3. Olivia & moi

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Accoudé au balustre d'un balcon, mon regard se perd sur l'horizon noirâtre. La lune est pleine, la nuit claire et la mer d'huile. Torse nu, je ne sens pas le froid me mordre la chair, tout au plus le frisson que me procure le contact des mains d'Olivia sur ma peau, ces mains qui enserrent ma taille, inquiètes.

— Toi non plus, tu ne trouves pas le sommeil ? me demande-telle en appuyant sa tête contre mon dos.

— Non... lui réponds-je, laconique.

Elle effleure furtivement mon sexe, prompte à le réveiller, mais j'interromps doucement son geste.

— Tu n'étais pas vraiment là, avec moi, ce soir, poursuit-elle, un brin amère. Ni au dîner, ni après.

— Tu crois qu'ils s'en sont rendus compte ?

Olivia avait convié des types pour parler affaires tandis qu'elle m'avait chargé de donner le change mondain en palabrant avec leur compagne.

— Non, Val, personne n'a rien remarqué, rassure-toi. Je suis la seule à l'avoir fait, la seule à savoir qui te hante...

Je me retourne en lui souriant, lui caresse la joue. Elle tremble. La brise glaciale peut-être.

— Tu veux qu'on rentre ?

Elle acquiesce. Je la serre contre moi et la raccompagne à l'intérieur. Je sais qu'elle a envie de moi, qu'elle n'aimerait m'avoir que pour elle. Et en toute honnêteté, même si je n'étais pas payé pour, je continuerais à prendre du plaisir avec elle, en mode sex-friend. Mais c'est elle qui insiste pour maintenir ce lien financier entre nous. Parce qu'elle sait qu'ainsi, je ne peux rien lui refuser. Parce que je lui dois tout, tout ce que je suis aujourd'hui, parce que c'est elle qui m'a mis le pied à l'étrier.

Depuis Emy, je n'arrivais plus à remonter la pente. Je m'étais mis à boire pour tenter d'oublier, à jouer au casino... Puis j'ai fini par perdre mon job de commercial, par accumuler les dettes, les loyers impayés et tout le toutim. Ce soir-là, j'étais vraiment au bout du rouleau, minable, prêt à sauter de ce pont anonyme sur lequel mon existence croisa miraculeusement la sienne. De fil en aiguille, on s'est mis à discuter de tout et de rien, comme deux paumés qu'on était ; on est allés prendre un verre, on s'est raconté nos vies. Ça nous a fait un bien fou, à elle comme à moi. Olivia venait de divorcer et avait souvent besoin d'être accompagnée pour des dîners d'affaires, des sorties mondaines ou des expos. C'était important pour elle, une façon comme une autre de fuir la solitude. Je n'avais plus de travail, elle avait du fric... Au début, il n'était nullement question de sexe. Jusqu'à notre première nuit...

***

Tu ne voudrais pas rester un peu ? J'ai pas envie de dormir seule... Je te paierai, t'inquiète pas !

***

J'ai accepté. J'aimais sa compagnie. Elle était drôle, cultivée. Brune, méditerranéenne. Magnifique. Et puis, on s'est pris au jeu sur fond de musique jazzy. Elle avait besoin de se sentir à nouveau séduisante, désirable dans les bras d'un homme après une année compliquée. Et moi, j'avais besoin de passer à autre chose, de me construire un « après-Émilie ».

Il faut dire aussi que j'avais très envie d'elle, de sa voluptueuse poitrine que je me suis empressé de libérer du carcan de tissu qui l'emprisonnait pour mieux la caresser de mes mains, la dévorer de ma bouche. Je n'avais plus fait l'amour depuis des mois, j'étais comme un loup affamé qui n'aspirait qu'à se repaître de la chair de sa proie. Olivia se retrouva très vite totalement dénudée, ma tête entre ses cuisses, mes doigts et ma langue s'activant au creux de sa si délicieuse intimité, qui ruisselait de plaisir. Très expressive, ma toute première cliente se tordait sous les bienfaits que je lui procurais goulûment, réveillant ainsi la véritable femme qui sommeillait en elle. Il fallait que je me déshabille à mon tour, urgemment, tellement je me sentais à l'étroit dans mes fringues ; j'avais une érection de dingue. Puis j'ai glissé ma queue, aussi raide que la justice, dans sa chatte humide, sans la moindre résistance. Je l'ai pilonnée avec autant de vigueur que de hargne, je voulais la faire rugir de plaisir. Je voulais me prouver que j'étais encore un homme - physiquement je veux dire -, que j'étais toujours en mesure de satisfaire les désirs charnels d'une meuf. Enivrés par ce contact aussi violent que sauvage qui enflammait mes sens, mes va-et-vient se firent de plus en plus profonds, de plus en plus intenses ; je la sentais vibrer sous mon joug. Enchaînés l'un à l'autre, déchaînés par cette folie orgasmique que syncopaient nos râles, une vague de jouissance, aussi fulgurante qu'une décharge électrique, nous submergea de concert, nous laissant vidés de toute substance et sans voix. Deux amants épuisés par l'effort, en sueur et à bout de souffle, enchevêtrés l'un dans l'autre, comme des poupées d'adulte.

Je suis resté longtemps en elle, même après avoir joui ; je ne débandais pas. Mais j'étais incapable de poursuivre notre chevauchée fantastique tellement j'étais à bout de souffle ; elle aussi. On s'est regardés longuement dans les yeux avant que je ne m'effondre, groggy, contre ses seins. Je me souviens de sa main caressant alors mes cheveux, de son souffle sur moi et de son cœur qui battait la chamade. Elle disait qu'elle m'aimait, divaguait sans doute sous le coup de l'émotion. Ne l'avait-on jamais baisée comme je l'ai moi-même baisée cette nuit-là ? Je me le demandais...

C'était il y a quatre ans, il y eut plein d'autres corps-à-corps depuis, mais celui-ci est encore ancré dans ma mémoire parce qu'il est réellement l'élément fondateur de ma renaissance, de l'homme que je suis devenu aujourd'hui : un escort boy.

***

On s'est remis au lit, enroulés dans ses draps de soie marine, sa tête posée contre mon torse nu.

— Explique-moi, Val... Pourquoi Émilie, pourquoi maintenant ?

— Parce qu'il y a quelqu'un, Olivia, l'une de mes clientes... Elle a eu le même genre de réaction qu'elle, dans des circonstances semblables. Et depuis, je n'arrête pas d'y penser.

— Qui est-ce ?

— Tu ne la connais pas, et puis, je n'ai pas envie d'en parler avec toi...

Elle se détache de moi, me tourne le dos. Je me colle à elle, mon sexe en demi-érection contre son postérieur et ma main égarée dans sa toison duveteuse.

— Je suis désolé, Olivia, lui murmuré-je en la caressant tendrement, ce n'est pas contre toi. C'est juste que personne ne peut comprendre ce que cette détresse-là remue en moi. J'ai besoin d'aller au bout de ça pour savoir, et c'est un chemin que je dois emprunter seul, sans toi, même si j'ignore jusqu'où il me conduira...

Ma bite se dresse et cherche l'entrée de cette grotte que je connais si bien. Elle ferme les paupières et soupire. Elle en a envie, capitule sous le désir ardent. Elle mouille d'envie.

— Comme tu voudras, Val. Mais sache que je t'attendrai, déglutit-elle entre deux spasmes provoqués par le va-et-vient de mes doigts dans son antre, que je serai toujours là pour toi.

Ma verge pénètre en profondeur son abîme, et elle en gémit. Me communique son plaisir de me sentir en elle. Seulement, cette fois-ci, je ne la baiserai pas, non. Je lui ferai l'amour, cet amour quasi-incestueux qui nous unit malgré moi.

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