Épisode 12 - Une éclaircie azurée

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 Sarouh se dirigeait lentement vers le terrain d'entraînement en réprimant un bâillement à s'en décrocher la mâchoire. Les yeux brûlants de fatigue, le Chuunin avait eu un mal fou à sortir du lit à l'aube. S'il avait passé sa première nuit correcte depuis une éternité, le contrecoup était terrible. Le retour d'Izul parmi eux avait profondément apaisé le petit groupe de ninjas. Le jeune homme aux cheveux bleus saluait la fin de ses tourments de la semaine passée. L'accident Leïl lui avait permis de se rapprocher de toutes les autres personnes de l'équipe. En tant qu'agent de liaison, c'était une bonne chose mais il espérait avoir l'occasion de lui parler un peu en tête à tête. Le genjutsu lui offrirait sûrement l'occasion qu'il attendait.

 Bon dernier arrivé, le jeune homme aux cheveux cobalts essuya les regards interrogateurs de ses camarades du désert. Sans se justifier, Sarouh se contenta de se gratter la tête en leur adressant un sourire gêné. Il avait bien conscience que sa fatigue était apparente et que tous soupçonnaient l'état de délabrement dans lequel il se trouvait. Pour autant, il lui était impossible de l'admettre ou de ralentir son entraînement.

 Gomaki devait bientôt être là, apparemment il avait une annonce à leur faire. Le Tsumyo profita du peu d'avance qu'il avait sur le Jounin pour travailler son en, dans l'espoir que sentir son Chakra ainsi canalisé le réveillerait d'une manière ou d'une autre. Rapidement, il perçut les autres membres de l'équipe autour de lui. Mutika et Tokri d'un côté, Izul et Nika de l'autre. L'espiègle roux envoya un petit coup de coude à Tokri en désignant le Chuunin de la tête, là où les filles étaient en pleine conversation. L'azurée jouait négligemment avec ses cheveux en penchant la tête en écoutant son amie, ce que Sarouh interpréta comme un signe de bien être. Sans le vouloir, il attarda sa perception sur la Genin de nouveau enjouée. Il était très agréable de sentir le monde par le Chakra et il était facile pour le contemplatif Gensouard de s'y perdre.

 Ressentir les vibrations et l'aura espiègle et colorée de la Leïl le fascina un instant, sans pour autant qu'il ne baisse sa garde au point qu'elle puisse le repérer. Vu ce qu'il ressentait en l'observant de la sorte, il constata que ce qu'elle montrait était en accord avec elle-même et il en éprouva un vif soulagement. Nika à ses côtés résonnait d'une manière totalement différente. Encore une fois et sans le savoir, leurs auras formaient un contraste splendide. Sarouh percevait que la jeune marionnettiste était encore toute affairée à ses réflexions. Elle non plus n'avait pas abandonné l'idée de comprendre. Mais sa joie de revoir son amie revenir à elle était palpable. Alors qu'il scrutait l'Hynomori, il sentit son trouble alors que le regard de Nika passait sur l'Utak puis sur lui. Le Tsumyo dut lutter de toutes ses forces pour réprimer un sourire.

 Alors qu'il allait s'appesantir sur l'autre binôme, se félicitant de la facilité qu'il avait désormais à contrôler et orienter son en, la voix chaude du Jounin au loin le sortit de son état méditatif. En se relevant, il croisa le regard interrogatif de Tokri. Et c'était lui qui avait besoin de tout comprendre ? Il lui rendit un grand sourire avant de reporter son attention sur Gomaki, flanqué d'un adolescent que Sarouh n'avait pas encore vu jusque-là. Il n'était cependant pas inconnu aux autres Chikarates, considérant leurs réactions

  • Tsumyo, voici Kiame Myo, mon petit frère. Comme vous vous en doutez, à partir de ce jour, il intègre l'équipe en tant que membre titulaire. Cela ne change bien évidemment rien à l'organisation établie jusque-là.

 Le Chuunin détailla le nouvel arrivant, qui lui sembla vaguement antipathique. Blond, les cheveux surmontés d'une crête, quelque chose dans le personnage lui rappelait désagréablement le Sabishii. Bien dessiné, le Genin possédait une musculature athlétique digne des ninjas des Sables dont il faisait partie. Le port fier, Kiame défiait du regard le petit groupe comme s'il s'attendait à des protestations. L'émeraude rencontra les yeux bleus clairs mis en valeur par la peau hâlée du jeune homme qui ne cilla pas une seconde. Définitivement, ça allait être compliqué entre eux deux.

  • Afin d'évaluer ta progression Kiame, je te propose d'affronter Mutika Oroshi. Cela vous sera surement tous les deux profitables.

 Simultanément, Izul, Nika et Sarouh se jetèrent un regard. Les trois étaient arrivés à la même conclusion. Gomaki connaissait forcément le niveau de son petit frère. Il était aussi très improbable qu'il soit capable de battre l'un d'entre eux. C'était donc une leçon d'humilité pour lui ? Une manière de forcer son respect peut-être ? L'approche était frontale, le Tsumyo en conclut que le Jounin voulait gagner du temps pour souder l'équipe. Possédait-il des informations sur le Boost S ? Le choix de Mutika était évident. Dépossédé de son combat contre Izul, il lui manquait une simulation et son mentor devait sentir qu'il était déstabilisé par les récents changements. L'objectif était certainement de le mettre en confiance à nouveau.

 Kiame s'avança, grand sourire aux lèvres qui ne fit que confirmer les impressions du Gensouard. Le roux en fit de même, son écharpe jaune dissimulant un sourire narquois. Sans être aussi brillant que les trois stratèges, l'Oroshi était loin d'être idiot.

 Les autres Ninjas s’assirent plus loin pour laisser la place. Nika se positionna entre Tokri et Sarouh, tandis qu'Izul s'était naturellement posée à la gauche du Chuunin. Elle lui adressa un sourire solaire qui manqua de lui faire rater le signal de départ de l'affrontement. Immédiatement, le jeune Myo s'élança contre son adversaire et enchaîna les frappes du poing que Mutika déviait sans peine. L'Oroshi para un coup de pied haut et s'en servit pour saisir son cadet, l'envoyant manger le sable d'une puissante projection, plusieurs mètres plus loin.

  • C'est tout ? Ramène-toi.

 Le blondinet lui répondit d'un grognement rageur. S'il avait l'égo fragile, affronter Mutika allait être une punition à la hauteur. L'Oroshi s'amusait déjà de ses réactions. Tokri eut même un petit sourire de connivence, qu'il masqua rapidement. D'une poussée des bras, le nouveau membre de l'équipe se releva avant de foncer en ligne droite sur son adversaire.

  • Encore une tête brûlée, releva Izul tout sourire.
  • Il me rappelle quelqu'un, surenchérit la marionnettiste.
  • Je vous souhaite bien du courage, un de plus.
  • Eh, Tsumyo, tu aimes un peu trop te battre pour commenter.
  • Au moins j'ai un plan, Tokri.

 Il croisa le regard noisette du chef d'équipe. L'utilisation du prénom n'était pas anodine et celui-ci s'en était bien rendu compte. Se battre ensemble était sûrement la chose qui avait apporté le plus de plaisir au Chuunin depuis Nikidami. À l'exception du sourire d'Izul peut-être.

 Ils reportèrent leur attention sur Kiame, toujours à l'offensive. Après une feinte, suivie d'une tentative d'uppercut, il essuya un puissant coup dans le ventre, le projetant un peu plus loin.

  • Il va falloir faire mieux que ça, niveau bourrin j'ai déjà de quoi faire avec celui-ci, persifla le renard roux en pointant du pouce l'Utak
  • Je t'emmerde Mutika. Concentre-toi un peu.

 Pour mieux illustrer le propos, le Genin frustré courut vers l’Oroshi, à peine obligé de se déplacer depuis le début du combat. La posture de Mutika changea quand il le vit composer des mudras. Alors comme ça, Kiame avait appris le ninjutsu en autodidacte.

  • Katon : Funhi !

 Un sourire victorieux se dessina sur le visage de Kiame, visiblement sûr que son adversaire ne l'aurait pas vu venir. À la place, un mur de terre s'était érigé devant un Mutika toujours immobile. Les flammes brûlantes qui sortaient des paumes du Genin n'eurent aucun effet sur le rempart rocheux que venait d'ériger l'Oroshi. Celui-ci se permit un petit rire suffisant, bien plus qu'assez pour mettre le Myo hors de lui. Rugissant, il passa d'un saut périlleux au-dessus de l'obstacle, bien décidé à écraser ce prétentieux qui osait se moquer ainsi de lui. À sa propre surprise, il atteint sans difficulté Mutika. Fatigué seulement par ce simple ninjutsu ? Pathétique.

 Les coéquipiers de Mutika sourirent tous en même temps devant la tête décomposée de Kiame, son adversaire se désagrégeant en un petit nuage de fumée. Dans la même seconde, une vicieuse balayette lui fauchait les jambes par l'arrière, suivie d'un coup de coude qui le projeta douloureusement contre le sol.

  • J'ai gagné, annonça tranquillement le vainqueur, un kunai sur la gorge de son nouveau partenaire.
  • Tss, cracha Kiame, se relevant sans lui adresser un regard.
  • Tu t'attendais à quoi exactement ? demanda sans ironie Mutika. Nous ne sommes pas sortis de l'Académie hier.

 Le Genin resta silencieux, sa fierté blessée. Il se releva sans prendre la main tendue par son adversaire. À la place, le jeune roux replaça son écharpe, dissimulant à nouveau un sourire narquois. L'objectif de Gomaki devait être rempli, se dit le Chuunin. Il s'interrogea vaguement sur le motif qui avait poussé le Jounin à le faire affronter Tokri et Nika. Peut-être était-ce simplement pour leur permettre de voir l'étendue de leur progrès. La fragile confiance en elle de la marionnettiste avait été ébranlée par les évènements de Nikidami et Tokri s'acharnait avec un perfectionnisme monomaniaque à l'entraînement, de ce qu'en avait aperçu le Tsumyo.

 Sarouh continuait de s'interroger sur cet entraînement acharné, sans y apporter plus d'importance que ça. C'était sûrement personnel, vu le respect de l'Utak pour la discipline, ce n'était pas pour la gloire de Chikara. Mais de nombreux ninjas avaient leurs griefs passés. Ce n'était pas son problème, tant que cela ne remettait pas en cause leur sécurité, ni la paix entre les Trois. Dommage qu'il n'y avait pas de Mahousard disponible, peut-être le shinobi aux cheveux bleus aurait-il pu percevoir une réaction chez le chef de leur unité et en déduire quelque chose. Chaque chose en son temps, se rappela-t-il. Le mystère Tokri n'était pas la priorité.

****

 Gomaki s'entretenait avec Kiame, tandis qu'Izul était toujours assise à côté de lui, le regardant avec une curiosité insistante. Si Nika en avait fait de même, elle était plus discrète. De son côté, Tokri s'était levé et s'étirait, se préparant sûrement à la suite des exercices.

  • Tu es bien pensif, commença l'azurée, chuchotant presque. Tu te dis qu'il y a un rapport entre l'arrivée de Kiame et le Boost S ?
  • Tu sais qu'en théorie je ne devrais pas en parler ? Mais en effet, je n'ai pas encore de nouvelles informations, je trouve ça curieux cet ajout de dernière minute. Je ne comprends pas pourquoi nous l'assigner maintenant. Mais ce n'était pas vraiment le sujet de mes réflexions.

 Il plongea son regard émeraude dans celui vert prairie pétillant de la kunoichi, laissant le sous entendu en suspens. La jeune femme ne se laissa pas décontenancer, un sourire mutin se dessinant alors qu'elle remettait une mèche derriere son oreille de la main.

  • Vraiment ? Et à quoi pensais-tu donc ?
  • Tu es brillante, je te laisse deviner.

 Sarouh aurait bien aimé prolonger ce petit jeu mais il était temps pour eux de reprendre l'entraînement. Gomaki leur donna des instructions claires. Kiame serait amené progressivement à se greffer aux mêmes exercices qu'eux, au fur et à mesure qu'il comblerait le retard. Le Jounin comptait sur Sarouh et Tokri pour faire en sorte que l'ajout de son petit frère ne diminue en rien la qualité des entraînements. L'équipe était de toute manière relativement autonome en la matière. Avec le retour à la normale d'Izul, ils s'exerçaient de nouveau dans la bonne humeur et leurs progrès continuaient d'impressionner le Gensouard ainsi que leur tuteur. Le Chuunin n'avait pas connu ça depuis Asori. Il était bien obligé de reconnaître que Gomaki savait ce qu'il faisait.

Pour aujourd'hui la simulation du combat, reportée au lendemain à la place du repos, était remplacée par la maîtrise du Chakra et le genjutsu. Ils ne prendraient leur repos que le lendemain soir. Si cette information fit lever les yeux au ciel Mutika, Sarouh en était ravi. Le jeune homme aux cheveux cobalts scruta le Jounin, qui ne montrât aucune émotion et son regard parcourait l’équipe sans faire de distinctions. Difficile de dire s’il lui faisait une fleur. Le Chuunin cessa de se mordre le pouce et soupira doucement en secouant la tête.

 Tokri s’était déjà éloigné et affairé à maîtriser son ten, suivi par un Mutika goguenard. Les deux Genins s’étaient beaucoup rapprochés et Sarouh sentait que l’Utak servait de pilier à l’Oroshi. Quelque part, le chef d’équipe était l’âme du groupe. Qu’il en ait conscience ou pas, il était le catalyseur de la synergie de l’équipe Myo. Sous cet angle, il n’y avait rien d’étonnant à ce qu’il ait été choisi pour cette fonction.

 Nika avait scruté un instant Sarouh avant de s’isoler pour s’entraîner. Comme le Chuunin l’avait compris à Nikidami, elle était autant une alliée de taille que la plus grande menace du groupe. Elle réfléchissait vite et bien, déduisait beaucoup à partir de peu d’éléments et ne laissait que rarement ses émotions la parasiter. Il faudrait qu’il lui parle prochainement.

 Izul était restée à ses côtés, silencieuse mais souriante. Elle l’avait tranquillement regardé faire son tour du groupe, immobile. Son intention était claire, la jolie kunoichi aussi avait envie de rester avec lui. Réprimant son enthousiasme, le Tsumyo lui désigna du pouce un endroit un peu à l’écart, plus confortable et surtout à l’ombre pour procéder à son propre entraînement. L’adolescente hocha de la tête et ils s’installèrent, toujours mutiques.

 Le Chakra les enrobèrent doucement alors qu’ils lançaient leurs ten respectifs. La sensation de calme qui venait avec cet exercice permettait en général de se concentrer pour les suivants en ayant une perception accrue de leur énergie spirituelle, c’est pour ça qu’il était traditionnellement le premier mouvement enseigné aux shinobis.

 Sarouh rouvrit les yeux un instant, se sentant observé par la belle azurée. Il la trouva les yeux clos, une moue de concentration adorable. Ses longues tresses lui descendaient sur la poitrine jusqu’à ses jambes en tailleur. Un subtil maquillage venait gommer ses cernes et agrandir ses yeux. La coquetterie de la jeune femme était revenue avec sa bonne humeur. Une brise secoua délicatement ses cheveux, portant son odeur jusqu’au Chuunin. Il ferma les yeux pour ne pas se laisser destabiliser par la note sucrée. Il en avait presque perdu son ten. Sarouh ne vit donc pas Izul ouvrir les yeux à son tour pour le détailler.

 Ce petit jeu dura une dizaine de minutes, en silence, leurs cheveux balayés par le vent. Chaque fois que le Tsumyo observait Izul, un sourire se dessinait malgré lui alors qu’un puissant sentiment de paix s’installait au creux de son ventre. Ils finirent par ouvrir les yeux en même temps. Ils détournèrent d’abord le regard, avant d’éclater de rire, amusés de leur gêne.

  • Ça m'a manqué, commença Izul d’une voix timide.
  • Je suis heureux que tu sois de retour parmi nous.

 La Leïl marqua un temps de pause. Techniquement elle avait continué de venir aux entraînements, mais il lui avait été impossible de ne pas se rendre compte de l’impact que son comportement avait eu sur les autres. Elle n’avait toujours pas montré de signe indiquant qu’elle parlerait des raisons de ces changements, chose que Sarouh se forçait à respecter. L’azurée reprit avec un petit sourire gênée, n’osant pas regarder le Chuunin directement dans les yeux :

  • Merci. D’avoir continué à être là pour moi. Je suis heureuse de vous avoir.

 Le Tsumyo dut réprimer la puissante émotion qui le saisit à l’écoute de ces mots. Une vague de tendresse pure. Il aurait aimé la prendre dans ses bras et lui dire qu’il ne l’abandonnerait pas.

  • C’est normal. Nous sommes une équipe, pas vrai ? se contenta-t-il de dire.

 Elle opina du chef. Sans se concerter et avec la force de l’habitude, ils se levèrent et passèrent au zetsu sans que cela ne les empêche de parler. Face à face, ils ne se quittaient plus des yeux. Pourtant l’exercice était maîtrisé d’une main de maître.

  • J’ai appris que tu avais eu du mal à cause de moi ces derniers temps. Pourtant, tu t’es montré très patient avec moi.
  • Nika ?

 L’azurée lui répondit par un autre sourire. Les deux kunoichis étaient proches. Il était probable que la marionnettiste parle de ça, au moins pour remettre son amie d’aplomb. Le Tsumyo lui en voulut vaguement d’avoir étalé sa faiblesse. Émotion qui disparut devant le regard d’Izul. Dans le vert intense de ses yeux transparaissait une vraie gratitude. Grâce à l’Hynomori, Sarouh avait décidé de ne pas fuir l’anxiété qui le rongeait alors que l’adolescente s’était transformée en miroir de ses incertitudes. Son regard en valait la peine.

  • Quoi qu’il en soit, je suis désolée. Ça ne se reproduira plus.

 Elle s’inclina du buste en présentant ses excuses. Le Chuunin eut du mal à contenir la nouvelle vague de tendresse qu’il ressentait. Il avait envie de la prendre dans ses bras et de lui dire qu’il la protégerait. Il fut lui-même surpris de l’intensité de sa propre réaction, masquant son émotion à grand peine alors qu’Izul relevait la tête, plantant son regard dans le sien. Le Tsumyo y lut la peur du rejet, de la culpabilité et une extrême vulnérabilité. C’en fut trop pour la contenance de l’adolescent.

  • Ne t’excuse pas, souffla-t-il en la prenant dans ses bras, sans lui laisser le temps de réagir.

 La Leïl se raidit tout d’abord, avant de se détendre, les bras ballants, posant sa tête sur l’épaule de Sarouh. Lentement, elle posa une main dans son dos, le serrant contre elle sans force. Le temps se cristallisa ainsi, le vent levant le sable autour d’eux. Ils ignorèrent totalement que même s’ils étaient à l’écart on pouvait totalement les apercevoir, autant qu’ils ignorèrent qu’ils étaient encore supposés s’entraîner. De toute manière, c'était les deux meilleurs élèves en matière de contrôle du Chakra.

 Finalement, Izul prit une profonde respiration et brisa le contact, affichant un petit sourire. Le sujet était clos. Comme lors de leur mission à Nikidami, ils restèrent plusieurs secondes ainsi, les yeux dans les yeux, silencieux. Puis ils reprirent l’entraînement, passant au gyo, avant que l’équipe Gomaki ne se rejoigne à nouveau pour passer à l’art des illusions.

 Le binôme aux cheveux bleus agit comme d’habitude. Pourtant Sarouh pouvait jurer sentir une étrange lueur dans le regard de l’Utak. Il se rappela ses paroles plus tôt et en ressentit une pointe d’agacement, qu’il ne laissa pas transparaître. Il fallait lui faire confiance, il serait toujours apte à gérer ses émotions en mission. Il était nécessaire qu’elles puissent s’exprimer en dehors, sinon rien n’avait de sens. Tokri n’entendit pas son plaidoyer mental et resta impassible, alors que Sarouh le rendait aveugle du bout des doigts.

 Encore une fois, il termina par Izul. Alors qu’il effleurait son visage, il lui murmura :

  • Demain en fin de journée, quand le soleil se couche sur le désert, j’aurais quelque chose à te montrer si tu le veux bien. Ça vaudra le déplacement.

 Il n’était pas bien sûr de ce qui l’avait décidé, mais il fallait fêter le retour d’Izul dignement et Sarouh avait l’idée parfaite pour cela. En tout cas, elle mûrissait dans son esprit, alors que son élève subissait une synesthésie inédite. Connaissant la future médecin, ce qu’il voulait lui montrer la ferait jubiler.

 Le reste de la séance de genjutsu se passa sans heurts. Les garçons arrivaient désormais sans problème à contrer tout type d’illusion, à condition d’être concentrés. En combat, ça ne serait pas si simple, mais ils ne rencontreraient finalement que peu de shinobis aussi versés dans l’art des Illusions que le Tsumyo. Tant qu’ils garderaient leur sang froid, ils ne seraient plus jamais démunis face à un genjutsuka. Kiame ne se joint pas non plus à cette phase, en plein entretien avec son grand frère.

 Sarouh s’attarda une seconde sur le jeune homme qui buvait les paroles de Gomaki sans leur jeter un coup d'œil. Le Chikarate avait hâte d’apprendre. Qu’il fut laissé ainsi sans équipe était une honte. Le comportement du jeune Myo changeait déjà. Il avait laissé tomber son port inutilement fier. Son dévouement et sa concentration étaient admirables. Ce serait peut être un bon ajout à l’équipe, se dit le Chuunin. Son Katon se marierait bien aux deux utilisateurs de Fuuton. S’il apprenait la valeur du travail en équipe ainsi qu’à garder son calme, Kiame aurait de beaux jours devant lui dans l’équipe comme shinobi.

 Le Gensouard se tourna vers l’Hynomori qui le fixait en se mordillant la lèvre inférieure. Le Tsumyo savait ce qu’elle voulait lui dire et n’avait aucune envie d’avoir cette conversation maintenant. Il lui adressa un sourire solaire en lui prenant la main, s’apprêtant à lancer la dernière illusion de cette session.

  • Ne t’en fais pas pour moi Nika, murmura-t-il. Je gère.

 Et elle se retrouva sourde et incapable de lui répondre. Elle lui tira la langue en boudant, faisant éclater de rire l’adolescent aux cheveux bleus, devant les regards interrogateurs des autres membres de l’équipe. Il ferma les yeux une seconde, savourant l’air chaud qui le traversait, le sirocco soulevant ses vêtements. Cela faisait longtemps que le Chuunin ne s’était pas senti aussi bien. La fatigue ne le gênait plus. Il sentit le Chakra parcourir son corps comme un torrent, un flot rugissant et plein de vie.

 Quand les Genins finirent par dissiper leurs illusions, il fut temps d’aller manger. Avec l’arrivée de Kiame, l’organisation à table changea quelque peu. Sarouh et Mutika s’asseyèrent côte à côte, échangeant des blagues en se jetant sur le repas comme si leur vie en dépendait, pendant que les filles riaient aux éclats. Tokri avait hérité de la place en face du jeune Myo, à côté de son frère qui présidait la table.

 Le repas se déroula dans une ambiance festive sous le regard satisfait de Gomaki. Le Tsumyo tentait d’y déceler un indice quant à l’arrivée de Kiame ou le revirement d’Izul mais comme à son habitude, il gardait son calme et une impassibilité souveraine, vaguement teintée de ce que Sarouh qualifiait de fierté.

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