Chapitre 5

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Clara Keller faisait les cent pas dans son bureau, le bruit de ses chaussures claquant avec rage sur le sol de béton gris clair. Voilà plus d'une heure qu'Henri était revenu après être allé voir Johns, cette grosse brute devrait déjà être là. Enfin elle l'entendit entrer dans le bureau d'Henri, sa voix de baryton résonnant dans la pièce d'à côté. Il entra sans frapper dans son propre bureau et resta planté là, devant la porte. Elle le fusilla du regard.

  • Pas trop tôt, Johns. Voilà près d'une heure que je vous attends.
  • Capitaine Johns. Et je n'ai pas d'ordres à recevoir de vous. Au cas où vous l'auriez oublié, j'ai une équipe à former, moi. Le départ est dans quatre mois et...
  • Il n'y aura pas de départ, siffla Keller, ses yeux plantés dans ceux du militaire.
  • QUOI ?! Mes gars sont prêts ! Quatre ans de boulot ! C'est quoi cette décision ?! Encore un coup des administrateurs, c'est ça ?
  • Absolument pas.

Clara ménagea un silence pour attiser son impatience puis elle reprit d'un ton glacial.

  • Quelqu'un est partit cette nuit avec la machine.
  • Mais la charge...
  • Était terminée, le coupa Keller sèchement. Avec quatre mois d'avance. J'ai mis un ingénieur sur le coup, il affirme que le chiffre d'avancement de la charge était trafiqué.
  • Mons n'aurait pas laissé passer un truc pareil, il l'aurait vu !

Les yeux du militaire s'éclairèrent d'étonnement mêlé de rage quant il comprit.

  • C'est lui ? C'est Mons qui est partit ?
  • Les caméras de surveillance ont été trafiquées, nous n'avons aucun visuel. Mais sa carte personnelle a été utilisée cette nuit pour accéder au secteur 23. Mes hommes le recherche sans succès depuis des heures. Selon moi, il est partit.
  • Putain, l'enfoiré !
  • Je ne vous le fait pas dire. Reste à savoir ce que nous allons faire maintenant.
  • Nous ?
  • Oui, nous. Je ne vais pas laisser ce merdeux ruiner le travail de plusieurs années. Il faut le retrouver et ramener la machine.
  • Il a supprimé la commande de retour ?
  • C'est plus que probable. Et je ne compte pas attendre sagement son hypothétique retour. Vous savez certainement qu'il existe une seconde machine.
  • Une antiquité oui ! Pas question qu'un de mes hommes embarque là dedans. Elle n'a pas fonctionné depuis quand ? Dix, vingt ans ?
  • Vingt-deux ans, vous êtes le dernier à l'avoir utilisé. Et je ne pensais pas à l'un de vos hommes, je pensais plutôt confier cette tâche à quelqu'un de plus... expérimenté.

Il la regarda avec surprise, il ne s'attendait pas à ça. Vingt-deux ans déjà qu'il était revenu de cette mission. Et quelle mission ! La plus fantastique de toute sa carrière et les cicatrices qu'il en gardait ne suffisaient pas à ternir le souvenir de ce que ça avait été : une putain d'expédition de malade. La plus géniale de toute sa vie. Keller voulait qu'il reparte à la recherche de Mons. L'ingénieur était malin, ça il le savait. Mais aussi suffisamment fou pour s'être barré, et ça c'était une chose qu'il n'aurait jamais soupçonné. Johns l'avait sous-estimé, il était plus couillu qu'il ne l'avait cru. En attendant, aller le débusquer on ne sait où était risqué, il ne partirait pas sans savoir où était Mons et surtout sans avoir de bonnes garanties.

  • Vous savez où il est ?
  • On y travaille, nous aurons la réponse avant la fin de la matinée.
  • Avant ou après la Grande Rupture ?
  • Les premiers indices suggèrent avant mais encore une fois, attendons la fin de la matinée.
  • Des conneries tout ça ! Je ne vais pas risquer ma peau pour vous ! Qu'est-ce que j'y gagne ?

Nous y voilà, songea t-elle, la véritable question était posée. Keller savait combien Johns avait aimé ses missions et combien il souhaitait y retourner. Il avait atteint le nombre maximal de missions possible pour une même personne, plus et cela devenait physiquement trop dangereux. Et bien qu'il ait été en parfaite forme, Johns avait été privé de départ.

  • Qu'est-ce que vous voulez Johns ? De l'argent ?
  • Ma dernière mission.
  • À Las Vegas ?
  • Je veux y retourner, avec de l'argent. Suffisamment.
  • Suffisamment ?
  • Je veux un aller sans retour.
  • C'est contraire au règlement, vous le savez.
  • Alors trouvez-vous un autre gars pour monter dans votre épave, moi je passe.

Il s'était avancé vers son bureau, menaçant. Trop près, bien trop près. Il ne plaisantait pas et Keller savait qu'elle n'aurait personne d'autre pour le remplacer. L'entreprise était trop risquée. Et ce que demandait le militaire n'était pas si important, une fois envoyé là-bas elle sera débarrassée du problème.

  • Gardez vos distances Johns, gronda-t-elle et l'homme recula d'un pas. Vous me le ramenez, mort ou vif. Je veux sa tête sur un plateau, pour le patron.
  • Faites moi savoir quand vous aurez les informations nécessaires à mon départ.

Le capitaine tourna aussitôt les talons et quitta la pièce.

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