Adieux

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La chimère est furieuse, tout du moins le laisse-t-elle visiblement comprendre. Le petit message du directeur, qu'elle avait désapprouvé, avait mis à mort Nemja. Tsadir, en apprenant cette nouvelle, exprime sa plus profonde déception. Mais le directeur ne tient pas compte de ses remarques et se contente de les ignorer. Après-tout, dit-il, la secrétaire était responsable d'un grand nombre de morts. La justice terrienne n'est après tout qu'une forme de vengeance ironise la cyborg.

Changeant de sujet, il leur apprend la capture de Prest : avec la mort de la secrétaire, ses hommes se sont retournés contre lui. L'équipe d'intervention est en train de le traîner vers la prison qu'il n'aurait jamais dû quitter.

Ney remarque un certain entrain nouveau chez l'homme. Il ne lui faut que quelques questions anodines pour deviner qu'il est pressenti pour remplacer feu Mahut au secrétariat de l'ONU.

Avec la mort de la secrétaire et la capture de Prest, les choses sont sur le point de redevenir calme. Il faudra du temps pour nettoyer les dégâts au sein de la section du contre-terrorisme et la disparition d'Actual Communication laissera des marques.

Toutefois, les deux solaires n'ont plus à se soucier des affaires terriennes. Le directeur a négocié un vol suborbital pour Kempala avec Sol6 et il leur a réservé deux places sur un vol orbital, où elles pourront regagner leur vaisseau. Le premier vol part dans quatre heures depuis Luton.

Le directeur les remercie le plus chaleureusement possible, mais malgré tout, il laisse à Ney cette impression qu'il souhaite être débarrassé d'elles rapidement. Il s'excuse enfin de ne pas savoir quoi leur offrir en récompense. Ney lui demande si elle peut emporte une feuille d'arbre. Évidemment, l'hyper-hybride n'apporte grande importance à ce cadeau, et il finira probablement numérisé et recyclé, mais c'est un moyen comme un autre de soulager le directeur et d'avoir la paix. Et cela fonctionne.

Avant de partir, il leur offre un repas dans un grand restaurant mais les solaires déclinent l'offre, préférant éviter des complications avec les autochtones. Déjà que le voyage de retour risque de les mettre au contact avec une population non préparée. Le directeur s'accommode de cette décision et les invite à la cantine.

Le repas se déroule sans problème et le chef de la section d'assaut que Tsadir avait accompagné se joint même à leur table. Il remercie une fois de plus la solaire pour son exploit, regrettant, avec hypocrisie, que les politiques irréconciliables de la Terre et des colonies ne leur permettent pas de travailler plus souvent ensemble.

Le repas terminé, les solaires sont conduites par le directeur en personne au véhicule destiné à les emmener à l'aéroport. Avec les nombreux détails qu'il a à régler, De-Montergny ne peut pas les accompagner jusque là-bas. Aussi, il leur fait ses adieux, espérant qu'ils pourront un jour se revoir sous de meilleurs circonstances.

La porte de la voiture se referme et le véhicule sort du parking sous-terrain. Tsadir jete un œil en arrière, mais le directeur est déjà reparti à son bureau : un autre signe que la présence des solaires sur la planète bleue n'est plus souhaitée.

Dans un silence profond, la voiture fait route au nord et arrive jusqu'à l'aéroport de Luton. Cet aéroport avait aussi été agrandi par Waylander qui y a installé un pas de tir pour les vols suborbitaux encore utilisés aujourd'hui. Quand l'ONU avait dégagé les corporations scélérates de la Terre, l'installation fur reprise par Sol6. Depuis, cette ancienne corporation, redevenue une simple, mais puissante, société terrienne au début de la guerre, gère l'aéroport et les vols intercontinentaux qui partent du Royaume-Uni.

Descendant du véhicule, les solaires sont accueillies par des hôtes de Sol6 qui les guident vers le terminal de la navette. Ces hommes les font passer par les accès réservés au personnel : ils ne souhaitent pas avoir à expliquer à la sécurité les raisons de la présence des deux solaires.

Les voici finalement devant la porte d'embarquement. C'est une petite navette comparée aux engins utilisés dans les colonies. L'un des hôtes les conduit dans l'espace particulièrement réduit de l'appareil et les installent dans les sièges arrières. En plus de Ney et Tsadir, quatorze autres passager attendent patiemment, assis sur leur siège. Le personnel de bord passe dans les couloirs exigus et vérifient le sanglage des passagers, rassurant de leur mieux les plus stressés.

La porte de l'appareil est enfin hermétiquement close et la voix du commandant souhaite la bienvenue à tous. Il explique ensuite que la navette va être conduite sur le pas de tir. Le lancement aura lieu dans quinze minutes et le vol devrait durer quarante minutes. Durant tout le vol, il est interdit de détacher les sangles de sécurité.

L'appareil subit alors une secousse, indiquant que le remorquage a commencé. Quelques vibrations et de légères accélérations accompagnent le déplacement et depuis les très petits hublots, les passagers peuvent observer l'extérieur.

Enfin la navette est placée à la verticale donnant à tout le monde l'impression d'être allongés. Le compte à rebours commence et l'anxiété à bord de l'appareil augmente considérablement. À zéro, l'appareil est soumis à une très violente poussée de trois “g”, accompagnée de vibrations importantes et d'un bruit assourdissant.

La force plaquant tous les passagers au fond de leur siège dure presque deux minutes avant de se réduire considérablement et de disparaître. L'apesanteur règne alors et deux passagers malades sont pris en charge par les membres de l'équipage.

Ainsi, durant plus d'une demi-heure, les passagers peuvent voir l'horizon bleu courbé de la Terre avec ses immenses nuages qui couvent les alentours. Ney et Tsadir observent la vue avec assez peu d'intérêt : elles en auront une bien meilleure depuis la salle d'observation de Mahertis dans quelques heures.

La rentrée et l'atterrissage se montrent aussi mouvementée que le décollage et après plusieurs minutes de vol plané, l'appareil se pose enfin en Ouganda. Une fois stabilisé, une équipe de Sol6 commence à le remorquer à nouveau et les passagers sont enfin libérés un peu plus d'une heure après l'embarquement.

Là encore, les deux héroïnes sont accueillies par des agents de Sol6 et avant d'être conduites à la salle de briefing, où huit autres personnes attendent. On leur explique qu'elles vont recevoir les instructions liées au vol. Apparemment, sur Terre, gagner l'orbite ne se déroule pas aussi simplement que dans les colonies.

Ce briefing d'une heure fut particulièrement dense en informations bien qu'il aurait put se résumer par : « Ne touchez à rien : on gère ! ». Les autres passagers de la “mission” semblent suivre une préparation depuis plusieurs jours déjà. Quand Ney pose discrètement la question à l'un des hommes de Sol6, ce dernier lui explique que les deux solaires n'ont pas vraiment besoin de cette formation, mais qu'en revanche elle assure certaines apparences pour les autres.

Une fois la formation éclair terminée, les solaires sont invitées à se rendre à la salle d'embarquement. On leur passe tout un équipement et les moins dégourdis sont aidés par les agents. Il s'agit tout simplement de combinaisons spatiales qui devront être portée pendant tout le vol pour parer à l'éventualité d'une dépressurisation. Ney se voit ainsi confié une combinaison pour enfant, dans laquelle elle flotte un peu. Son air pataud lui vaut le fou rire de Tsadir avec la complicité de son IA de supervision.

Après quelques derniers rappels de sécurité, les futurs spationautes sont conduits à bord du vaisseau, une capsule semblable à celle que les solaires avaient empruntée en arrivant sur Terre.

La capsule est alors hissée par une puissante grue et fixée à sa place sur l'imposante fusée. La manœuvre dure un peu plus d'une heure et l'excitation à bord est palpable. Ney et Tsadir sont assises côte-à-côte et l'espace intérieur est envahi par de nombreux sacs contenant probablement une partie du cargo du vaisseau.

Enfin, on leur annonce qu'il ne reste plus que cinq minutes avant le décollage. La grue est alors éloignée du pas de tir et l'imposante structure qui maintenait la fusée s'ouvre comme une fleur.

Viens alors le compte à rebours final suivit de la phénoménale poussée, à peu près équivalente à celle de la navette, mais bien plus longue. Les étages récupérables de la fusée sont largués au fur et à mesure que leurs réservoirs se vident et finalement le vaisseau termine seul sa mise en orbite. L'amarrage à la station est prévu dans une heure trente. D'ici là, les passagers admirent par les petites ouvertures le spectacle fascinant de la Terre vue à quelques centaines de kilomètres d'altitude.

C'est fini : elles ne sont plus sur Terre.

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