9.Mère & fille

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[Réponds-moi, s’te please !! J’en peux plus d’être sans toi, j’en crève de ne pas sentir tes mains, ta peau sur moi… J’en crève, tu comprends ? Appelle-moi ! ]

***

Valentine appuya sur la touche « envoi » de son smartphone, puis se mit à parcourir l’album intitulé « Miguel ». Elle fit défiler les clichés jusqu’à ce qu’elle tombe sur celui qu’elle cherchait, une photo de lui, de face, dans son plus simple appareil, prise par surprise au sortir de la douche. Elle se souvenait précisément de ce moment-là, de celui qui avait suivi juste après, quand il l’avait coursée dans tout le loft pour s’emparer de son portable afin d'effacer ladite photo. De ce qu’il lui avait fait jurer – ne la montrer à personne – s’il capitulait, de l’amour qu’ils avaient fait dans la foulée. De la manière dont il l'avait prise, sauvagement, sur le divan. Des coups de boutoir qu'il lui avait donnés, de plus en plus profonds, de plus en plus violents, des va-et-vient qu'avait impulsé sa trop bonne queue dans sa chatte, de la jouissance que ça lui avait procurée, du geyser de foutre qu'il avait déversé dans sa bouche quand il lui avait demandé de le finir et qu'elle avait avalé l'intégralité de son nectar sans broncher.

Miguel… Miguel, c’était sa drogue, le seul mec qui avait vraiment compté pour elle. Différent parce que, malgré leurs mémorables scènes de baise d'une intensité sans nom, il ne pensait pas qu’à son cul. Et pourtant… Pourtant, elle, elle ne pensait qu’à son sexe, à ce chibre qu'elle vénérait comme un Dieu, qui la comblait et dont elle était plus que dépendante.

Il faut dire qu'elle avait toujours plus ou moins été friande de joutes charnelles. Aux prémices de sa vie sexuelle, elle s'était fourvoyée bien sûr. La première fois, elle l'avait fait par amour. Avec un caïd, un type plus âgé qu'elle qui exigeait toujours davantage dans leurs moments intimes. Pas parce qu'il la trouvait jolie - ce qu'elle avait cru au début, malgré ses rondeurs qui la complexaient - mais parce que c'était une fille facile, docile. Soumise. Ce fut la réputation qu'il lui fit, dans tout le lycée. Dingue de lui, elle avait accepté beaucoup de choses. Mais un jour, la « petite soumise » avait dit non. Et ça n'avait pas plu au caïd. Il se mit alors à balancer leurs sex-tapes sur les réseaux sociaux, à la traiter publiquement de « grosse salope », de « pute », de « garage à bites », de « bouche à pipe ».

Les messes basses, les regards désobligeants, les remarques sur son physique, les insultes... Partout, tout le temps. Et puis, les anxyolitiques qu'elle avait finis par prendre en cachette en dévalisant régulièrement le cabinet de son père médecin, les veines qu'elle s'étaient ouvertes un soir, à bout, dans sa salle de bain.

L'après avait été sa revanche, sa seconde vie. Un régime drastique pour fondre à vue d'oeil, le recours à la chirurgie esthétique pour correspondre trait pour trait aux canons de beauté en vigueur. Et pour ne plus avoir à attendre qu'on la choisisse par défaut, devenir maîtresse de ses choix intimes.

Depuis, elle avait multiplié les amants, s'était érigée en reine du sexe tout en ayant la mainmise sur son destin et ses relations charnelles. C'était elle qui décidait, toujours. Jusqu'à ce qu'elle croise la route de Miguel. Qu'il lui fasse perdre pied et qu'elle en ait le vertige. Tout ou presque avait été si parfait entre eux, pourquoi avait-il fallu qu'il rompe ? Avec son physique de rêve, elle avait cru pouvoir le tenir par les couilles - son atout charme avait tout de l'arme absolue -, et pourtant, il s'était dérobé, le mufle !

La photo de son ex, intégralement dénudé, lui faisait de l'oeil, l'excitait. Au point de ne pas pouvoir s'empêcher de se caresser les seins, de descendre lentement vers son intimité, de titiller de ses doigts sa fleur si sensible à la simple évocation du bel andalou. Lascivement, elle se faisait du bien en ruisselant de désir. Gémissements et soupirs...

Un bruit de clé dans la serrure de la porte d’entrée. Valentine interrompit brutalement son onanisme, réajusta son unique vêtement – une longue chemise masculine – et se composa une attitude studieuse sur le sofa en se saisissant de sa guitare pour jouer les premiers accords et entonner les premières notes de « Señorita », le fameux duo muy caliente (1) de Shawn Mendes et Camila Cabello .

Les ballerines de Laurène chuintèrent à peine sur le sol du vestibule, puis elle pénétra dans le salon.

  • Salut ma fille ! Toujours en pleine répétition pour le concert de ce soir ?
  • Salut maman ! Non, pas vraiment. On n’a pas prévu de jouer ce morceau. Mais tu sais, je t’avais parlé d’une tournée que je voulais faire en Espagne, en septembre. Barcelone, puis l’Andalousie.

C’était surtout le périple que lui avait promis Miguel du temps de leur idylle. Mais Valentine ne disait jamais rien à sa mère de ses aventures sentimentales.

  • Avec les deux mois d’animation colo, poursuivit la jeune étudiante, j’aurai assez pour financer mon voyage. Et en octobre, j’attaque à nouveau la fac…

Laurène l'écoutait distraitement. Sur l’instant, elle ne se rendit même pas compte que sa fille ne s’était pas habillée – la longue chemise masculine étant sa tenue de nuit. La jeune femme rengaina son smartphone dans la poche de son vêtement – remerciant intérieurement le ciel que sa mère n’ait pas vu le cliché osé de Miguel -, posa sa guitare sur le canapé et se leva pour se diriger vers sa chambre située au rez-de-chaussée.

  • Je vais me changer... annonça-t-elle à Laurène.
  • Ah, tu pars déjà ?
  • Oui, j'ai un rencard... mentit-elle.

En réalité, Valentine était en manque. De sexe, de dope. Et parmi ses contacts, Ludo était le seul à pouvoir lui fournir la totale sans qu'elle ait à se justifier de quoi que ce soit. Un simple coup de fil pour vérifier qu'il était dispo suffisait. Et apparemment, il l'était...

(1) : très chaud

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