Chapitre 6 - Thirsty

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 Sirotant son cocktail au bar, il regardait la barmaid essuyer les verres. Enfin, c’était sa poitrine qu’il regardait, pour être plus précis. Il n'avait que faire des verres qu’elle essuyait, du bar qu’elle nettoyait ; ses seins qui se balançaient au gré de ses mouvements étaient tout ce qui l'intéressait en cet instant précis. Elle s’interrompit :

— Natsu, ça fait combien de temps que t’as pas baisé ? J’ai horreur que tu mattes mes seins comme ça, je te l’ai déjà dit.

 Natsu ricana, reprenant une gorgée de son cocktail. Ils étaient bien évidemment seuls ; elle ne se serait jamais permise de dire ça devant d’autres clients. Le minuscule bar ne faisait pas plus de quelques mètres carrés : un bar et cinq sièges au comptoir, rien de plus. Les bouteilles derrière la patronne des lieux suffisaient à la décoration, les murs en vieilles pierres ajoutaient un charme particulier à cet endroit.

Complètement avachi sur le comptoir, il jouait avec son verre vide de sa main droite.

— Deux semaines, tu y crois toi ?

— Deux semaines ? Mais dis moi, tu vas finir par redevenir puceau à ce stade.

 Il poussa un gémissement, semblable à une plainte et se redressa pour s’étirer. Dans sa robe moulante rouge, la barmaid lui préparait déjà un nouveau cocktail.

— Et ta petite humaine ? ajouta-t-elle, une once de curiosité dans la voix.

— Toujours rien, et j'ai l'impression qu'il ne se passera rien avant plusieurs semaines. Il faut que je gagne sa confiance.

— Natsu qui reste avec une femme sans avoir de relation avec elle, je suis soufflée.

— Ça ne me dérange pas. Je l'apprécie et sa présence m'apaise. Puis, tu te moques, mais qu'est ce que je fais, là ? Il n'y a que toi et moi et, à ce que je sache, on n'est pas en train de baiser.

— Et ce n'est pas à l'ordre du jour.

— Dommage.

 Il fit une moue boudeuse avant de sortir son paquet de cigarettes et un briquet de son jean.

— Pas de clope ici. Faut que je te le répète combien de fois ?

Natsu la regarda dans les yeux, lui décrocha un sourire et alluma sa cigarette devant elle.

— J'adore te rendre furieuse, June, dit-il en lui soufflant la fumée au visage.

— Je vais vraiment te tuer un jour.

 Les deux souriaient. Natsu ne savait plus depuis combien de temps ils se connaissaient, suffisamment longtemps pour qu'elle puisse le menacer sans représailles. June était canon. Elle avait tout les atouts pour faire tourner la tête des hommes : de son tour de hanche, en passant par la taille de sa poitrine et en finissant par un visage sans imperfection. Étonnamment, c'était ses cheveux qu'il préférait chez elle ; sa longue chevelure rousse qui tombait jusqu’à ses hanches. Natsu lui avait pourtant dit, à maintes reprises, qu'elle se ferait plus d'argent en étant actrice porno que barmaid, mais elle avait toujours refusé ses propositions. S'amuser avec ses cocktails, écouter les conversations des gens, rencontrer de nouvelles personnes... C'était ce qu'elle aimait le plus dans son métier.

 Derrière elle, une minuscule télévision cathodique diffusait les informations en fond sonore. Elle mettait toujours les actualités lorsqu'elle préparait l'ouverture du bar et les éteignait de suite à l'arrivée du premier client. Sauf pour Natsu. Elle ne le considérait pas comme un client. Un nuisible sûrement, un ami dans ses meilleurs jours, mais pas un client.

 Depuis plusieurs jours, le meurtre du sénateur faisait la une de tous les journaux. L'investigation se poursuivait, sans succès à priori. La police avait beau faire des conférences de presse régulièrement, c’était toujours pour dire la même chose : l'enquête était au point mort.

 June regardait la télévision et lança un regard accusateur à Natsu.

— Pourquoi est-ce que je n’ai pas compris plus tôt que c’était toi ?

— Parce qu’arracher les yeux n’est pas ma spécialité ? La preuve : mort cérébrale en quelques secondes, pas eu le temps de rire avec lui. Assez déçu.

Il reprit une bouffée de cigarette, totalement serein.

— Il t’a fait quoi pour que tu crées cette mise en scène ? Tu les brûles d’habitude.

— Il a violé l’humaine que je convoite actuellement. Et je voulais faire passer un message à son collaborateur.

 June, habituellement cynique, ne dit rien. Elle savait pertinemment que Natsu s’amusait de beaucoup de choses ; les arnaques, les suicides, les meurtres et autres crimes sordides. Mais pas le viol. Il ne lui avait jamais vraiment dit la raison derrière son aversion mais elle s’était faite sa propre idée. Elle soupira :

— Je sais que tu gères assez bien la police, mais les chasseurs te retrouveront si tu continues. Ne recommence pas s’il te plait.

— Quand tu me demandes les choses de cette manière, je ne peux rien te refuser.

— S'il te plaît, oublie le discours de charmeur Natsu. Toi et moi on en est plus là, dit-elle en levant les yeux au ciel.

 Elle finit par servir le cocktail qu'elle préparait depuis quelques minutes : la mixture était rougeâtre, assez sombre. June ajouta une paille et quelques glaçons avant de le tendre à Natsu.

— Dis moi ce que tu en penses.

— Pour l'instant j'en pense qu'il est assez moche ton cocktail, June. Tu m'as habitué à mieux.

 Moqueur, Natsu renifla le cocktail puis le porta à ses lèvres. Sous l’oeil attentif de June, il réfléchissait. Le goût était étrange, les premières notes étaient amères, et l’arrière goût… Il foudroya la barmaid du regard en posant son verre d’un coup sec sur le comptoir :

— Tu te fous de moi ? Tu pensais que j’allais pas le sentir ?

— Qu’est ce que tu en penses ? Je l’ai appelé “cocktail pour vampires qui auraient bien besoin de se nourrir mais qui ne le font pas”.

 Il la toisait, la machoîre serrée. Il n’avait pas besoin de miroir pour deviner que la couleur de ses yeux avait changé, eux qui étaient habituellement d’un gris argenté étaient devenus sombres, presque aussi noir que la nuit. Les veines tout autour de ses yeux devaient elles aussi être présentes, comme à chaque fois qu’il se nourrissait de ce merveilleux nectar. Il finit son cocktail, cul sec, sous le regard amusé de June. Le vampire la détestait, mais elle avait raison.

 Satisfaite et assez fière de sa ruse, elle lui ébouriffa les cheveux. Natsu n’était, quant à lui, pas du tout amusé.

— Depuis quand tu t'inquiètes assez pour mettre quelques gouttes de ton sang dans mon verre, June ?

— Depuis que tu as des poches sous les yeux et que tu empestes la cigarette.

 Il grommela puis ferma les yeux afin de reprendre ses esprits. Le sang de June était un de ses favoris : les dernières notes étaient florales, légères et surtout, il suffisait à apaiser cette soif insatiable. Elle ne le laissait que très rarement se nourrir sur sa personne, aussi Natsu se délecta de ce cadeau qu’elle lui avait fait ce soir.

 Il n'aimait pas l'admettre, mais la faim était difficilement supportable ces derniers jours. La nicotine permettait de tenir : il avait découvert qu’elle atténuait la sensation de faim. Les récents événements et ses rendez-vous avec Emi ne lui avaient pas permis de prendre un peu de temps pour lui, et la pente était dangereuse. Cette soif qui le tenait aux tripes ne devait jamais être négligée car les conséquences étaient irréversibles.

 Il rouvrit les yeux, apercevant que June s'était assise sur le siège à côté de lui. Accoudée au comptoir, elle le regardait.

— Je préfère tes yeux aux couleurs de la lune, Natsu. Tu es beaucoup plus sexy, comme ça.

 Si vous souhaitiez vérifier si un vampire avait eu sa dose récemment, c'était ses iris qu'il fallait regarder. Elles perdaient de leur intensité quand la faim était présente et, à contrario, étaient d'une couleur vive, presque surnaturelle, lorsque ce dernier était repus. Et si ses yeux viraient au noir ? Il fallait courir. Soit le vampire en question allait vous bouffer, soit il était déjà sur vous. Bref, ce n'était jamais bon signe.

 Natsu rapprocha le siège de June du sien, et glissa à son oreille :

— Voyons, June, tu ne peux pas me laisser comme ça après m'avoir nourri… Tu sais dans quel état ça me met.

 June recula en riant.

— C'est ton problème, ça. Pas le mien.

 Elle se releva, décidée à reprendre son travail. Le bar ouvrait dans une heure et rien n'était prêt. Elle devait encore nettoyer le sol, passer un coup de chiffon sur les bouteilles puis…

 Natsu l'attrapa par les hanches et l'attira avant de l'embrasser fougueusement. Il mordillait ses lèvres avec énergie, si bien qu'un mince filet de sang s'en échappa. June lui rendit son baiser, avec autant d'ardeur. Les joues rosies par l'excitation qui montait doucement, elle reprit sa respiration, un peu agacée.

— Je te déteste, Natsu.

 Il passait et repassait sa langue sur ses lèvres, à la recherche de la moindre goutte de sang restante. Ce n'était que pure gourmandise, mais il en souhaitait toujours plus. Alors il ramena June contre lui et pressa son bassin contre le sien : il voulait qu'elle sente à quel point il la désirait.

— Ne fais pas comme si tu détestais ça, June.

 Ses doigts glissants contre ses cuisses, il remontait lentement la robe moulante de June, les yeux plein de malice. Elle lui tapa sur les doigts, sourcils froncés ; Natsu était prêt à ce qu’elle le réprimande, une fois de plus, mais elle releva elle même sa robe, découvrant ses cuisses. Elle remonta son habit encore un peu plus haut, révélant sa culotte en dentelle noire. Il ne perdait pas une miette du spectacle qui se tenait devant lui ; elle s’offrait si rarement de cette manière.

 Elle s’assit sur lui, et, d’un vague signe en l’air de la main, activa le verrou de la porte d’entrée de son bar.

— Très bien, changement de plan, souffla-t-elle alors qu’elle passait les mains sous son t-shirt.

— Depuis le temps que je voulais te prendre sur ce comptoir, ricana Natsu.

— Ferme là, satané vampire. Et interdiction de me bouffer.

 Ses mains caressèrent délicatement ses fesses. Il contenait tant bien que mal ses pulsions, autant bestiales que sexuelles. Il voulait transpercer sa carotide de ses canines acérées, l’entendre hurler, autant de plaisir que de douleur. Natsu laissa échapper un long râle. Se contenir, comme toujours. C’était le maître mot de chacune de ses relations sexuelles, et June ne le savait que trop bien. Après autant d’années, elle lui faisait pleinement confiance, assez pour lui laisser sa nuque à quelques centimètres de ses lèvres. Elle savait qu’il pouvait la mordre à tout moment, mais il ne casserait pas cette confiance mutuelle. June avait dit non ce soir, aussi respecterait-il, difficilement, ses mots.

 Plongeant son visage dans sa nuque, puis, gonflant ses poumons de son parfum, il lui murmurra :

— Très bien, pas de morsure ce soir.

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