Le braquage

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En me levant ce matin, je trouve mes deux petits sagement affalés dans le grand canapé en train de regarder pour la vingt-septième fois Captain America tout en avalant des quartiers de vieilles pizzas qu’ils ont dû trouver au fin fond de la poubelle. Horrifiée, je leur arrache ça des mains, me bouche les oreilles pour ne pas subir les hurlements stridents du petit qui ne se taira pas tant qu’il n’aura pas quelque chose de consistant à se mettre sous la dent. Il crie, hurle, me suit jusqu’à la cuisine la bouche grande ouverte, se poste derrière moi pour brailler : T’as pris ma pizza. Ma pizzaaaaaaaaaa !!! Dans l’espoir de l’apaiser, je lui demande Pizza, ça commence comme quoi ? Sans se faire prier, il réplique Pizza ça commence comme pirate et comme pile et comme pilote et comme Pilar et comme pitit bateau et comme pipi…

Mon téléphone sonne. Je fourre une tartine de confiture dans la bouche de "Monsieur-pas-du-matin", retiens ma respiration trois secondes pour savourer le silence revenu et m’éclipse au salon, mon smartphone collé à l’oreille. Ce sont mes deux locataires qui parlent en stéréo, qui braillent elles aussi dans le téléphone. Elles ont assisté à un braquage hier soir, juste avant le couvre-feu. Elles ont dormi chez Antoine. Un braquage ? Comment ça un braquage ? Un braquage où ? Et Antoine qui d’ailleurs ? Et le virus, merde !? Elles disent « Près de la gare », elles disent « Les braqueurs avaient des masques », elles disent « Antoine, le petit prince », elles disent « Ne préviens pas nos parents », elles disent « On t’aime ! » et elles raccrochent.

On sonne à la porte. On sonne et puis on frappe. Je vais ouvrir. C’est C., échevelée et essoufflée, avec deux bières à la main. Je lui dis « Je ne bois pas à 7 heures du matin ». Elle dit « Moi non plus mais je n’avais rien de plus fort. » Elle me pousse pour rentrer, va tout droit à la cuisine, s’assied, ouvre une canette et dit « Je suis allée à mon rencard et il veut me revoir. Il dit que je suis jolie. Non mais tu te rends compte? Tous des c*** quand même ! »

J’inspire, j’expire. Je cherche une fréquence vibratoire. Puis je vais me recoucher. Je serai en retard. Tant pis.

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