Chapitre 11

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La sonnerie retentit, m’annonçant que mon cours de maths est terminé. Je range en vitesse mes affaires et je me rends compte que je n'ai pris presque aucune note durant cette heure, comme à celle d'avant. Tant pis, je demanderai à Ashley.

Je pars à mon casier et prends mes affaires. Un papier tombe lorsque je récupère le classeur que j'ai déposé une heure auparavant. Je ne l'avais pas remarqué avant. Je me penche pour découvrir le mot qui m'a été laissé en espérant que ce soit Liam, sans vraiment comprendre pourquoi, je voudrais que ce dernier prénom soit inscrit sur ce bout de papier. Mais ça n'est pas le cas. Ce n'est rien de plus qu'une note que m'a laissé Aiden un jour et que j'ai oublié de jeter. Je tourne la tête vers le petit miroir que j'ai accroché en première année de lycée sur la porte de mon casier. Les couloirs sont déserts, ou presque. Liam marche d'un pas assuré, son sac de sport sur l'épaule. Il doit aller à son entraînement de foot. Quelque peu bouleversée par son ignorance, je ferme à la volée mon casier avec un bruit retentissant et m'en vais vers mon cours d'anglais, en retard, pour ma dernière heure de la matinée. Du coin de l'œil quand je rentre dans la cage d'escalier, je vois Liam se retourner et me toiser. Je n'ai donc pas rêvé la journée de la veille.

La fin de mon dernier cours est enfin arrivée : il est quinze heures et je peux rentrer chez moi. Dehors, il fait beau et chaud, je vais rentrer à pied. Au coin de ma ruelle, je m'attends à voir la voiture de Liam, mais elle n'est pas là, et comme par réflexe, je m'arrête et attends. J’attends quelques secondes, puis quelques minutes, et enfin une heure. Jusqu'à ce que je me résolve à l'idée que ce jeu existait vraiment, que ce n'était pas un prétexte. Mais surtout, je me fais à l'idée que Liam a probablement gagné. Je ne comprends pas comment il a pu, je ne comprends pas ce qui est défaillant chez moi, mais je me fais à cette idée. Puis peut-être que je ne l'aime pas réellement, peut-être que j'aimais juste l'idée de revivre, de ne plus ressentir le vide. Mais quoique ce soit, il ne le saura pas. Il ne faut pas qu'il le sache.

Je parcours les quelques mètres restants jusqu'à ma porte d'entrée. J'insère ma clé dans la serrure, rentre et cours dans ma chambre. Je m'adosse au mur, saisis mon code et contemple le mur en face tandis que mon ordinateur s'allume. Plusieurs photos me frappent, me rappelant tant de souvenirs. La plus marquante, c'est celle de la cascade. Je l'ai trahi. J'ai fait ce que je m'étais promis de ne jamais lui faire. Et je m'en veux. Pour la première fois, j'accepte de lire ce qu'il m'avait laissé. Je me lève donc, vais à mon bureau et, les mains tremblantes, j'ouvre le tiroir abritant ses derniers mots. Je saisis la lettre qu'il m'avait laissée. Je pars m'asseoir les jambes au-dessus du vide sur le rebord de ma fenêtre, l'enveloppe entre mes mains tremblantes. Je redoute ce que je vais y lire.


Ma jolie Emma,

Aujourd'hui, j'ai eu envie de t'écrire. Cet essai est peut-être le dernier, comme il pourrait ne pas l'être. Mais je n'abandonnerai pas pour autant. Cette lettre, j'ai besoin de te l'écrire. J'ai besoin de te dire tout un tas de choses, t'en expliquer tant d'autres. J'aimerais que tu saches les sentiments que j'ai pour toi. Que tu saches ce que je ferais pour toi, mais aussi ce à quoi je ne renoncerais pas.

Depuis tout ce temps, tu crois sans doute me connaître. Mais ce n'est pas le cas. Il y a des faces cachées de moi que tu ne soupçonnais pas. Que tu ne pouvais pas soupçonner. Et j'ai conscience qu'en l'apprenant, tu me quitteras sans doute. Mais peu m'importe, j'ai besoin que tu saches.

Je t'aime, c'est vrai. Mais cet amour n'est pas arrivé comme ça, comme j'ai pu te le répéter. Comme tu le sais, j'ai eu une épreuve à surmonter. J'ai dû me battre contre la maladie. Et on la maudit, ensemble, cette maladie. Mais tu sais quoi ? Je n'avais que 13 ans quand je l'ai vaincu. Et j'avais 10 ans quand j'ai été diagnostiqué. 10 ans, ce n'est même pas 1/8 de la vie. J'ai eu si peur. Comme beaucoup, sans doute, je n'avais pas peur de mourir, de quitter le monde, non, j'avais peur de n'avoir rien fait de ma vie, de n'avoir jamais profité. Alors, quand je suis allé mieux, j'ai décidé de vivre. C'est vrai, j'agis sous l'impulsivité, mes choix sont parfois un peu idiots et souvent incompris. Mais après tout, j'aime ces moments, je suis heureux, je me sens vivant.

C'est avec mes 3 acolytes que je vis, désormais. Léa, Thomas et Gabby veulent vivre eux aussi. Alors on se donne des défis. On fait en sorte de faire monter cette adrénaline en nous pour nous faire ressentir ce sentiment de vie. Prendre des risques pour moi ne signifie rien, ou plutôt tout. La vie en elle-même est un risque. Quoi que tu fasses, tu mourras. Alors vis tant que tu le peux. Un jour, il y a presque 2 ans, mon défi était de sortir avec toi. Oui, au début, mes sentiments n'étaient pas sincères. Mais maintenant ils le sont. Même si tu n'as plus aucune raison de me croire, je veux que tu me croies. Tous ces moments passés avec toi, ont finalement été les plus beaux et ont toujours été sincères.

J'ai fait des erreurs et accepter ce défi fut la pire idée que j'ai eu mais aussi la meilleure. Si je ne l'avais pas fait, je n'aurais jamais pu goûter à tes lèvres, je n'aurais jamais ressenti ton corps vibrer avec le mien, je n'aurais probablement pas expérimenter l'amour véritable. Mais j'ai fait l'erreur de jouer avec l'amour. J'ai joué avec toi et je n'aurais pas dû, parce que tu mérites plus que tout ce que le monde a offrir. Tu mérites d'être aimée pour ce que tu es et non pas pour remporter une victoire. La vraie victoire, c'est toi. Si j'avais su ça plus tôt, j'aurais fait les choses différemment.

Je t'aime. — Noah


Pour la deuxième fois de la journée, je suis bouleversée. Les larmes ruissellent sur mes joues, et je ne peux m'arrêter. Ces mots sont tellement tranchants, et pourtant, je ne peux pas lui en vouloir. Je ne peux plus lui en vouloir. Parce que même si j'en avais envie, je ne pourrais pas. Dans ma chambre, mon téléphone sonne. Je ne décroche pas et laisse la personne parler sur ma messagerie, que je n'écouterais probablement plus jamais pour ne plus jamais entendre sa voix. Ma mère va bientôt rentrer et je ne veux pas qu'elle me voit comme ça. Je pars dans la salle de bain accolée à ma chambre pour me passer de l'eau sur le visage. Je me détaille dans le miroir : j'ai la peau rouge, les yeux gonflés et les lèvres en sang de les avoir trop mordues. J'ai une tête à faire peur. Je tourne le mitigeur au plus froid puis réunit le fluide dans le creux de mes mains, y plongeant mon visage.

J'étouffe et l'air devient irrespirable ici. Je dois sortir. Je dois respirer. J'ai l'impression de mourir. Mon cœur me brûle et ma gorge se sert, mon ventre se noue et je ne sais pas combien de temps je pourrais encore tenir sur mes deux jambes. Je dois faire quelque chose. Je suis triste, dévastée, en colère et je veux juste hurler. Ou pleurer. Je ne saurais pas vraiment dire finalement. Dans ma chambre, mon regard est capté par ce cadre, posé face contre table, cette guirlande où y sont attaché des dizaines de photos. Ma chambre entière est habitée par sa présence. Je suis prise par l'envie de verser des larmes pendant quelques secondes, mais la fureur est bien plus forte. Je me dirige vers ce cadre en métal doré où sont gravées ses initiales. Je le regarde un court instant, me demandant si je vais regretter, mais c'est trop tard, je n'ai pas le temps de vraiment y réfléchir que le verre jonche déjà le sol, la photo virevoltant au gré du courant d'air. Je l'attrape avant qu'elle ne tombe au sol et l'observe. Je nous revois, c'était pour le bal de fin de collège. Il m'avait invité, bien évidemment, et j'avais acheté la robe de mes rêves pour l'occasion. Il avait un smoking, il était très élégant. C'est sa mère qui s'était occupé de moi, la mienne était en déplacement. Elle avait bouclé mes cheveux et avait fait un joli maquillage qui faisait ressortir mes yeux. Comme tous les parents, ils avaient tenu à avoir des photos de ce soir alors nous avions joué le jeu et prenions la pause. Je me demande s'il était sincère à ce moment. Et je me pose cette même question dès que mes yeux se posent sur les siens, dans les clichés que j'ai accroché un peu partout dans la pièce.

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