Épisode 5 - Animation familiale

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 Le duo venait de traverser la grande rue de Chikara, le chemin le plus court pour se rendre à l’hôpital. La journée venait de commencer, ils ne croisèrent que peu de Chikarates. Quelques-uns avaient observé avec grand étonnement les jeunes Genins. Nika tenait toujours fermement le bras gauche de son compagnon d’infortune. Les regards la gênaient malgré ses quelques progrès dans la maîtrise de sa timidité. Elle tâchait de les ignorer au mieux et détailla discrètement Tokri.

 Il était plus grand qu’elle d’une dizaine de centimètres. Plutôt fin d’apparence et agréable à regarder, Tokri avait les cheveux en batailles noirs foncés, les yeux noisettes et le corps musclé. Malgré ses blessures, il semblait détaché comme s’il avait déjà oublié les événements de ce matin. Cela étonnait Nika qui voulut en apprendre un peu plus sur lui.

 — Tokri ? Ce qui s’est passé ne t’ennuie pas ?

 — Je crains surtout la réaction de ma tante. Elle travaille à l’hôpital et apprendra vite ce qui s’est passé, répondit-il en se mordillant une lèvre.

 — C’est pour ça que tu ne voulais pas y aller ? comprit alors Nika.

 Quelque peu gêné, Tokri confirma d’un hochement de tête.

 — Et tes parents ? Que font-ils ? continua Nika.

 — Rien, rétorqua laconiquement Tokri.

 Comprenant qu’il n’était pas enclin à aborder ce sujet, elle tenta de dévier la discussion.

 — Mon père est marionnettiste comme moi, dit-elle en espérant dissiper le malaise. Et comme il est Jounin, il part souvent en mission.

 Tokri semblait ne plus écouter. Son regard fixait le chemin qui se présentait devant sans paraître le voir, absorbé par ses pensées. Nika se tut. Alors qu’elle jeta un bref coup d'oeil à son visage, elle remarqua une fine cicatrice sous son œil gauche. L’Utak sentit le regard de Nika peser sur son visage et tourna les yeux vers elle. L’espace d’un instant, leurs regards se croisèrent. Elle détourna le sien presque aussitôt, avec une jolie couleur rose sur le haut des joues.

 — Tu as une petite cicatrice sous l’œil, bredouilla-t-elle.

 Elle sentit le jeune homme se crisper. Il répondit abruptement :

 — Ça remonte à loin.

 La Hynomori fut surprise par cette réponse sèche et songea qu'elle avait certainement été trop indiscrète. Ils arrivèrent à l’hôpital. Nika entendit le jeune homme prendre une grande inspiration, comme s'il essayait de se donner du courage.

 Plusieurs personnes étaient en grande conversation devant le bâtiment. Lorsqu’ils se rapprochèrent, un homme et une femme les rejoignirent. La femme était d’assez grande taille, les cheveux noirs coupés courts et encadrant son visage. La peau bronzée, elle avait un air de famille avec Tokri. L’homme contrastait avec elle de par sa peau plus pâle et ses cheveux courts et bruns. Ils portaient tous deux l’uniforme officiel de Chikara, section médecine.

 — Tokri ! s’exclama la femme en attrapant le menton du Genin afin d’analyser son œil violacé. Qui t’a fait ça ?

 — Toujours un plaisir de te voir Utika, répondit un Tokri dépité.

 À l’inverse de la femme, le médecin semblait amusé.

 — Il faut être un peu dérangé pour venir voir ta très chère tante dans cet état, déclara-t-il en ricanant.

 — Tu ne m’as pas répondu, demanda la femme en ignorant la boutade de son collègue. Qui t’a fait ça ?

 Elle dévisagea étrangement Nika, qui fut prise d'effroi. Croyait-elle qu’elle avait été celle qui avait frappé son neveu ? Tokri esquissa un petit sourire narquois. Le souvenir du récent combat semblait lui procurer une intense satisfaction.

 — Un imbécile nous a défiés. Il a eu plus mal que nous.

 — Félicitations ! s’exclama le médecin. Tu viens de gagner ton premier combat en tant que Genin ! Un vrai ninja, ton grand-père va en sauter de joie !

 Nika crut percevoir du sarcasme dans sa voix, mais la jeune fille avait toujours eu du mal à cerner ce genre de personnage. Utika lui jeta un regard meurtrier, mais l’homme ne sembla pas s’en émouvoir. Il semblait y être habitué.

 — Ryul ! Occupe-toi de lui, ordonna-t-elle.

 — Viens avec moi, mon cher neveu. Je vais te rafistoler.

 Il saisit le bras droit de Tokri, alors que Nika lâcha le gauche et le guida dans l’hôpital. Cher neveu ? Cet homme était-il donc l’oncle de Tokri ? Il ne se ressemblait pourtant que peu. Le mari de Utika dans ce cas ? Nika prit conscience qu’il ne restait plus qu’elle et Utika devant la grande porte blanche, ce qui l’extirpa de ses réflexions.

 — Tu t’es battue toi aussi ? demanda la médecin en désignant l’hématome qui avait gonflé sur la joue de la Genin.

 Elle poussa un profond soupir sans laisser le temps à la Hynomori de répondre quoi que ce soit.

 — Ce n’est pas parce qu’on vous donne un stupide bandeau qu’il faut vous croire invincible.

 Nika inclina rapidement sa tête, les mains sur les genoux.

 — Pardonnez-moi, dame Utika ! Je voulais juste bien faire en aidant votre neveu.

 Les excuses de la jeune fille ne détendirent pas l’expression sévère de Utika.

 — Suis-moi. Je vais soigner ta joue.

 Nika s’empressa de la suivre, plus par crainte de la voir de nouveau en colère que pour l’intérêt de se faire soigner. Elles se rendirent au premier étage et rentrèrent dans une petite salle remplie de matériels médicaux. Ryul effectuait des premiers soins à Tokri. Nika balaya d’un œil curieux la pièce.

 Tous les murs étaient recouverts d’étagères, elles-mêmes surchargées en pansements, bandages, cotons, potions et diverses liqueurs. Il y avait également un bureau et cinq chaises. Une vive lumière blanche sortait des petites ampoules incrustées dans le plafonnier. Tokri était installé sur l’une des chaises alors que son oncle, installé à son côté, le soignait en usant d’un ninjutsu médical. Sa main était entourée d’une étrange lueur verte qu’il appliquait sur les blessures du garçon.

 Utika pria Nika de s’installer non loin. La Genin s'exécuta après avoir adossé sa marionnette au bureau. Nika regarda la médecin prendre un bout de coton et l’imbiber d’un produit sentant fortement l’alcool. L'infirmière prit une chaise et s’assit à quelques centimètres de la jeune Hynomori. Elle saisit le menton de Nika de sa main gauche, puis appliqua avec doigté le coton sur la joue de la jeune fille.

 — Il ne faut pas user de ninjutsu médical sans précaution préalable, expliqua-t-elle.

 Elle jeta un œil à la marionnette.

 — Tu es une Hynomori ? questionna Utika.

 La jeune fille opina du chef.

 — Je m’appelle Nika Hynomori, répondit-elle.

 — Tu sors avec lui ? enchaîna Utika en désignant son neveu d’un mouvement de tête.

 Nika entendit Ryul pouffer de rire comme un préadolescent. Tokri ne sembla pas réagir. L’Hynomori sentit ses joues s’empourprer une fois de plus.

 — Non non, je ne suis pas…

 — D’où le connais-tu, dans ce cas ? la coupa la médecin.

 — A l’Académie.

 — Tu étais donc sa copine à l’Académie ?

 — Non ! s’exclama Nika. Nous ne sommes pas…

 Utika la dévisagea de plus belle en plissant des yeux, comme si elle essayait de lire en elle.

 — Pourquoi ? Il n’est pas beau mon neveu ? lâcha-t-elle soudainement dans un léger sourire.

 — Si si il est beau, bafouilla Nika, complètement perdue. Mais…

 — Tu trouves ? Moi pas.

 — Je suis là au cas où tu ne l’aurais pas remarqué, signala Tokri.

 Nika ne savait plus où se mettre. Elle aurait fortement souhaité posséder un pouvoir lui permettant de se rendre invisible ou de rapetisser afin de fuir le plus vite possible. Ryul rigola de plus belle, alors que Tokri marmonnait quelques paroles incompréhensibles. Il semblait contenir sa mauvaise humeur face à la scène qui se jouait. Utika jeta le coton dans une poubelle puis, toujours assise à quelques centimètres de Nika, fit apparaître du Chakra légèrement vert dans sa main droite. Nika eut un léger mouvement de recul.

 — Ne bouge pas ! l’intima Utika avec autorité.

 Elle saisit fermement le menton de Nika de sa main gauche, puis appliqua sa main droite sur la joue douloureuse de la jeune femme.

 — Comment était-il en cours ? demanda-t-elle tout en appliquant les soins. Niveau travail j'entends.

 — Il semblait faire de son mieux, répondit timidement Nika.

 — Je dirai plutôt qu’il ne fichait rien oui, répliqua-t-elle en haussant le ton.

 — Laisse-la tranquille Utika, intervint sèchement Tokri

 — Je questionne ta copine si j’en ai envie.

 — Nous ne sommes pas ensemble, affirma à son tour l’Utak en soupirant.

 Nika se sentait comme prise entre deux feux. L’arrivée de deux autres personnes la soulagea. Le premier était âgé, mais malgré tout musclé et athlétique. Il avait le même air de famille que Tokri et Utika. Le second la surprit. À peu de chose près le sosie de Tokri en un peu plus vieux et avec une queue de cheval, il avait un air assuré de puissant ninja.

 — Je te présente le reste de ta belle-famille Nika ! clama Utika.

 Celle-ci s’empourpra à un point qu’elle n’avait jusqu’alors jamais atteint. Les deux nouveaux arrivants ne semblèrent pas relever le commentaire.

 — J’ai appris que tu avais encore joué à l’imbécile ! ronchonna le vieil homme à l’encontre de son petit-fils. Moi qui pensais que devenir Genin te ferait rentrer dans les clous.

 — Il n'a pas combattu seul, précisa une Utika tout sourire, en désignant Nika d'un mouvement de tête.

 Le jeune homme aux cheveux longs se tourna vers elle.

 — Comment s’est-il battu ? demanda-t-il avec sérieux.

 — Euh... bien. C’est lui qui a donné le coup de grâce à Hika, l’informa Nika.

 — Bien, se contenta de dire le jeune homme, un sourire en coin.

 Utika retira sa main, faisant se dissiper la lueur. La joue de Nika était comme neuve, parfaitement guérie.

 — Merci dame Utika. Je suis impressionnée par votre talent.

 — Ne le sois pas. Un ninja-médecin débutant aurait pu le faire, répondit-elle avec simplicité.

 En entendant le mot « débutant », Nika se rappela avec effroi un détail important : son entraînement avec Nozuké. En route, lorsqu’elle était tombée sur le combat que menait Tokri, les événements s’étaient enchaînés à une telle vitesse que son mentor clanique lui était totalement sorti de l’esprit. Elle se leva précipitamment, s’inclina en posant les mains sur ses genoux et dit à toute vitesse, sans prendre la peine de reprendre son souffle :

 — Excusez-moi ! Je dois partir ! Je vous souhaite une bonne journée. Merci encore Dame Utika ! Au revoir Tokri !

 Elle prit sa poupée et sortit en trombe de l’hôpital. Nika se rendit à toute jambe à la sortie du Village, craignant les foudres de son maître en se répétant sans interruption : “ Il ne va pas être content ! Il ne va pas être content du tout ! ”

 Elle arriva à la sortie de Chikara et passa devant les gardes. Arrivée au pas de la porte, elle arrêta sa course devant son professeur et souffla, hors d'haleine suite à cette course. Elle croisa alors son regard.

 Il n’était pas content. Pas du tout…

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