chapitre 46

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Ils restent sur leurs gardes, l’oreille aux aguets, au cas où ils ne seraient pas seuls à arpenter ces lieux. Shawn ne peut s’empêcher de penser que si Constantine avait voulu les piéger, il n’aurait pas pu mieux orchestrer les choses. Ce tunnel est l’endroit parfait pour un guet-apens. Il secoue la tête, voulant sortir ses idées négatives de la tête. Il sait très bien que ce n’est pas en étant parano qu’il va se sentir mieux, loin de là !

Shawn sort le plan qu’il a imprimé dans la chambre de Griffin et le tend à Hayden. Ce dernier lui demande de quoi il s’agit.

- C’est les plans du bâtiment, au cas où quelque chose se passerait mal. Vous devez savoir où se trouvent les accès de sortie.

- Comment as-tu eu ça ? demande Max, n’en revenant pas.

- De nos jours, on trouve tout sur Internet dit Shawn, en souriant.

- Bien joué mon vieux ! reconnaît Hayden.

- Eh ! Je ne suis pas le leader du groupe pour rien. Gardez-le et mémorisez le plus d’infos possibles, au cas où on serait séparés.

- Et toi comment feras-tu ?

- Je le connais par cœur.

Ils gardent ensuite le silence tout en continuant à arpenter les lieux. L’oreille tendue, ils sont prêts à agir au moindre bruit suspect. Ils finissent par atteindre le bout du tunnel et lorsqu’ils voient la porte, ils doivent reconnaître que Constantine avait raison. Cette dernière fait au moins 3 mètres de hauteur et semble être d’une épaisseur assez imposante. Elle parait invulnérable, tout simplement imprenable.

- On aurait dû penser à amener de la dynamite ! s’exclame Shawn, en sifflant.

- Je peux peut être le percer avec ma main en trident dit Max

- Il te faudrait des heures pour en venir à bout dit Hayden, en secouant la tête.

- Tu suggères quoi ? demande Max.

Hayden hausse les épaules, n’ayant pas de meilleures idées à proposer. Ils sont piégés, ne pouvant avancer, à la merci de Constantine. Ce qui les frustre énormément, même s’ils n’osent pas le dire à haute voix. Shawn finit par prendre la parole, après avoir regardé sa montre :

- Laissons encore du temps à Constantine. Il n’est pas en retard. Le plan A est toujours d’actualité.

Max allait lui demander quel était le plan B, mais il n’en pas le temps. Ils entendent du bruit derrière la porte.

Lorsque la porte s’ouvre en grand, une personne sort de l’ombre et entre dans le tunnel, une lampe torche à la main. Chacun de ses pas semblent mesurés. Constantine s’attendait à tomber sur les trois jeunes, mais ne les voyant pas, il commence à s’inquiéter. Il se demande s’ils ne sont pas perdus ou s’ils ont suivi ses instructions. Il ne pourra rester indéfiniment devant la porte. On finira par lui tomber dessus et il sera rapidement à cours de fausses excuses.

Soudain, il entend un bruit de chute derrière lui. Le détective fait volte-face et se trouve en face des trois jeunes. Il écarquille les yeux, n’en revenant pas.

- Comment vous avez fait ce tour ? Vous pouvez être invisible ou quoi ?

- Ce serait trop génial si c’était le cas ! s’exclame Hayden, imaginant déjà ce qu’il pourrait faire avec un tel pouvoir.

- On a juste escaladé le mur au cas où vous ne seriez pas seul explique Shawn.

- La confiance entre nous, n’est vraiment pas d’actualité ! soupire Constantine.

- Pas vraiment confirme Shawn, un sourire au coin des lèvres.

- Bon, on y va ou on reste là à discuter torchon dit Max, impatient de quitter ce lieu.

Constantine ouvre la marche, suivi de près par ses trois acolytes. Ils traversent un long couloir isolé avant d’arriver devant un escalier d’une quinzaine de marches qui mène à une porte fermée. Constantine s’arrête devant les escaliers, puis il se tourne vers les trois jeunes.

- Bon et maintenant, c’est quoi votre plan, vous voulez voir quoi ?

Hayden et Max ne disent rien et se tournent à leur tour vers Shawn. Ce dernier ne leur a jamais dit non plus ce qu’il recherchait véritablement dans ce lieu.

- J’aimerai me rendre dans l’endroit où sont rangés tous les dossiers dit Shawn.

- C’est l’ancien bureau du directeur. Il a été transformé en salle d’archive, je vous y emmène.

- Mais avant, j’aimerai faire un autre arrêt.

Constantine plisse les sourcils, se demandant ce que le jeune homme a derrière la tête. Il n’en a aucune idée et en voyant le visage des compagnons de Shawn. Cela le rassure de savoir qu’il n’est pas le seul dans ce cas.

Moins de cinq minutes plus tard, le détective et les trois jeunes ont réussi sans se faire repérer à atteindre la pièce qui servait, près de 25 ans plus tôt, de prison pour les six femmes enceintes. Constantine pense que c’est une folie de vouloir s’y rendre. Ils perdent du temps et prennent des risques, juste pour un souvenir nostalgique, mais il ne dit rien. Sachant d’avance que personne ne l’écoutera de tout de façon. Il reconnaît que les jeunes d’aujourd’hui sont vraiment obstinés.

Ils traversent la pièce de long et en large, touchant les murs, le sol, les traces laissés par la présence des lits. C’est comme s’ils étaient à la recherche d’un objet qui serait encore là après tout ce temps. Mais les agents du C.A.S n’ont pas l’habitude de laisser trainer la moindre preuve. Cette pièce a été entièrement vidée et condamnée. Personne ne s’en sert, ni n’y rentre.

En tout cas, jusqu'à aujourd’hui !

Shawn est le plus concentré des trois. Il cherche quelque chose sans le trouver. Il pensait que voir ce lieu de ses propres yeux, créerait quelque chose en lui. Un lien qui lui permettrait de voir des souvenirs. Mais rien ne se produit. Ce lieu reste aussi austère qu’en entrant. Aucune vision, aucuns souvenirs n’apparait dans sa tête. Il doit se rendre à l’évidence, son pouvoir n’est pas aussi grand. Il soupire de déception, mais finit par se reprendre. Il n’est pas venu pour ça. Il voulait juste voir ce lieu, le toucher, cela lui suffit. Il n’en sait pas plus sur sa mère mais au moins il a vu où elle a été emprisonnée et ça c’est déjà énorme en soi. C’est un peu comme un pèlerinage.

Cela augmente sa douleur de savoir que des individus ont enfermé sa mère dans cette pièce sans se soucier d’elle. Sa colère grandit en lui et il en est heureux. Il ne voudrait pas que cela en soit autrement. Il sait qu’il pourrait détruire ce lieu, le rayer définitivement de la carte. Cet horrible bâtiment et tous ses occupants. Mais plus il y pense, plus il imagine ce qu’en penserait Sarah. Penser à elle, lui suffit pour ne pas le pousser à de telles extrémités. C’est sa muse et heureusement qu’elle existe car sans elle, il aurait depuis longtemps basculé du côté obscur. Il veut être capable d’agir et de réfléchir par lui-même. Il se tourne vers ses compagnons.

- Allons-y, ne perdons pas plus de temps ici !

Ils sortent tous de la pièce dans un silence presque religieux. Constantine dirige le groupe vers un escalier qui mène à l’étage supérieur.

Dans la base, tout le monde continue à vaquer à ses occupations sans se douter de ce qui est en train de se tramer. Au niveau de l’entrée principale, deux gardes sont placés devant une grande porte grillagée, vérifiant les autorisations des quelques visiteurs.

Une voiture approche dans leur direction. Ils respectent la procédure, c'est-à-dire garder leurs mains prés de leur arme au cas où ils devraient s’en servir. Ils ont l’autorisation d’utiliser toutes les méthodes qu’ils jugeront nécessaires afin qu’aucun intrus ne puisse faire irruption dans la base. Si c’était le cas, ils auraient des comptes à rendre et les sanctions risqueraient d’être lourdes à leur encontre.

La voiture ralentit et s’arrête devant eux. Le premier garde se dirige vers la portière du conducteur afin de lui demander ses papiers. Tandis que le deuxième reste en retrait afin de garder un œil sur l’ensemble des occupants. La voiture compte trois individus, le conducteur et deux personnes en blouse blanches. Le conducteur sourit d’un air poli, avant de descendre la vitre de sa portière. Il s’agit de l’agent Becker, celui qui a été porté disparu récemment. Les deux individus en blouse blanche ne sont autres que Devon et Ethan.

Ces derniers ignorent que leurs demi-frères sont à quelques centaines de mètres d’eux. Sans le savoir, ils ont choisi le même jour pour leurs opérations respectives.

- Je peux vous aider ? demande le garde.

Le conducteur se contente de lui montrer sa carte d’agent du C.A.S.

- Je suis l’agent Becker. Je suis mandaté par le directeur Cross. Les deux personnes avec moi doivent retrouver certaines informations de la salle d’archive.

- Nous n’en avons pas été informés dit le garde, sur un ton suspicieux.

- Vous connaissez le directeur et sa façon de gérer l’administratif. Vous pouvez l’appeler et le déranger si vous y tenez vraiment.

Le garde déglutie avec peine. Il connaît le directeur de réputation et n’a aucune envie d’être la personne qui le dérangerait pour des broutilles. Il finit par faire signe à son collègue d’ouvrir la porte.

- Il est inutile de déranger le directeur, il doit être suffisamment occupé. Vous pouvez y aller.

- Nous ne serons pas longs.

Devon fait un signe de la tête pour saluer le garde. Il jubile intérieurement, heureux que son stratagème ait si bien fonctionné. L’agent Becker conduit la voiture vers le vaste parking avant de se garer dans un coin isolé, proche d’une sortie de secours. Il se tourne ensuite vers Devon. Ethan semble ailleurs, comme s’il était drogué et que son esprit se trouvait à des kilomètres de cet endroit. L’agent tremble de tout son corps et les palpitations de son cœur s’accélèrent sous le coup du stress. Il prend son courage à deux mains pour bredouiller :

- J’ai suivi toutes vos instructions. C’est maintenant à vous de tenir vos promesses.

- Oui, c’est sans doute vrai dit Devon.

- Donc, vous ne toucherez pas à ma famille ?

Devon jette un coup d’œil à l’extérieur afin de s’assurer que personne ne se trouve dans les environs. Puis il se tourne vers le conducteur et lui dit, sur un ton empli de mépris :

- Votre famille, je m’en contrefous. Je n’ai pas de temps à perdre à les tuer, même si cela m’amuserait. Mais bon, je respecterai ma parole.

- Merci !

- Oh mais de rien dit il en tendant sa main à l’agent, comme pour sceller leur pacte.

L’agent n’a pas du tout confiance, mais il lève tout de même sa main. Mais la poignée de main n’aura jamais lieu. Avant que les deux mains ne puissent se toucher, deux filaments de feu sortent de celle de Devon. Les projectiles atteignent l’agent au niveau du torse. Ce dernier pousse un hoquet de stupeur. Il baisse la tête vers sa poitrine où il voit les deux blessures encore fumantes. Il ouvre grand les yeux, comprenant ce qu’il vient de lui arriver. Il fixe Devon qui sourit d’un air pervers, savourant la souffrance de l’agent.

Ce dernier tente de parler, mais c’est un gargouillement incompréhensible qui sort de sa gorge. Quelques secondes plus tard, il s’affaisse dans son siège, mort. Devon n’a pas manqué une seule seconde de son calvaire. Un petit plaisir pervers dont il ne se lasse pas.

- On était vraiment obligé de le tuer ? demande Ethan, d’une voix las.

- Je ne répondrai même pas à cette question. On y va ordonne Devon.

Le jeune homme subtilise la carte d’accès dans la poche intérieure de la veste de l’agent décédé, avant de descendre de voiture. Ethan n’est pas du tout affecté par la mort de Becker. Il ne ressent rien pour les autres. Son cœur est totalement vide et cela depuis sa plus tendre enfance. Il ne connaît pas le sens du mot pitié, mais il trouve inutile de tuer des gens juste pour le plaisir. Il commence de plus en plus à se dire qu’il est différent de Devon. Il est loin d’être aussi sadique que lui.

Les deux jeunes se dirigent vers une des différentes entrées. Ils disposent de la carte qui va leur permettre d’avoir accès à l’ensemble des pièces de la base. Ils ont une très bonne couverture au cas où on leur poserait la moindre question. Devon est fier de lui, son plan est parfait. Il aurait dû le mettre à exécution depuis longtemps. Quand il quittera ses lieux, cet endroit ne sera plus qu’une ruine. Il s’en fait la promesse. Le fils de Satan est bien décidé à le détruire. Tant pis pour les innocents qui s’y trouvent. Ce seront des dommages collatéraux à rajouter à la liste. Même si comme il le dit souvent, personne n’est totalement innocent.

Pendant ce temps, l’autre groupe a pu pénétrer dans l’ancien bureau du directeur, qui est devenu une salle d’archive. Le détective n’a rien oublié de l’endroit. Il s’y repère facilement, sachant où sont situés les raccourcis. Il a tellement passé de temps entre ces murs, qu’il pourrait y circuler les yeux fermés. Même si cela fait plus d’une vingtaine d’années qu’il n’y a pas remis les pieds. On n’oublie jamais sa maison. Certaines données restent graver dans le cerveau, pour ne jamais en ressortir.

Il a tout de même ressenti un choc lorsqu’il est entré dans l’ancien bureau et qu’il a vu l’aménagement qui y a été fait. Il a l’impression d’être dans une pièce totalement différente. Il trouve d’ailleurs cela étrange que Cross junior ait autorisé ces modifications. Il aurait pensé que ce dernier aurait laissé le bureau tel quel. Un peu comme un mémorial pour son regretté père.

Apparemment, Cross a bien changé durant ces dernières années. Il est devenu une autre personne, encore plus dangereux et sournois qu’avant. Le détective n’aurait pas cru que cela puisse être possible. Mais comme on lui a appris, il ne faut jamais sous estimer la haine et la souffrance d’un homme. L’actuel directeur est consumé par la vengeance, il ne voit rien d’autre. Il s’est mis lui-même dans une situation d’enfermement et ne vit que pour sa rage. Sans se douter qu’elle finira par le détruire.

Constantine reste en retrait pour assurer leurs arrières tandis que les trois jeunes fouillent les la pièce. Si le centre était opérationnel, ils n’auraient jamais pu faire un mètre sans se faire repérer. Mais heureusement pour eux, ce lieu est devenu une vulgaire zone de stockage. Plus de cameras de sécurité tous les cinq mètres.

Le bureau de l’ancien directeur dispose d’une imprimante et d’un fax que tout le monde peut utiliser. L’aquarium a été remplacé par une grande armoire et sur le coté droit se trouve plusieurs casiers qui comportent les dossiers du groupe. De nombreux cartons sont empilés au fond. Constantine a de plus en plus hâte de quitter cette ville. Si tout se déroule correctement, ce soir il sera loin de Chicago et personne ne le retrouvera. Après ce jour, il pourra alléger sa conscience et vivre en paix avec lui-même. Rien que de l’imaginer, il se sent déjà mieux. Enfin un peu de lumière dans sa triste existence.

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