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On rapporta qu'elle eut été aperçue à divers endroits, parfois en même temps. Tout le monde s'activait pour rechercher Angèle Meyer qui fut ainsi régulièrement la tête d'affiche de la presse nationale. Une blonde à frange telle qu'elle fut décrite avait tout de commun, il était difficile pour les autorités de lui mettre la main dessus. Les concitoyens étaient mis à contribution et l'on pouvait compter sur leur vigilance. Le double meurtre effroyable dont elle était accusé eut de quoi susciter l'intérêt et un élans de mobilisation. Deux pauvres enfants qui jouaient ensemble dans leur jardin par une belle après midi ensoleillée, enlevés, torturés puis noyés. La mère endeuillée, martelant sa peine devant les médias, fut tellement crédible qu'elle y croyait elle même.

La jeune femme était inconnue du grand publique, sa discrétion était absolue ce qui en faisait une redoutable fugitive. Le bureau d'enquête chargé du dossier subissait d'énormes pressions. La presse, le peuple et la hiérarchie exigèrent une tête sur une pique. Des dizaines de témoignages, des centaines d'heures de visionnage, des milliers de cafés pour tenir la cadence ne suffirent plus à garder l'espoir au seins de l'équipe après une semaine de recherches effrénées. Si cette femme était apparue de manière si brusque, elle pouvait certainement disparaître tout aussi soudainement. Ils le savaient, ils risquaient fort de s'enliser et attendirent secrètement un autre événement dramatique pour détourner l'attention.

En parallèle de ces investigations, une autre enquête était en cours, menée par une cellule secrète supervisée par Andréa. Cette enquête eut également pour but de rechercher cette femme, la jolie blonde à la frange. Pas celle qui eut commis un double meurtre imaginaire, mais celle qui eut enlevé Fabien Floch. Dès qu'on eut plus aucune nouvelles de lui, on sonna immédiatement l'alarme. L'enquête préliminaire avait été soignée et rapide mais rien n'eut permis de déterminer les causes et les circonstances du drame. La maison de sa fille fut fouillée, la route fut inspectée, ses appareils de communication ainsi que sa puce de géolocalisation n'émirent plus aucun signal. Un homme surgissait dans toutes les pensées, mais personne ne soulevait l'hypothèse, on se refusait à le croire, à l'admettre.

Tout commença avec Darren Fuller. Le chauffeur de la berline fut retrouvé inconscient au beau milieu d'une ancienne scierie abandonnée. L'homme retrouvant peu à peu ses facultés dès sa prise en charge à l'hôpital, il pu ainsi donner un premier témoignage : une jolie blonde en panne au milieu de la chaussée, une camionnette trop lourde pour être déplacée à mains nues et un coup de taser par derrière. Il fut transporté d'urgence le lendemain à la capital afin d'y être placé sous protection.

Darren était irlandais d'origine, il n'était pas rare que des étrangers vinssent immigrer dans le pays. Le regain de prospérité attirait beaucoup de monde et le pays était réceptif de cette main d’œuvre bienvenue. C'était une stratégie pour faire la promotion de son système et ainsi pourquoi pas, le répandre partout ailleurs. La politique d'immigration avait beaucoup évoluée et tout le monde rêvait de venir travailler, économiser, apprendre et éventuellement repartir grandi. Darren fut devenu chauffeur à son arrivée en France, la conduite n'était pas vraiment une passion, mais on lui eut proposé un métier bien payé, de bonnes garanties, il était simple d'avoir une situation stable.

Il prit possession d'un appartement pour témoins protégés mis à disposition, et commença à regretter amèrement ne pas avoir été à la hauteur, tant pour ne pas avoir su aider son patron que pour ne pas pouvoir aider les autorités. Il y repensait devant sa tasse de café qu'il vint de préparer, seul assis dans sa cuisine. Pourquoi ne pas avoir porté plus d'attentions à cette jeune fille ? Jolie, bonde, sexy, et rien d'autre. Il se senti coupable d'avoir eu un intérêt aussi primaire, sans le dépasser pour remarquer un signe distinctif. Cela devait certainement le tourmenter car étrangement, sa tasse fut devenue vide l'instant d'après. Il n'avait certainement pas vu le temps passer et avait sûrement bu son café machinalement, noyé dans les pensées. C'était curieux qu'il ne se souvienne pas du tout de la moindre gorgée. Même la cafetière était presque vide et le reste de café qu'elle contenait était froid. Dès le soir-même, il pu constater avec surprise en regardant le journal télévisé que la police avait un nom et un visage.

Les pires craintes se confirmèrent, la cellule savait à présent à quoi s'en tenir. La dernière trace de vie d'Angèle Meyer remontait à un an, on l'avait identifié lors d'une fusillade, avant de disparaître tel un fantôme. L'ombre d'Adam planait sur elle. Andréa voulait mobiliser la population pour la retrouver rapidement, elle eut ainsi mis en place cette stratégie de manipulation afin que la suspecte fût activement recherchée par toutes les polices ainsi que par la population. Ce fut le seul moyen pour donner une portée nationale à l'affaire car on ne pouvait pas accepter de rendre publique les véritables raisons. La discrétion était vitale, c'était une affaire d’État. L'organisation Torem était très peu connue du grand publique qui l'adulait pourtant sans le savoir par l'intermédiaire de sa vitrine gouvernementale. Il fallait émouvoir et impliquer le peuple en imputant un crime horrible, peu importe les raisons, tout le monde la recherchait, c'était le principal.

- Quel con ! Pensa fort Andréa, au sortir du palais de l’Omniscient. Il se fout de ma gueule !

Andréa était peu habituée à discuter avec Darius, mais elle connaissait son aspect incontrôlable et se devait de faire preuve de patience et de pertinence. Il eut accepté ce rendez-vous alors qu'il était déjà occupé à recevoir quelqu'un d'autre. Il eut prévu dès le début d'être expéditif et de les renvoyer comme des mal propres. Un tel manipulateur ne peut pas agir comme il le fait sans intérêts.

La photos était tirée d'une caméra, elle représentait un homme que l'on ne pouvait pas distinguer clairement. L'organisation Torem tentait de garder continuellement un œil sur Darius, celui-ci le savait bien, mais comme il avait constamment une longueur d'avance, cela ne le dérangeait pas. Il s'en amusait pour flatter son ego. Cette photo-là serait passée inaperçue si les événements récents n'eurent pas été déroulés, tant Adam n'était pas reconnaissable. Les circonstances après coup furent favorables et il fallut l’œil avisé d'experts pour l'identifier. Il fallut aussi ratisser tout les alentours à la recherches d'indices supplémentaire de sa présence sur les lieux. On ne se rendait pas chez l'Omniscient sans se préparer.

Adam était l'image d'une rébellion incomprise et incompréhensible. Il était surtout le seul que l'on ai pas réussit à appréhender. Les autres groupes révolutionnaires se firent et se défirent, se firent attraper, emprisonner. Parfois, ils se rangèrent du bon côté, d'autre fois, ils n'eurent même pas déjà existé se faisant neutraliser en amont, à titre préventif.

Andréa redoutait bien que Darius étant intouchable, elle n'en obtiendrait rien. Angèle Meyer avait lié Adam Adam à l'enlèvement de Fabien Floch et l'entourage connu d'Adam encore en circulation était relativement flou. Il y avait bien-sûr ses acolytes de toujours qui ne donnèrent plus signe de vie pour certains depuis des années. Se battre aux côté du Dernier Dissident, impliquait une vie rude, méfiante et souterraine. Le jour où elle mettra la main sur certains d'entre eux, Andréa savait qu'elle serait rancunière. C'était tous des meurtriers en puissance qui mettaient en péril la sécurité de la nation. Leurs tentatives de détruire Torem étaient toujours atténuées auprès du peuple par des raisons gouvernementales plus fédératrices afin d'éviter de mettre l'organisation en lumière et surtout en position de faiblesse.

Enzo Cortes était un responsable politique influent dans la ville de Paris, Andréa, particulièrement remontée se rendit à son bureau directement.

- Ça aurait du être toi ! Tu n'as pas voulu te faire rembarrer par orgueil alors tu m'y a envoyé.

- Je t'y ai envoyé car tu es en charge de l'affaire souviens-toi. Que t'a t-il dit ?

- Rien. Rien du tout. Il a fait son show, il m'a parlé comme s'il parlait à quelqu'un d'autre. Bref, mystique et ennuyant comme à son habitude.

- C'était attendu qu'il ne dévoile rien. Nous voulions juste lui faire savoir que nous savons.

- J'ai triplé les effectifs autour de sa baraque, il y a suffisamment d'hommes qui surveillent chacune de ses sociétés. Je suis très peu convaincue que ça va donner quelque chose.

- Très bien, à partir de là, je prend le relais, je m'occupe de Paris. Toi, tu retournes sur Argenton-sur Creuse. Tu vas finir par trouver quelque chose j'en suis sûr maintenant que le mal est fait.

Argenton-sur-Creuse abritait la dernière planque connue d'Adam. Il s'éloignait rarement de la capitale, sauf quand c'était très dangereux. Le repère fut découvert quelques mois plus tôt. Étant donné que l'opération de l'enlèvement de Fabien eut pu prendre du temps de préparation, il était envisageable que la planque eut pu couvrir une partie de sa planification. On eut estimé que l'endroit eut été abandonné moins de six mois avant sa découverte, lavé de tout indice comme toujours. C'était un petit garage situé à la lisière d'un bois, ainsi, on put entrer et sortir par la forêt sans se faire remarquer. On épluchait de nouveau tout ce qui avait été saisi alors, espérant, comme pour la photo, que les éléments puissent avoir un tout autre langage. Le mobilier, les vêtements laissés, les quelques documents, les photos de reste de nourriture, il y eut une bonne quantité de choses à étudier. Si ça avait été laissé, c'est que ce n'était pas exploitable, juste de quoi contenter et ralentir les enquêteurs. Andréa pouvait le voir, elle le savait trop bien.

Près de deux mois après l'enlèvement, les policiers n'eurent pas encore appréhendé Angèle la double meurtrière. La cellule secrète venait en revanche de localiser un garde meuble assez intéressant. Il avait été utilisé d'après le propriétaire pour stocker plusieurs caisses en bois. Son témoignage fut authentifié comme celui de Darren le fut. Les caisses attirèrent l'attention du propriétaire lorsque elles eurent été mentionnées aux journaux télévisés. C'était le chargement que la meurtrière avait dans son camion au moment de sa fuite. Ces caisses furent en réalité un poids très utile pour alourdir la camionnette afin de la rendre difficile à bouger par la force des bras. Le propriétaire n'ayant plus eu de nouvelles de sa locataire, du nettoyer l'emplacement. Ce fut là qu'il découvrit certaines des caisses qui n'avaient pas pu être chargées et qui ressemblaient fort à celles décrites à la télévision.

Elle se nommait Estelle Beauprés mais les empruntes retrouvées ne laissèrent aucun doute, Angèle Meyer était bien la locataire. À partir de là, il ne restait plus qu'à l'équipe de sortir toutes les données sur ce nom d'emprunt. Sa dernière résidence, un hôtel de campagne à Issoudun fut immédiatement saisi. Les enquêteurs découvrirent rapidement qu'Angèle y avait séjourné seule durant quelque jours avant de disparaître sans être allé au terme de la réservation.

Tout les environs de l'hôtel et ceux du garde meuble furent ratissés, toutes les vidéos surveillance des axes reliant ces deux lieux furent saisis. C'était une équipe d'une cinquantaine de personnes qui travaillait d'arrache-pied pour retrouver le moindre trace, le moindre indice menant à elle.

Après deux jours, tout les témoins potentiels eurent été entendus, certains eurent permis une grande avancée. Estelle Beauprés dévoilait encore d'autre éléments sur ses activités passée, comptes bancaires, différent lieux de résidence, forfais téléphoniques... Même si ce nom d'emprunt n'eut existé que deux semaines, ce qu'il offrait était d'une richesse appréciée après tant de semaines peu fructueuses. L'alias d'Angèle fut soigneusement protégé de toute divulgation pour ne pas alerter ses collègues. Ils allaient mettre la main sur elle, ce n'était qu'une question de temps.

Le gouvernement commençait à redouter sérieusement les répercussions des infirmations sensibles qu'aurait pu dire et dévoiler Fabien Floch sous la contrainte. On se préparait à d'autres événements en conséquence, des attentas, des enlèvements, une déstabilisation stratégique... la vigilance était accrue. Andréa pourtant ne savait pas vraiment quoi penser de tout cela. Quelle erreur stupide ! De vulgaires caisses de bois abandonnées ! Il aurait été facile de s'en débarrasser, c'était primordial. Quelque chose s'était passé. Sans parler de Darren Fuller qui fut retrouvé on se sait pourquoi. Elle redoutait qu'une telle négligence n'eusse plus d'importance si une menace irréversible venait à arriver.

Le pire qu'Andréa pouvait penser, l'hypothèse qu'elle privilégiait secrètement était qu'il s'agisse d'un piège. Et si c'était le cas, elle et son équipe y tombait à pied joints.

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