sa légèreté

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Si Rouge, Jaune étaient des teintes matérielles, charnelles, ancrées dans le réel, le Bleu s’en distanciait en raison de sa légèreté. Que manque-t-il donc au Bleu pour que son accomplissement se réalise ? Il se met spontanément en quête du VERT, non pour des raisons qui seraient simplement chromatiques, mais pour des motifs bien plutôt cosmologiques. Afin que l’Univers se dote du divers, du pluriel, de l’immensément foisonnant qui est son chiffre le plus réel. Ce que le Bleu a ouvert comme espace onirique, de pure évasion, le Vert doit le compléter pour un motif d’homologie formelle dynamique. Les vagues de l’Océan, les marées, les battements incessants de l’eau appellent, comme en miroir, le ressac des forêts, la houle des prés, le flux de la Nature en sa parure chlorophylienne. Tout est vert qui est végétal, seul le temps en métamorphose la teinte, automne de cuivre, hiver du blanc dépouillement, de l’étoile de givre qui cloue les êtres en leur destin de pierre. Le Vert est un bourgeonnement à la pointe des choses. Le Vert respire, il est la silencieuse mélodie du monde. Le Vert appelle une sourde quiétude, un retrait parmi la dispersion des objets pluriels qui nous entourent. Sa présence est partout, sa laque recouvre une grande partie des terres habitées, glace l’eau des rizières, confère une douceur d’aquarium aux délicates clairières. Si bien qu’environnés de sa profusion nous finissons par ne plus en voir l’essentielle trace. Remaquons-nous, au moins, la prière discrète de la rainette réfugiée sous son abri de mousse ? Avons-nous encore quelque égard pour le dépliement de la crosse de fougère dont l’activité de photosynthèse est synonyme de vie ? N’y aurait-il plus de Vert et les déserts croîtraient partout, entraînant avec eux la perte des hommes. Peut-être accorderons-nous plus de crédit à la fine lame de malachite aux si belles arabesques, à l’éclat de l’émeraude dans son écrin rouge, à l’agate si mystérieusement sombre, on la croirait parvenue à l’extrême du spectre, là où, peut-être, elle s’absenterait de sa famille d’origine.

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