Le curé sur la mezzanine

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J'attendais une réponse de Pilou, mais ce fut Joséphine que j'entendis dans ma tête le soir suivant.

- Bonsoir, Pilou a eu peur des conséquences de vos initiatives, et il s'est confié à l'ange en charge de son secteur qui m'a contacté. Je prends en quelque sorte la relève pour étudier le projet.

Celui-ci ne pourra pas être confié à des amateurs, et il devra être piloté par des religieux motivés, et non par des entreprises à but lucratif.

J'ai vu à plusieurs reprises que votre curé était un homme efficace, capable de rassembler autour de lui. C'est un quelqu’un comme lui qu'il nous faut pour évaluer la faisabilité de cette affaire.

Expliquez-lui le projet de création d'une revue, et s'il y souscrit, débrouillez-vous pour que je puisse lui parler. Surtout pas d’évêques dans le système, pas de récupération possible par la hiérarchie. Une revue pour les fidèles tenue par de vrais croyants de base.



- Joséphine, avant d'aller voir le curé, je voudrais vous faire une suggestion qui n'a rien à voir avec le projet :

Pourquoi n'utilisez-vous pas les lignes orales d'assistance qui ont l'avantage d'exister dans le cerveau de tout un chacun, pour faire passer des messages aux humains ?

De la musique douce accompagnée de messages subliminaux.

Avec toutes les âmes observatrices dont vous disposez au paradis, vous pourriez cibler vos prospects et leur envoyer des messages adaptés.

De plus, cela serait une source d'occupation et de motivation pour les âmes désœuvrées.

Une religion à la pointe de la modernité, voilà ce que je vous propose.



Joséphine mit un terme à notre entretien.

- Je note, mais un petit conseil, ne vous rendez pas trop indispensable, car, sinon on risque de vous expédier au ciel plus tôt que prévu.



Le curé adhéra immédiatement au projet. Mais il voulut en parler avant avec son groupe des fidèles du Bêtisier du Confessionnal, avant de donner son accord.

C'était la première fois qu'un sujet devait être occulté à une hiérarchie en laquelle ils avaient entièrement confiance.

À l'unanimité, ils demandèrent au curé de les représenter.



Le curé me rejoignit donc chez moi pour notre tentative de communication avec Joséphine.

Une fois dans mon appartement, la mise en place de l'opération se révéla délicate. Très délicate.

Car, au risque de me répéter, j'avais une chambre surplombée par une mezzanine, elle-même accessible par une échelle.

Sur cette mezzanine trônait un énorme matelas. J'y avais ajouté de nombreux coussins me permettant d’être dans une position confortable pour effectuer mes méditations.

Cette mezzanine me servait occasionnellement à recevoir, mais, à ce jour, jamais de membres du clergé.

Arriver à faire monter le curé à l'échelle fut déjà un exploit.

Lui expliquer qu'il devait s'allonger sur le matelas, et se mettre en position front contre front avec moi pour pouvoir entendre la conversation avec Joséphine, pas évident non plus.

Le fait d'avoir découvert quelques dessous féminins perdus sous les coussins ne le rassura pas plus.

De mon côté, la crise de fou rire qui me prenait ne facilitait pas l'opération de concentration.

Enfin, comme nous étions tous les deux conscients de l'importance de cette affaire, nous avons réussi à nous positionner en occultant nos émotions respectives.

Joséphine et le curé eurent une discussion très constructive, expliquant, chacun à son tour ce qu'ils proposaient pour le projet.

Joséphine clôt la conversation en indiquant qu'elle ne pourrait parler de ce projet à Dieu tant que les moyens terrestres ne seraient pas connus avec certitude.



Je raccompagnais chez lui le curé qui était chaud bouillant.

Il voyait son église à la une des journaux, les interviews des télévisions, la reconnaissance de son action. Il était l'homme qui réconciliait le ciel et la terre, qui leur permettaient de se connaître, de se comprendre.

Qui serait le plus puissant ? Le pape qui parlait aux hommes, ou lui qui traduisait Dieu.

Je savais qu'il ne buvait pas, mais ce soir, c'était comme si.

Un ego qui sort de son sommeil. Pour réussir le projet, il faudra bien qu'il y retourne.


Je fus régulièrement en contact avec Joséphine à partir de ce jour-là, et j'en profitais pour lui poser quelques questions.



Le sort de Pilou m'importait et je l'interrogeais à son sujet.

- Pilou va passer du statut d’âme simple à celui d'ange stagiaire avec possibilité de titularisation.

- Pilou pourrait-il devenir mon ange personnel ?

- La première réaction qu'a eue Pilou à votre égard a été de vous dénoncer auprès de ses chefs. Ce n'est pas le meilleur critère de la confiance que l'on peut accorder à quelqu'un.

De plus, en règle générale, avoir son ange privé signifie en pratique que vous êtes sous la surveillance directe du ciel. Et connaissant votre souci d'indépendance, je crains que cela ne vous convienne pas.

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