Partie I - Premier chapitre

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_ Tu n'es qu'une incapable, Eglantine. Baisse ton regard immédiatement.

Et c'est ce qu'elle fît comme toujours.

Eglantine s'abaissait toujours à cet enfer qu'était sa mère. Elle était, à vrai dire, mortifiée parce qu'elle se demandait toujours si sa matriarche serait capable du pire avec elle, sa propre fille. Lorsqu'elle pensait « au pire » c'était en réalité simplement pour se rassurer. Eglantine se rassurait toujours comme elle pouvait, alors elle envisageait toujours la mort lente et capricieuse. 

Avant qu'elle ne soit projetée contre la commode, s'esquintant la colonne vertébrale par la présence des poignées rondes de cette dernière, elle pensa qu'il y aurait pu avoir « pire », qu'elle aurait pu se casser la jambe et ça elle ne le voulait pas. Eglantine aimait trop courir, elle aimait davantage s'enfuir et sans ses jambes, elle était prisonnière de la folie de sa mère. Elle resta cinq minutes sans bouger attendant l'agonie mais elle n'arriva pas. Donc, Oui, tout ça aurait pu être bien plus grave.

Son frère cadet entra dans sa chambre sans même frapper et lui asséna un dernier coup de pied dans les côtes. Elle se recroquevilla un peu plus sous la douleur qui paralysait son petit corps. Il déclara :

_ T'es misérable.

Ça y était.

Ils avaient déversé leurs colères enfouies au plus profond d'eux dans leurs actes immondes. Leurs actes étaient toujours dirigés envers Eglantine. Elle se sentait responsable de la violence des membres de sa famille. Son petit frère était pris de soudain excès de colère. Cet état d'esprit l'habitait inlassablement. 

C'était normal. Non, Églantine n'était pas victime de maltraitance, c'était juste qu'ils ne leurs restaient plus qu'elle pour projeter leur aversion pour le monde. Elle ne pouvait pas leur en vouloir. C'était sa famille.

Heureusement l'amant de sa mère, le voisin, arriverait bientôt et elle serait enfin tranquille et pourrait peut être traîner avec son fils Rayan. C'était sympa de traîner avec lui. Il parlait, et elle se la fermait.

Elle ne savait pas vraiment quelle était la nature de la relation qu'elle entretenait avec Rayan. Elle pensait qu'ils étaient amis mais n'en n'était pas totalement convaincue. Il était de ces jeunes adoptant des comportements dangereux pour eux mêmes et pour les autres, comme Eglantine. Cependant elle ne le voyait pas comme tels. Ils se comprenaient dans leurs manière d'agir un peu violente.

Un soir, où sa mère travaillait de nuit, ils avaient organisé une petite fête chez elle. Il avait invité quelques amis et elle s'était forcée à faire de même avec quelques camarades de classe. L'alcool coulait à flot et elle ne savait plus vraiment ce qu'on lui proposait ou ce qu'on lui donnait à boire. Elle disait toujours oui à tout Eglantine, même quand elle pensait Non. Elle se trouvait toujours plus légère lorsque elle était en état d'ébriété avancé. Elle ne parvenait plus à sentir la souffrance qui habitait son corps, son dos, ses jambes, son cœur et son âme. Plus rien n'existait. Il ne restait plus que son enveloppe corporel qui se balançait d'homme en homme. Eglantine pensait que c'était ce qu'il fallait faire à cet âge. Elle se pensait plus jolie et plus aimée lorsque les hommes aimaient davantage ses courbes qu'elle ne les supportait.

Rayan la rattrapa in extremis lorsqu'elle failli tomber contre la table basse et dans un geste qu'elle trouva bon, il l'allongea dans sa chambre. Elle était à peine consciente. Eglantine ne se souvenait plus vraiment de tout. Elle gardait seulement de violents flashs qui revenaient la hanter les nuits d'insomnies. En fait, c'était ce qui lui créait ses nuit d'insomnies, ses souvenirs cauchemardesques. Elle savait qu'elle n'avait même pas essayé de résister. Elle était faible et elle n'avait rien intenté afin de se sortir de cette situation. Elle était juste trop fatiguée et était si ivre qu'elle ne pu rien contrôler. Ça la consumait littéralement cet alcool qui lui coulait dans les veines et elle se sentait un peu plus coupable, de lui avoir laissé déboutonner son pantalon, de lui avoir laisser arraché sa culotte et de l'avoir pénétré violemment sans préparation. Elle en avait hurler de douleur, déchirant son hymen, brisant le peu d'intégrité qui lui restait et le peu de respect qu'elle avait d'elle même. Elle était désormais une souillon, et elle n'avait rien fait pour empêcher que cela se passe. La musique cachait bien son cri strident d'agonie. Personne ne pouvait rien faire alors elle le laissa se soulager en elle. Si elle fermait les yeux et laissait planer son enveloppe corporelle peut être que son corps ne se rappellerait de rien le lendemain et effacerait toutes ses souffrances infligées. Peut être qu'elle ne sentirait pas la douleur atroce qu'elle ressentait dans le bas ventre, entre ses jambes, à l'intérieur.

Mais ce ne fût pas le cas, le lendemain.

Elle trouva Rayan allongé à côté d'elle ce matin là, il dormait profondément. Lorsqu'elle sentit la peur et l'angoisse de vide s'infiltrer dans ses veines, elle dégobilla sur sa couette. Elle bougea à peine avant que sa colonne vertébrale et ses côtes ne la rappelèrent à l'ordre. Puis, elle suffoqua. Le mal qui la rongeait était intolérable toutefois ce n'était rien quand elle rassemblât le peu de force qu'il lui restait afin de se lever. Là, à l'intérieur, elle était déchirée. Le sang séché sur sa culotte la tétanisa et Eglantine n'arriva pas à se rassurer pas ce jour là. Elle essaya de penser au pire mais elle ne trouva plus ce qu'il pouvait bien lui arriver de pire. Même pas Mourir. Non, ça serait trop apaisant.. Elle sortit de la chambre, puis de la maison tout en enfilant un legging et un pull et elle s'échappa de l'air trop lourd qui lui comprimait la poitrine à l'intérieur. Tout n'était que douleur infâme.

Elle se précipita sous le chêne en face de l'immeuble et s'imprégna de la délicate fumée de sa cigarette. Ses nerfs lâchaient enfin prise et les premières larmes d'Eglantine naissaient au coin de ses pupilles.

Tout était de sa faute. La vie ne lui en voulait pas. C'était elle qui créait son propre malheur.


La vie d' Eglantine était régie par une famille décousue, qui sévissait, mais elle ne désirait pas voir cette vérité. Elle préférait rejeter la faute sur elle parce que ça lui paraissait plus facile. Elle était la cause du chagrin et de la violence de sa mère, des actes de Rayan et de la méchanceté projective de son frère. Elle était prise au piège dans cette spirale infernale. Elle ne vivait pas, elle survivait. Les jours les plus calmes étaient ceux qu'elle préférait. Sa mère travaillait en journée et son frère rentrait de l'école plus tard qu'elle à cause de l'étude. Les soirs de semaine, elle pouvait traîner jusqu'à six heures dehors.

Elle pouvait respirer jusqu'à six heures.

Malgré tout ce que subissait Eglantine, et tout ce qui s'écroulait dans sa vie, L'école lui subsistait. Elle avait des facilités et elle se reposait sur ses acquis. C'était une adolescente perturbée. Enfin Eglantine ne se pensait pas perturbée. Elle aimait être turbulente en cours. Elle aimait se faire remarquer. Elle aimait dépasser le cadre, les limites et lorsque l'avertissement ne suffisait plus et que l'ultime menace était l'appel de sa mère . Eglantine se figeait de peur et la lueur qui l'habitait seulement lorsqu'elle était en classe et qu'elle testait le professorat, les surveillants et le bureau de de la conseillère principal d'éducation, s'éteignait immédiatement.

Le lycée était son exutoire, ce qui lui permettait d'être à l'abri pour quelques heures. Elle se sentait en sécurité à cet endroit seulement . Elle aimait que l'attention de toute la classe soit orientée sur sa personne. Elle respirait de nouveau, elle avait l'impression d'être de nouveau importante. Ses camarades l'aimaient bien pour toutes les absurdités qu'elle sortait, elle se moquait ouvertement de certains de ses profs. Elle était irrespectueuse parfois, puis elle s'excusait rapidement, parce que les professeurs était plus attentif à elle, son bien être que sa propre famille. 

Un jour elle avait eu un avertissement et on appela sa mère pour un rendez vous. Elle eut cette impression que les murs de l'école s'écroulaient sur elle.

L'Adjointe à la proviseur avait été clair. Eglantine devait se calmer si elle souhaitait passer son baccalauréat dans ce lycée.

Et c'était ce qu'elle voulait le plus au monde, passer son baccalauréat et fuir.

L'été fut atrocement long pour elle parce qu'elle était prisonnière de sa mère. Elle avait le droit de voir une ou deux amies à la maison, mais Eglantine n'en n'avait pas beaucoup. Cependant, elle en aimait une plus que toutes les autres, Juliette, son amie d'enfance. Le changement d'attitude de sa mère au contact de ses amis l'impressionnait toujours. Elle était une mère compatissante qui aimait ses enfants plus que tout. Elle devait surement l'aimer se disait-elle, mais d'une manière un peu trop surprotectrice.

Un peu trop castratrice et totalitaire aurait-on dit. Un peu trop maltraitante aurait-on dénoncé.

Elle passa l'été à se réfugier chez ses grands parents. Il y avait une douce chaleur chez eux qu'elle ne connaissait pas chez sa mère. Sa mère était froide et effrayante comme la glace. Elle était heureuse de partir avec eux sans sa mère et si elle y était, elle allait bien. Sa mère n'agissait jamais comme un tyran devant ses propres parents. L'été était supportable.

Oui, Encore une année à tenir pour Eglantine et elle partirait.

La veille de la rentrée, sa mère éclatait sa fureur, C'était surement encore un stratagème pour qu' Eglantine mange avec Rayan, mais elle ne le voulait plus. Elle était trop effrayée, elle avait juste expliqué à sa mère qu'ils s'étaient disputés, et qu'elle en faisait tout une histoire seulement pour ça, une simple dispute.

Elle avait attrapé les cheveux d'Eglantine en arrivant, ses yeux injectés de sang par la haine et lui avait crié :

_ T'es une battarde comme ton père. Tu ne feras jamais rien de ta vie. Tu m'entends !

Le cœur d'Egantine saignait toujours énormément lorsqu'on parlait de son père. Il les avait abandonnés mais elle se rappelait davantage des gestes d'affection de son père que ceux de sa mère. Elle l'avait connu jusqu'à ces dix ans avant qu'il claque la porte. Sa mère avait formellement interdit à ses deux enfants de voir leur père ou de n'avoir ne serait-ce qu'un contact téléphonique. Il n'avait pas vraiment insisté. Le père d'Eglantine était un lâche.

Eglantine préférait les douleurs physiques à celles que lui infligeaient son palpitant, alors quand sa mère décidait de la laisser tranquille et de seulement la rabaisser plus bas que terre. Elle s'enfermait dans sa chambre et ouvrait le dernier tiroir de son bureau ou elle en extirpait des ciseaux. Églantine pleurait encore. Elle pleurait de la noirceur de sa vie, qu'elle même croyait en être la créatrice.


Harry était heureux de rentrer en Terminale. La dernière année de lycée s'entamait. Il avait pour but de décrocher une mention, et d'entrer en Sciences Politiques. Ses parents préféraient largement qu'il enchaîne avec une école de Commerce, mais il le ne voulait pas. Ils avaient déjà réussi à le pousser vers une filière générale économique et sociale alors il ne comptait pas non plus à ce qu'ils choisissent ce qu'il adviendrait de sa vie.

Harry était le genre de garçon plutôt discret, mais il avait des amis qui le sollicitaient toujours parce qu'il avait un charisme débordant, il avait une aura percutante qui envoûtait l'autre sans grand mal. Il était mystérieux parce qu'il ne dévoilait que très peu d'éléments sur sa vie mais il avait de l'impact, parce qu'il fascinait. Il ne parlait pas beaucoup mais s'il le faisait, le monde autour de lui s'arrêtait de tourner, préférait se taire et boire ses paroles. Il n'avait pas vraiment conscience de tout ça. De plus, il pensait que ce succès provenait certainement de l'argent que ses parents possédaient. La dernière grande entreprise nationale implantée dans leur région. Il justifiait ce qu'il représentait pour les autres par l'argent. Il n'était qu'un trophée à gagner pour les filles de son lycée et un passe temps pour ses potes de classes. Ils trouvaient que ces filles, celles qui côtoyaient son lycée était fades, sans parfum, sans saveur. Il ne se concentrait que sur ses études. C'était son but. En fait, Harry avait de la chance, ses parents payaient presque l'ISF (impôts sur les grandes fortunes) mais ils se plaisaient à penser qu'ils étaient en quelque sorte dans une démarche progressiste, républicain et aimant profondément le service publique. Ils ne voulaient pas d'un internat privée pour Harry, ou d'un lycée réputé et extrêmement cher. Ils avaient décidé qu'il serait dans le lycée public le plus proche de leur habitation et qu'il aurait le droit à la même chance que ses semblables de réussir. Ses parents ne voulaient pas faire d'Harry, un enfant capricieux, imbu de sa personne, qui écrase son prochain pour pouvoir réussir. Ils voulaient qu'il apprenne l'humilité. Si Harry devait y arriver, il le ferait en étant du même pied d'égalité avec les autres élèves parce que c'est ce que les hommes étaient. Tous égaux. 1789 l'avait défini ainsi. Il apprendrait de ses erreurs, de ses chutes, de ses failles, et il aurait cette faculté que les autres enfants de Bourgeois ne possédaient pas.

La Richesse de l'âme. Celle de l'Humanité dans sa définition la plus utopiste.

Son père était à cheval sur les principes de droit moraux et de liberté. C'est ce qu'il aimait de son père. Même si il était parfois dur.

Il était par définition née de parents d'ouvriers, et donc il était issu d'une culture ouvrière. Harry aurait dû suivre la même la trajectoire sociale que ses parents.. C'est ce qu'il avait été au début. Seulement, son père aimait se cultiver, comprenait et aimait se jouer des vices et vertus du système économique du pays. Il s'était fait remarquer et il était devenu facilement le bras droit du Directeur. Il lui resta fidèle pendant trente années. Et quand le fils de Monsieur Hardwell aurait du accéder à la succession de son père, il décéda dans un accident de voiture. Monsieur Hardwell en fut dévasté mais décréta de nommer le père d'Harry à la tête de l'entreprise. Evidemment, la presse s'était enflammée à propos de cette décision. Le père d'Harry, Robert, s'était vu bafoué par les médias. On le tenait responsable de la mort du fils de Monsieur Hardwell, on l'accusait à tord. Et les Interviews adressées aux neveux de ce dernier ravagés par la jalousie n'aidaient en rien. Monsieur Styles était un meurtrier et il était maintenant à la tête de la plus grande entreprise industrielle de la région. On travaillait les métaux et les métaux servaient à construire des bateaux. La société en avait besoin, En fait Harry pensait que c'était le capital qui en avait besoin.

Pourquoi implanter cette chaîne dans plusieurs pays ? Parce que la main d'oeuvre coûtait moins cher ? Parce qu'on allait exploiter encore des personnes ? On expliquait l'importation de cette firme dans plusieurs pays par le fait qu'on agissait enfin dans le monde, que l'entreprise traversait l'Atlantique qu'il faisait la fierté régionale en créant quelques emplois. Ce que ne savait pas les citoyens de la région, c'est que "Hardweel Industeel" pouvait créer de l'emploi au quatre coins du pays si l'Etat le décidait. Son père avait voulu qu'il étudie l'économie. Il l'étudiait et la manière dont il avait compris comment le système capitalisme marchait l'avait purement et simplement dégoûté. Il voulait changer ce processus. Il refusait que son père fasse comme les grandes firmes multinationales. Il voulait que cette entreprise reste nationalisée mais il savait aussi qu'elle mourrait surement étouffée par la mondialisation des échanges de capitaux."Hardweel industeel" devait s'importer dans d'autres pays pour continuer d'exister et le siège social resterait ici. Harry ne voulait pas de ça. Il détestait ce que son père s'apprêtait à faire et par ce changement, Harry comprenait que son père entreprenait exactement l'opposé de ce qu'il avait inculqué à Harry. Toutes ses valeurs. Puis avec le temps, Harry admettait juste qu'il s'était durcit, que ses idées avait évolué dans le sens de son père, mais de manière plus virulente. Robert avait déclaré fatalement, que le monde changeait et évoluait et qu'il fallait suivre la cadence.

Le monde se détruisait, ça c'était l'avis d'Harry mais...

Harry était un ambitieux, Il n'avait pas vraiment cette volonté de puissance, de domination de la planète. C'était lui, ses profondes croyances en un avenir meilleur pour chaque personne sur terre. Il était utopiste, mais pas abruti. Il voulait se réaliser et donc tout cela passait par le voeu de se rendre meilleur. Après tout son but en premier lieu était de lutter contre le déterminisme social. Il voulait réussir son pari.

Demain, était l'avenir et aussi le jour de sa rentrée en Terminale et il était irrémédiablement déterminé.

Cependant ce qu'il ne voyait pas, à cause de l'immensité de ses aspirations, c'était cette fille juste à côté de lui qui n'arrivait même pas à déchiffrer le bout de ses pieds endoloris. 

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