accord sur un week-end entre filles !

— Mais j’ai rien dit !

— Je te vois venir ma morue avec tes gros sabots ! J’te connais, tu joues la carte de la culpabilisation pour ensuite qu’on accepte de changer nos plans !

— Mais non ! s’offusque Cléo.

— Tu fais ça tout le temps, insiste Léo.

Ces deux-là, quand elles commencent à se disputer, il y en a pour des heures. Néanmoins, pour une fois, Léo n’a pas tort. Cléo a du mal a lâché sa famille. C’est d’ailleurs pour ça qu’il y a une éternité que nous ne partons plus. Enfin, si, tous ensemble, ce qui inclus les mecs, les gosses et ce qui va avec. Soyons clair, je les adore tous, cependant, je suis encore la seule célibataire et parfois, tenir la chandelle me pèse. Les filles n’arrêtent pas de me dire que je dois sortir, sauf que je n’en ai presque jamais le temps. Les rares occasions où j’arrive à rentrer de bonne heure, soit je m’écroule dans mon lit, soit elle me traîne ici où il n’y a que des habitués.

Bref, je reste convaincue que ces quelques moments seront les bienvenues pour nous toutes. Sauf peut-être pour mes angoisses !

Pourquoi est-ce que j’ai accepté d’aller au ski avec elle au fait ?

Parce que tu n’es qu’une trouillarde !

C’est vrai, un jour, il va falloir que je pense à faire entendre mes opinions !

Je ne sais pas pourquoi, tout à coup, ce Nouvel An à la neige me semble une bien mauvaise idée…


Bonsoir à tous et bienvenue dans cette dernière partie de la trilogie cap ou pas cap ! Comme toujours, ce que je vous publi est du premier jet, le texte sera retravailler.

Néanmoins, n'hésitez surtout pas à dire ce que vous en pensez, à relever les incohérences ou toute autre chose.

En tout cas, je vous souhaite de passer un bon moment en compagnie de Joy ! ;)

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