Mais où sont les roux ?

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Le lendemain c’est la rencontre avec Michael, le guide d’un jour et dans leurs coeurs pour toujours. Michael aime son travail et raconter des histoires sur sa région, rencontrer des touristes et leur débiter des blagues en boucle. Il emmène le groupe aux falaises de Moher. Elles ressemblent à celles d’Etretat, mais en version calcaire et schiste noir.

Du haut de leur 214 m d’altitude et sur une longueur de 8 km, qui se parcourt aisément, leurs tenues légères sont "idéales" en plein vent. Elles prennent le temps d’admirer la vue sur l’horizon infini alors même que la centaine de touristes ne se retourne pas sur leur passage, et ce malgré leurs auras divines. Et toujours aucun roux pour offrir à sa belle une bague de claddagh. Bah, j'en trouve pas !

La Claddagh ring est une bague traditionnelle irlandaise, offerte pour des fiançailles ou portée comme alliance. Aujourd'hui, elle peut être utilisée comme gage d'amitié. La bague et les coutumes qui lui sont associées viennent de Claddagh, un village de pêcheurs, qui se trouve juste derrière les vieux murs de Galway, dans l'ouest de l'Irlande. Sur la bague de Claddagh, on voit deux mains tenant un cœur, la plupart du temps surmontées d'une couronne. On dit souvent que chacun de ces trois éléments symbolise une qualité : l'amour pour le cœur, l'amitié pour les mains et la loyauté pour la couronne.

Térébenthine est soucieuse. Elle se sent un peu flouée. On lui aurait menti. L’incroyable densité de roux au m2 en Irlande ne serait qu’un mythe ?

Ce n’est pourtant pas vrai. Je me sens désemparé. Mon “Abracadaroux” n’est vraiment pas flagrant. Il me semble pourtant avoir parsemé leur route de plusieurs représentants de notre clan. Ne seraient-ils donc pas assez séduisants ? Un roux est un roux. Séduisant, forcément.

Elle en vient à se demander s’il n’y aurait finalement pas plus de rouquemoutes en France. Mais non, ils ne sont que 5% là-bas ! Heureusement, Michael va vite lui remonter le moral en lui parlant du “Lisdoonvarna Matchmaker Festival” autrement dit le festival des rencontres, un slow-dating géant, avec fatalement des roux célibataires dans le lot...

Le Lisdoonvarna Matchmaker Festival est un événement culturel irlandais qui se tient dans le village de Lisdoonvarna fin août. Son principe est assez insolite : il propose aux participants de rencontrer l’amour, tout en vivant à fond la danse traditionnelle irlandaise ! Les danses démarrent dès midi, jusqu’à tard dans la nuit, le tout, dans une ambiance surchauffée et conviviale. Les gens dansent, se rencontrent dans une ambiance propice à la fête et au romantisme, et savourent dans les rues et dans les Pubs des pintes de bière irlandaise comme le veut la tradition.

La réputation du festival de Lisdoonvarna est telle, que le chanteur et guitariste irlandais Christy Moore a même écrit une chanson intitulé “Lisdoonvarna” pour rendre hommage à l’ambiance festive du coin.

How's it goin' there everybody, Hey, comment ça va tout le monde (bah, super pépère)

From Cork, New York, Dundalk, Gortahork and Glenamaddy.De Cork, NewYork, Dundalk, Gortahork et Glenamaddy (et même de plus loin, mec)

Here we are in the County Clare Nous sommes ici dans le comté de Clare

It's a long, long way from here to there. C’est un long long chemin d’ici à là-bas (sans dec)

There's the Burren and the Cliffs of Moher, Il y a le Burren et les falaises de Moher

And the Tulla and the Kilfenora, Et le Tulla et le Kilfenora

Miko Russell, Doctor Bill, Miko Russell, Doctor Bill (de parfaits inconnus)

Willy Clancy and Noel Hill. Willy Clancy and Noel Hill (idem)

Flutes and fiddles everywhere. Des flûtes et des violons partout

If it's music you want, Si c’est de la musique que tu veux (bah non, pas que ça, mec)

You should go to Clare. Tu devrais aller à Clare (c'est bon, j'y suis)

Oh, Lisdoonvarna Oh, Lisdoonvarna

Lisdoon, Lisdoon, Lisdoon, Lisdoonvarna! Lisdoon, Lisdoon, Lisdoon, Lisdoonvarna!

Le retour en bus est un florilège de bonne humeur. L’ambiance débute doucement folâtre pour rapidement devenir hystérique au côté de Michael, qui tout en conduisant son bus, fait partager à son public ses chansons internationales préférées. De l’Amérique latine en passant par les pays de l’Est, tous les genres musicaux sont à l’honneur. Alors que se dessine au loin le profil aride des montagnes du Connemara, l’apogée est atteint quand tout le bus à l’unisson, même les non-francophones, entonne à tue-tête la chanson mondialement connue de Michel Sardou dont voici le premier couplet:

Terre brûlée au vent

Des landes de pierres

Autour des lacs, c'est pour les vivants

Un peu d'enfer, le Connemara

Des nuages noirs qui viennent du nord

Colorent la terre, les lacs, les rivières

C'est le décor du Connemara !

Le soir, on leur recommande un repas gourmand dans la brasserie “On the corner”. Je fais en sorte qu’elles y soient reçues comme les princesses qu’elles sont. Serveuse attentionnée, sourire aux lèvres, description en détail des plats, dégustation de vin. Les mets sont copieux et goûteux. Malheureusement, elles n’ont plus assez faim pour terminer leurs plats. De si petits estomacs sous ces tailles de guêpe ! Alors des doggy bags sont demandés juste pour ne pas gâcher ces bons mets et en faire profiter des SDF, assez nombreux dans la ville. Quelles sont bien mes belles nymphes ! Marine se souvient de l’endroit où elle les a vus et entraîne ses comparses vers les rues piétonnes et les portes des boutiques où ils s’abritent pour la nuit sous leurs duvets. Au hasard est choisi un couple. Ils ont l’air d’apprécier le don. Cette initiative se révèle être si simple à entreprendre que Térébenthine se demande pourquoi elle ne l’a pas fait avant.

Ravies de cette bonne action, elles se dirigent vers le bar O’Connell’s, recommandé au préalable par un des serveurs parfaits de la Brasserie. L'endroit est si petit et déjà bien complet qu'elles se demandent par où elles vont bien pouvoir se faufiler. C'était sans compter sur le panneau “beer garden” inscrit sur la porte au fond du bar. Heureusement, Clémentine et Térébenthine ont l’intuition de pousser cette porte. Et là, elles débarquent dans une oasis improbable. Une cour intérieure avec un décor de Western, une épicerie d’après-guerre remplie d’articles en tout genre, des toilettes en faïence verte des années cinquante, un autobus rouge des années soixante, une cabine téléphonique jaune des années soixante-dix, des fauteuils d’été roses des années quatre-vingt, du mobilier marron des années quatre-vingt-dix, des spots multicolores des années deux mille et enfin un bouton vert des années deux mille dix qui sert à enclencher les radiateurs extérieurs.

A ce stade de la soirée, je décide d’intervenir de façon flagrante et d'insérer dans le paysage un homme à la longue barbe rousse dans la foule. Malheureusement, son charme reste imperceptible aux yeux des filles et laisse surtout Térébenthine de marbre. À l’évidence, je n’ai pas trouvé le bon spécimen. Cela dit, je n’ai pas réellement identifié l’attente de ces dames. Y aurait-il une appréhension face à une véritable rencontre rouquine ? Je crois soulever un vrai sujet là. À méditer.

Après avoir bu un verre d’alcool différent dans chaque compartiment de cette oasis, les miss sont un peu éméchées et s’amusent d’un rien avec des rondelles d’agrumes dans leur bouche, ce qui les fait ressembler à des babouins en rut.

La tournée se poursuit dans le bar de l’année, The Quays, qui se situe à exactement vingt mètres à vol d’oiseau de leurs lits superposés. Dans le pire des cas, elles pourront y rentrer en rampant tout en faisant gaffe à ne pas trop s'érafler les genoux. Jade étant particulièrement fragile à ce niveau-là. De la musique live résonne enfin. L’ambiance est surchauffée. Un groupe joue un air connu d’ ACDC, un autre de Pink Floyd puis un autre air inconnu. Et puis c'est tout. Merde alors, la fête est déjà finie ? La déception des filles est palpable. Du haut de mon nuage, je me marre. Les girls font la moue. Et la moue du soir n’est pas facilement consolable. Alors dans l’espoir de prolonger la magie du moment, elles s'entêtent à faire deux fois le tour du pub en montant et descendant les marches à qui mieux-mieux, ce qui leur fait explorer tous les recoins de cet antre de la débauche en train de se vider.

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