Chapitre 10

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— Emma, réveille-toi.

La voix, les lèvres de Liam, ses bras chaleureux et son corps tout contre le mien me réveillent. J'ouvre les yeux, me relève, attrape mon téléphone et regarde l'heure. Il s'est déjà déroulé vingt-trois heures. Il reste encore une heure, pendant laquelle nous nous préparerons pour le lycée avant de se quitter.

Liam est habillé, fin prêt alors que je dois rentrer chez moi changer de vêtements. Je n'aurais plus que trente minutes. Trente minutes pour me préparer mais aussi trente minutes avec Liam avant de finir ce jeu. Nous montons dans sa voiture, que je connais désormais comme ma poche, en direction de mon petit chez moi. Aujourd'hui, je retrouve ma vie. Devant mon pavillon, je sors de la voiture et Liam me suit. J'entre et monte dans ma chambre. Je me suis déjà douchée chez lui, je n'ai plus qu'à m'habiller. Je saisis un jean noir et un pull beige. J'attrape à la volée mes Converses noires, les enfile et prends mes quelques cours de la journée que je jette dans mon sac. Liam me complimente sur ma tenue, je ne réponds pas et me contente de rouler des yeux. En moins de quinze minutes, nous ressortons déjà de chez moi, où je pars à pied et Liam avec sa voiture. Les vingt-quatre heures sont écoulées. Et j'espère le voir baisser sa fenêtre, comme il l'a fait hier, à l'angle de la rue pour qu'il me dise de monter, qu’il m’emmène au lycée avec lui. J’aimerais qu’il me dise qui est cette fille. J'espère avoir gagné même si je n'en aurais que faire de cette victoire. Je m’en fiche pas mal, parce que ce n’est pas mon cas, et que par conséquent, je ne sais pas vraiment ce que je voudrais de lui. Sa voiture arrive à ma hauteur, ses lèvres bougent, tout comme sa tête : il doit être en train de chanter. Il m'ignore, redémarre après avoir vérifié qu'il n'y a personne et part, loin de moi.

Je tire une cigarette de mon paquet et l'allume. Fumer tue. Aimer tue. Vivre tue. Grandir tue. Peter Pan avait raison : ne grandis pas. Ce n'est qu'un piège. C'est absurde. Ça n'a aucun sens. Aucun intérêt.

Quelques minutes plus tard, j'arrive devant le lycée, je passe les grilles et mon regard se pose sur Maya, qui parle avec Liam. Je balaye les élèves des yeux et aperçois enfin mes amis. Arrivée à leurs niveaux, je leur dis bonjour et explique qu'hier je ne me sentais pas bien. La sonnerie retentit. Tout le monde rentre en cours. Personnellement, je n'ai pas cours. Je reste avec Ashley, qui n'a pas cours non plus. Du coin de l’œil, je peux voir Maya parler, enfin se disputer, avec Liam. J'interroge Ashley, qui hausse les épaules et me parle des vacances, qui vont bientôt arriver, qu'il faut déjà organiser. Mais je n'écoute pas un traître mot de ce qu'elle me dit et j’essaye de comprendre ce qui se passe entre Maya et Liam. Ils ne se connaissent pas, enfin, avant, ils ne se parlaient jamais. Ils doivent partager quelques cours.

LIAM

À mon réveil, la tête d’Emma est posée contre mon épaule et ses cheveux sont étalés en rideau sur ma peau. Aussi bizarre soit-il pour moi, son contact me plaît et je ne bouge pas d’un centimètre, de peur de la faire se retourner et, ainsi, interrompre ce moment. Je prends alors le temps de l’observer, je détaille son visage et frôle quelques morceaux de sa peau qui s'offrent à moi. Sa main est posée sur mon bras, on pourrait presque croire qu'elle souhaite me retenir si on ne connaissait pas la situation. Si quelqu’un arrivait, je suis prêt à parier qu’il me prendrait pour un grand malade. Mais c’est pourtant la seule chose qui m'apparaisse naturelle à cet instant.

Trente minutes plus tard et voyant l’heure tourner, je décide de réveiller Emma à contre-cœur. J'aurais préféré que le moment ne se termine pas, j'aurais préféré rester au lit toute la journée, j'aurais voulu passer une journée de plus avec Emma, mais j'ai inventé des règles et il est important de les respecter. Les règles permettent de bien vivre. Elles nous empêchent de faire des erreurs. Je ne dois pas faire d’erreurs.

— Emma, réveille-toi.

Elle lâche un petit gémissement puis ouvre doucement les yeux, mais les referme aussitôt à cause de la luminosité qui éblouit les murs de la chambre. Elle refait un effort et se relève. Pendant une seconde, elle regarde autour d’elle, perdue, tentant de savoir où elle est. Puis elle me regarde et comprends, me lançant un sourire timide. Elle saisit son téléphone, regarde les notifications et nous nous préparons pour aller au lycée. Dans mon dressing, je saisis un jean basique avec un tee-shirt blanc. À tour de rôle, nous prenons nos douches et, quand nous sommes fins prêts, nous nous rendons chez Emma pour qu'elle puisse se changer et récupérer ses affaires.

Le temps s'est écoulé, l'alarme a sonné alors que j’étais installé sur son lit, à la regarder se déshabiller et enfiler ses nouvelles affaires. Vingt-quatre heures sont passées et je ne sais pas qui est la personne qu'elle aime. J’ai un petit peu triché. Quand la sonnerie a retentit je ne suis pas parti, je suis resté ici, à l’attendre, à la détailler. J’aurais pourtant dû partir. C’était la règle : quand les vingt-heures sont écoulées, je pars.

Je n'ai pas gagné. Emma est partie à pied ce matin ; moi, j’ai pris ma voiture. Arrivée au bout de l’allée, je la vois attendre un instant. Quand je suis à sa hauteur je murmure le dernier nom. Celui qui marque la fin et signifie ma défaite. Je lui murmure le nom de la dernière joueuse sans la regarder pour qu’elle ne sache pas que je lui parlais et qu’elle ne puisse encore moins déchiffrer mes dires. Et je reprends ma route comme si ce que je venais de prononcer n’était que les paroles d’une chanson qui passe à la radio et non le prénom qui a fait pencher la balance. Mais je sais ce qu'il en est. Je n'ai pas gagné, et même pire que ça, j'ai perdu.

Lorsque j’arrive dans l’enceinte de l’établissement, la copine d’Emma, Maya, me tombe dessus. J’essaye de l’esquiver, mais c’est peine perdue. Elle est coriace et a, visiblement, des choses à me dire. Des reproches à m’adresser. Des requêtes à me faire entendre. Je commence par l’ignorer, rejoins mes coéquipiers et les salue tous un par un. J’espère qu’elle parte faute de mon attention mais elle ne démord pas et continue de me suivre de près. Je finis par céder.

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