Quelques jours s’étaient déroulés depuis la rencontre avec les deux journalistes. Après de nombreux aller-retour les deux premiers jours pour clarifier les documents et affiner la stratégie, Vilem n’avait plus reçu de nouvelles d’eux. Le temps lui semblait incroyablement long. Qui plus est, il voyait peu Marianna, qui était souvent absente de chez elle. Lorsqu’il la croisait, ils n’abordaient jamais les sujets sur le feu, elle détournait souvent l’attention sur des choses matérielles futiles. Vilem se demandait s’il devait relancer les journalistes. Peut-être allaient-ils lui dire qu’ils allaient abandonner la mission, peut-être qu’ils allaient lui faire part que les documents étaient des faux, que le complot n’existait pas et que Vilem s’était fait roulé depuis le début. Mais il écarta vite ces pensées pessimistes, Marianna lui avait confirmé que des choses également se tramaient en Slovaquie sans pour autant lui en dire davantage. Il devait prendre son mal en patience. La persévérance était une lutte de tous les instants.

Assis sur le pourtour en pierres d’une fontaine asséchée, il observait, un crayon et un bloc-notes à la main, la façade décrépite d’une maison bourgeoise. Celle-ci donnait le curieux sentiment d’un passé glorieux oublié, vestige révolu d’une époque d’Empire qui contrôlait une partie de l’Europe. Aujourd’hui, ces constructions magnifiques dormaient, attendant mutinement une épopée nationale victorieuse ou le délabrement progressif pour tomber dans l’oubli total. Rien ne laissait penser aujourd’hui que les belles Bratislava, Vienne et Prague allaient renaître de leurs cendres. Mais l’histoire était résolument faîte de soubresauts dont les vagues déferlantes se succédaient, alternant périodes glorieuses et sombres.