Partie I - Neuvième chapitre

10 minutes de lecture

Églantine fut absolument ravie d'avoir fini cet exposé et il avait décroché un A+. C'était une des rare fois ou elle se sentait fière d'elle. Elle avait cette étincelle juchée au fin fond de ses iris qui disait que son avenir était encore à construire, qu'elle n'était pas condamnée à l'échec. Cette note représentait tellement pour elle.

Harry ne souriait pas, il affichait cet air un peu hautain qui révélait de son égocentrisme que cette note était tout à fait normale et qu'il ne pouvait pas avoir autre dénouement pour cet exposé. Cependant si on observait bien, si on se concentrait un peu plus sur ses traits, et si on s'approchait, un rictus se dessinait. On pouvait entrevoir, déceler la signification de ce léger sourire à la vue d'Églantine explosant de joie. Elle savait qu'elle venait de sauver sa moyenne d'Histoire du semestre...et lui aussi le savait.

Elle était rayonnante lorsqu'elle prit le chemin du retour avec Juliette. Elle rejoignit Liam qui lui proposa l'herbe qu'il fumait, elle eut ce réflexe d'attraper le sachet puis se ravisa. Cette émotion de fierté qu'elle ressentait était réelle, bel et bien réelle et elle désirait la ressentir pleinement. Elle n'avait pas besoin de fumer. C'était tout, c'était bien.

_ Alors, t'as laissé ce fils de riche, faire l'exposé tout seul ? Il te donne un A+ sans que t'es rien fait. C'est génial. Tu peux te la couler douce maintenant. Avec cette note, c'est sûr que tu auras la moyenne ce trimestre. Ricana Liam.

Églantine arrêta soudainement de sourire.

_ Tu crois que je l'ai laissé faire ?

_ Ben, tu vois le genre d'Harry. Tu vois ou t'habites, tu vois tes notes. Il a pas du te laisser toucher à ce devoir. Il a tout organisé de A à Z. C'est ce qu'il fait toujours. Quand, il est en binôme, il se fout de s'accaparer tout le travail, parce qu'il sait pertinemment qu'il va avoir une bonne note. Il est tellement autocentré. Il se sent plus.

Et elle douta soudainement autant qu'elle se colora de colère rapidement. Pourquoi Liam voulait toujours tout gâché ? Elle en avait marre d'entendre toutes ses insanités sur Harry. Avant elle se fichait de l'entendre déblatérer sur lui mais plus maintenant. Aujourd'hui, ils étaient tous les deux une sorte d'équipe, et elle se sentait aussi insultée. Elle ne comprenait pas d'où venait la sensation qui s'accaparait de son être et qui faisait qu'elle éprouvait une sorte de proximité avec Harry parce qu'il fallait se rendre à l'évidence, elle n'avait rien partager de "personnel" avec lui et quand elle parlait de "personnel", elle signifiait spécifiquement des conversations, pas ce qu'il avait vu, pas les secrets qu'ils cachaient tous les deux. Alors elle demanda

_ Pourquoi tu ne peux pas le blairer ?

_ Quoi ?

_ Pourquoi t'agis comme ça? Pourquoi tu parles de lui comme ça, on dirait que c'est ta victime, que tu l'as choisis lui spécialement pour te venger de porter toute la misère que tu emmagasines, toute la rancœur et la haine que t'avales à coup de pétard et d'alcool. Mais ce n'est pas sa faute, tu le sais ça ? C'est quoi, alors ton problème avec lui ?

_ Va te faire foutre Églantine. T'es qu'une pute. Va t'envoyer en l'air avec ton connard de bourge.

Et il est parti avec les feuilles mortes de l'automne. L'hiver venait de pointer le bout de son nez et Églantine prenait conscience de la portée de ses mots. Les vacances de Noel arrivait à grand pas et c'était les vacances qu'Églantine haïssait le plus de tout son être. Parce qu'il y avait son cousin qu'elle détestait, parce qu'elle était avec sa famille qui crachait sur elle et que tous ses amis partaient.

Les jours suivants, Liam ne lui parlait plus et forcément ça l'ennuyait beaucoup. Elle voulait trouver le moyen de s'excuser en même temps qu'elle se demandait encore ce qu'il lui avait pris de défendre son apathique voisin plutôt que son ami, mais malgré ça, elle allait mieux. Enfin l'école et elle se réconciliaient. Plus les journées se déroulaient, plus elle s'animait parce qu'elle ne dormait plus, affalé contre sa table, et elle participait même quelque fois en économie, en Philosophie et en Histoire. Harry n'échangeait pas beaucoup mais ils se souriaient de temps en temps poliment et elle trouvait que les choses changeaient entre eux sans vraiment comprendre pourquoi. Pourtant, elle aurait bien voulu en savoir plus, en comprendre plus... Oui, seulement voilà. Ils n'avaient plus de projets en communs. Et elle n'aurait jamais cru penser ça un jour mais ça lui manquait, parce qu'avec Harry. Elle avait l'impression ne plus être obliger de se cacher volontairement derrière sa pauvreté, il ne considérait pas son statut social, mais sa personne. Parce qu'Harry s'en foutait. Il l'avait laissé participer à leur projet, - ce qui était normal - mais pas selon Liam. Et cette remarque la taraudait.

Son genou bougeait de manière impulsive parce que ses questions la tourmentaient incessamment. Et du coup, elle ne participait plus et Harry paru déçu que leur petit jeu qu'ils avaient instaurés s'arrête. Leurs mains levées, se percutant quelques fois ou se frôlant à d'autres moments. L'adrénaline montante à la vue du professeur qui allait interroger l'un des deux. Églantine découvrait chez Harry, un côté taquin et enfantin alors qu'ils ne se parlaient même pas. Ils en connaissaient bien plus sur l'autre en observant leur gestuel propre.

Elle envoya un SMS à Juliette expliquant qu'elle devait rentrer tôt et qu'elle ne pourrait pas la rejoindre. Et ce qu'elle s'apprêtait à faire était totalement insensé mais il l'avait aussi fait donc elle était en droit de le faire. Elle lui rendait la monnaie de sa pièce

La sonnerie retentit, et elle prit son temps pour ranger ses affaires, Harry se précipitant, elle le suivit. Il était avec Niall marchant le long de la chaussée à l'opposé du trajet d'Églantine. Elle ne comprit pas pourquoi, il n'avait pas déjà pris le car, ou pourquoi il n'avait pas appelé son chauffeur personnel. C'était ridicule de marcher, de perdre du temps à marcher quand on pouvait en gagner. Surtout que chez lui, c'était loin, très loin.

Niall se stoppa ainsi qu'Harry et ils se donnèrent une tape à l'épaule afin de se quitter, Niall tourna à l'angle de la rue et Harry se retrouva seul.

A vrai dire, Églantine ne saisissait toujours pas pourquoi elle le suivait, jusqu'où elle le suivrait et surtout, elle se demandait si cela avait réellement un sens.

Harry sortit son iPhone de sa poche, et le sien à elle vibra aussitôt. « Stiles » s'afficha sur son vieux smartphone. Elle s'immobilisa.

« Je sais que tu me suis »

Et c'était tout. Il rangea son portable à l'arrière de son jean et avança sans se retourner. Elle se figea un instant et s'interrogea sur le simple fait que ce garçon soit sain d'esprit, puis elle se dit que ça ne pouvait pas être pire qu'elle de toute façon. Il était 17h heures, et elle devait rebrousser chemin si elle voulait être à l'heure. Elle abandonna, ne sachant pas d'où venait cette impulsivité.

_ Ben, t'es pas très téméraire Églantine.

Il se fichait d'elle. C'était déconcertant.

_ Je dois rentrer, j'ai des obligations.

_ Pourquoi tu m'as suivi ? Interroge a-t-il les yeux pleins de malice.

_ Chacun son tour mon pote !

_ Ah, parce qu'on est pote maintenant ? S'exprima –il dubitatif.

Elle grimaça, regrettant ses paroles, et elle tenta de se justifier

_ C'est une façon de parler, Harry. On n'est pas comme pote, pote. Tu vois. On est co-équipier. Non enfin. Genre voisin de la même table, voilà. Tu vois, on est proche sans l'être mais du coup on l'est quand même...On ne se connait pas, mais si c'était une sorte d'image, tu vois ? Tu peux m'aider s'il te plaît ?

Il explosa de rire, et Eglantine s'offusqua. Il se foutait vraiment de sa figure et elle, était rouge pivoine. Elle se frappa mentalement, mais qu'est ce qui lui avait pris ?

_ Ecoute j'ai compris, t'inquiètes pas.

Et c'est la première fois qu'elle le voyait si ouvert, ses yeux la détaillaient vraiment, la sonnaient vraiment.

_ Hum, bon écoute, je dois retourner chez moi donc je vais te laisser, sinon je risque de me faire étrangler.

Et il ne savait pas à quel point il pouvait prendre ses mots à la lettre, d'ailleurs, pourquoi avait-elle dit ça ? C'était jeter de l'huile sur le feu.

_ Tu ne vas pas fournir tous ses efforts pour rien quand même?

_ Toi aussi la dernière fois, t'as pas vraiment appris de trucs sur moi tu vois...

Mais à quoi jouaient-ils? C'était ridicule, leur conversation l'était. Il parlait du fait qu'ils s'espionnaient sans vraiment l'aborder. Elle était mal à l'aise à ce propos.

_ Oh si.

_ Pardon ? S'irrita-elle.

_ J'ai appris des choses là bas.

Elle ravala difficilement sa salive et elle eut une peur panique. Il était au courant pour le sang qu'il avait trouvé sur sa chemise. C'est vrai qu'il en savait davantage sur elle, qu'elle sur lui.

_ Allez, je vais te raccompagner, tu ne seras pas rentrée à temps et ta mère t'étranglera. Edgar arrive.

Elle fronça les sourcils.

_ Pourquoi il ne vient pas directement au lycée ? C'est débile. Tout le monde sait que t'es riche.

_ Non, Niall et toi le savez, pas les autres. Mes parents le sont, pas moi. Je n'ai pas forcément envie d'attirer l'attention. Je ne suis pas toi.

_ Je ne cherche pas non plus à attirer l'attention...

_ Pour un certain nombre de choses, oui, c'est sûr.

Elle baissa les yeux, honteuse de se montrer aussi faible. Pourquoi fallait-il que ce soit lui ? Pourquoi devait-il être au courant de tout ça ? Elle n'aurait pas pu faire sérieusement attention ? Elle était tellement inconsciente et manquait de tact et d'intellect. Ça la bouffait et lui déclenchait des démangeaisons parce qu'elle se détestait alors elle avait envie de se frotter les bras forts et mal, parce qu'elle n'était qu'une pauvre conne.

_ Eglantine arrête.

Et elle ancra ses pupilles dans ceux d'Harry qui était nettement plus près d'elle qu'il y avait trois minutes. Il attrapa son poignet et le serra très fort. Il ne l'avait jamais regardé avec autant d'intensité. Ses yeux la transpercèrent, ils visitaient son âme pour en découvrir toutes les failles et les secrets qu'elle dissimulait

_ Lâche-moi.

_ Pourquoi tu fais ça ?

C'était injuste de poser cette question de cette façon-là, tout le monde le faisait. C'était le premier réflexe et pourtant ça n'aidait pas les malheureux. Jeter à la personne qui souffrait le martyr, l'irrationalité de son geste, la stupidité de celui-ci, rappelait au mutilateur qu'il était encore plus croupissant qu'il ne se pensait déjà. Ça n'arrangeait rien ces questions, parce que ça rassurait l'autre de comprendre les causes mais pas la personne mutilatrice qui ressentait cette douleur si atroce en permanence qu'elle était obligé de s'infliger pareilles scarifications sur son corps pour se permettre de projecter la souffrances ailleurs que celle intérieur.

Églantine était fatiguée. Elle avait pourtant passé une bonne journée et tout remontait à la surface, ce n'était pas une vague, c'était un tsunami d'émotions toutes plus affreuses.

Et elle lui répondit :

_ Tu ne poses pas la bonne question.

Et ça eut l'effet de le moucher. Il ne répliqua pas, ne compris pas et il lâcha le poignet d'Églantine en même temps qu'Edgar arriva.

_ Bonjour, Mademoiselle Églantine, heureuse de vous revoir. Je vous en prie.

Elle s'engouffra dans la voiture, et ne pipa mot pendant plusieurs minutes, Harry fit de même. Elle ne voulait pas rentrer chez elle et aurait préféré marcher, quitte à affronter les foudres de sa mère. Elle était énervée qu'Harry lui impose ça, de la ramener quand elle, n'avait que la marche pour s'évader de ce monde impitoyable. Et en y réfléchissant, c'était peut-être pour ça qu'elle lui en voulait un peu plus tôt de marcher avant de monter dans son foutu taxi avec son foutu maître d'hôtel. Parce que c'est tout ce dont elle disposait, quand lui avait tout. Il pouvait faire ce qu'il voulait.

Lorsqu'elle arriva à destination, elle se jeta presque dehors mais Harry la retint.

_ Ne fais pas ça

Oh si qu'elle avait l'intention de le faire. Il ne savait pas à qui elle avait à faire là-bas, à l'intérieur. Il suffisait qu'il entre dans le hall de l'immeuble pour comprendre les traces douloureuses de sa mémoire.

Elle l'observa, déterminée.

_ N'en parle à personne.

Elle se retourna, et pris la cage d'escalier.

Harry était excédé. Pourquoi faisait-elle ça ? Ça n'avait aucun sens ? Pourquoi elle l'avait suivi ? Ces questions s'enchaînaient, il ne trouvait aucune réponse et Edgar l'interrompit dans ses pensées.

_ Ça avait tout l'air tragique, Harry. Tu devrais t'inscrire dans des cours d'art dramatique. Je suis sûr que ton père serait ravi.

_ Mon père est ravi dès que je côtoie de près ou de loin les mondanités. Bien sûr qu'il serait heureux. Aucune de ses personnes habitant de près ou de loin ce quartier ne fait de l'art dramatique Edgar !

_ C'est tout à fait juste.

_ Je n'appartiens pas à ce monde-là. Ni à celui de mon père. Je fais partie de la société dans son ensemble le plus grand, comme on m'a éduqué. Mon père est un homme de contradictions. Tu le sais aussi bien que moi Edgar.

_ Je ne pense pas avoir le droit de faire des commentaires M. Stiles

Après avoir pris quelques coups par son frère dans les jambes, Eglantine s'enferma dans sa chambre. Ses yeux étaient gonflés de fatigue, ces cernes se creusaient et elle n'avait plus de force ou peut être que si, juste un peu pour lui permettre de...

Son smartphone clignota. Elle venait de recevoir un SMS « Stiles »

« T'as mal ? »

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire CelineJune ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0