Prologue

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Un ciel d'un bleu limpide, constellé de nuages oscillant entre le rose et le violet au soleil levant. Le paysage apparaît par une multitude de montagnes rocheuses aux sommets et aux versants fortement enneigés. Une forêt de résineux résistants à ce climat si rude. Quelques pointes vertes d'arbres dont le vent violent a balayé la lourde poudre blanche afin de leur permettre de colorer ce paysage magnifique quasi monocolore. Une petite rivière aux eaux cristallines et tumultueuses serpente dans ce décor sauvage. Un décor d'une beauté à couper le souffle et d'un calme apaisant.

L'œil est attiré par une petite fumée blanche qui s'élève au cœur de la forêt. L'oreille se tend au son de cris et de bruits étranges et puissants. Le regard s'approche de la cime des arbres via le terrain dégagé par la rivière. Il pénètre cet amas de branches rigides et lourdement chargées. Un oiseau perché s'envole. Un magnifique aigle à tête blanche et au corps marron. Au pied de l'arbre, un caribou tape le sol de son sabot et farfouille pour trouver de l'herbe sous l'épais manteau de neige. Il relève la tête et écoute. Un chemin apparaît entre les arbres et nous conduit à travers l'immense étendue arborée.

Nous sommes dans une petite maison faite de rondins de bois. Une coquette demeure entourée de forêt et d'un joli jardin délimité par des barrières couleur lavande. Le sol est recouvert d'un épais manteau de neige. Deux motoneiges sont abandonnées sur le chemin d'accès de la maisonnée. De nombreuses traces de pas perturbent l'homogénéité du duvet cotonneux.

À l'extérieur, dans le coin gauche du jardin, un fumoir dégage une douce chaleur et une petite fumée odorante. Un feu de bois doit crépiter à l'intérieur. Un mélange de l'odeur de braises, de poisson et de viande embaume l'air ambiant et ferait saliver quiconque approcherait. La petite cheminée au sommet du toit est la source de la fumée qui a attiré l'œil.

Accolée à ce fumoir, une maisonnette en pierre abrite quelques cochons dont les plus téméraires affrontent le sol glacé de leur enclos à la recherche de quelques racines ou nourriture enfouie. Les plus frileux profitent de la proximité du fumoir dont le foyer réchauffe leur abri par un mur mitoyen. Noirs ou roses, ils sont allongés les uns contre les autres et sont avachis sans préoccupation pour le confort de leurs voisins. Leurs grognements font grand bruit. Les animaux sont agités.

Sur la droite du jardin, là où le soleil est le plus présent, une belle et grande serre de verre au toit pentu accueille quelques plantes dont des tomates avec leurs couleurs vertes aux pommes rouges qui égayent cette blancheur omniprésente. Le mur du fond de la serre est recouvert de tonneaux peints en noir emmagasinant la chaleur la journée et la restituant la nuit pour que les plantes ne gèlent pas.

Le jardin accueille une petite bâtisse servant de refuge à des poules, oies et lapins qui se terrent sous les lampes chauffantes et n'osent pas braver le froid extérieur. Tout ce petit monde gigote joyeusement, se chamaillant pour récupérer les grains de céréales dans la mangeoire ou se bousculant pour trouver la place la plus chaude et confortable. Certains lapins se sont blottis contre des poules en train de couver pour se réchauffer un peu.

Une petite étendue plate avec quelques piquets agrémente cet extérieur lisse et lumineux. Cet endroit semble servir de potager aux beaux jours. Juste à côté, une cabane rassemble les outils et sert de garage à véhicules. Sur son appentis, un stock impressionnant de bûches empilées les unes sur les autres occupent les trois-quarts de la place. L'ensemble de l'extérieur donne une impression de calme et de bonheur simple.

Le perron de la maison est sommaire. Deux marches à l'entrée surélèvent la maison. Une petite terrasse d'accès avec un toit pentu protège quelques instants les personnes rentrant ou sortant de la neige tombante. La porte est ouverte. Elle nous révèle une scène d'une violence inouïe.

Deux hommes sont allongés à terre. Le premier est au perron. Il s'agit d'un jeune homme d'environ vingt ans. Des cheveux brillants de santé courts et noirs. Une barbe fournie noire elle aussi. Ses yeux sont clos. On dirait qu'il dort. Il a un visage doux malgré des traits durs et une mâchoire carrée. Il semble sourire. La largeur et la robustesse de ses épaules sont remarquables, tout comme sa taille de presque deux mètres. Il porte des bottes fourrées adaptées au climat, un pantalon kaki de toile épaisse et une chemise à carreaux rouge et vert. La chemise est percée de trois trous au niveau du cœur. Il est mort.

Dans la cuisine, un second corps sur le carrelage fait de carreaux de pierre beige. Un jeune homme-là aussi. Dans la vingtaine également. Son aspect est totalement différent de l'autre. L'homme est quasiment son contraire. Il est blond. Ses cheveux sont sales et rêches. Sans barbe, mais mal rasé. Ses yeux sont écarquillés de peur, exorbités. Son visage est éclaboussé de gouttes rouges. Sa bouche ouverte laisse échapper une coulée bordeaux et on perçoit des dents noires dont plusieurs sont éclatées autour de lui.

Sa corpulence est frêle et squelettique. Son teint est jaunâtre. Il doit faire un mètre soixante-dix au maximum. Il porte des baskets usées et couvertes de boue. Son pantalon est déchiré au niveau des genoux. Son torse est recouvert d'une doudoune sale et déchirée. De nombreux trous l'ont saccagée. Des ouvertures laissant une traînée pourpre dont suinte un liquide de la même couleur qui recouvre le sol et fait une mare autour du jeune homme. Un couteau est planté au niveau de son cœur. Il a été poignardé et battu à mort.

Une lumière vive éclaire l'intérieur au niveau du premier corps. Elle est aveuglante. Lorsqu'elle s'atténue, nous distinguons un papillon multicolore posé au niveau de la poitrine du beau jeune homme. Un magnifique papillon aux ailes immenses qui reflète les rayons du soleil. Des ailes de toutes les couleurs de l'arc-en-ciel. De l'orange, du blanc, du noir, du rose, du bleu ciel, plusieurs nuances de vert, du jaune couleur or. D'un battement, le papillon s'envole et nous voyons alors à côté du beau jeune homme, un loup aux yeux bleus magnifiques. Le papillon volette jusqu'au canidé et se pose sur son dos. Le loup hurle en levant la tête puis s'enfuit en direction de la forêt épaisse avec son drôle de passager.

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