Cet automne était radieux...
Cet automne était radieux, avec ses teintes fauves, sa lumière inclinée, ses nappes de brume, le matin sur les collines, le soir sur l'eau lisse de la Nive. Comme une arrière-saison de la vie et le prodige de la mémoire assemblant tout dans un même lieu. C'était si près d'un songe, d'un flottement imprécis pareil aux rivages d'un lac perdu dans le bleu des montagnes. Je me levais de bonne heure pour profiter de la première clarté, déambulais dans le grand parc aux teintes aquatiques. Les ifs taillés étaient immobiles et les éventails des palmiers tremblaient à peine sous la levée du jour. Sur les grandes jarres de terre cuite, l'œil glissait, n'en saisissant que la chute vernissée. De rares promeneurs apparaissaient au détour d'un massif, puis s'évanouissaient sans laisser plus de trace que le grésil dans le cristal d'hiver.
Une semaine déjà dans cette aimable station thermale du sud et rien ne s'était produit que de très banal. Une simple léthargie dans laquelle dissoudre quelque mal de vivre. Mais pourquoi donc le Docteur Carlson m'avait-il envoyé faire cette cure de remise en forme ? Certes mes nombreux voyages aux confins du monde, près des volcans éteints et des forêts de bouleaux m'avaient conduit, un moment, près d'une lassitude qui semblait ne vouloir jamais s'éteindre. Les paysages infusaient-ils, dans l'âme, une mélancolie dont ils étaient atteints depuis la nuit des temps ? Ici, dans cette nature lisse et lénifiante, sans doute le repos était-il assuré mais avec son inévitable lot de monotonie. La langueur pouvait-elle se résoudre à simplement côtoyer ce temps suspendu ?
Annotations
Versions