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Andréa le pensait très fort, ce n'était du au hasard si Angèle et Jimmy se sont retrouvés dans la même ville au même moment quelques jours plus tôt. Il y avait fort à parier qu'ils y furent toujours. Plusieurs informations recueillies permirent de localiser la fugitive à Orléans. Le plus surprenant était que Jimmy, ayant échappé à la surveillance s'y était aussi rendu alors que celui-ci ne sortait jamais de chez lui. Il vivait dans son cocon isolé de toute vie humaine tel un agoraphobe. La pression s'accrut lorsque durant cette semaine passée, l'on perdit trace de quelques autres membres de La Force Grise.

Des voitures de polices eurent encerclé une ancienne gare de campagne désaffectée, plus les heures avançaient et plus le dispositif s'alourdit, sous la direction de la commandante Laudry. Andréa vint en début de matinée, pour reprendre le contrôle des opérations qui duraient depuis la veille. La tension était très palpable, et l'arrivée de cette dernière n'apaisa pas la situation. Elle était en effet excitée et fébrile. À quelque mètres d'elle seulement, se trouvait Angèle Meyer. Ce moment avait une saveur de victoire après tant de jours de recherche. Fabien Floch était à portée de main et la cellule d'Adam pourrait être démantelée à l'issue de cette journée. Elle n'hésita pas à faire part de son empressement auprès de l'équipe, quitte à se montrer trop entreprenante vis-à-vis de la commandante. Elle resta également en contacte téléphonique avec la capitale où elle ne démordait pas dans son anxiété.

Jimmy eut pour dernière adresse une vielle cabane isolée en périphérie de Metz, ce fut très surprenant de le retrouver à proximité d'Orléans. Les anciens de La Force Grise restèrent très méfiant de tout ce qui les entouraient, aussi bien du pouvoir que de la populations. Tous s'isolèrent au maximums depuis la dissolution du parti en fusionnant étrangement avec le principal parti d'opposition. Ils se mirent à détester le pouvoir en place et à le discréditer. Adam ne les appréciait pas car ceux-ci faisaient du tort à son action, il les considérait comme particulièrement idiots et non taillés pour la lutte. La police eu cessé de tenter de les interpeller après les nombreux suicides de tout ceux qu'ils réussirent à approcher de près où de loin. À défaut de les menacer d'arrestation, le pouvoir préféra les laisser dans leur médiocrité car ils ne représentaient au fond pas tant de danger que ça. Ils furent néanmoins surveillé à distance car étaient toujours considérés comme des individus fichés à risque. Ils ne sortaient jamais de chez eux, vivaient misérablement pour ne pas dire salement. On les entretenait cependant avec des vivres et un accès internet avec lequel ils tentaient d'inonder les forums en étant parfaitement conscient du but de ce traitement de faveur. Personne ne leur accordait d'importance, le niveau d'éducation des gens avait suffisamment évolué pour ne pas se laisser tomber dans le piège de stupides théories du complot.

Un dénouement contre-productif était inenvisageable, il fallait la fugitive vivante mais les négociations étaient très difficiles. Jimmy, pouvait parfois garder un calme olympien au téléphone, et se déchaîner la minutes d'après dès qu'il se sentait menacé. Il était très très à crans, et certainement pas seul car l'on pouvait entendre parfois d'autres voix dans le fond. Il était de moins en moins possible de le liguer contre Angèle pour qu'il la livre. Celui-ci ne cessait de marteler que tout le monde serait mort bien avant que l'on fit le moindre pas et menaçait de faire feu contre eux.

Il jeta un regard par la fenêtre poussiéreuse pour apercevoir que le dispositif avait encore grossit. Il ne regrettait pas d'être venu à la rencontre d'Angèle et se persuadait que la mort serait la seule alternative s'il n'obtenait pas ce qu'il voulut. Il rejoignit ses trois autres collègues, Flo devant son ordinateur portable, Rachid, le moins préoccupé de la bande, confortablement assis sur un canapé, et enfin Santon qui se chargeait d'avoir un œil sur leur prisonnière. À force de regarder tout le monde s'agiter dehors, Jimmy comprenait bien que la seule raison de toute cette situation était Angèle et que lui et ses amis ne valaient rien comparés à elle. Il était resté prostré devant la fenêtre depuis suffisamment longtemps pour avoir repéré la personne qui allait les sortir de là.

Le téléphone retenti dans le poste de contrôle, le négociateur se mit au travail.

- Passez moi la femme qui est arrivé il y a une heure. S'empressa de demandez Jimmy.

- De qui parlez-vous ?

- Passez moi la femme qui vous a rejoint c'est tout ! Hurla t-il devant l'hésitation du négociateur.

Andréa comprit et arrachât le téléphone.

- Je suis là. Que voulez-vous ?

- Vous. Venez ici !

Cette volonté autant surprenante qu’inadmissible avait choqué tout le monde.

- Vous me voulez moi ? Pourquoi ?

- Vous savez très bien pourquoi. Alors vous venez où Angèle est morte ! Ordonna t-il de manière très rapide et brève.

Jimmy avait raccroché subitement, il ne voulait pas perdre davantage de temps. Il se tourna vers Angèle d'un pas décidé.

- Si tu m'avais passé Fabien Floch, on en serait pas arrivé là. Tout aurait été plus simple putain !

Celle-ci demeura silencieuse, son regard montrait le mépris qu'elle avait pour lui. Elle sembla épuisée après toute une nuit restée captive au milieu de ces quatres hommes.

Il était évidement hors de question de risquer de faire d'Andréa une otage. Tout le monde s'y opposa fermement, à commencer par le procureur général qui venait d'arriver.

- Ils veulent vous utiliser, ils savent que vous être une proche de Floch.

Cette situation trouble affectait absolument tout le monde, aussi bien malfrats que policiers. Cela pouvait dégénérer à tout moment. Après plusieurs minutes de délibérations, Andréa saisit spontanément le téléphone sous les regards incompris de la commandante, du procureur et du chef de l'unité d'élite. Sans rien dire, elle contacta de nouveau Jimmy qui peinait à répondre.

- Je vais venir vous rejoindre pour éclaircir la situation et discuter. Je n'ai aucune arme. Dit-elle en forçant le calme.

Les prises de parole qui suivirent étaient tendues et se firent en même temps.

- À quoi bon récupérer Fabien Floch si vous êtes à votre tour enlevée ? Tentait de raisonner Laudry.

- N'y allez pas Andréa, c'est un piège. On ne pourra pas vous sauver. Enchérit le chef d'unité, Max Labot.

- On ne va pas rester là à se regarder continuellement. Ma décision est prise, je vais dedans.

La tension était à son apogée, c'était le pire qui puisse arriver, qu'une division se fasse entre eux. Jimmy et ses acolyte ne purent même pas se réjouir de les déstabiliser ainsi, cela jouait également contre eux. Andréa se prépara fermement sans rien entendre des contestations qui venaient de toutes parts. Cette mésentente força la commandante Laudry à se tenir sur son chemin, celle-ci se voulait tout aussi ferme et décidée qu'elle. Elle tenait à préserver la chef, même si ce fut contre son grès. Celle-ci lui ordonna de s'écarter de son chemin alors que les autres chefs des différents corps tentèrent de gérer au mieux le désaccord qui enflait. Les tensions s'étaient accrues au sommet de la hiérarchie.

- Poussez-vous de là commandante ou je vous vire ! S’insurgeât Andréa lorsque Cécile Laudry s’évertua à lui barrer la route.

Les deux femmes se tinrent face à face en se défiant du regard. Aucune ne voulut lâcher prise. Le Chef d'unité vint tenter d'apaiser la situation sans succès. Andréa était déterminée.

- Je suis la directrice de cette cellule, je pourchasse Melle Meyer depuis plusieurs jours, je vous intime l'ordre de me laisser passer. Cria t-elle le plus sereinement possible.

- Je vous relève de vos fonctions. Osa répondre Cécile en étant sur d'elle et incertaine à la fois.

- Calmons-nous ! Calmons-nous. Ne jouons pas leur jeu. Je pense que tout le monde est fatigué.

Le procureur avait beau mettre le ton impartial et délicat, il sentait bien qu'il parlait dans le vide.

- Osez répétez ça commandante.

- Vous n'êtes plus maître de vous même et par conséquent, de la situation. Vous allez vous asseoir et vous calmer, nous allons gérer cette crise.

- Vous ne pouvez rien contre moi alors pour la dernière fois écartez-vous.

- Je vous demande de faire demi-tour, vous n'avez plus l'autorisation d'être là.

Andréa était étonnée par ce qu'elle venait d'entendre, elle ne pensait pas se faire bousculer ainsi. Il lui en fallait bien plus pour se laisser intimider de la sorte. Elle choisi d'ignorer toutes les personnes autour d'elle et de continuer en direction de l'entrée de la gare.

- Andréa ne faites plus un pas où je vous arrête pour obstruction à une opération en cour. Lui cria Cécile.

- Vous n'avez toujours pas compris que rien n'avancera tant qu'ils ne m'auront pas en face d'eux ? Dit-elle en continuant de marcher sans se retourner.

- Messieurs, arrêtez-là, c'est un ordre.

Quatre membres des forces spéciales entourèrent Andréa qui se défendit d'être touchée, aidée de ses deux hommes de mains tentant de la protéger.

- Très bien, vous m'aurez obligé à en arriver là. Dit-elle en saisissant son téléphone.

- Je vous demande de téléphoner ailleurs, la zone est sensible à cet endroit et vous êtes à présent considérée comme simple civile, vous n'avez rien à faire ici.

- S'il vous plaît Andréa, venons au poste de contrôle, nous y seront mieux. Le procureur, Léo su qu'il était une des causes de l'initiative de Cécile, car en sa présence et sa qualité, elle avait plus de facilité pour démettre ses supérieurs. Cela le mit dans une étroite position et tentait tant bien que mal d'apaiser la situation.

Jimmy restait rivé à la fenêtre, regardant la scène de loin. Il avait comprit à quel point c'était délicat et songeait à rappeler la cellule de crise pour réaffirmer ses exigences et sa position de décideur dans cette affaire. Angèle restait derrière figée, toujours avec le même regard dénué d'émotion, froid, plat. Ses yeux bleus sans expression ressortaient de son visage usé, ce qui intimidait Santon.

- Elle a envie de nous bouffer tout cru. Pensa t-il fort. C'est pour ça que tu ne parles pas ?

- Elle a dit tout ce qu'elle avait à dire. Elle va nous tuer, Adam aussi. Le monde veut nous bouffer tout cru. Ferme-là maintenant. Lui répondit Rachid.

- Elle me stresse, elle a toujours ce regard. On dirait un serpent qui attend de se jeter sur sa proie.

Jimmy vint du bout de la pièce, très tendu.

- Passe moi le téléphone Flo, je vais les rappeler. Ces glands ne veulent pas coopérer.

- A quoi tu t'attendais ? Ci c'était aussi simple d'avoir un membre des Torem, ça ferait longtemps que notre vie de merde aurait évolué… et on en serait pas là, coincés dans ce trou à rats avec elle. Répondit Rachid toujours couché sur le canapé sans emmètre un signe de panique.

Jimmy le savait que son opération tournait au vinaigre mais il ne se laisserait jamais déstabiliser de la sorte. Lui et ses compagnons n'avaient rien à perdre, ce combat leur a enlevé depuis des années le goût de vivre.

- Arrête de raconter ta vie et lève toi. Demanda t-il à Rachid.

Celui-ci se redressa péniblement par flemme, il savait ce qu'il devait faire.

Le chef de l'unité d'élite répondit au téléphone. Jimmy était assez remonté, il fit savoir qu'il voulait parler à la jeune femme qui dirigeait ses hommes. On avait deviné qu'il s'agissait de la commandante Cécile Laudry.

- Bon écoutez moi vous ! Vous arrêtez de foutre la merde et vous laisser l'autre pétasse se ramener ici c'est claire ?

- D'abord tu te calme et tu arrêtes de faire le gamin contrarié. Tu te rends compte de ce que tu demande là ?

Rachid qui s'était posté à ses côtés avec un pistolet en main tira deux fois. Il toucha deux agents.

Bien que l'agitation soit contrôlée, tout le monde s'affola encore plus. On cherchait à se réfugier, on porta secours aux hommes touchés et on escorta Andréa dans une voiture garée à proximité. Les autres agents se préparèrent à riposter. Cécile garda Jimmy au téléphone qui continua de s'emporter.

- Ça ne sert à rien de protéger votre chef, c'est la seule qui ne risque rien. Alors laissez-là venir. Nous retenons en otage Angèle Meyer, je pense qu'elle serait ravi de s'entretenir avec elle. Sinon vous n'avaiz qu'à vous barrer parce qu'on va continuer à tirer.

Cécile tenta de garder son sang froid suite à cette ultime annonce.

- On va débarquer et on va tous vous fumer bande de cons. Donnez-nous Angèle et on vous laisse partir. Dernière offre avant l'assaut. S'énerva t-elle.

- Cette conne refuse de me laisser entrer et ils nous canardent. Il n'y a plus le choix. Cria Andréa, très remontée au téléphone, confortablement installée dans la voiture avec ses hommes de mains.

De l'autre côté du fil, on s'étonnait de son extrême implication. Elle était certes la directrice de la cellule de recherche, mais devait tout gérer depuis la capitale, et non continuellement sur place. Les risques étaient trop grand et ce qui se déroulait en était un parfait exemple. Elle posait son attention vers le poste de contrôle où tout le monde était à la fois statique et survolté. Elle observait également la gare qu'elle voyait si proche. Alors que la conversation téléphonique s'enlisait, elle bondi de la voiture et se ruât vers l'entrée du bâtiment. La commandante la vit faire mais ne put agir efficacement car les tirs continuèrent afin de protéger Andréa. Les ripostes étaient autorisées cette fois là, la fusillade n'était pas équitable mais chacun avait un avantage sur l'autre. Jimmy parvint à ouvrir la porte et à faire entre André à l'intérieur.

- Vous avez mis le temps. Se plaignit Jimmy, éternellement insatisfait.

- Ne vous inquiétez par pour nous Madame, tant que vous êtes en vie, nous ne risquons rien. Ironisa Rachid.

Andréa remarqua l'état de délabrement du lieu. Le pays regorgeait de petite gare de village inutilisée faute de rentabilité. Cela lui rappela qu'il fallait remettre d'usage ces endroits abandonnés au nom du droit au service pour le peuple. Ce devoir devait passer avant toute considérations pécuniaires, et ce serait aussi une occasion de creuser l'écart avec les désastres des anciennes républiques passées.

Elle se fit raccompagner dans la pièce reculée où elle pu enfin voir Angèle de ses yeux. Celle-ci gardait la même attitude, sans bouger, sans laisser ressortir le moindre tempérament malgré la rudesse de l'épreuve. Andréa prit place juste en face d'elle sous les yeux de Jimmy et Santon qui restèrent dans la pièce. Rachid surveillait ce qui se tramait dehors, parfois aidé de Flo qui tentait péniblement de trouver de l'aide avec son ordinateur. Les deux femmes se regardèrent tel des félins dans un climat de défiance et lourd de tension de tout les côtés.

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