Chapitre 12

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Lorsque je me réveillai, il commençait à faire sombre. Je décidai de reprendre un peu la route. Je pris le temps de manger un sandwich avant de grimper sur mon vélo. Alors que je pédalais à toute vitesse dans le désert, je réfléchis.

L’homme avait raison. Combien de personnes avais-je tué en utilisant le trois de Trèfle ? J’avais le souvenir que plusieurs dizaines de personnes s’étaient écroulées par terre. Mais je ne savais pas s’ils étaient mortes ou pas.

Dans la cabane, le couple s’était mis à vomir par terre, mais n’en étaient pas mort. Là, l’homme avait dit que plusieurs personnes étaient mortes, les personnes les plus fragiles.

Ma liste de morts était de plus en plus longue. Je n’en savais même plus le nombre. Encore une fois, je me justifiai :

  • Ils allaient me tuer ! Je me défendais, c’est tout.

Mais une autre part de moi, ma personnalité plutôt négative, répliqua :

  • Eux aussi voulaient se défendre. Ils avaient besoin de nourriture. Cet argument ne marche pas. Tout le monde a besoin de défendre sa vie. Et toutes les personnes qui ont déjà tué quelqu’un se sont dit comme toi.
  • Que c’était pour les défendre, murmurai-je.
  • Exactement. Et le jour où l’on te tuera, cette personne se dira : c’était pour me défendre.
  • C’est vrai. Mais je ne suis pas à la place des autres personnes. C’est déjà assez compliqué d’exprimer sa pensée, alors celle des autres....

La partie plus positive de moi-même arriva à ce moment :

  • C’était pour te défendre, donc arrête de t’en vouloir ! Ce n’était pas de ta faute.
  • Mais si ! répliqua ma personnalité négative. C’est lui qui a tiré, non ? Donc c’est lui qui tué.
  • Sa vie est plus importante que celle des autres, dit ma partie positive, un peu égoïstement.
  • Mais les autres personnes se disent la même chose ! Qu’ils tuent pour se défendre !
  • Je ne vois pas d’autre raison de tuer, dit la partie optimiste.
  • Par plaisir, suggérai-je.

Je compris alors que j’étais en train de discuter avec moi-même, car la solitude me pesait trop. Je m’inquiétais :

  • Je devrais peut-être voir un médecin...
  • Les médecins doivent être tous morts ! dit la partie négative.
  • Quant à discuter avec soi-même, il n’y a rien de grave, assura la partie optimiste.
  • Mais bien sûr que si ! répliqua la partie négative. Il risque de devenir schizophrène !
  • Tu parles de ça alors que tu es en partie responsable de ça, répliquai-je.

Mon vélo se stoppa soudain dans le sable. J’avais foncé dans une dune, et je ne pouvais plus continuer, car il faisait trop noir. J’établis mon campement sur ce lieu précis et ne tardai pas à m’endormir, éreinté par cette journée.

Le lendemain, je me réveillai courbaturé aux jambes, car j’avais roulé trop longtemps. Je mis donc du temps à me lever et à monter sur le vélo. Au détour d’une dune, je tombai sur un petit village qui semblait abandonné.

Je restai sur mes gardes et sortis le revolver de mon sac. Puis, laissant mon vélo où il était, j’avançai dans l’unique rue du village. Celui-ci comportait une dizaine de maisons en tout, et sans doute pas plus du double d’habitants.

Toutes les portes des maisons étaient ouvertes, témoignant d’un départ précipité. Puisqu’il n’y avait aucun habitant, je rangeai le revolver et retournai chercher mon vélo.

J’entendis soudain un bruit de verre qu’on casse et je vis une ombre s’abattre sur moi. Un poids s’abattît sur mon corps et je fus plaqué à terre, assommé. Une femme me regardait, tournant autour de moi à quatre pattes.

Elle semblait se comporter comme un animal. Alors qu’elle allait s’en prendre à mon sac, je roulai sur le sol pour lui échapper et me relevai. Je sortis rapidement mon revolver et le pointai en direction de la femme.

Elle semblait encore se souvenir de ce qu’était une arme, et elle recula donc en direction de la maison d’où elle venait. Je reculai moi aussi, ne la quittant pas des yeux.

Après quelques pas en arrière, la femme avança aussi, se maintenant à une distance respectueuse. Je compris qu’elle ne me lâcherait pas. Je me résolus de tirer sur la femme, mais une petite voix dans ma tête me rappela :

  • Tu as déjà tué assez de personnes ! Tu veux en tuer une de plus ?
  • Vas-y, tues-la ! Une de plus ou une de moins...
  • Tu peux prendre un petit bout de pain et lui lancer !

J’appliquai ce plan immédiatement. Sans la quitter des yeux j’enlevai mon sac de mes épaules et pris une tranche de pain. Je remarquai à cet instant que le paquet était presque vide. Il ne me restait que de la nourriture pour aujourd’hui.

Je lançai la tranche de pain dans les airs avec force, et la femme, reconnaissant la forme, courut après. J’en profitai pour monter sur mon vélo et pédalai à toute vitesse. Un peu plus loin, je m’arrêtai et vérifiai que personne ne me suivait.

Je sortis la carte de mon grand-père et l’étalai sur la sable. Si j’avais bon dans mes prévisions, la prochaine ville était dans moins d’un kilomètre, mais je choisis de l’éviter pour faire un petit détour.

J’irai dans une ville qui, je l’espérai, serait un peu plus clémente. Je me remis immédiatement sur mon vélo et pédalai de toutes mes forces.

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