Le dernier des Mohicans

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Ani couni

Ani couni chaouani
Ani couni chaouani
Awawa bikana caïna
Awawa bikana caïna
E aouni bissini
E aouni bissini

Berceuse iroquoise (une des traductions possibles)

Tous les soirs les indiens sont autour du feu
Tous les soirs les indiens sont autour du feu
Ils écoutent la chanson de la nuit
Ils écoutent la chanson de la nuit
Pour aller coucher leurs petits
Pour aller coucher leurs petits

" Hou hou ! Où êtes-vous ? Où vous cachez-vous ? HOUUUU ! C'EST PAS DU JEU !"

Je cours dans les bois.

Je cours à perdre haleine.

J'ai peur maintenant.

Je m'assois et je pleure.

D'où vient cette brume ?

" MAMAN !!!!!"

La brume est épaisse.

Comment elle dit maman déjà ?

Mhmmm.

Elle dit que les renards font four.

Car les renards cuisent leur nourriture et cela fait de la fumée.

D'où la brume.

Pas de problème !

S'il y a de la fumée, il y a des maisons, s'il y a des maisons, il y a des gens.

On va me ramener à ma maman.

Et je vais me faire sacrément enguirlander.

Ani couni

Ani couni chaouani
Ani couni chaouani
Awawa bikana caïna
Awawa bikana caïna
E aouni bissini
E aouni bissini

" Dire qu'on s'amusait bien à jouer aux Indiens ! Pfff ! Où ils sont tous passés ? A me laisser comme ça. C'est pas sympa."

J'ai du courage ! Je suis un Indien !

Oui.

Mais la brume est grosse et je suis tout seul.

Et j'ai faim.

Et j'ai froid.

Et j'ai peur.

" HOU HOU ! Où vous êtes ?"

J'ai pas honte de pleurer, non.

Maman m'a dit que les garçons aussi avaient le droit de pleurer.

Et de faire de la danse, et d'aimer les poupées, et d'aimer les chevaux...et...

Je suis perdu.

La brume m'entoure et je ne vois plus rien.

HA ! Je me souviens de ce que m'a dit mon papa !

Mon papa m'a dit : quand on est perdu, on s'assied et on ne bouge plus.

Sinon les secours ne nous trouvent pas.

Je me redresse.

J'ai encore plus peur.

J'ai couru partout.

Mais ils vont me trouver, non ?

Ani couni

Ani couni chaouani
Ani couni chaouani
Awawa bikana caïna
Awawa bikana caïna
E aouni bissini
E aouni bissini

" HOUHOU ! JE SUIS LA ! HOUHOU ! ICI !"

Paul avait une super hache. Toute pleine de dessins faits avec du feu. Je sais plus comment ça s'appelle.

Une jolie hache d'Indien. Je sais comment ça s'appelle : un tomahawk !

J'aime les histoires d'Indiens ! Je lis Yakari moi et tout seul !

On a tous joué avec et ajouté des plumes au manche.

Oui, je l'ai gardé plus longtemps que les autres ! Paul est mon copain !

Mais j'aurai pas dû partir avec. Je sais.

C'est pas bien.

Mais Paul m'a laissé faire.

Paul est mon copain, il m'en voudra pas.

HOOOO

Ce doit être pour ça qu'ils sont partis en me laissant tout seul.

" PAULLLL ! J'ai ta hache, je te la rendrai ! PROMIS ! JE M'EXCUSE !"

Et cette brume.

Je suis tout seul.

Je suis fatigué.

Je suis triste.

J'ai peur.

S'il vous plaît.

Quelqu'un ?

Ani couni

Ani couni chaouani
Ani couni chaouani
Awawa bikana caïna
Awawa bikana caïna
E aouni bissini
E aouni bissini

" L'enfant a disparu depuis trois jours, claqua la voix fatiguée du lieutenant.

- Oui. Ce doit bien être un enlèvement, admit amèrement l'inspecteur.

- Merde ! On ne le retrouvera jamais ! Si dans les 24 heures, on n'a rien..."

De rage, le lieutenant Lyster jeta un grand coup de pied dans un caillou, l'envoyant au loin dans la forêt.

" Les enfants jouaient aux cow-boys et aux Indiens, reprit le vieil inspecteur, désabusé. Le gamin a filé en emportant le tomahawk de l'un.

- Et on l'a plus revu. Les enfants ont fouillé, puis les parents, puis la police. Merde ! Je sais !"

Et soudain, le vieux policier leva la tête et écouta le silence.

" Quoi ? Vous entendez des voix maintenant ?, se moqua le lieutenant.

- CHUT ! Vous n'entendez pas ?

- Mhmm. Il n'y a que la forêt et les collègues qui font un barouf d'enfer."

Plus sérieusement, elle regarda son collègue pour lui demander :

" Qu'est-ce que vous entendez ?

- Une chanson."

Ani couni

Ani couni chaouani
Ani couni chaouani
Awawa bikana caïna
Awawa bikana caïna
E aouni bissini
E aouni bissini

" HOUHOU ! QUELQU'UN M'ENTEND ? Je suis de l'autre côté de la rivière. ICI !"

Je suis passé par le gué.

Car je sais comment les Indiens font pour se cacher !

Ils passent par les gués pour cacher leurs traces.

Même les soldats de la cavalerie ne les trouvent pas !

Je sais ! J'ai lu !

J'ai même lu les Tuniques bleues, mais je préfère Yakari.

J'ai commencé le dernier des Mohicans, mais c'est encore un peu trop dur.

Je me suis caché de l'autre côté de l'eau, il y a une petite île.

Là...

Je suis bien caché.

Trop bien, peut-être.

Je vais chanter, comme ça j'aurai moins peur.

Et peut-être...quelqu'un m'entendra ?

Papa m'a dit de pas bouger.

Maman m'a dit de pas bouger.

Et je ne vois rien avec la brume.

" HOUHOU ! S'IL VOUS PLAÎT ! JE PROMETS DE PLUS RECOMMENCER !"

Maman va me tuer !

Ani couni

Ani couni chaouani
Ani couni chaouani
Awawa bikana caïna
Awawa bikana caïna
E aouni bissini
E aouni bissini

" Merde. Ce fut un tragique accident."

Le lieutenant était triste.

Sur la table d'autopsie se trouvait le corps d'un gamin de six ans. Trop petit pour être là, trop jeune pour être mort.

Il portait une horrible blessure à la poitrine. Un coup de tomahawk.

" Il est mort sur le coup. Il est tombé en courant sur la hache et la lame est entrée profondément, murmura le vieux policier.

- Comment on va dire ça aux parents ? Et aux enfants ? Le petit qui a amené la hache ? Merde !

- Des enfants qui jouaient aux Indiens et aux cow-boys. Un peu trop sérieusement."

Et de ce fait, posés bien à plat sur une chaise, se trouvaient les différents éléments d'un costume d'Indien. Coiffure de plumes, mocassins, tunique bariolée.

Ainsi que l'arme du crime, un tomahawk emballé dans un sac plastique.

" Comment le gosse a eu ça ?

- Son papa l'a acheté sur un site internet.

- Pourquoi ça ?

- Son gosse aime les Indiens. Tout comme notre victime.

- Merde, merde, merde."

Le lieutenant Lyster secoua ses cheveux devenus courts et noirs comme l'aile du corbeau.

Elle s'assit sur le canapé et but sa bière fraîche.

" Vous voulez voir quoi ce soir ?," demanda-t-elle à son collègue fantôme.

Un silence de quelques minutes, puis l'inspecteur répondit :

" Vous n'auriez pas Pocahontas par hasard ?"

Elle tourna sa tête vers son collègue et le regarda suspicieusement :

" Un Disney ? Vous vous foutez de ma gueule ?"

Midnight ne savait plus où donner de la tête, elle regardait tantôt à gauche tantôt à droite du canapé.

La compréhension se fit.

Le lieutenant se leva et se mit à farfouiller dans sa pile de DVD et de disques durs externes.

" Pocahontas. Peut-être pas. Mais je dois avoir Astérix chez les Indiens. Cela vous va ?

- Parfait," répondit le policier, raide et imposant.

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